Accueil Blog Page 753

18/04/2008 – Conseil général – Une session qui se veut historique

18/04/2008 - Conseil général - Une session qui se veut historique

Ce vendredi matin à partir de 9h00, l'hémicycle Younoussa Bamana s'apprête à vivre un des moments forts de l'année politique. En effet, la session plénière de l'assemblée exécutive doit adopter une motion demandant au gouvernement de consulter les Mahorais avant la fin de l'année sur le futur statut de département tant réclamé depuis 50 ans.

Pour ceux qui mettront les pieds ce matin dans l'hémicycle du conseil général, vous vous croirez sûrement dans un studio télé parisien. RFO a déployé un dispositif sans précédent pour retransmettre en direct une session plénière qui se veut historique. En effet, outre quelques dizaines de rapports, les conseillers généraux doivent adopter une délibération demandant au gouvernement d'organiser une consultation sur le futur statut de l'île, qui devrait être le département et région d'Outremer prévus à l'article 73 de la Constitution française. Les élus mahorais s'appuient sur les précédentes consultations, mais aussi sur les promesses tenues par le Président de la République Nicolas Sarkozy, ainsi que ses différents ministres chargés de l'Outremer.
Une fois adoptée, une délégation composée de tous les anciens députés de Mayotte, des parlementaires actuels, du président Ahamed Attoumani Douchina et de son 1er vice-président M'hamadi Abdou, du président de l'Association des maires Ibrahim Amédi, de la conseillère économique et sociale Anziza Moustoifa, du directeur de cabinet et du DGS de la CDM, partira à Paris présenter ce souhait à l'Elysée, au Parlement et à la rue Oudinot.
Ce vendredi matin, il sera aussi question de l'installation de la nouvelle assemblée ainsi que de son administration. Enfin, les délibérations annulées pour vice de forme par le tribunal administratif vont être remises à l'ordre du jour. C'est le cas notamment du Padd qui devra être modifié pour être remis pour avis au Conseil d'Etat avant son adoption.

Faïd Souhaïli

 

18/04/2008 – Education à l’environnement – Formation réussie au Papa club

C'était une des dernières journées d'action du Papa Club avant le retour en métropole d'Emmanuel Dumas et Laurence Payet, enseignants fondateurs de l'association et malheureusement en fin de contrat. Dimanche dernier, à Musicale plage, l’association a organisé une journée d’initiation à la plongée sous-marine pour neuf jeunes Naturalistes du collège de Koungou. Trois ateliers étaient mis en place pour la journée.
Pendant que certains réalisaient leur baptême de plongée, encadrés par Xavier Courrian et Emmanuel Dumas, moniteurs bénévoles, d’autres étaient pris en charge par les jeunes mahorais de l’association dans les deux autres ateliers. Un à terre sur l’éducation à l’environnement où ils ont initié les jeunes par différents jeux aux bons gestes à avoir pour préserver la faune et la flore de Mayotte. Un autre dans l’eau sur un parcours sécurisé où ils ont pu apprendre à leurs camarades à nager avec les palmes, masque et tuba.
Cette journée a également permis de clore la formation débutée mi septembre et terminée fin mars qui a réuni jusqu’à 17 jeunes mahorais et où 16 baptêmes et plus de 70 plongées de niveau 1 ont été réalisées. Elle se termine avec la validation de sept niveaux 1 de plongée.
 
 

Mieux connaître son île pour mieux la respecter

L’objectif de cette formation était, au-delà de l'initiation à la plongée sous-marine, de former des jeunes capables de sensibiliser leurs camarades à l’environnement. Pour cela ils ont participé à dix séances théoriques animées les dimanches par Florence Payet qui est professeur de SVT. La matinée passée à initier les jeunes de Koungou leur permettait de valider cette partie de la formation dont la devise est "Mieux connaître son île pour mieux la respecter."
En fin de journée a eu lieu la remise des diplômes de niveau 1 pour les 6 jeunes du Papa Club et les baptêmes pour les 9 jeunes de Koungou. Malgré leur départ, Florence et Emmanuel prévoient une suite aux actions du Papa Club. L’association a déposé des demandes pour poursuivre la formation de ces jeunes ainsi que de résidents à l’initiateur plongée E1 auprès du conseil général. Ainsi la pratique de la plongée pourra se faire pour le plus grand nombre sur des sites d’accès populaire.
Des aires de pratique pourraient être aménagées et entretenues afin d’offrir au plus grand nombre l’accès au patrimoine naturel. Les actions du club sont réalisées en partenariat avec la cellule EEDD du conseil général.

Hélène Ferkatadji avec Laurence Payet

Avril 2008 – Piraterie – Pavillons noirs sur les mers

Quelle est l’importance de la piraterie maritime dans le monde ?

Le sujet embarrasse les armateurs, les marins et les assureurs. Chacun s’accorde pourtant à reconnaître que la piraterie maritime constitue une réelle menace. « A chaque fois que je longe les côtes africaines ou que je franchis le détroit de Malacca, entre la Malaisie et l’Indonésie, je ne peux pas m’empêcher de craindre l’attaque de pirates », reconnaissait le commandant d’un porte-conteneurs, interviewé dans l’émission Thalassa sur France 3.
Attaques de navires, vols de cargaisons, prises en otage d’équipages, le nombre d’actes de piraterie a triplé entre 1994 et 2004, pour atteindre 468 attaques cette année-là, selon le Bureau maritime international (BMI). Depuis, la piraterie a semblé marquer le pas, avec « seulement » 232 agressions enregistrées par le BMI en 2006. Mais l’espoir fut de courte durée : en 2007, les mers sont redevenues des zones à risque, avec 379 attaques répertoriées contre des cargos. Une recrudescence due en grande partie à une augmentation des violences le long des côtes africaines, en particulier celles de la Somalie (voir l’article : Le retour de la flibuste africaine).
La persistance de la piraterie maritime n’a rien de surprenant. Chaque jour, près de 46 000 pétroliers, porte-conteneurs et autres méthaniers croisent sur les océans. Et 97 % des marchandises échangées d’un continent à l’autre le sont par voie maritime – soit six milliards de tonnes de fret. Or, les navires sont devenus des monstres de technologies. Même longs de deux cents mètres, ils n’ont besoin que d’une trentaine de membres d’équipage. Leur cargaison peut avoir beaucoup de valeur. Souvent, le coffre d’un bateau peut renfermer une « fortune » destinée à payer l’équipage, les taxes douanières et les droits de ports. Or ces navires évoluent lentement (40 km/h environ) et sont peu manœuvrants. De plus, l’immensité des océans rend illusoire une protection efficace par des patrouilles de police. Quant aux possibilités de se cacher, elles n’existent pas.
Il est probable que le nombre d’actes de piraterie est sous-estimé. Les armateurs préfèrent se taire plutôt que de payer des primes d’assurance déjà très élevées ; ils ne veulent pas non plus affoler les affréteurs. En outre, plainte signifie enquête, donc obligation d’immobiliser le navire alors qu’une journée à quai oscille entre 15 000 et 30 000 dollars pour un porte-conteneurs.

Quelles sont les régions les plus dangereuses ?

A l’exception des côtes européennes, nord-américaines et du Pacifique, toutes les mers du monde sont en proie, à des degrés divers, à la piraterie. En Amérique latine, les côtes du Venezuela, du Brésil, du Pérou, et toute la région des Caraïbes constituent le terrain de chasse favori des écumeurs des mers. En Asie, la partie méridionale de la mer de Chine, le canal qui mène jusqu’au port de Chittagong, au Bangladesh, et les côtes des Philippines sont les plus dangereuses. De sinistre réputation il y a peu de temps encore, le détroit de Malacca est devenu apparemment plus sûr. Les autorités malaisiennes et singapouriennes ont certes pris les grands moyens pour cela. En Afrique, ce sont les côtes somaliennes, dès le sud de la mer Rouge, et le golfe de Guinée, particulièrement le littoral du Nigeria, qui suscitent les plus grandes inquiétudes chez les marins.
A en croire Serge Roche, spécialiste des menaces criminelles contemporaines à l’université Paris II, « les côtes d’Indonésie, de Somalie, du Nigeria, ainsi que la mer de Chine méridionale, sont de très loin les régions les plus dangereuses. Les attaques peuvent avoir lieu en pleine mer comme dans les ports. La Lloyds, la célèbre compagnie d’assurance britannique, a d’ailleurs classé les eaux territoriales de Somalie zone de guerre. » Et l’universitaire de raconter l’histoire de ce cargo disparu sans laisser de traces entre l’Indonésie et la Corée du Nord, retrouvé deux ans plus tard avec un faux équipage dans le port de Shanghai après avoir changé trois fois d’immatriculation.
Malgré plus de 4 000 attaques dans les vingt dernières années, la recrudescence de la piraterie maritime n’en menace pas encore pour autant le commerce international. Si tel était le cas, des mesures plus énergiques seraient d’ailleurs déjà adoptées. Néanmoins, l’inquiétude demeure quand on sait que 62 % de la production mondiale de pétrole est transportée sur les océans. Le détroit d’Ormuz, entre le golfe Persique et celui d’Oman, n’a que 2 km de large, ce qui oblige les supertankers à réduire leur vitesse. Or, 15 millions de barils de pétrole transitent chaque jour par ce passage. Une cible rêvée pour un groupe terroriste.

Comment a évolué la piraterie maritime ces dernières années ?

Fini le temps des flibustiers hissant le drapeau noir à tête de mort, avant de jeter des grappins sur un galion, le sabre à la main, et des hurlements à la bouche. Les pirates du XXIè siècle sont équipés de fusils automatiques et de lance-roquettes, de vedettes rapides et de GPS. Ils opèrent souvent la nuit, alors que seuls cinq hommes d’équipage veillent à la navigation, dans une timonerie à peine éclairée. Ils positionnent leur embarcation vers l’arrière de leur cible et – seul point commun avec les saigneurs de la côte du passé – montent à bord à l’aide de grappins et d’échelles de corde. En quelques minutes, ils se rendent maître du navire, n’hésitant pas à abattre les marins qui résistent. « Les pirates sont de plus en plus audacieux ; ils attaquent des bâtiments toujours plus grands, et jusqu’à deux cent milles des côtes. Ils sont aussi de plus en plus violents, tuant parfois avec sadisme l’équipage », constate Pottengal Mukundan, le directeur général du BMI.
Lorsque la piraterie maritime a connu un regain, il y a une vingtaine d’années, les assaillants se contentaient de détrousser les marins surpris dans leur sommeil et de forcer le coffre du bord, avant de s’évanouir dans la nuit à bord de leur speed-boat. Ils venaient généralement de villages misérables de pêcheurs, et avaient trouvé de quoi survivre dans cette nouvelle forme de banditisme de grand chemin. Mais, comme l’expliquait Pottengal Mukundan au quotidien kényan The Daily Nation : « Année après année, ces pirates se sont organisés en bandes structurées, davantage hiérarchisées, mieux armées ; ils sont parfois membres de mafias puissantes. C’est particulièrement le cas en Asie, mais aussi aujourd’hui en Afrique orientale. Au vol de l’équipage a succédé le détournement du navire pour s’emparer de la cargaison, puis au vol du bateau lui-même, les marins étant abandonnés sur une île voire en pleine mer à bord d’une chaloupe. On assiste aujourd’hui à des prises d’otages où le bateau et l’équipage sont restitués en échange d’une rançon. »
Ainsi, le Danica White, un cargo danois, a-t-il été arraisonné le 2 juin 2007 au large des côtes somaliennes par des pirates armés de mitraillettes et de lance-roquettes. Il a fallu plus de deux mois de négociations pour que l’armateur récupère, le 22 août, le navire et les onze membres d’équipage en échange d’une rançon d’un million et demi de dollars. Quelques semaines auparavant, le China Fong Hwa, un chalutier taïwanais, avait connu la même mésaventure ; les cinq marins avaient été relâchés contre 77 000 dollars après six mois de détention. « Nous n’avons plus affaire là à des flibustiers de petit calibre, mais à un syndicat du crime puissamment organisé », se lamente Pottengal Mukundan.

Comment les navires peuvent-ils se défendre ?

Face à cette menace, équipage et armateurs sont globalement désarmés. Le Bureau maritime international recommande aux navires de passer aussi loin que possible des côtes africaines et philippines. La nuit, certains disposent sur leurs flancs des filets électriques qui envoient une puissante décharge à quiconque l’escalade. D’autres sont équipés d’alarmes sonores et lumineuses qui déstabilisent l’assaillant. Des alarmes installées en plusieurs endroits du bateau envoient discrètement un SOS à un centre de contrôle. Encore faut-il que le bâtiment se trouve à proximité d’une terre. « Nombre de ces défenses sont illusoires. Comment un navire pourrait-il s’éloigner des côtes si sa destination est un port qui, comme celui de Chittagong, est un véritable coupe-gorge ? A quoi bon lancer un SOS si aucune force ne peut intervenir à temps ? On ne peut pas se cacher en mer, et les navires de commerce sont peu manœuvrants par rapport aux vedettes rapides des pirates », souligne Serge Roche.
« Il faut agir en amont, préconise Pottengal Mukundan, que des bâtiments militaires multiplient les contrôles des embarcations, qu’ils fassent acte de présence. L’essentiel est d’empêcher les pirates de s’emparer du navire. Car une fois qu’ils sont à bord, l’équipage ne doit surtout pas résister ; il perdrait à coup sûr une bataille contre des attaquants bien armés et sans pitié. » Ainsi, la piraterie a diminué dans le détroit de Malacca, considéré il y a peu de temps encore comme le repaire de la flibuste, après l’adoption par les autorités malaisiennes et singapouriennes de l’Initiative régionale de sécurité maritime (RMSI, pour son acronyme anglais). Ce vaste plan prévoit notamment des patrouilles permanentes des marines des deux pays. Tout navire de commerce qui entre dans le détroit est également pris en charge par des radars installés à Singapour, détectant tout rapprochement suspect entre deux bateaux qui déclenche alors une intervention des forces de l’ordre. Enfin, les armées des deux pays ont déployé des unités sur plusieurs récifs du détroit, qui disposent d’hélicoptères et de speed boats afin de pouvoir intervenir à la moindre alerte.
Mais un tel dispositif n’est possible que parce que des terres se trouvent à proximité. Cette RMSI représente aussi un coût élevé, pris en charge par l’Onu, le BMI, les affréteurs et les pays limitrophes. Or, Singapour et la Malaisie sont des pays riches, aux forces de l’ordre disciplinées, qui peuvent donc contrôler leurs eaux territoriales. Ce qui n’est pas le cas partout.
Certains affréteurs font parfois escorter leurs navires. Des entreprises privées de sécurité – comme Kroll ou Maritim Risk – ont été créées à cette fin, employant d’anciens marins de la Navy britannique. Là encore, leur coût est élevé, ce qui fait que de telles escortes restent exceptionnelles. Après plusieurs attaques, les bateaux du Programme alimentaire mondial à destination de la Somalie sont désormais souvent escortés par des bâtiments des marines française ou américaine.

Existe-t-il un lien entre piraterie maritime et terrorisme ?

Rares sont les mouvements rebelles – qualifiés de terroristes par les uns, de hérauts de la libération nationale par les autres – à posséder des moyens maritimes d’envergure. Aujourd’hui, seul le mouvement séparatiste tamoul (en anglais Liberation Tigers of Tamil Eelam, LTTE) possède plusieurs navires qui ont déjà infligé de lourdes pertes à la marine sri-lankaise. L’Organisation de libération de la Palestine avait un temps cherché à créer une flotte de combat. Sans succès. Au Nigeria, certains pirates affirment ne s’en prendre qu’aux cargos de ravitaillement des plates-formes pétrolières. Un moyen de revendiquer un meilleur partage des richesses en hydrocarbure du pays. Mais cette prétention laisse sceptique le directeur du BMI, Pottengal Mukundan : « Certains groupes armés recouvrent leur activité criminelle d’un vernis politique. Leurs revendications sont trop fluctuantes et leur appât du gain trop manifeste pour y voir un quelconque message politique. Ce ne sont que des pirates. »
A en croire la revue Foreign Affairs citant les services de renseignements américains, Al-Qaeda et les groupes qui s’en réclament possèderaient une douzaine de « bateaux fantômes », à savoir des bâtiments détournés, puis repeints, dont les certificats de navigation sont falsifiés et les équipages composés de combattants de la cause. A ce jour cependant, aucun attentat n’est venu étayer cette affirmation des services américains.
Les experts en sécurité planchent cependant sur des scénarios catastrophes où des terroristes détourneraient un navire pour le faire exploser, une fois chargé de bombes voire d’armes de destruction massive, dans un port ou un terminal pétrolier. Dans leur livre1, Solomon Kane et Francis Martin imaginent un 11-septembre maritime. Dans le détroit de Malacca, un groupe terroriste éventre un superpétrolier et un chimiquier puis pousse dans la fournaise plusieurs cargos. La marée noire et l’incendie sont impossibles à juguler en moins d’une semaine. Le trafic maritime est bloqué dans cette partie du monde ; les bourses asiatiques s’effondrent, puis par contamination, celles d’Europe et des Etats-Unis ; privées de pièces, les entreprises doivent réduire leur activité. L’attentat fait peu de victimes, mais coûte des centaines de milliards de dollars à l’économie mondiale. Il ne s’agit cependant que d’un livre, qui s’appuie sur des menaces plausibles mais encore jamais réalisées. Si les pirates sont de mieux en mieux organisés, ils grimpent toujours sur les navires avec des échelles de corde !

Jean Piel

1. Pirates et terroristes en mer d’Asie, un maillon faible du commerce mondial. Solomon Kane et Francis Martin. Paris, éditions Autrement, 2005.


Les redoutables « Somali Marines » ont piraté le Ponant

Le Ponant, voilier de luxe français, terminait sa saison dans la zone, entre Madagascar, les Seychelles et Mayotte, et remontait en Méditerranée. Il a été intercepté vendredi 4 avril dernier au large de la Somalie, probablement par le plus puissant des groupes de pirates locaux, les « Somali Marines », et des négociations sont en cours.

Après plus de 48 heures de mer et 400 km parcourus après l’attaque, le Ponant est depuis immobilisé à quelques encablures du village de Garaad, situé dans le sud de la côte de la région autoproclamée autonome du Puntland, au nord-est de la Somalie. Ces « Marines » ont une grande expérience des négociations au long cours avec les armateurs et les propriétaires de navires, toujours via des intermédiaires, et sont capables de garder pendant des semaines leurs otages, qu’ils traitent bien, en changeant les équipes de geôliers régulièrement pour éviter qu’ils ne nouent des liens avec les prisonniers. Dans le cas du Ponant, les spécialistes prédisent une issue pacifique, avec le versement d’une somme par le propriétaire du yacht, le groupe français CGM.
Le yacht compte une trentaine de membres d’équipage, dont 22 Français et une dizaine d’Ukrainiens. « On sait juste qu’ils vont bien, qu’ils sont sains et saufs », a indiqué dimanche à l’AFP une porte-parole de l’armateur français du yacht, CMA-CGM.
Par ailleurs, Nicolas Sarkozy a reçu cette semaine les familles des 22 Français membres de l’équipage du voilier de croisière à l’Elysée. Pour ces familles, dont celles de quatre marins bretons, l’attente se fait pesante. Et les nouvelles arrivent au compte-goutte. « La crise est susceptible de s’inscrire dans la durée, un ou deux mois selon le Quay d’Orsay ». Une équipe du Groupe d’intervention de la gendarmerie nationale (GIGN) s’est envolée dans la nuit de dimanche à lundi depuis une base de la région parisienne pour rejoindre celle de l’armée française à Djibouti.
Côté vie à bord, « selon les informations de la cellule de crise, les conditions sanitaires à bord du Ponant sont bonnes ». D’après Annick Le Loch, députée du Finistère, « seul l’armateur du bateau est en contact avec les ravisseurs, l’Etat français restant pour l’instant en soutien ». Sans doute à la grande satisfaction des familles, Annick Le Loch aurait eu la confirmation que « la voie privilégiée par les autorités françaises pour obtenir la libération de l’équipage et du bateau demeurait la négociation ».
Une organisation non gouvernementale somalienne a d’ailleurs ravitaillé le Ponant en nourriture et en eau, à la demande des pirates, ce mercredi. « Nous avons fourni de l’eau et de la nourriture dont le bateau avait besoin, et nous continuerons à leur donner ce que nous pouvons », a déclaré Mohamud Abdulkadir « John », représentant de l’ONG Somali Tribal Rights Watch (STRW) dans la région de Garaad, joint par l’AFP au téléphone de Nairobi.

« Une seule loi, celle de l’argent » raconte un ex-otage
Le Ponant est probablement aux mains du plus puissant des groupes de pirates locaux, les « Somali Marines ». Le journaliste Gwen Le Gouil a lui même été l’otage de ces pirates en décembre dernier. Ils l’avaient bien traité, préoccupés avant tout de l’échanger contre des espèces sonnantes et trébuchantes.
Gwen Le Gouil s’apprêtait à faire un reportage sur les « Somali Marines », le plus puissant des groupes de pirates locaux, quand ils l’ont pris en otage en décembre dernier. Après négociations avec les autorités françaises, il a finalement été relâché. « Ce ne sont pas des gens qui ont un sens politique très poussé. Ils n’ont qu’une seule loi, celle de l’argent » raconte Gwen Le Gouil. Le journaliste français décrit ses anciens ravisseurs comme d’anciens pêcheurs « reconvertis dans des trafics divers et variés ». « A leurs yeux, j’étais rare et j’avais de la valeur. Ils m’ont plutôt bien soigné, ils avaient peur que j’aille mal », précise encore Gwen Le Gouil qui a pu être secouru sain et sauf.

Il travaillait à bord du voilier pris par les pirates
« Ce sont plus que des collègues, c’est une famille », lâche Bruno Louis au sujet de l’équipage du Ponant, voilier qui a été pris par des pirates le 4 avril au large de la Somalie. Les quelque trente membres d’équipage, il les connaît presque tous pour avoir travaillé sur le trois-mâts en 2005. Bientôt la quarantaine, cet habitant de Cité Barkly a travaillé, ces dix-sept dernières années, comme cuisinier sur des navires autour du monde. D’ailleurs, il aurait été du dernier voyage s’il n’était pas tombé malade et n’avait pas été en convalescence… « J’aurais eu une histoire à raconter », dit-il sous le regard désapprobateur de sa femme, Patricia.
Bruno Louis nous raconte cette année passée à bord du Ponant. Il embarque aux Seychelles – le point de départ du voilier. Celui-ci fait ensuite route vers la Méditerranée pour récupérer le gros des clients. Pour rejoindre la Méditerranée sans contourner l’Afrique, il faut atteindre la Mer Rouge, mais avant, une traversée du golfe d’Aden est obligatoire. « On sait que c’est un endroit dangereux », continue Bruno Louis, précisant qu’à bord du Ponant, il a suivi, avec les autres membres d’équipage, des cours de formation sur les prises d’otages. D’ailleurs, à chaque fois que le voilier a dû traverser ce golfe, Le Ponant était escorté par un bâtiment de la marine française pour des raisons de sécurité.

Les mesures de sécurité sont alors à leur maximum
Bruno nous raconte que la traversée de ce golfe dure trois à quatre jours. Les mesures de sécurité sont alors à leur maximum. Ainsi, au lieu des deux personnes pour chaque quart, six membres d’équipage sont mobilisés. Aucune lumière n’est allumée la nuit, pour ne pas attirer l’attention. Il nous explique qu’une simple cigarette allumée peut attirer les pirates vers le bateau. De plus, toutes les femmes à bord restent dans leurs cabines. Aucun client n’est normalement présent lors de cette traversée dangereuse, nous précise Bruno Louis qui affirme que cinq hommes armés suffisent pour prendre le contrôle du bateau et des trente membres d’équipage.
« Je devais reprendre la mer sur le Ponant l’an dernier », nous affirme Bruno Louis. Il avait en effet été repris comme membre d’équipage, après avoir quitté le bateau une première fois pour revenir au pays et épouser sa fiancée, Patricia. Mais cette fois, c’est la maladie qui l’empêche de rejoindre l’équipage.
« Il écoute France Inter toute la journée », nous affirme Patricia. Inquiet, il est à l’affût de tous les journaux d’informations pour avoir des nouvelles de ses amis, otages en Somalie. La seule chose qui puisse le rassurer c’est de savoir que l’équipage est soudé et que les cours qu’ils ont suivis devraient leur permettre de faire face à la situation – il ajoute qu’aucune arme n’est permise à bord du Ponant, et qu’en cas d’attaque, il est interdit à l’équipage de se défendre.
Selon Le Monde, qui cite Bernard Kouchner, le chef de la diplomatie française, l’équipage du Ponant serait sain et sauf. Le bateau, qui a jeté l’ancre au large de Garacad, sur la côte est de la Somalie, est constamment sous la surveillance de la marine française.

Vincent Potage
L’Express de Maurice


Somalie, repère de pirates

Les côtés somaliennes sont considérées comme une des régions les plus dangereuses pour la navigation. La Somalie est ravagée par la guerre civile depuis la chute du président Mohamed Siad Barre en 1991. Son gouvernement de transition, soutenu par l’Ethiopie, contrôle peu du pays et combat régulièrement des milices islamistes que les Etats-Unis accusent d’être liées à Al-Qaïda.


Piraterie
« Une puissante mafia des mers »

Les pirates somaliens opèrent en redoutables gangs bien organisés et armés, à partir de côtes et de ports que personne ne contrôle. Au cours des années, à la faveur de l’anarchie qui règne en Somalie depuis plus de vingt ans, de puissantes bandes de pirates se sont constituées, souvent à partir de familles de pêcheurs, qui représentent désormais un péril majeur pour la navigation dans la région.

« C’est une puissante mafia des mers », estime le Français Olivier Hallaoui, de la société de sécurité maritime Secopex. « Ce sont le plus souvent des pêcheurs reconvertis au grand banditisme, des clans, des milices locales qui se sont aperçus que c’était un business très rentable, à cause des rançons versées presque à tous les coups par les armateurs des navires détournés. Ils se sont ‘marinisés’. » « Ils ont des GPS, des moyens modernes de communication et des armes lourdes. Et surtout, ils tirent sans sommations », ajoute-t-il.
Selon lui, ils n’ont « pas que cette activité de piraterie, ils sont aussi à l’origine des trafics d’immigrants clandestins. Ils n’ont jamais été violents gratuitement avec les otages, car ce sont leur monnaie d’échange ». Olivier Halloui rappelle que leur objectif est l’argent, comme en « août 2006 où, après 4 mois de capture de 25 otages, ils ont obtenu une rançon de 2 millions de dollars ».

Avec la multiplication des actes de piratage au large de la Somalie, le Bureau international maritime, qui gère le centre anti-piraterie basé à Kuala Lumpur, recommande depuis plusieurs années de ne pas croiser à moins de 200 milles nautiques (plus de 370 km) des côtes. Mais les gangs de pirates modernes ont trouvé la parade : ils opèrent au large, explique l’Américain Michael Wall. Cet ancien officier de l’US Navy est aujourd’hui l’un des dirigeants de la société privée de sécurité maritime Tactical Solutions Partners, basée à Glen Burnie, dans le Maryland.
Ils attendent tranquillement leurs proies, puis fondent dessus. « Souvent, ils sont sur un cargo-mère, très loin des côtes, avec à bord de nombreuses barques plus petites. Ils se font passer pour des pêcheurs et attendent leurs proies », précise Michael Wall. « Ils ont des ports, des zones de mouillage contrôlées par des bandes armées où ils savent que personne n’ira jamais les déranger », ajoute Olivier Hallaoui. « Ils y planquent leurs captures et lancent les négociations. »
Depuis le début de l’année, il y aurait eu sur cette zone sept tentatives de piratage. Le 1er février, un remorqueur danois commandé par un officier britannique, en route pour l’extrême-orient russe, a ainsi été capturé dans ce secteur. Il a été gardé pendant 47 jours, jusqu’à sa libération. U ne rançon de 700.000 dollars avait été versée.


Le retour de la flibuste africaine

Les côtes de Somalie sont parmi les plus dangereuses au monde, de l’avis des marins et des armateurs. La piraterie maritime connaît dans cette région une nette hausse depuis le retour au pouvoir du gouvernement fédéral de transition à Mogadiscio. Au point de menacer l’arrivée de l’aide humanitaire du Programme alimentaire mondial à bon port.

« Zone de guerre ». L’appellation est pour le moins alarmiste, mais c’est ainsi que la Lloyds, la célèbre compagnie d’assurance britannique, a classé les côtes somaliennes. Selon le Bureau maritime international (BMI), vingt-six attaques de navires ont été perpétrées en 2007 dans cette région ; dans dix des cas, l’équipage a été enlevé puis libéré contre rançon. L’affaire la plus célèbre concerne le Danica White, un cargo danois arraisonné par des pirates le 2 juin 2007 et restitué seulement le 22 août, après que son armateur a payé 1,5 million de dollars de rançon. Il est probable que les attaques contre des navires ne sont pas toutes déclarées afin de ne pas affoler les affréteurs et de prévenir la hausse de primes d’assurance déjà élevées. L’insécurité des côtes somaliennes est l’une des principales causes de recrudescence de la piraterie maritime en 2007, selon le BMI.

Cent-onze jours aux mains de pirates

La technique des pirates est toujours la même. Armés de lance-roquettes et de mitraillettes, ils se déplacent avec des vedettes rapides équipées de GPS. Ils opèrent la nuit, lorsque l’équipage est réduit au minimum, et grimpent à bord à l’aide d’échelles de corde. Rapides, mobiles, extrêmement violents aussi, ils prennent vite le contrôle du navire, n’hésitant pas à abattre ceux qui résistent. Un autre bateau les suit, généralement un chalutier maquillé, et donc difficilement repérable, qui leur sert de base arrière. A son bord se trouvent d’autres pirates, des vivres, du fioul. C’est parfois là que sont retenus les équipages pris en otage.
Juma Vita, un chef mécanicien d’origine tanzanienne, a été détenu par des pirates somaliens pendant cent-onze jours en 2005. Il racontait ainsi sa mésaventure dans le quotidien Libération : « J’étais aux machines lorsque j’ai entendu des tirs. Personne n’avait vu les pirates arriver. Ils fonçaient sur des petits speed-boats et ont pris le contrôle de notre vraquier par l’arrière ; nous n’avons rien pu faire. Ils étaient vingt-cinq pirates à bord, et se relayaient tous les dix jours. Après quelques semaines, notre bateau a mouillé à Harardere, une localité à 400 km au nord de Mogadiscio. J’ai appris qu’il s’agissait d’un des principaux bastions de la piraterie en Somalie. Nous avions peur, faim, soif. Nous pensions que cela n’en finirait jamais et qu’ils nous tueraient tous. Après plusieurs semaines encore, le commandant et moi avons été débarqués à terre pour rencontrer un chef de guerre. Il y a eu des négociations, peut-être une rançon, je ne sais pas, mais nous avons été libérés ; c’était l’essentiel. »


Le contexte politique somalien

A en croire Pottengal Mukundan, le directeur du BMI : « Les pirates sont de mieux en mieux organisés et de plus en plus audacieux. Ainsi le Danica White a été attaqué à 240 milles des côtes, soit près de 400 km. La piraterie maritime en Somalie est devenue un secteur d’activité lucratif. Nous avons peu d’informations sur les négociations après une prise d’otages. Nous savons juste qu’elles s’effectuent en Somalie par l’intermédiaire de notables locaux. » Le retour des écumeurs des mers au large des côtes est-africaines coïncide avec la victoire du gouvernement fédéral de transition (GFT) et de ses alliés éthiopiens contre les Tribunaux islamiques. Lorsque ces derniers détenaient le pouvoir à Mogadiscio, de juin à décembre 2006, ils avaient réussi à réduire les attaques de navires en menant des raids contre les principaux points de regroupement des pirates. Ces derniers appartiendraient en majorité à l’ancienne marine de guerre, tombée en déshérence après la chute de Siad Barré en 1991, ou seraient des pêcheurs reconvertis dans le grand banditisme sous les ordres de chefs de guerre locaux. Aujourd’hui, le gouvernement légal en Somalie n’arrive pas à assurer l’ordre dans la capitale ; lutter contre la piraterie ne constitue donc pas sa priorité.

Une menace pour la sécurité alimentaire

Cette recrudescence des attaques en mer menace la livraison de l’aide humanitaire du Programme alimentaire mondial (PAM), qui transite par le port de Mogadiscio. Au point que les cargos affrétés par le PAM sont souvent escortés par des navires militaires français ou américains, ou prennent à leur bord pour les derniers milles des membres des commandos de marine. Comme l’expliquait l’un d’eux à Libération : « Nous défendons les navires, mais nous ne traquons pas les pirates. Ce n’est pas notre mission. Lorsque nous repérons un bateau suspect, nous commençons par des avertissements verbaux, puis des fumigènes, des tirs de semonce et, en ultime recours, des tirs réels. Nous sommes d’ailleurs très bien armés. » Commandant d’un aviso d’escorte, le capitaine de frégate Philippe Le Gac ajoute : « Ces actions de piraterie sont le fait d’hommes entraînés et bien organisés. Pour lutter contre ce phénomène, il faudrait avoir les moyens de patrouiller le long des 3 400 km de côtes et disposer d’unités spécialisées prêtes à intervenir immédiatement. »
De nombreux bâtiments militaires patrouillent pourtant dans la région, dans le cadre du volet maritime de l’opération Liberté immuable. Mais leur mission est de lutter contre le terrorisme, pas contre la piraterie. Au demeurant, l’attaque du Danica White avait été repérée par un navire de guerre américain qui avait même fait feu. Mais les pirates avaient réussi à échapper à sa poursuite.
Cette insécurité des eaux territoriales somaliennes inquiète évidemment les équipages et les armateurs. Et bien sûr aussi les responsables du PAM : « Notre capacité à nourrir un million de Somaliens est menacée par la piraterie ; 80 % de notre aide alimentaire est acheminée par voie maritime, or nous avons désormais du mal à trouver des navires qui acceptent de croiser dans la région. Du coup, depuis décembre dernier, nous recommençons à acheminer l’aide par voie terrestre. C’est beaucoup plus cher, mais nettement plus sûr. Les flibustiers ont peut-être une image romantique au cinéma, mais pas pour les personnes dont la survie dépend de l’aide alimentaire dans les camps de déplacés en Somalie », confiait Josette Sheeran, la directrice générale de l’agence onusienne, au quotidien sud-africain Mail & Guardian.
Les experts s’accordent à dire qu’une action internationale coordonnée est nécessaire pour prévenir les attaques des écumeurs des mers. Mais tant que la Somalie n’aura pas rebâti un Etat de droit à même de mettre en place un cadre répressif et législatif, la lutte contre la piraterie maritime restera une illusion à long terme dans cette partie du monde.

Jean Piel

Témoignage
« Ils nous ont tout pris, sauf la vie »

Une famille de Mayotte voguant depuis la Méditerranée vers l’île sur son voilier, attaquée par des pirates au large de la Somalie. C’était en 2005, mais le souvenir est toujours vif, peut-être même trop pour les enfants. Sans entrer dans les détails, ils ont accepté d’en parler.

Amoureux de la mer, des îles et du voyage, marins, ils en ont subi les dommages collatéraux. C’était en janvier 2005. A bord de son voilier cette famille chemine de la mer Rouge vers Mayotte. Sur le trajet entre le Yémen et le Kenya, au large de la Somalie, ils sont attaqués par des pirates.
« Les pirates ont des informateurs à chaque escale qui se renseignent sur les trajets des bateaux et leur date de départ, selon la tête du client ils jugent si c’est intéressant. C’est pourquoi il faut se montrer discret lors des escales, ce que nous faisons toujours. Il faut éviter de donner trop d’indications sur sa destination, ne pas faire étalage de ses richesses, forcément attirantes pour des peuples aussi pauvres. Malgré toutes nos précautions, nous n’avons pas eu de chance. »
La mer est agitée, il remarquent le bateau des agresseurs trop tard, les voilà à bord. Des gamins, 7 ou 8 âgés de 14 à 25 ans tout au plus, « armés jusqu’aux dents, comme dans les films, très persuasifs… Nous n’avons pas bronché, obéi à tout. » L’argent, la nourriture, l’eau, le carburant, les moteurs, les installations électroniques, les vêtements… Les pirates leur ont tout pris « sauf la vie, nous les avons d’ailleurs remerciés quand ils sont repartis, environ 3 heures après ».
Restés sur la seule chose qui leur reste, leur bateau, ils voguent à la voile pendant 8 jours jusqu’à Lamu, l’île kényane. Comment ont-ils survécu sans rien ? Grâce au chien… L’imposant animal noir était installé sur une couchette, sous laquelle étaient cachés quelques réserves d’eau et de nourriture, les papiers et un peu d’argent.

« Si c’était à refaire je le referai »

Leurs jeunes agresseurs, musulmans, sont trop effrayés par le chien pour aller explorer sous la couchette, cette peur a été leur salut. Ils auront de quoi affronter les 8 jours suivants nécessaires pour arriver à Lamu, leur île d’adoption. En chemin, à leur grand étonnement, ils ne croisent aucune présence militaire, pas même à la frontière des eaux somaliennes et kenyanes.
« Si c’était à refaire, je le referai sans hésiter. C’était un voyage fabuleux, des rencontres très intéressantes avec les populations qui nous ont toujours bien accueillis, que des bons souvenirs à l’exception de l’attaque. Nous n’avons pas eu de chance, sur les trois bateaux qui empruntaient cette route, nous sommes les seuls à avoir été attaqués. » Pour ce voyageur, si l’attaque qu’il a subie est due au mauvais coup du hasard, celle du Ponant est en revanche facile à expliquer. « Il y a un comportement à avoir en mer et lors des escales, ne pas trop se montrer, ne pas sortir de liasses de billets, se vêtir décemment en territoire musulman… Un bateau de luxe comme le Ponant attire forcément les convoitises. »
Le bateau de la famille est toujours en Afrique de l’Est. Resté là bas d’abord pour cause de réparations nécessaires, il a été descendu progressivement, jusqu’au yacht club de Dar-es-Salaam, la capitale tanzanienne, Mayotte n’est pas jugée assez sûre pour y laisser son bateau.
« Si on n’habite pas sur son bateau ici, il lui faut malheureusement une surveillance constante, à moins de le mettre en Petite Terre mais ce n’est pas intéressant pour nous (ils habitent tout au nord de l’île, ndlr). Il faudrait engager quelqu’un pour être constamment dessus, d’autant qu’un phénomène nouveau est apparu ici, des bateaux ont été attaqués avec leurs occupants à bord. » La piraterie déjà présente aux Comores – les eaux territoriales d’Anjouan sont fortement déconseillées aux plaisanciers – arriverait à Mayotte. Plusieurs bateau l’ont subie, à Hagnoundrou ou dans le nord. Une situation qui risque de devenir dérangeante pour tous ces plaisanciers qui font escale dans l’île aux Parfums.
Les « tour du mondistes » qui arrivent d’Asie du Sud Est, qu’ils continuent vers la mer Rouge ou le cap de Bonne Espérance, s’arrêtent presque toujours ici, et repartent avant la saison des cyclones.

Hélène Ferkatadji

« S’ils s’en sortent, ça va encore aggraver le problème de la piraterie dans la région »
Mowliid Haji Abdi est un journaliste somalien basé au Puntland

Les actes de piraterie se sont multipliés ces quatre dernier mois. Ces bandits n’appartiennent pas à une organisation plus large (référence aux chefs de guerre locaux). Ils sont incontrôlables et ne vivent que du piratage, qui est une activité très lucrative. Les pirates sont de plus en plus forts. Ils ont des armes modernes et même des équipements GPS.
Le dernier bateau qu’ils ont attaqué leur a rapporté 450.000 euros de rançon. Mais cette affaire du Ponant est encore plus importante. S’ils s’en sortent, ça va encore aggraver le problème de la piraterie dans la région. En général, les pirates ne tuent pas, même si ça leur est déjà arrivé. Et, autant que je sache, ils ne torturent ni ne maltraitent pas non plus leurs otages.


La Jeanne d’Arc au secours du Ponant

La France a décidé de renforcer ses moyens navals au large de la Somalie, où les 32 membres d’équipage du Ponant sont retenus en otage. Selon nos informations, le transport de chalands de débarquement Siroco a appareillé mardi soir de Toulon pour rejoindre l’océan indien. Dans le même temps, le porte-hélicoptères Jeanne d’Arc, navigant actuellement entre Madagascar et Djibouti dans le cadre de la campagne d’application des officiers de marine, se tiendrait prêt à intervenir. Le Ponant est, quant à lui, toujours au mouillage au sud de la Somalie.
La Jeanne permettra aux autorités françaises, en cas de besoin, de s’appuyer sur une unité plus importante que l’aviso Commandant Bouan, un petit navire certes très armé, mais dépourvu d’hélicoptère et aux capacités d’hébergement limitées. Avec la Jeanne, les militaires français disposent d’une plateforme mobile embarquant des hélicoptères Aloutette III de la marine et Puma et Gazelle de l’armée de Terre. Elle est, de plus, dotée d’installations hospitalières importantes, qui permettront d’accueillir, le cas échéant et dans de bonnes conditions, les marins du Ponant.
Partie de Brest en décembre dernier pour campagne annuelle avec les élèves officiers, la Jeanne d’Arc, escortée par la frégate Georges Leygues, a d’abord croisé en Amérique du nord et en Amérique latine avant de rejoindre le continent africain. Après une escale à Mayotte lors de la visite d’Yves Jégo, le porte-hélioptères avait rejoint Madagascar fin mars avant d’amorcer son retour vers la métropole.
La mobilisation de ces moyens, très lourds, ne signifie toutefois pas qu’un assaut contre le Ponant est imminent. Le gouvernement privilégie avant tout les négociations pour éviter de mettre en danger l’équipage du Ponant. Mais les tractations pourraient durer, comme l’a expliqué ces derniers jours Bernard Kouchner, ministre des Affaires Etrangères. C’est pourquoi, la Jeanne ne pouvant rester dans le secteur très longtemps (Elle est attendue en Turquie le 27 avril), le transport de chalands de débarquement Siroco a quitté la France mardi. Ce bâtiment, doté d’un grand hôpital de 55 lits et d’une plateforme avec hangar pour quatre hélicoptères lourds, devrait arriver sur zone dans une grosse dizaine de jours. Il permettra de relever la Jeanne, au cas où le Ponant serait encore aux mains des pirates.


Histoire ou mythe ?
Le séjour à Anjouan des fondateurs de Libertalia

Misson et Caraccioli, fondateurs de la république utopique de Libertalia dans la région de Diego Suarez, auraient auparavant séjourné à Anjouan où ils auraient aidé la reine dans sa guerre contre Mohéli et rencontré les épouses qui les suivirent à Madagascar.

Une des plus célèbre légende de pirates de l’océan indien est l’histoire de la république utopique de Libertalia, fondée dans la baie de Diego Suarez par le capitaine Misson et son acolyte Caraccioli. Le récit de ces pirates et de leur société avant-gardiste démocratique ne figure que dans le traité d’un certain Charles Johnson, aujourd’hui identifié comme étant le romancier Daniel Defoe, « The general history of the pyrates », il est donc impossible d’en vérifier l’authenticité.
Le chercheur Alain Clockers a étudié le séjour à Anjouan de ces pirates mystérieux, séjour qui précède directement la fondation de Libertalia. A partir des années 1680, les pirates sont de plus en plus nombreux à croiser dans l’océan indien, attirés par les cargaisons des vaisseaux de la Compagnie des Indes orientales. Ils commencent à fréquenter les îles des Comores, pour s’approvisionner en eau et nourriture autant que pour y surprendre d’autres navires.
Il a souvent été relaté que les populations comoriennes ne représentaient pas un grand danger pour les pirates, au contraire ils faisaient avec eux du commerce et ont sollicité plusieurs fois leur aide dans leurs guerres locales. A l’époque, la petite île de Mohéli cherchait depuis longtemps à se défaire de la suzeraineté d’Anjouan, entraînant de nombreux conflits. C’est à l’un d’eux qu’aurait pris part l’équipage de Misson. Arrivés sur l’île en 1693, ils y font la connaissance de la reine Halima 1ère qui sollicite leur aide pour mater les Mohéliens.

Les Libertaliens : des métis anjouanais

« L’affaire commence par une tentative de débarquement des Mohéliens sur la côte ouest d’Anjouan. Caraccioli avec ses acolytes et quelques guerriers anjouanais repoussèrent les Mohéliens après un combat meurtrier : de nombreux cadavres jonchèrent rapidement les lieux de débarquement. De son côté, Misson et sa flotte attendirent au large les rescapés en fuite et leur barrèrent la route du retour. Une centaine de fugitifs furent faits prisonniers et renvoyés à Mohéli porteurs d’un message de paix : ce message fut accueilli avec mépris par le sultan qui répondit n’avoir pas de conseils à recevoir pour faire la paix ou la guerre.
Devant une telle arrogance, la réaction anjouanaise et celle de Misson ne pouvaient tarder. Avec son vaisseau le Provençal, ce dernier prit la tête d’une expédition punitive vers Mohéli. Une fois débarqués, les pirates accompagnés d’Anjouanais se livrèrent au pillage et au saccage de l’île, face à environ 700 Mohéliens armés de sagaies et de flèches qui n’eurent que peu d’effets contre les fusils des pirates. Opération de pillage peu fructueuse, suivie plus tard d’une seconde expédition que les acolytes de Misson espéraient plus rentable. En vain. »
Cependant si l’expédition fut peu rentable, elle le fut d’une autre façon. « Certains d’entre eux avaient découvert d’autres « trésors » à Anjouan. Quelques relations matrimoniales s’y étaient en effet nouées. Misson et Caraccioli avaient épousé des princesses. Quant à l’équipage, certains de ses membres ne s’étaient pas privés de prendre femme. »
La population d’Anjouan aurait ainsi été partie prenante dans la fondation de Libertalia, les femmes ayant toutes choisi de suivre les pirates à Madagascar. « Cette base arrière pour leurs opérations de piraterie verra naître ainsi les enfants de ces liaisons « tendres » d’Anjouanaises et de pirates européens. Certaines Malgaches partagèrent le même « sort » pour donner naissance à des enfants qui constitueront ce que les habitants de la Grande Ile appelleront les « Zana Malata » : les « mulâtres » (métis). Ce sont ces derniers qui renversèrent la république utopique, obligeant Misson et les autres à fuir… Clockers conclue son étude en précisant qu’à Mayotte et Madagascar, « les aventures de Misson ont marqué les mémoires et stimulé les imaginations de quelques uns qui n’hésitent pas à se présenter eux-mêmes comme issus de l’aventure libertalienne. »

Hélène Ferkatadji
Source : « La piraterie dans les eaux comoriennes au XVIIe siècle », Alain Clockers



Le trésor de La Buse n’a toujours pas été trouvé

Olivier Levasseur plus connu sous le nom de « La Buse », surnommé ainsi en raison de sa rapidité à fondre sur sa proie, était un authentique pirate. Son trésor était constitué de perles, diamants, or et vaisselles d’argent… Un vrai pirate pendu haut et court, avec des messages codés, des grottes et une île mystérieuse, des plans ou foisonnent des cachettes !

La Buse, pirate célèbre, écuma l’océan indien au début du 18ème siècle. Il aurait caché un trésor estimé aujourd’hui à 4,5 milliards d’euros quelque part à la Réunion. Aujourd’hui encore, des chercheurs et des scientifiques se lancent à la recherche de ce trésor précieusement conservé depuis plus de 280 ans.
Olivier Levasseur est né à Calais à la fin du XVIIè siècle. En 1721, La Buse est associé au pirate anglais Taylor. Ils se sont emparés au mois d’avril du riche vaisseau portugais de 72 canon La Vierge du Cap qui avait cherché refuge contre les tempêtes dans le port de Saint-Denis (île Bourbon).
A bord du vaisseau se trouvaient le comte Ericeira, vice-roi des Indes et l’archevêque de Goa. La Buse n’exigea pas de rançon du vice-roi, mais fit main basse sur les objets d’inestimables valeurs : rivières de diamants, bijoux, perles, barres d’or et d’argent, meubles, tissus, vases sacrés et cassettes de pierres précieuses, et la crosse d’or de Goa constellée de rubis pesant une centaine de kilos, le tout évalué à 4,5 milliards d’euros.
La Vierge du Cap, radoubée et remise à neuf, devint le vaisseau de La Buse et prit le nom de Le Victorieux. Mais l’année d’après, Duguay-Trouin et le commodore anglais Matthews vinrent se chercher querelle dans les parages. La Buse et Taylor se sont méfiés et ont préféré prendre « le large ». Taylor s’enfuit aux Antilles et La Buse se retira à l’île Sainte-Marie près de la côte de Madagascar. Il prit sa retraite, car la piraterie n’était plus possible avec aux trousses un gaillard de la trempe de Duguay-Trouin, dont le pavillon flottait glorieusement de l’Equateur au cap de Bonne-Espérance.
La plupart des écumeurs des mers cessèrent également toute activité et devinrent d’assez paisibles citoyens en profitant de la Charte de clémence offerte par le roi de France. Leurs bateaux pourrirent dans les anses et la piraterie disparut. Presque seul, La Buse temporisa avant d’accepter la Charte, restitua les vases sacrés, mais ne put se résoudre à rendre le butin de La Vierge du Cap, condition de la clémence.
Il est certain qu’il cacha son trésor… mais où ? On a avancé le nom de 6 îles : Maurice, La Réunion, Frigate, Mahé, Rodrigues, Sainte-Marie. Dans tous les cas, c’est à Sainte-Marie que vivait Levasseur, en situation irrégulière mais sans grand danger immédiat… parlant de soumission sans se hâter de conclure. Vers 1729, exerçant le métier de pilote dans la baie d’Antongil (Madagascar), il offrit des services au vaisseau La Méduse, de la Compagnie des Indes, qui voulait entrer dans le port.
Le capitaine d’Hermitte, commandant de bord, le reconnut, et se souvenant que le pirate avait maintes fois arraisonné des navires de sa compagnie, il l’arrêta. Le 7 juillet 1730, La Buse était condamné à mort à 17h. Quand il monta sur l’échafaud pour expier ses crimes de pirate, Olivier Levasseur, dit La Buse, lança dans la foule un cryptogramme et s’écria :
– « Mes trésors à qui saura comprendre ! »
Voici donc La Buse pendu, le cryptogramme lancé dans la foule, et le trésor caché offert aux plus malins.

Voir les sites : pirates-corsaires.com/levasseur-la-buse.htm et http:/ybphoto.free.fr/piste_la_buse_yb_1.html (pour les amateurs de chasse aux trésors)

Définitions

Le pirate (du grec « peiratès » qui signifie initialement « celui qui entreprend », « celui qui tente fortune ») agit pour son propre compte. C’est un hors-la-loi qui parcours les mers et qui pille, viole et bien souvent tue sans distinction de nationalité. S’il est pris, on le pend haut et court.
Haut pour que tout le monde le voit, et court pour économiser de la corde !

Le corsaire (de l’anglo-saxon « privateers ») lui, agit sur lettre de marque délivrée au nom du roi (bien souvent, ce dernier n’était pas averti). Ce papier est un document par lequel un pays le reconnaît comme force militaire auxiliaire. Les corsaires agissent au service de leur pays. S’il est capturé, il exhibe ses lettres de marques, ce qui lui évite la corde. Mais quelques corsaires peu scrupuleux profitaient de ce papier officiel pour piller et tuer les marchands comme les pirates.
La piraterie est vieille comme le monde et existe toujours, tandis que les corsaires ont sévit durant trois siècles (du XVIè au XIXè siècle).

Le flibustier (ou « frère de la côte », du néerlandais « vrijbuiter ») est un corsaire des Antilles qui va sus à l’Espagnol aux XVIIè et XVIIIè siècle. Le mot apparaît à la fin du XVIIè siècle (Furetière, 1690), mais il est usité depuis Dutertre en 1667. Ce mot se traduit par « freebooter » en anglais ; le sens littéral signifie « libre butineur ».

Le boucanier (dérivé du Caraïbe « boucan ») est à l’origine des chasseurs d’animaux sauvages. Il traite la viande par un procédé de fumage appelé boucanage appris des Indiens Arawak, et fait du commerce avec les peaux. A l’origine, les boucaniers occupent des terres sur l’île d’Hispaniola qui appartient à l’Espagne (aujourd’hui Haïti et la République Dominicaine). La raréfaction du gibier dans les îles ainsi que la tentative des espagnols d’évincer les boucaniers, leur font rejoindre la flibuste.

UNE Mayotte Hebdo N°376 – Vendredi 11 avril 2008

UNE Mayotte Hebdo N°376 - Vendredi 11 avril 2008

Dossier 4 pages

Danger, Pirates !

 > Evènement – écoute, fermeté et assurance de l'élysée
 > Politique – "vive mayotte avec ses traditions dans la république !"
 > Sport – finale de rugby le rcm impérial

11/04/2008 – Enquête sur l’emploi dans le privé – 8 entreprises sur 10 envisagent d’embaucher

Certes le mieux est l'ennemi du bien, mais les 107 tableaux de l'étude Ipsos rendue publique ce jeudi par la Caisse d'assurance chômage qu'il l'avait commandée montre que le monde économique mahorais se situe sur la bonne voie… ou plutôt sur le bon layon. Il est vrai que la situation décrite rend perplexe tant les difficultés rencontrées paraissent dater d'un autre temps.
La première difficulté des ressources humaines réside dans l'embauche du personnel. La première raison ? "Le manque de candidats dans l'absolu", note l'étude. Effectivement, quand on n'a pas de candidats à sélectionner, il est dur d'embaucher. Dans tous les cas le choix est des plus restreint. Dans le même temps, le philosophe explique que "choisir c'est renoncer". Le renoncement est donc étranger à Mayotte, ce qui est plutôt positif, non ?
Les trois grands manques de main d'œuvre se ressentent quand il faut embaucher un comptable, malgré tous les bacs STG, considérés comme la dernière roue du carrosse dans l'Education nationale. 45% des offres n'ont pas trouvé preneur dans cette fonction, ensuite ce sont les commerciaux (75%) et plus étonnant les standardistes et hôtesses d'accueil. Cette dernière carence met en valeur la grande absence d'une instruction "nationale" maîtrisée.
Un écueil certes problématique mais qui peut être évité par une formation aux compétences de bases. Seules 57% des grandes entreprises sont conscients de ce problème. Plus les entreprises diminuent de taille, moins elles s'efforcent à former. De manière globale, seulement 40% des sociétés à Mayotte pensent à former leurs personnels. Les entreprises de plus de 50 salariés disposent d'un budget formation pour 89% d'entre elles, mais seulement 55% possèdent un directeur des ressources humaines, ce qui est très peu, malgré les efforts de la DTEFP à les sensibiliser à l'importance de ce secteur.
"Toutes les entreprises interrogées, surtout dans l’industrie, ont affirmé avoir eu de très grosses difficultés, voire des problèmes pour recruter, en CDI (83%), pour les postes à responsabilités. Ces difficultés sont essentiellement dues au manque de compétences techniques, au manque d’expériences, au déficit de formation, au manque de qualités personnelles des candidats", affirme l'étude Ipsos.
 
 

70% des entreprises mahoraises ont embauché localement

Malgré tout, 94% des offres d'emplois ont été pourvues, ce qui reste colossal et 70% des entreprises mahoraises ont embauché localement. Ce bon pourcentage est malheureusement lié au statut de la main d'œuvre dans l'île. Pour toutes les sociétés, la main d'œuvre locale rime avec ouvriers (35% des emplois) et employés (45%). Cette situation ne tend pas à s'équilibrer puisque dans les projections des patrons, les futures embauches concerneront à 88% ces deux catégories. Seulement 6% de cadres sont présents dans ce tissu économique.
Mayotte est encore un pays de manœuvres. Les bureaux climatisés tant espérés et obtenus dans le secteur public constituent une chimère pour les 12.000 salariés du privé. En 2006-2007, sur les 2.690 embauches réalisées, 1.297 concernaient des postes d'ouvriers qualifiés ou non qualifiés. "Et en plus, il faut les former sur le tas", se plaignent les patrons qui n'oublient pas tout de même que le salaire est moindre par rapport à ce qu'il serait dans un département.
"Je ne suis absolument pas contre l'arrivée du département. Mon syndicat a soutenu et soutient la volonté égalitaire des Mahorais avec nos concitoyens. Nous avons établi un calendrier de rattrapage du Smig vers le Smic. Ce que je déplore c'est qu'aucun plan de rattrapage dans la formation professionnelle n'a été préparé. Aucun calendrier ne dit quand un ouvrier mahorais obtiendra la même productivité qu'un ouvrier au Smic", se plaignait dernièrement un entrepreneur du BTP.
L'étude sur la productivité rendue fin 2007 a montré que : "Par secteur, Mayotte compte trois à cinq points de retard, voire 10 points comme dans l'artisanat. Je pense que nous pouvons gagner de 2 à 3% de productivité par une meilleure organisation", tempère Gilbert Laporte, le directeur de l'Arvise (Association réunionnaise pour la valorisation de l'initiative socio-économique), délégué régional de l'Anact (Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail) et rapporteur de l'étude sur la productivité.
Ce dernier a mis sur la sellette tout le système d'emplois intermédiaires qui coûte trop cher à ses yeux. "Il est peut-être venu le temps de faire confiance à la base. Si la masse salariale par rapport à la valeur ajoutée créée par l'entreprise correspond à la moyenne nationale, autour des 60%, c'est l'encadrement de contrôle de l'exécution qui a un coût très élevé. En plus, cette forte présence déresponsabilise la base qui se dit toujours que si elle commet une erreur quelqu'un la réparera. Il est temps de lâcher le bonhomme."

 

Développement de l'emploi précaire

Ce n'est pas l'option qui semble avoir été prise par les opérateurs économiques. Depuis 2006, le nombre d'emplois précaire symbolisés par les contrats de chantiers se multiplie. Ces derniers se retrouvaient uniquement dans les grandes entreprises de BTP. 28% des contrats du secteur sont de ce type, soit 10% du total des 12.000 emplois. Maintenant, on voit apparaître des contrats de chantiers dans le secteur associatif et surtout dans des petites structures.
60% des embauches prévues en 2007 dans les structures de moins de cinq salariés et 75% dans celles de moins de dix envisageaient la signature d'un tel engagement très provisoire. Tout de même, le CDI reste la règle avec 75% des contrats signés, mais encore une fois dans les embauches envisagées celui-ci tombe à 36% à égalité avec le CDD, le reste étant réservé au contrat de chantier. Une évolution inquiétante sur laquelle les pouvoirs ont peu d'emprise, à moins qu'il ne s'agisse de la structuration d'un chemin vers l'emploi, débutant par le CDD ou le contrat d'un chantier.

L'étude recense, brièvement, 900 postes menacés tandis que 1.800 embauches sont prévues. Un seuil positif mais qui ne couvre pas la croissance démographique. L'étude sur la productivité a observé une croissance de 3,5% des emplois contre 4% pour la démographie. Encore une fois, la mobilité va devenir un élément incontournable du parcours professionnel du Mahorais. Pour l'instant, la majorité ne possède pas assez de bases solides pour l'assumer.
Ceux qui le peuvent le doivent à une formation continue payée par l'entreprise, qui de son côté voit partir un élément qu'il a pris le temps de former ou à qui il a donné du temps pour ça. Il plante l'arbre sans en récolter les fruits. A égalité avec la difficulté d'embaucher (citée 30% des fois), le manque de reconnaissance et la motivation arrivent en tête des points négatifs de la ressource humaine.

Gérôme Guitteau


Panorama des entreprises Mahoraises

Les entreprises mahoraises sont à 90% des entreprises privées, le reste étant de statut associatif. Les trois quarts sont indépendantes : elles ne sont filiales d’aucun groupe industriel, commercial ou financier. Les 2/3 ont plus de 5 ans d’existence. Elles évoluent essentiellement dans les secteurs de commerce et des services (plus de la moitié), le BTP et très rares dans l’industrie et l’agriculture. Elles sont essentiellement en mono-activité.
La quasi-totalité des entreprises mahoraises sont des PME, seules 6% ont plus de 50 salariés et plus.
On peut considérer qu’il y a globalement 12.000 salariés dans les entreprises mahoraises. Les plus gros employeurs restent le BTP (1/3), les services, puis le commerce. L’effectif moyen par entreprise est d’environ 17 salariés. 6% des entreprises emploient la moitié des salariés.

Bénéficiaires de la CACM

Les salariés ayant exercé une activité professionnelle sur le territoire de Mayotte involontairement privés d’emploi et ayant fait l’objet d’un licenciement économique
Les salariés sous contrat CNE (4 mois de présence dans l’entreprise)
Les salariés involontairement privés d’emploi par suite de la mise en liquidation judiciaire de l’entreprise qui les emploie.
Modalités :
3 mois à 75% du salaire total brut plafonné à 1000€
4 mois à 50% du salaire total brut plafonné à 1000€
Soit une indemnisation sur 7 mois avec une obligation d’actualiser sa situation et de tenir compte de l’évolution de la recherche d’emploi une fois par mois auprès de l’ANPE

11/04/2008 – Les associations mahoraises reçues à l’Elysée

Il y a deux semaines, à l’occasion de la session de formation organisée pour les associations d’Outremer établies dans l’Hexagone, au ministère de la santé, la ministre Michèle Alliot-Marie s’était montrée très ferme sur le plan de la lutte contre l’immigration clandestine – qui devrait s’intensifier – de même que sur le plan politique puisqu’elle a tenu à préciser que "les calendriers qui avaient été prévus seront respectés".
Même son de cloche du côté de la présidence de la République qui a reçu cette semaine, et c’est une première, une délégation de la Famm (Fédération des associations mahoraises de métropole) et du Comité Mayotte Département. Pour Nicolas Sarkozy, par la voix de sa conseillère technique à l’Outremer Marie-Luce Penchard, tout est clair : "ce n’est pas la France qui va décider du statut de Mayotte mais les Mahorais eux-mêmes. Nous attendons à ce que le conseil général s’exprime". Et pour ceux qui en douteraient, l’Elysée tient à préciser que ceci s’inscrit dans le cadre du calendrier législatif préétabli. "Ceci n’est en aucune manière une réaction aux récents évènements qui ont secoué Mayotte, mais le signe du respect des engagements de l’Etat".
 

"Ce n’est pas le statut qui va régler le problème de l’immigration clandestine"

Marie-Luce Penchard ajoute même que "quel que sera le choix des Mahorais, Mayotte restera française. Les Mahorais ne doivent avoir aucune inquiétude, mais sachez, ajoute-t-elle, que ce n’est pas le statut qui va régler le problème de l’immigration clandestine". De quoi lever toute inquiétude pour ceux qui considèrent que le statut actuel de Mayotte est un statut "hybride", n’octroyant aucune garantie quant au maintien de l’île dans la République.
Mais sur ce terrain plus précisément de l’immigration, l’Elysée a tenu là aussi, dans la manière et le style du chef de l’Etat, à lever toute ambiguïté. Car face aux angoisses exprimées par les associations mahoraises sur le refus des autorités comoriennes d’accueillir leurs clandestins, histoire de laisser le chaos gagner Mayotte, comme l’a laissé entendre Sambi, le conseiller diplomatique du Président de la République est ferme : "pour nous, la priorité maintenant c’est le retour aux frontières de tous les sans papiers".

 
"Il faut que les Comoriens arrêtent de fantasmer que la source de leurs problèmes c’est la France"

Rémi Maréchaux a tenu à préciser certains points, notamment par rapport aux propos du président Sambi qui a laissé entendre la semaine dernière, de retour à Anjouan après un an d’interdiction, qu’il était en discussion avec le Président Sarkozy sur la question de Mayotte. Celui-ci a clairement indiqué que Nicolas Sarkozy a fait savoir à Ahmed Sambi – et ce depuis septembre 2007 – que "nous ne sommes pas et nous serons sans doute jamais d’accord sur la question de Mayotte".

Avec son franc-parler, Nicolas Sarkozy aurait dit à son homologue comorien : "il faut que les Comoriens arrêtent de fantasmer que la source de leurs problèmes c’est la France. On ne pourra pas régler le contentieux politique, alors développons une politique de coopération", dans laquelle chacun des deux pays serait gagnant. Le Président de la République aurait ainsi proposé au président comorien de "faire en commun ce qui est en commun", notamment sur le plan de l’éducation, du commerce, etc.

Ces premières discussions de septembre dernier se seraient bien passées, de quoi garantir de meilleures relations dans l’avenir. D’ailleurs, selon ses proches, le Président de la République estime que durant les deux premières années, Sambi a été "un partenaire fiable". "Aujourd’hui, il est à la limite", d’autant que les Comores ont mis un frein à cette politique de coopération qui s'appuyait sur le document-cadre qui a été mis en place sous Girardin alors ministre de la Coopération en 2006.
La rencontre de septembre entre les deux présidents devait aller dans le sens de la continuité, avec notamment la mise en place d’un Groupe de travail de haut niveau, mais les autorités comoriennes n’auraient pas suivi, d’autant que le contexte n’a pas été favorable puisque la crise anjouanaise – qui a débuté dès le mois de juin 2007 et qui a duré dans le temps – n’a pas permis aux deux pays d’avancer selon la feuille de route tracée.

La France tient tout de même à préciser qu’elle a emboîté le pas en permettant par exemple la mise en place d’un vice-consulat à Anjouan où devaient être étudiées les demandes de visa, en contrepartie la France a bataillé pour obtenir l’adhésion de Mayotte à la Commission de l’océan indien (COI), alors qu’un "boycott sportif" paralysait toujours le monde sportif mahorais. "Nous avons obtenu un compromis, souligne Rémi Maréchaux, "ce qui n’est pas, je vous l’accorde, une situation satisfaisante. Car qui dit compromis dit que chacun renonce à ses valeurs et ses principes."

 

"Pour faire une coopération, il faut être deux"

Le rêve français aux Comores, version Sarkozy, devait être celui du modèle franco-allemand, c'est-à-dire "réussir avec les pommes de terre et les oignons ce que nos deux pays ont réalisé avec le charbon et l’acier". Mais aujourd’hui le rêve semble virer au cauchemar puisque les Mahorais, tant à Mayotte qu’en Métropole, tiennent à préciser que "pour faire une coopération, il faut être deux et surtout il faut se respecter mutuellement".
Sur le terrain diplomatique il incombe de rester optimiste et de croire qu’un dialogue, voire même une vie en commun – sans que chacun ne renonce à ce en quoi il croit – est possible tant que l’on privilégie les pourparlers. Mais la réalité des faits est qu’aujourd’hui nombreux sont les Mahorais à demander à ce que le gouvernement envoie un signal fort, qu’il condamne avec la plus grande fermeté les évènements du jeudi 27 mars qui "ont eu des conséquences humaines et matérielles assez lourdes", comme ont tenu à l’exposer à l’Elysée les responsables associatifs mahorais.

Sur ce plan, Marie-Luce Penchard a voulu insister que "lors de ce genre de situation de conflit et d’insurrection, la priorité pour l’Etat est de rétablir l’ordre public. La France a la responsabilité d’assurer la sécurité de tous ses citoyens, quel que soit le territoire dans lequel ils vivent et encore plus à Mayotte, malgré un contexte particulier dû notamment à la difficulté de contrôle des eaux territoriales, et la question de l’immigration est l’une des failles", selon la conseillère technique Outremer du chef de l’Etat.
Et pour elle, "ce qui s’applique à Mayotte s’applique aussi en Métropole", lorsqu’elle évoque ce qui s’est passé à Marseille il y a deux semaines où des Mahorais ont été pris à partie par des Comoriens alors qu’ils se rendaient dans une radio pour s’exprimer sur les récents évènements. Pour la présidente de la Famm, "ces évènements démontrent qu’à Mayotte ou en France, nos libertés fondamentales sont opprimées, nos libertés de penser, de circuler, de s’exprimer… avec des intimidations, des menaces, etc.".
L’Elysée a tenu à rassurer nos compatriotes que le préfet maritime de Marseille a été saisi afin d’assurer la sécurité de tous les citoyens, tout en appelant à l’apaisement entre les communautés et à la reprise des dialogues entre les différents partenaires, car il est sans aucune mesure incontestable que seuls le dialogue et le respect mutuel garantiront une paix durable dans l’archipel.

Les associations mahoraises se félicitent en tout cas de la "réussite" de cette mission. Elles souhaitent désormais être associées, dans l’unité, aux côtés des élus et parlementaires locaux, à ce long combat qui n’est tout autre que celui de la défense des intérêts vitaux de Mayotte et des Mahorais.

R.T Charaffoudine Mohamed

UNE Mayotte Hebdo N°375 – Vendredi 04 avril 2008

UNE Mayotte Hebdo N°375 - Vendredi 04 avril 2008

"Après Anjouan, Mayotte"

Comment stopper l'engrenage

 > Politique – interview du président du Conseil Général Ahamed Attoumani Douchina
 > Statut de Mayotte -Jégo, Alliot-Marie, ils confirment la départementalisation
 > Environnement – le parc marin, un véritable enjeu

 

04/04/2008 – Pêche – Trois jeunes Mahorais montrent l’exemple

La Copemay s'est battue bec et ongles auprès des instances gouvernementales afin d'obtenir le financement d'un tel navire qui représente le début d'une pêche professionnelle d'envergure dans l'île. Résultat : un palangrier de 8,85 mètres de long, 3,40 mètres de large, d'une capacité de 1.000 litres de combustible avec 3 mètres cubes de cale à poissons, pouvant aller à 24 nœuds de vitesse, a débarqué à Longoni ce mardi, sous les yeux enthousiastes des trois jeunes Mahorais et de Pierre Baubet, le directeur de la Copemay et instigateur de ce projet devenu réalité cette semaine. Ce dernier, en poste depuis le début des années 80, obtient enfin les financements adéquats pour faire décoller une activité naturelle de Mayotte : la pêche aux pélagiques.
Twaro signifie espadon en shimaore. Le nom résume à lui seul les objectifs de l'exploitation : cibler les poissons de passage qui circulent dans les courants des 50 miles nautiques : thons et espadons. Pour l'instant, un seul bateau exploite cette filière, le Ménakély. "Le Twaro est très rapide, c'est l'un des plus rapides construits en France. Cette vitesse doit améliorer la qualité du poisson vendu grâce à un temps passé dans les cales très court. Il s'agit d'aller sur le banc, de prélever et de ramener en moins d'une journée. Il y a à Mayotte un marché de qualité du poisson qui est rendu rentable pour le pêcheur grâce au prix d'achat de la Copemay qui sont parmi les meilleurs du monde", affirme Jacques Albin.
Ce monsieur de la pêche palangrière de la région a été choisi par les chantiers Béneteau pour venir former les trois jeunes Mahorais à l'entretien du navire et à son exploitation optimale. Jacques Albin, dorénavant basé à Maurice, a détenu pendant longtemps le haut du pavé à la Réunion, même Thalassa, l'émission de référence de France 3, l'a portraitisé.
 

La rentabilité d'une telle pêche et de ce bateau sont déjà assurées

"La rentabilité d'une telle pêche et de ce bateau sont déjà assurées. Le travail de marin pêcheur à Mayotte, par rapport à la mer qui est rarement grosse, est moins dur qu'à la Réunion et il y a plus à gagner. A la Réunion, on nous achète le kilo d'espadon à trois euros contre cinq euros ici. Je remarque que le kilo de filet de thon envoyé sous vide à Rungis, à Paris, est acheté onze euros pour être vendu 4 euros à 5 kilomètres de Paris. Ce n'est pas normal. A Mayotte, grâce à la coopérative, nous bénéficions d'un climat optimal pour réussir", observe le consultant de Béneteau.
Irchad et Kamal sont prêts à relever le défi. Les deux hommes ont travaillé à la Réunion sur ce type de bateau après avoir obtenu leur diplôme à l'Ecole d'apprentissage maritime de Dzaoudzi. "Nous sortirons 3 à 4 fois par semaine. S'il faut rester la nuit nous le ferons. Nous sommes motivés. Perso, je ne me voyais pas faire le taxi entre Petite Terre et Grande Terre. La pêche c'est mon rêve depuis mon enfance à Hagnoundrou. Je suis né dans l'eau mais je ne voulais pas mettre ma vie ne jeu en partant sur un kwassa à 300 miles. C'est une chance que nous donne la Copemay, il est hors de question de la laisser passer", remarque Kamal.
Dix autres bateaux du même type sont programmés dans les chantiers Béneteau, il faudra juste trouver des gens aussi motivés que ces jeunes Mahorais du sud.

Gérôme Guitteau


Qui finance ?

Le ministère de l'Outremer (Mom) ne s'est pas contenté de financer l'outil, il a aussi déboursé 40.000 euros dans la formation des mécaniciens qui se chargeront de l'entretien des palangriers et aussi dans l'achat d'intrants indispensables aux pêcheurs comme les appâts.
De son côté, le chantier Bénéteau, à travers sa fondation, a financé à hauteur de 22.000 euros la formation des équipes au métier de la long line. Il est regrettable que les banques ne soutiennent pas cette filière.

Les quatre piliers de la future pêche mahoraise

Développement du long-line avec une flotte d'une dizaine de navires
Repousser les thoniers senneurs au-delà des 50 milles nautiques
Créer des structures portuaires
Développer la pêche artisanale des petites barques grâce au quadrillage de l'île par des dispositifs de concentration de poissons (DCP).

Sur ce dernier point les avis sont partagés. Une étude d'évaluation de la biomasse sous les DCP va être menée en 2008 par l'IRD (Institut de recherche pour le développement, ancien Orstom) et l'Ifremer (Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer) à Mayotte pour l'ensemble de l'océan indien.

Pour les services étatiques la question n'est donc pas urgente, même si les anciens DCP n'existent plus faute d'entretien. Ces DCP, s'ils étaient aux environs des 5 milles nautiques, deviendraient des zones de pêches prioritaires pour les barques. Dans tout l'Outremer, l'efficacité des DCP est avérée. "Elle est une réalité économique pour des pêcheurs qui ne peuvent plus s'en passer", assure le syndicat professionnel maritime des patrons pêcheurs de Mayotte.

Ils ne seraient plus obligés de prendre des risques inconsidérés en direction de la Zélée ou des Glorieuses. A ce propos, six barques construites à Madagascar et importées par Carène moteurs services ont été commandées par des pêcheurs locaux. Leurs configurations ouvrent des campagnes d'une journée, justement dans cette zone plutôt sûre entre 5 et 20 milles nautiques, pour un prix avoisinant les 50.000 euros.

04/04/2008 – Visite ministérielle – Un chèque de 300 millions d’euros pour Mayotte

Pour une fois, Mayotte a été inscrite en première page de l’agenda d’un ministre en charge de l’Outremer. A peine installé dans ses fonctions, le nouveau locataire de la rue Oudinot (siège du secrétariat d’Etat à l’Outremer) est venu se confronter aux réalités locales de la Réunion et de Mayotte, au cours d’une visite de plusieurs jours dans l’océan indien.
Pour ne pas pénaliser le développement de notre île, Yves Jego est venu signer le Contrat de projet (2008-2014) laissé en trombe par son prédécesseur en janvier dernier, officiellement pour des raisons de calendrier trop chargé. Ahmed Attoumani Douchina, le président du conseil général de Mayotte élu le jeudi 20 mars 2008, n’a pas caché sa satisfaction de voir ce Contrat de projet devenir effectif. "Cette signature est parallèle avec le dynamisme qui est lancée en vue de construire la départementalisation de notre île", a-t-il souligné au nouveau ministre, avant de lui faire remarquer que ce Contrat de projet est à ses yeux une occasion de définir et construire un mode de développement économique, social et humain à Mayotte. "Je puis vous souligner que j’ai pour ce territoire un projet politique et économique fondé sur la capacité du conseil général de Mayotte qui concentre depuis le 1er janvier 2008, des responsabilités départementales et régionales, à offrir aux Mahorais des outils de leur propre développement et répondre à leurs besoins essentiels".
Le nouveau chef de l’exécutif à Mayotte a indiqué au ministre que le conseil général qui se réunira le 18 avril prochain adoptera la résolution demandant au gouvernement de faire passer l’île du statut de Collectivité départementale à celui de département et région d’Outremer, tel que prévu dans l’article 73 de la Constitution française.
 
 

Ne rien cacher aux Mahorais sur les avantages et les inconvénients de la départementalisation

L’extension du port de Longoni, la réalisation de la piste longue de l’aéroport de Pamandzi, les constructions scolaires ainsi que la mise en place urgente d’un plan de rattrapage social sont les premiers sujets qu’Ahmed Attoumani Douchina a exposé à Yves Jego, en émettant le souhait que les crédits de l’Etat ne soient pas versés avec parcimonie.
Décontracté, le ministre est revenu sur chacun de ces dossiers et en a même évoqué d’autres dans une allocution improvisée, qui a démontré sa parfaite connaissance des questions mahoraises. Yves Jego a maintes fois déclaré croire au potentiel de développement de notre île et rappelé que la première phase (études) de la piste longue avance à bon rythme que d’ici 8 ans Mayotte disposera d’un aéroport international, source importante de développement du secteur touristique, d'emplois et de formations des jeunes hors de l’île.
Outre la poursuite des travaux du port de Longoni, le ministre a abordé la question de la relance du Padd nécessaire pour le développement de l’agriculture et du tourisme. Il a également parlé d’un plan d’action global de lutte contre l’immigration clandestine, de reconduite aux frontières et de co-développement avec les îles voisines. A l’instar de ses deux prédécesseurs à la rue Oudinot, Christian Estrosi et François Baroin, Yves Jego s’est déclaré disposé à ouvrir le débat sur le droit du sol à Mayotte et à définir avec les Mahorais la nature des mesures à mettre en place et les résultats que l’on peut en espérer.

S’agissant de l’évolution statutaire du territoire, il a indiqué que la cession du CG le 18 avril 2008 va ouvrir une période de plusieurs mois pendant laquelle il faudra consulter les Mahorais, la population. "Il faudra tout dire à la population, les avantages et les inconvénients du statut de Dom et les bouleversements qui vont s’opérer dans la vie de tous les jours. Il faudra lancer une vraie campagne d’information en direction des Mahorais, ne rien leur cacher pour leur permettre de prendre leur décision en toute connaissance de cause le moment venu."

 

La fermeté contre les fauteurs de troubles et des moyens supplémentaires pour lutter contre l’immigration clandestine

Le ministre a rappelé que le Président de la République Nicolas Sarkozy est attaché au principe d’une départementalisation progressive de Mayotte, avec une feuille de route claire et un calendrier d’actions négocié afin que l’on sache dans quel sens on va aller et éviter de nourrir des illusions auprès de la population. Par la voie d’Yves Jego, Paris rassure les Mahorais que leur île restera française, sans ambiguïté, sous le statut de Collectivité départementale, dans le cas où l’option du Dom n’aura pas été choisie par une majorité d’électeurs lors de la prochaine consultation référendaire.

Dans l'optique d'une départementalisation, une loi programme particulière à Mayotte sera soumise au vote du Parlement pour apporter à notre île les outils de son développement, en s’appuyant notamment sur ses nombreux atouts. Le nouveau secrétaire d’Etat, qui se veut un ambassadeur de Mayotte à Paris, s’est engagé à faire de son mieux pour faire avancer les choses, précisant qu’on ira vite, très vite ou ralentira lorsque cela sera possible, dans une discussion ouverte en permanence.
Revenant sur les événements violents de la veille à Mamoudzou et en Petite Terre, Yves Jego a promis une application ferme de la loi, une rapidité de l’action de la justice. Il a invité les magistrats à avoir la main lourde dans les sanctions qu’ils auront à prononcer "pour que ceux qui viennent s’adonner à des actions répréhensibles sachent que cela ne sera pas toléré…". Il S’est engagé à faire débloquer des moyens supplémentaires pour assurer la sécurité des frontières maritimes de Mayotte, le troisième radar sera opérationnel cet été et deux nouveaux bateaux seront acheminés dans l’île au cours des prochaines semaines.

Saïd Issouf

UNE Mayotte Hebdo N°374 – Vendredi 28 mars 2008

UNE Mayotte Hebdo N°374 - Vendredi 28 mars 2008

Emeutes d'immigrés

Ils embrasent Mayotte

 > Environnement – 17 millions d'euros pour le reboisement et les déchets
 > Rugby – des demies finales palpitantes
 > Région – l'armée prend le contrôle d'Anjouan

28/03/2008 – La fuite de Mohamed Bacar embrase Mayotte

Place du marché de Mamoudzou, 7h00 du matin. De nombreux ressortissants anjouanais soutenus par quelques grands comoriens prennent possession de la gare maritime de Mamoudzou, arborant des pancartes sur lesquelles on pouvait lire : "Nous voulons son retour aux Comores" (Mohamed Bacar, ndlr) ou en alors "Nous luttons contre la corruption, le racisme et l’esprit satanique de France".

Objectif principal : se rendre en Petite Terre à la préfecture pour demander au représentant de l’Etat le transfert de Mohamed Bacar à Moroni. Devant cette cacophonie, la direction du service des transports maritimes (STM) prend la sage décision de suspendre la rotation des barges afin d’éviter tout incident, empêchant ainsi un certain nombre de travailleurs de se rendre sur leur lieu de travail.

La foule s’amasse de plus en plus et les esprits s’échauffent. Animés d’une réelle volonté de nuire, certains manifestants commencent par bloquer la circulation du rond-point de la place du marché à une heure où la circulation est dense. Aucune intervention des forces de l’ordre n’est perceptible à cet instant. Certains Mahorais s’énervent, déplorant l’inertie des autorités de l’Etat. "Quand il s’agit d’une manifestation de Mahorais, les gardes mobiles interviennent immédiatement", lâche un jeune chef d’entreprise. "Il faut que les autorités françaises arrêtent de jouer un double jeu", martèle une jeune femme excédée de voir la capitale livrée aux "voyous".

Vers 9h00 du matin, la situation prend une autre tournure. Un collègue journaliste de RFO qui cherche à recueillir des informations est pris à partie par les manifestants. Son péché : avoir simplement essayé de faire son métier. Il devra son salut à l’intervention des clients d’un bar restaurant de la place. Le ton monte, les insultes racistes et xénophobes fusent, les poubelles s’envolent. Les voitures garées aux abords de la rocade de Mamoudzou sont saccagées, les pare-brises détruits. La circulation reste coupée. Une fourgonnette de la gendarmerie qui essaye de se frayer un passage sur le rond-point a eu les vitres littéralement explosées à coups de pierres. Pour éviter tout saccage, les commerces et les bureaux la place baissent leurs rideaux vers 9h30.

 

Sale temps pour les Mzungus

La situation vire à cet instant au cauchemar. Les assaillants déterminés à en découdre s’en prennent à tous les Mzungus qui circulent sur Mamoudzou et ses alentours. Toujours aucune intervention des forces de l’ordre à l’horizon. La capitale est sous le contrôle des clandestins. Un jeune métropolitain est passé à tabac à la rocade de Mamoudzou. Son scooter est traîné jusqu’à la devanture de la BFC avant d’être brûlé. Une jeune femme qui aborde la descente du Caribou en moto est également attaquée sans comprendre pourquoi. Elle se fait elle aussi lyncher à son tour. Sa moto est écrasée à coups de galets avant d’être brûlée. Les sapeurs pompiers viendront à sa rescousse.

Des manifestants armés de barres de fer et de cailloux crient "A mort les Mzungus !", "Les Mzungus dehors !". C’est la panique totale dans la capitale. La foule qui s’est amassée aux alentours crie au scandale. "Le préfet doit prendre ses responsabilités", clame un jeune cadre du conseil général. "Si personne ne réagit, la situation risque d’avoir des conséquences dramatiques", renchérit un autre.

Vers 10h00, les forces de l’ordre décident d’intervenir. Trois fourgonnettes de la police font leur apparition sur la place du marché. Les bombes lacrymogènes commencent à pleuvoir comme une pluie torrentielle en période de Kashi kasi. La foule se disperse. Les gens courent dans tous les sens. Certains, plus fragiles, tombent évanouis. En quelques minutes à peine, le rond-point de Mamoudzou se vide, laissant la place à l'épaisse fumée noire des deux motos carbonisées.

Les policiers procèdent à une dizaine d’interpellations. Des poches de résistance se créent de parts et d’autres. Le rond-point de Kawéni ainsi que celui du Baobab sont bloqués. Un militaire du GSMA de Combani à bord d’une fourgonnette s’est fait débarquer manu militari de son véhicule avant d’être molesté devant la caserne des sapeurs pompiers. Sa voiture sera ensuite renversée au milieu de la route et brûlée. Les forces de l’ordre en sous-effectif sont rapidement débordées par les événements.

 

"Après les Mzungus on s’en prendra aux Mahorais"

La psychose règne dans zone industrielle de Kawéni, poumon économique de l’île et fief des clandestins. Les entreprises ferment boutique et renvoient leur personnel à la maison, quand c'est possible, mais souvent le personnel se terre dans les magasins, les bureaux. La circulation devient quasiment impossible. L’économie de l’île est paralysée à cause d’un groupe d’individus sans foi ni loi dont la seule motivation est de nuire aux intérêts de l’île.

Un groupe de jeunes passablement éméchés se dirige vers la station-service de Kawéni pour y mettre le feu. Heureusement, les forces de l’ordre informées à temps arrivent sur place et mettent en place un cordon de sécurité pour éviter la catastrophe. Au même moment, de l’autre côté, au carrefour de M’tsapéré, un autre métropolitain a été contraint de se mettre à genoux avant de vider ses poches. "Après les Mzungus on s’en prendra aux Mahorais", clament les manifestants.
Un jeune mahorais témoin de la scène monte au créneau, suivi par quelques copains. La tension monte, les coups partent dans tous les sens, pendant que dans la rue du stade une autre voiture, avec toujours un métropolitain, reste bloquée au milieu le pare-brise en éclat.

Les échauffourées ont continué sur Kawéni toute l’après-midi de jeudi opposant les gardes mobiles et les jeunes de Kawéni, bloquant ainsi la circulation sur la route nationale.
Positionnés devant la caserne des pompiers, les forces de l’ordre ont arrosé les hauteurs de Kawéni à coups de bombes lacrymogènes pendant que plusieurs métropolitains restaient cloîtrés, certains chez eux, d’autres chez des amis, craignant de circuler sur un territoire qui est le leur.

Soldat

Mars 2008 – Emeutes – La fuite de Mohamed Bacar embrase Mayotte

Ces manifestants exigeaient l’extradition du dirigent anjouanais vers Moroni pour qu’il puisse répondre de ses actes devant la justice comorienne. Le trafic aérien avec l’extérieur a été interrompu toute la journée, de même que les déplacements maritimes entre Petite et Grande Terre.
La question de l’immigration clandestine incontrôlée en provenance des Comores voisines prend une dimension nouvelle cette semaine. Mayotte s’est réveillée ce jeudi matin avec un pied dans le bourbier militaro-politique intra comorien, conséquence directe de la fuite sur son sol du dirigeant déchu de l’île autonome d’Anjouan, le colonel Mohamed Bacar et plusieurs membres de sa garde rapprochée. Une fuite très prévisible qui place la France en porte à faux vis-à-vis de son ancienne colonie, qui la soupçonne depuis plusieurs mois de jouer un double jeu dans cette affaire.
Depuis l’affaire de l’hélicoptère tombé en pleine nuit au dessus du territoire anjouanais la semaine dernière, une tension palpable se lisait dans la très nombreuse communauté des immigrés comoriens à Mayotte, qu’ils soient réguliers ou irréguliers. Ils redoutaient en effet une exfiltration du chef rebelle que l’on disait irretrouvable malgré les recherches entamées par les troupes conjointes de l’Union africaine (Tanzaniens et Soudanais) et des Comores parties le déloger dans son île.
Certains immigrés clandestins n’hésitaient pas à veiller sur certaines parties du littoral mahorais, à l’affût du moindre indice pouvant étayer cette thèse. Ce qui est certain – confirmé par le préfet de Mayotte au cours d'une conférence de presse ce jeudi après-midi à Dzaoudzi – c'est que Mohamed Bacar serait arrivé dans le sud de Mayotte mercredi aux environs de 18 heures, à bord d'une embarcation de type kwassa transportant au total 23 personnes : des membres de sa garde rapprochée, un de ses frères médecin militaire de son état, une sœur et d'autres personnalités dont la préfecture n'a pas souhaité divulguer l'identité.

 

L'aéroport fermé, les barges interrompues

Un des commissaires de police comoriens présent à l'aéroport a lui confirmé la présence du ministre des Finances nommé Mahamoud Duclin. Toutes ces personnes se seraient rendues dès leur arrivée à Mzoizia, au domicile de Daniel Bacar, son jeune frère de nationalité française (celui-là même qui avait défrayé la chronique en 2006 lorsque les Chatouilleuses ont voulu le déloger de la CSSM où il travaille), résidant dans cette localité.
Le colonel rebelle aurait spontanément déclaré sa présence à la brigade locale de gendarmerie qui en a référé à sa hiérarchie. Le colonel de la gendarmerie et le directeur de cabinet du préfet se seraient alors rendus sur place pour constater le fait. La diaspora anjouanaise à Mayotte a très vite eu vent de cette présence encombrante, et un attroupement s'est rapidement formé devant le domicile de Daniel Bacar, faisant craindre pour la sécurité de ses visiteurs.
Les autorités ont ensuite décidé de l'exfiltrer par bateau vers Pamandzi, via la plage de Ngouja, pour éviter les nombreux barrages érigés sur les routes menant à Mzoizia. Il aura juste fallu que Radio Mayotte annonce la présence du colonel Bacar tôt jeudi matin, pour qu’une foule immense se jette dans les rues de la capitale pour manifester sa colère, avec la ferme intention de se rendre en Petite Terre pour essayer d’empêcher son transport annoncé – par avion miliaire – vers l’île de la Réunion.
Devant la tension déjà perceptible et la marée humaine qui bloquait le quai de Mamoudzou, l’équipage de la barge de 7h25 a été contraint de rebrousser chemin vers Dzaoudzi pour ne pas mettre en danger la vie des passagers. Le préfet de Mayotte, Vincent Bouvier, a alors pris la décision de faire interrompre la circulation maritime entre les deux îles jusqu’au départ effectif de Mayotte du chef rebelle. Cette décision a eu pour effet, de perturber la circulation sur l’axe Dzaoudzi-Pamandzi, mêlant manifestants comoriens et travailleurs résidant en Petite Terre qui ne trouvaient pas de moyens de locomotion pour retourner chez eux.

"Rendez-nous Mohamed Bacar, il appartient aux Comoriens qui doivent le juger pour ses crimes !"

Un attroupement s’était déjà formé devant la caserne de gendarmerie de Pamandzi, où des dizaines d’hommes et de femmes originaires d’Anjouan criaient de tous côtés, demandant que Mohamed Bacar leur soit livré pour répondre des actes de violence, de tortures et de viol qu’il aurait ordonné à ses troupes durant cette crise. Les manifestants ont rapidement fait mouvement vers l’aéroport de Pamandzi, où les forces de l’ordre les attendaient de pied ferme, bloquant les différentes issues de l’aérodrome. Des embarcations de la police et de la gendarmerie étaient visibles sur le lagon, à hauteur de la piste d’aviation.
Les manifestants, dont les rangs ont grossi progressivement, ont installé des barrages sur la chaussée pour empêcher le circulation automobile et gêner dans le même temps l’arrivée d’éventuels renforts de gendarmerie. Au bout de la route nationale, au portail permettant d’accéder à une partie du tarmac de l’aéroport, un face-à-face a longtemps opposé immigrés clandestins et gendarmes.
Aux jets de pierres des premiers, les deuxièmes répondaient par l’envoi de grenades lacrymogènes, sous un soleil de plomb. "Mohamed Bacar assassin !", "Mohamed Bacar criminel !", "La France complice des ennemis des Comores", scandait la foule. Des petits caïds ont constitué des cagoules de fortune à l’aide de leurs vêtements pour ne pas être indisposés par les fumigènes et défiaient les gendarmes de manière sporadique, avec des galets qu’ils jetaient dans l’intension de causer des dégâts à leurs véhicules.
Pendant ce temps, la violence est montée de plusieurs degrés chez d’autres manifestants dans les rues de la capitale – visiblement contrariés par le fait de n’avoir pu concrétiser leur projet de se rendre à l’aéroport de Pamandzi – où ils ont mis le feu à des véhicules et s’en sont pris à des citoyens innocents.

 

L'ambassade de France à Moroni prise d'assaut

Des sources policières ont confirmé l’importance de ces dégradations commises sur des véhicules, des bâtiments, obligeant les forces de l’ordre à faire usage de la force pour mettre un terme à ces actions. Comme dans la capitale de l’Union des Comores, Moroni, où des exactions auraient été commises, les anti-Mohamed Bacar s’en sont pris aux intérêts de la communauté métropolitaine. On signale notamment l’incendie des locaux de la Caisse Française de Développement (AFD) et une tentative d’attaque des bâtiments de l’ambassade de France qu’un cordon de militaires comoriens aurait réussi à protéger de la colère d’une foule haineuse. Un regroupement de ressortissants français est également annoncé en vue d’un éventuel rapatriement dans l’Hexagone si cela s’avère nécessaire.
A Pamandzi, la gendarmerie a du faire face à un deuxième front de manifestants vers 11h30, aux abords du lycée, sur le boulevard du général de Gaulle. D’apparence pacifique, cette foule qui s’était massée aux abords de la voie d’accès aux installations aéroportuaires avait cherché, elle aussi, à faire usages de cailloux contre les gardes mobiles, interdisant tout mouvement vers les bâtiments dont celui abritant le chef rebelle anjouanais et ses proches.
Le commissaire de police Hanifi, un des trois officiels comoriens dépêchés dans notre île depuis décembre 2007 pour veiller à ce qu’aucune personnalité anjouanaise recherchée par l’Union africaine ne contourne l’embargo imposé contre Anjouan, a déclaré à la presse que le sort du colonel Mohamed Bacar se jouait à Paris, en haut lieu. L’Union des Comores tentait de négocier avec la France une éventuelle extradition des rebelles vers Moroni.

"La France est un Etat de droit"

Un suspens levé par le préfet au cours de sa conférence de presse : "nous ne méconnaissons pas les lois comoriennes et les accords passés l'année dernière (à Dzaoudzi) sous l'égide de l'Union africaine, mais M. Bacar a demandé l'asile politique. La France est un Etat de droit, nous nous devons d'examiner cette demande. La Constitution française nous oblige à nous pencher sur cette question."
Poursuivant la chronologie des évènements de la journée, Vincent Bouvier a annoncé l'arrivée de renforts par avion : 2 pelotons de gendarmes (46 militaires), 1 compagnie d'intervention de la sécurité publique (30 hommes) et 15 fonctionnaires du GIPN. Les avions sont bien arrivés ce jeudi en fin d'après-midi, transportant également du matériel. Il était 18h40 lorsque Mohamed Bacar et une partie de son entourage ont embarqué à bord du premier appareil militaire arrivé sur l'aéroport à destination de l'île de la Réunion.
Cette décision de transférer l'ancien chef rebelle anjouanais dans le département voisin est expliquée par les autorités préfectorales comme une mesure destinée à faire baisser la tension et à ramener le calme dans l'île. Le représentant du gouvernement à Mayotte s'est voulu rassurant à l'égard de la population, notamment la minorité de M'zoungous qui a été la cible de brutalités, de vols et de prise d'otage de la part de manifestants anjouanais dans la ville de Mamoudzou et à Kawéni. Il a annoncé l'arrestation d'une vingtaine de personnes, dont quelques unes en situation régulière dans l'île et promis des sanctions sévères. "La loi prévoit leur expulsion immédiate."
"Tout sera mis en œuvre pour ramener le calme dans l'île dans les projets jours", a-t-il ajouté. Malgré ce climat insurrectionnel, la première visite à Mayotte du nouveau secrétaire d'Etat à l'Outremer est maintenue pour aujourd'hui vendredi.

Saïd Issouf

 


La fuite de Mohamed Bacar embrase Mayotte
Chronique d’une manifestation aux relents xénophobes

L’information faisant état de l’arrivée de Mohamed Bacar sur le territoire de Mayotte dans la nuit de mercredi a provoqué l’ire de nombreux ressortissants comoriens. Ces derniers ont commencé à se rassembler vers 1 heure du matin dans de nombreux quartiers de la commune chef-lieu. Ils se sont ensuite rendus aux abords de la gare maritime de Mamoudzou tôt dans la matinée de jeudi pour exiger l’extradition immédiate du président de l’île rebelle d’Anjouan vers Moroni.

Place du marché de Mamoudzou, 7h00 du matin. De nombreux ressortissants anjouanais soutenus par quelques grands comoriens prennent possession de la gare maritime de Mamoudzou, arborant des pancartes sur lesquelles on pouvait lire : "Nous voulons son retour aux Comores" (Mohamed Bacar, ndlr) ou en alors "Nous luttons contre la corruption, le racisme et l’esprit satanique de France".
Objectif principal : se rendre en Petite Terre à la préfecture pour demander au représentant de l’Etat le transfert de Mohamed Bacar à Moroni. Devant cette cacophonie, la direction du service des transports maritimes (STM) prend la sage décision de suspendre la rotation des barges afin d’éviter tout incident, empêchant ainsi un certain nombre de travailleurs de se rendre sur leur lieu de travail.
La foule s’amasse de plus en plus et les esprits s’échauffent. Animés d’une réelle volonté de nuire, certains manifestants commencent par bloquer la circulation du rond-point de la place du marché à une heure où la circulation est dense. Aucune intervention des forces de l’ordre n’est perceptible à cet instant. Certains Mahorais s’énervent, déplorant l’inertie des autorités de l’Etat. "Quand il s’agit d’une manifestation de Mahorais, les gardes mobiles interviennent immédiatement", lâche un jeune chef d’entreprise. "Il faut que les autorités françaises arrêtent de jouer un double jeu", martèle une jeune femme excédée de voir la capitale livrée aux "voyous".
Vers 9h00 du matin, la situation prend une autre tournure. Un collègue journaliste de RFO qui cherche à recueillir des informations est pris à partie par les manifestants. Son péché : avoir simplement essayé de faire son métier. Il devra son salut à l’intervention des clients d’un bar restaurant de la place. Le ton monte, les insultes racistes et xénophobes fusent, les poubelles s’envolent. Les voitures garées aux abords de la rocade de Mamoudzou sont saccagées, les pare-brises détruits. La circulation reste coupée. Une fourgonnette de la gendarmerie qui essaye de se frayer un passage sur le rond-point a eu les vitres littéralement explosées à coups de pierres. Pour éviter tout saccage, les commerces et les bureaux la place baissent leurs rideaux vers 9h30.

 

Sale temps pour les Mzungus

La situation vire à cet instant au cauchemar. Les assaillants déterminés à en découdre s’en prennent à tous les Mzungus qui circulent sur Mamoudzou et ses alentours. Toujours aucune intervention des forces de l’ordre à l’horizon. La capitale est sous le contrôle des clandestins. Un jeune métropolitain est passé à tabac à la rocade de Mamoudzou. Son scooter est traîné jusqu’à la devanture de la BFC avant d’être brûlé. Une jeune femme qui aborde la descente du Caribou en moto est également attaquée sans comprendre pourquoi. Elle se fait elle aussi lyncher à son tour. Sa moto est écrasée à coups de galets avant d’être brûlée. Les sapeurs pompiers viendront à sa rescousse.
Des manifestants armés de barres de fer et de cailloux crient "A mort les Mzungus !", "Les Mzungus dehors !". C’est la panique totale dans la capitale. La foule qui s’est amassée aux alentours crie au scandale. "Le préfet doit prendre ses responsabilités", clame un jeune cadre du conseil général. "Si personne ne réagit, la situation risque d’avoir des conséquences dramatiques", renchérit un autre.
Vers 10h00, les forces de l’ordre décident d’intervenir. Trois fourgonnettes de la police font leur apparition sur la place du marché. Les bombes lacrymogènes commencent à pleuvoir comme une pluie torrentielle en période de Kashi kasi. La foule se disperse. Les gens courent dans tous les sens. Certains, plus fragiles, tombent évanouis. En quelques minutes à peine, le rond-point de Mamoudzou se vide, laissant la place à l'épaisse fumée noire des deux motos carbonisées.
Les policiers procèdent à une dizaine d’interpellations. Des poches de résistance se créent de parts et d’autres. Le rond-point de Kawéni ainsi que celui du Baobab sont bloqués. Un militaire du GSMA de Combani à bord d’une fourgonnette s’est fait débarquer manu militari de son véhicule avant d’être molesté devant la caserne des sapeurs pompiers. Sa voiture sera ensuite renversée au milieu de la route et brûlée. Les forces de l’ordre en sous-effectif sont rapidement débordées par les événements.

"Après les Mzungus on s’en prendra aux Mahorais"

La psychose règne dans zone industrielle de Kawéni, poumon économique de l’île et fief des clandestins. Les entreprises ferment boutique et renvoient leur personnel à la maison, quand c'est possible, mais souvent le personnel se terre dans les magasins, les bureaux. La circulation devient quasiment impossible. L’économie de l’île est paralysée à cause d’un groupe d’individus sans foi ni loi dont la seule motivation est de nuire aux intérêts de l’île.
Un groupe de jeunes passablement éméchés se dirige vers la station-service de Kawéni pour y mettre le feu. Heureusement, les forces de l’ordre informées à temps arrivent sur place et mettent en place un cordon de sécurité pour éviter la catastrophe. Au même moment, de l’autre côté, au carrefour de M’tsapéré, un autre métropolitain a été contraint de se mettre à genoux avant de vider ses poches. "Après les Mzungus on s’en prendra aux Mahorais", clament les manifestants.
Un jeune mahorais témoin de la scène monte au créneau, suivi par quelques copains. La tension monte, les coups partent dans tous les sens, pendant que dans la rue du stade une autre voiture, avec toujours un métropolitain, reste bloquée au milieu le pare-brise en éclat.
Les échauffourées ont continué sur Kawéni toute l’après-midi de jeudi opposant les gardes mobiles et les jeunes de Kawéni, bloquant ainsi la circulation sur la route nationale.
Positionnés devant la caserne des pompiers, les forces de l’ordre ont arrosé les hauteurs de Kawéni à coups de bombes lacrymogènes pendant que plusieurs métropolitains restaient cloîtrés, certains chez eux, d’autres chez des amis, craignant de circuler sur un territoire qui est le leur.

Soldat
 

Communiqué du président du conseil général, Ahamed Attoumani Douchina

Au regard des événements très graves survenus ce matin sur Petite Terre et dans la commune de Mamoudzou, j'ai décidé en urgence de réunir cet après-midi l'ensemble des conseillers généraux disponibles. Après un échange d'information sur les graves incidents de ce jour, unanimement nous condamnons de tels agissements qui déshonorent leurs auteurs et portent atteinte à la paix sociale de notre île. La République ne doit pas tolérer que des individus attisent les tensions entre les communautés et tentent de déstabiliser Mayotte.
Par ailleurs, l'administration du CG a fait en sorte de protéger ses biens, ses agents et les usagers notamment du transport maritime.
Enfin, il appartient aux services de l'Etat de rétablir le plus rapidement possible l'ordre public et la protection des biens et des personnes afin que la stabilité et la paix publiques règnent sur notre île.


"Je n'ai pas vu un seul policier pendant tout ce temps"

Nadia* travaille chez un opérateur de téléphonie mobile à proximité du rond-point de Kawéni. Pendant toute la journée de ce jeudi, elle a pu voir des Anjouanais en colère s'en prendre aux Wazungu qui s'aventuraient aux abords de ce passage stratégique, incontournable, vers le nord de l'île. "C'était la plupart du temps des gamins armés de bâtons. Dès qu'un Muzungu passait, ils essayaient de le faire tomber en lui lançant des projectiles s'il était à deux roues ou de casser son véhicule s'il était en voiture. Ils s'en sont pris à une dame qui conduisait sa voiture, ils l'ont faite sortir de son véhicule, et ont commencé à le casser. Heureusement des passants l'ont sauvée en la mettant à l'écart. Du côté de la Poste, ça été la même chose, ils ont fait descendre un Muzungu de sa voiture et l'ont frappé, les pompiers sont intervenus. Le plus étonnant, c'est que depuis ce matin, sauf une fois, je n'ai pas vu un seul policier ni gendarme. Tout le monde a fermé les rideaux et tout le monde a peur."


Tribune libre

La présence physique de Monsieur Mohamed Bacar, ancien dictateur de l’île autonome d’Anjouan, sur le sol de Mayotte a entraîné des réactions de violence condamnables de la part des ressortissants comoriens.
Si les accusations de violation des droits de l’homme portées à son encontre sont fondées, Mohamed Bacar ne doit pas être le bienvenu sur le sol français. Le devoir de la France est de le remettre à une justice équitable pour qu’il réponde de ses actes.
Pour autant les débordements auxquels se livrent certains ressortissants comoriens à Mayotte en ce moment sont inacceptables : je les condamne avec la plus grande fermeté.

Ibrahim Aboubacar,
conseiller général
 

Témoignages
Noémie, d'origine anjouanaise de la commune de Ouani, fief de Mohammed Bacar.

Je travaille sur les hauteurs de Kawéni. J'ai pu voir un gendarme (ndlr, un homme du GSMA) se faire agresser. Il a été sauvé par les pompiers. Une voiture a aussi brûlé, le conducteur a reçu un pavé sur la tête. Les magasins de la zone ont été caillassés. J'ai vu une pierre me passer à deux centimètres de mon visage. Je suis d'accord avec les manifestations qui se déroulent à l'aéroport, même si elles devraient être mieux organisées. Nous devons revendiquer notre droit à voir Mohamed Bacar traduit devant la justice. J'ai des membres de ma famille qui ont disparu. Nous devons obtenir des réponses. Mais nous pouvons manifester avec des banderoles. Casser ne sert à rien. Pourquoi s'en prendre aux Blancs, c'est une affaire entre deux gouvernements et non pas entre des Comoriens et des Blancs. L'amalgame est nauséabond.
De toutes manières, il s'agit de bandes de jeunes qui ne représentent pas la communauté anjouanaise. Ces bandes récupèrent le mouvement. Ils ne comprennent même pas la situation. Si la France ne livre pas Bacar, il existe un risque d'aggravation.

 


Les Comoriens mettent la pression sur la France

L'annonce de l'arrivée, mercredi à 15h à Mayotte du président déchu d'Anjouan Mohamed Bacar, sur qui pèsent des soupçons de tortures et de disparitions d'opposants, a provoqué la colère de la communauté comorienne à Mayotte.
Des manifestations de colère ont explosé à Kawéni, à la barge et au rond-point du Baobab dans la nuit. Elles ont continué toute la journée de ce jeudi. Les Blancs, "symbole du gouvernement français" pour les manifestants, ont été pris à partie de manière très violente. Les motos, scooters et voitures brûlées se multiplient. Des coups et des caillassages ont été perpétrés à l'encontre de citoyens lambda, des forces de l'ordre et aussi des pompiers. Des regroupements de Comoriens étaient recensés dans tous les villages. Ils envisageaient de rejoindre Mamoudzou dans la journée de jeudi.

 



Récit d'une violence

Pendant toute une journée, les professeurs du collège de Kawéni sont restés bloqués dans leur établissement. Ils ont pu voir plusieurs exactions commises contre des Blancs avant d'être évacués à 16h par quatre escouades de policiers anti-émeutes qui ont "nettoyé" les ronds-points de Mega et de SFR à coups de flash ball, cantonnant les émeutiers entre les deux axes. Le pire observé concerne une femme, mère de famille.
A Kawéni, vers 11h30, cette dame vient chercher son enfant en catastrophe lors d'un moment particulièrement chaud. Les enseignants ont essayé de l'en dissuader. Elle a tenté sa chance. Au moment, où elle fait monter son enfant dans la voiture, des gens ont commencé à caillasser la voiture. Les vitres ont explosé alors que l'enfant était à l'intérieur et un chauffeur. Un homme a crevé un pneu arrière à l'aide d'un chombo. Le chauffeur a décidé alors de démarrer en catastrophe, laissant la femme seule devant une meute de jeunes clandestins, prête en découdre. Elle a été tirée par les cheveux, molestée pendant plusieurs minutes. C'est à ce moment là, alors qu'elle tentait de s'échapper vers la station Total, que le personnel de cette société est intervenu. Deux hommes l'ont prise sous leur protection et l'ont emmenée dans station Total. La foule s'est ensuite calmée.

 


Le vice-président de Mohéli désigné pour administrer Anjouan

L'un des vice-présidents de l'Union des Comores Mohéli Ikililou Dhoinine a été désigné pour administrer l'île d'Anjouan dans l'attente de la mise en place d'un gouvernement de transition "d'ici la fin de la semaine", a-t-on appris de source officielle, mercredi à Moroni.
Le vice-président Ikililou Dhoinine représentera l'autorité politique à Anjouan d'ici la mise en place d'un gouvernement de transition sur l'île, révèle la même source. ''Le gouvernement de transition sera mis en place d'ici la fin de semaine", a déclaré sur Radio Comores le porte-parole du gouvernement comorien, Abdourahim Said Bakar, à l'issue d'un Conseil des ministres.
Le vice-président Ikililou Dhoinine, natif de Mohéli (Petite île des îles des Comores) occupe également le poste de ministre de la Santé, de la Solidarité et de la Promotion du Genre.

 


Vendredi 4 avril 2008

Analyse – "La gueule de bois"

Une semaine après le passage éclair de Mohamed Bacar, l’ancien président déchu de l’île autonome d’Anjouan, le Mahorais ne cesse de panser sa plaie, plus morale que physique, mais qui laissera néanmoins des séquelles dans la mémoire collective des habitants de notre île. La zone urbaine de Mamoudzou et Petite Terre est en état de siège depuis les violentes manifestations de jeudi dernier. Les renforts de policiers et gendarmes dépêchés par Paris sont visibles à tous les coins de rues, mais ils n’ont pas réussi à dissiper une peur encore palpable dans tous les esprits des résidents de Mayotte, chacun réalisant être passé tout près du chaos.

L’image de la paisible et idyllique Mayotte a pris un sacré coup à l’extérieur avec le déchaînement de violence que le bref passage de l’ancien dictateur anjouanais a provoqué au sein des populations immigrées anjouanaises vivant sur notre territoire. A l’image d’une personne qui réalise avoir la "gueule de bois" au lendemain de sa première cuite, Mayotte a peur et le confesse volontiers, et si la vie finira par reprendre son cours normal d’ici peu, on peut dire sans exagérer que plus rien ne sera pareil après horrible journée de jeudi 27 mars 2008.
La communauté métropolitaine découvre qu’elle constitue une cible facile dans une île qu’elle croyait pourtant française et francophile, et la population autochtone retrouve intacts ses démons du passé, dont elle croyait s’être définitivement débarrassés en choisissant de demeurer française, contre vents et marrées, il y a une trentaine d’années.
Réflexe compréhensible, une petite partie des résidents métropolitains cède à la panique et quitte le territoire, par crainte d’une complication de la situation au cours des jours à venir. Les investisseurs potentiels paniquent eux aussi, et se demandent s’ils n’ont pas intérêt à aller voir ailleurs, sous des cieux plus cléments. Quand à lui, le Mahorais découvre qu’il est vulnérable sur son propre territoire, que l’ampleur de l’immigration clandestine anjouanaise dépasse de très loin les projections qu’il se faisait, que l’esprit d’humanité qui l’a poussé à accepter vaille que vaille la présence de cette forte communauté immigrée illégale et incontrôlée venait de lui jouer un mauvais tour.
Conscient qu’il ne pourra pas faire l’économie d’une révision de son sens traditionnel de l’accueil et de l’hospitalité, donc de modifier ses propres règles de vie, il s’interroge sur la bonne marche à suivre, fortement tenté il faut le reconnaître à bouter cette menace anjouanaise hors de ses frontières, sans autre forme de procès.
En décidant de fuir les forces tanzaniennes et soudanaises (venues le déloger d’Anjouan sous la bannière de l’Union africaine) et à venir demander l’asile politique à la France en rejoignant le sol mahorais, Mohamed Bacar n’a ni arrangé la situation des victimes de son régime dictatorial, ni les relations déjà très tendues entre l’Union des Comores et la France depuis le début de la crise séparatiste anjouanaise.
Craignant pour leur sécurité et l’avenir du processus de départementalisation de leur île, les Mahorais sont depuis quelques jours tiraillés par une envie de se faire justice et multiplient les réunions dans les quartiers, villes et villages de l’agglomération de Mamoudzou et Petite Terre.

 

Des violences sont à craindre en représailles contre les Anjouanais

Les manifestations d’hostilité à la présence des immigrés anjouanais se multiplient et pourraient déboucher sur une grande marche de protestation, d’autant que les déclarations récentes – imprudentes et provocatrices – du Président de l’Union des Comores, Abdallah Mohamed Saambi, qui s’est félicité de l’heureuse libération de l’île d’Anjouan, avant celle prochaine de Mayotte, n’ont pas été de nature à calmer des esprits forts échauffés par la découverte d’une menace intérieure sous estimée.
Le pire reste donc à craindre, des débordements ne sont pas à exclure dans les prochaines semaines, à moins que les autorités locales ne prennent les devant en décrétant certaines mesures administratives, restreignant les activités des immigrés clandestins. Ces mesures que certains donneurs de leçons ne manqueront pas de qualifier de honteuses et d’inacceptables pour un Etat de droit comme la France, sont – ne leur en déplaise – nécessaires pour ramener la quiétude dans cette île, mise à mal par les conséquences des marchandages de couloir de la diplomatie française, qui n’a jamais voulue être réaliste dans le traitement du contentieux l’opposant aux Comores sur le dossier de Mayotte.
La situation exceptionnelle que la déconfiture de l’Etat comorien fait supporter à Mayotte est dangereuse pour tous et justifie le recours à des moyens d’exception pour éviter une catastrophe à venir. En effet, les violences de jeudi dernier, trop huilées pour être spontanées, ont sans tardé instauré une méfiance entre Mahorais et Métropolitains, ces derniers (et leurs intérêts) ayant été le seule cible des immigrés anjouanais. Des questions fusent de partout, et certains n’hésitent pas à reprocher à l’Etat de ne pas avoir su prévoir et empêcher ce déferlement de violence dans les rues de Mamoudzou, Kawéni et Pamandzi.

 

Ces violences sont la conséquence d’une attitude conciliante de Paris à l’égard des dirigeants comoriens

Dans cette situation, on peut difficilement imaginer que la France, puissance tutrice des Comores, puisse continuer à laisser le désordre politique s’installer durablement dans l’archipel voisin. Ces violences sont la conséquence absolue d’une attitude conciliante de Paris à l’égard des dérives mafieuses des tenants successifs du pouvoir à Moroni au cours des 35 années écoulées. Est-il normal que ce soit toujours Mayotte qui paie le prix de l’inconscience des dirigeants comoriens ? Combien de temps, de drames et de souffrances faudra-t-il encore attendre avant que la France et la communauté internationale ne se saisisse réellement du problème comorien.
Si ces deux parties ne conjuguent pas leurs efforts pour ramener de toute urgence une bonne gouvernance dans l’archipel, toutes les aides financières promises ici et là pour relancer l’activité économique aux Comores, aussi colossales qu’elles puissent être, ne serviront à rien d’autre qu’à accroître un peu plus le malheur des Comoriens. Et avec à la clé, non plus une déstabilisation de la seule île de Mayotte, mais de toutes les îles et pays de la sous-région.
L’encombrant colonel Mohamed Bacar n’est plus là, mais il serait illusoire de croire que son départ en exil (probablement en Afrique du sud d’après ce qui se dit) suffira pour ramener la paix et la prospérité dans l’archipel. Le mal est trop ancré dans une société comorienne qui admire et glorifie depuis 35 ans le pillage de ses deniers publics par une classe politique qui se moque bien du bien-être de ses populations.
Les donneurs de leçons de tous poils qui pullulent à Mayotte ces dernières années feraient mieux de retenir cette réalité et de ne pas se tromper de combat. N’étant jamais mieux servi que par soi-même, le bonheur des Anjouanais ne viendra pas de Mayotte (et des Mahorais), mais des dirigeants comoriens eux-mêmes.

Said Issouf
 

Reconduite aux frontières pour l'ex-président d'Anjouan

L'ancien dirigeant sécessionniste d'Anjouan Mohamed Bacar, assigné à résidence à la Réunion après avoir été chassé du pouvoir la semaine dernière, a affirmé mercredi qu'une "mort certaine" lui était promise s'il était renvoyé aux Comores par la France.
"Une mort certaine m'attend aux Comores. Un de mes beaux-frères a été tabassé et se trouve dans le coma. Mes frères et soeurs sont pourchassés, ils se cachent dans la montagne", a déclaré à Reuters l'ancien homme fort d'Anjouan, à la Réunion depuis le 29 mars. "Je suis ici pour demander l'asile politique, je préfère la France", a-t-il répondu à une question sur son prochain pays d'accueil.
Mohamed Bacar, 46 ans, s'exprimait en marge d'une audience du tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion, alors que ses avocats mènent une bataille de procédure pour éviter la reconduite à la frontière de leur client et des vingt-deux hommes qui l'ont accompagné dans sa fuite.
Dans la nuit de mardi à mercredi, le préfet de la Réunion avait signé un nouvel arrêté de reconduite à la frontière, élargissant la possibilité d'accueillir les 23 hommes à tout pays où ils seraient légalement admissibles. "L'administration a reconnu sa grave erreur d'avoir envisagé de renvoyer Bacar aux Comores" dans un premier temps, a indiqué Me Marie Briot, un des conseil de l'ancien dirigeant anjouanais.
Me Briot a d'autre part annoncé qu'elle déposerait jeudi un recours contre le nouvel arrêté préfectoral, ainsi qu'une demande d'autorisation provisoire de séjour pour son client, en attendant la réponse de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides à sa demande d'asile politique.
Mohamed Bacar et ses hommes, hébergés sur la base aérienne 181 de La Réunion placée sous la surveillance de la gendarmerie, ont formulé lundi une demande d'asile politique à la France et le préfet de La Réunion a demandé à l'Ofpra (Office français de protection des réfugiés et apatrides) de l'examiner selon la procédure d'urgence. "Je fais confiance à la justice française", a déclaré à l'AFP l'ex-président Bacar venu assister mercredi à l'audience du tribunal administratif. "La Réunion est une île démocratique, sécurisée, où personne ne pourra attenter à nos jours. C'est aussi parce que nous sommes menacés que nous demandons l'asile politique à la France", a-t-il dit.
Si la procédure d'urgence est adoptée, l'Ofpra disposera de quinze jours pour répondre à la demande de Mohamed Bacar et de ses hommes. Quelques manifestants d'origine comorienne s'étaient regroupés mercredi devant le tribunal administratif. "On n'a pas besoin de la France pour juger Bacar", criait l'un d'entre d'eux.

Avec Le Point et l'AFP
 

Trois proches de Bacar condamnés à la prison

Alors que des manifestations violentes anti-Wazungu ont eu lieu jeudi dernier à Mamoudzou, Kawéni et Pamandzi en marge de la venue puis du transfert du colonel Bacar, des proches de celui-ci continuent à arriver à Mayotte. Trois d'entre eux ont été jugés en comparution immédiate lundi soir au palais de justice de Kawéni.

Chat échaudé craint l'eau froide. Ayant constaté les réactions violentes de manifestants anjouanais furieux de voir Mohamed Bacar arriver à Mayotte puis repartir pour la Réunion, les autorités ont choisi de parer à toute éventualité lundi soir aux abords du palais de justice à Kawéni. Un camion de gendarmes au rond-point de la zone Nel et un autre dans l'enceinte du tribunal étaient chargés d'assurer la sécurité des magistrats et des prévenus qui faisaient l'objet d'une comparution immédiate.
Ceux-ci étaient au nombre de trois et tous proches du président déchu de l'île autonome d'Anjouan, Mohamed Bacar. Vers 18h30, ils sont arrivés à bord d'un véhicule de la gendarmerie et sous bonne escorte. Alignés bien en rang, les gendarmes ont encadré les trois prévenus qui ont fait leur entrée dans la salle d'audience avec un sac en jute sur la tête, pour ne pas qu'ils soient reconnaissables.
Toutes ces précautions n'auront pas trop servi puisque seuls trois journalistes ont assisté à cette audience. Mais vu la pluie de critiques qui s'est abattue sur le préfet Vincent Bouvier sur le manque de forces de l'ordre en Grande Terre jeudi dernier, il valait mieux prévenir que guérir. Après avoir demandé aux journalistes de laisser leurs caméras et appareils photos en dehors de la salle et d'éteindre leurs téléphones portables, le président du tribunal correctionnel Alain Mancini, visiblement tendu, a ouvert l'audience.
C'est seulement une fois à la barre que l'on découvre les visages de Mohamed Soumaïla, gendarme et responsable de l'aéroport de Ouani, Mohamed Ridjali, adjoint au commandant d'un peloton de la gendarmerie et de Ridjali Abdou, directeur de cabinet de Mohamed Bacar.

 

Des prévenus inquiets pour leurs familles restées à Anjouan

Les trois hommes sont partis d'Anjouan dans la nuit du vendredi 28 au samedi 29 mars. Ils ont pénétré sur le territoire français sans document valide (visa) et en possession d'armes de guerre. Le procureur de la République Gilles Rognoni a demandé à leur encontre une peine de 6 mois de prison, dont 4 fermes. Venue défendre les prévenus, Me Lebel a mis l'accent sur le fait qu'ils étaient inquiets pour leurs familles restées à Anjouan.
Par ailleurs, elle a souligné que les armes de guerre détenues par les prévenus ont été directement remises aux gendarmes et qu'il n'y a eu aucune intention de s'en servir sur le sol mahorais. Enfin, elle a plaidé pour la prise en compte du fait que les trois hommes s'étaient comportés correctement depuis leur arrivée sur le sol mahorais. Cette plaidoirie a peut-être porté puisque le juge Alain Mancini n'a pas sanctionné les trois hommes selon les réquisitions du procureur.
Mohamed Soumaïla et Mohamed Ridjali ont écopé de 4 mois de prison dont 2 fermes, alors que Ridjali Abdou n'a été condamné qu'à 2 mois de prison dont un avec sursis. Pour ce dernier, Alain Mancini a estimé que la détention d'armes de guerre n'était pas avérée. Les trois condamnés seront mis en isolement à la maison d'arrêt de Majicavo avant d'être transférés dans une prison à la Réunion. Les trois hommes ont demandé l'asile politique à l'instar de Mohamed Bacar. Mais contrairement à ce dernier, le juge n'a pas retenu de vice de procédure, ce qui devrait peut-être calmer les opposants à Mohamed Bacar qui demandent toujours que les caciques de l'ancien régime d'Anjouan soient traduits en justice à Moroni.

Faïd Souhaïli
 

27 Anjouanais demandent l'asile politique

Outre trois proches du colonel Bacar jugés en comparution immédiate, vingt-quatre autres personnes sont arrivées ces derniers jours à Mayotte depuis Anjouan pour demander l'asile politique. La préfecture de Mayotte dément les rumeurs d'arrivée massive de gendarmes anjouanais sur notre île et précise qu'elle a renforcé la surveillance aux frontières, avec notamment la présence d'un patrouilleur de la Marine nationale et d'un hélicoptère de l'Armée de l'air. Douze personnes étaient en garde à vue mardi et douze autres ont été placées en rétention administrative en attendant que leur demande d'asile soit examinée.

 



Après les émeutes de clandestins jeudi dernier
La riposte des Mahorais s’organise

Après les violentes émeutes qui ont secoué Mayotte dans la journée du jeudi 27 mars, plusieurs villages de l’île ont organisé des manifestations hostiles aux ressortissants comoriens. Après Labattoir vendredi dernier, les habitants de M’tsapéré leur ont emboîté le pas en descendant dans les rues dimanche pour réclamer le départ des ressortissants comoriens, ainsi que la destruction de leurs bangas qui donnent une image hideuse sur la commune chef-lieu.

"Nous ne voulons plus de clandestins dans nos champs ! Kavani Sud, Doujani, Massimoni, Mhogoni, Barazi, dégagez de M’tsapéré !", pouvait-on lire sur les banderoles arborées par les manifestants. Parti de la place publique baptisée "Sénat" vers 11h30 ce dimanche, le cortège de 200 personnes environ sous escorte de la police, s’est d’abord rendu sur le site de Doujani 2 pour déloger les clandestins installés sur les terrains de la Collectivité. Les meneurs de la manifestation ont toutefois réussi à calmer les esprits afin d’éviter toute confrontation.
"Il s’agit aujourd’hui d’une manifestation pacifique en guise d’avertissement", lancera un des membres. "On veut leur montrer que nous sommes chez nous, et leur faire comprendre qu’ils doivent rentrer chez eux car la personne qui les faisait fuir sur leur territoire n’est plus là", poursuit-il. Après Doujani 2, les manifestants ont contourné le quartier avant de se rendre dans la rue du collège de Doujani 1 où un léger incident rapidement maîtrisé les a opposés à des ressortissants anjouanais.
Ce nouveau quartier, peuplé essentiellement d’immigrés clandestins qui ont érigé des constructions anarchiques aux allures de bidonvilles sur des terrains appartenant à la Collectivité, a particulièrement attiré l’attention des manifestants. "Aucun Mahorais n’aurait eu le droit de construire un banga sur ces sites qui offrent une vue splendide sur le lagon", déplore un manifestant. "Ce sont les autorités qui cautionnent ces dérives", regrette un autre.
L’ancien président du syndicat des commerçants de Mamoudzou enfonce à son tour le clou : "Je suis allé voir il y a quelques temps le secrétaire général de la préfecture pour lui demander de prendre des mesures à l’encontre des vendeurs à la sauvette aux abords du marché. Sa réponse m’avait anéanti", a-t-il lancé. "Si je les vire de là, ils iront voler dans les villas", aurait déclaré le fonctionnaire de l’Etat.

 

Direction Bonovo, refuge de clandestins

Après un bref arrêt sur le parking du collège de Doujani, le cortège décide de se rendre à Bonovo, un quartier perché sur les hauteurs de M’tsapéré, réputé comme étant un redoutable fief des clandestins. L’agent de police qui escorte la manifestation essaye de dissuader les manifestants de s’y rendre, craignant d’éventuelles représailles. Une demande qui sera rapidement rejetée.
Pour mémoire, un collectif des habitants de M’tsapéré avait saisi le procureur de la République et le commissariat de Mamoudzou il y a quelques mois, pour protester contre les agissements d’un groupe de jeunes en situation irrégulière qui faisaient régner la terreur dans ce quartier en s’attaquant aux femmes et aux enfants avec une meute de chiens. Aucune suite n’a d’ailleurs été donnée à leur requête…
"Bonovo est un quartier de M’tsapéré, personne ne nous empêchera de nous y rendre", clament en cœur les manifestants. "Les familles mahoraises qui habitent dans ce quartier n’excèdent pas une vingtaine", déclare Oiladi. Se rendant compte de la détermination qui anime les jeunes, l’agent de police en tête du cortège contacte rapidement par radio des renforts qui prennent position dans le quartier avant l’arrivée de la foule, afin d’éviter d’éventuels débordements.
Deux camions bondés de gendarmes mobiles armés de matraques et de bombes lacrymogènes étaient stationnés sur les hauteurs. Une présence dissuasive puisque aucun incident n’a été constaté lors de la traversée du quartier, malgré le vacarme tonitruant du mégaphone au message évocateur : "Ne touchez pas à nos mzungus ! Anjouanais rentrez chez vous ! Nous en avons marre !". La manifestation s’est ensuite poursuivie jusqu’au lotissement de Cavani Sud où un nouveau quartier sauvage vient de voir le jour sur les hauteurs. Des constructions illégales érigées sur des terrains en pente à la merci d’éventuels éboulements. Des zones difficilement accessibles qui n’offrent aucune condition de sécurité.
"Il faut qu’ils comprennent que nous n’avons pas besoin d’eux chez nous", lance le jeune Taki, particulièrement remonté, sa femme d’origine métropolitaine ayant failli se faire lyncher dans la journée de jeudi. "Ce n’est pas la première fois qu’ils agissent de la sorte, mais cette fois leur comportement agressif a atteint son paroxysme. Il faut qu’ils rentrent chez eux", conclut-il.

Soldat
 

 

Une délégation reçue par le maire de Mamoudzou et la Préfecture
"Des mesures de fermeté seront prises"

Abdourahamane Soilihi, le nouveau maire de Mamoudzou a fait son baptême du feu lundi en recevant une délégation des habitants de M’tsapéré et Cavani. Objet de cette rencontre : demander au premier magistrat de prendre des mesures pour stopper la cascade de violence et les agissements inacceptables perpétrés par les ressortissants comoriens dans la commune chef-lieu.
Quatre revendications ont été formulées au cours de cet entretien. Tout d'abord le renforcement du dispositif de reconduite à la frontière des personnes vivant sans titre de séjour. Les citoyens en colère ont aussi mis en avant la démolition immédiate des bangas construits illégalement par des clandestins dans la commune de Mamoudzou. Ils demandent à leur 1er magistrat d'interdire à toute personne de laver son linge à la rivière de M’tsapéré qui est dans un état pitoyable à cause des produits en tous genres déversés dedans, et enfin d'empêcher l’accès des vendeurs à la sauvette au marché de Mamoudzou.
Après avoir écouté attentivement les doléances de chaque membre de la délégation, le nouveau maire s’est engagé de manière formelle à prendre des mesures immédiates sur deux points qui sont de sa compétence. La première concernant l’accès à la rivière de M’tsapéré : "je prends un arrêté municipal pour empêcher toute personne de faire sa lessive à la rivière car cela constitue une dégradation de l’environnement", a assuré le premier magistrat.
Pour la seconde – la lutte contre l’accès des vendeurs à la sauvette à la place du marché – le maire a promis "de mettre en place dorénavant une présence permanente des policiers municipaux sur le marché de Mamoudzou", car, dit-il, "ça me sidère de voir les clandestins jouer au chat et à la souris avec les policiers".
Concernant les reconduites à la frontière et la démolition de bangas, M. Abdourahamane Soilihi alias Ladjo s’est engagé à saisir très rapidement le procureur de la République et le représentant de l’Etat afin qu’ils prennent des mesures d’urgence pour régler ce fléau.
Il a cependant exhorté ses administrés à prendre de leur côté leurs responsabilités, car a-t-il ajouté, "tout le monde héberge un clandestin chez soi".
La préfecture a assuré de son côté «que des mesures de fermeté seront mises en place pour lutter contre l’entrée illégale sur le territoire des ressortissants étrangers », en sollicitant "l’aide de la population dans la gestion de cette crise".

Soldat
 

Emeutes du jeudi 27 mars
Le lycée de Kawéni livré à lui-même


Depuis plusieurs années, enseignants et personnels du lycée de Kawéni alertent le vice-rectorat sur les conditions d'insécurité de l'établissement, dues notamment à la quasi absence de clôture. Les émeutes de jeudi, dont le lycée a été en partie le théâtre, ont conduit enseignants et élèves à faire grève pour réclamer une réelle protection. Les travaux commencent.

Jets de pierres sur les véhicules et les personnes, pneus crevés, agressions physiques, un homme blessé à la tête, une femme sauvée in extremis par des Mahorais… Les émeutes de jeudi ? Oui, mais à l'intérieur même du lycée de Kawéni. Mardi matin, enseignants et élèves, unis dans le même combat, étaient rassemblés calmement dans la cour du lycée pour protester contre les conditions de sécurité déplorables que leur offre l'établissement, une situation qui dure depuis plusieurs années.
Premières victimes : les élèves qui suivent des cours dans des locaux extérieurs, que ce soient ceux de l'UFA situés à quelques mètres du lycée même, ou dans les locaux du collège. Ces élèves "sont fréquemment agressés et rackettés depuis plusieurs années", affirment représentants des enseignants et des élèves. Les bandes de Kawéni attendent régulièrement les élèves sur le chemin, particulièrement en fin de journée. Récemment un élève en a été victime et s'est défendu en rendant les coups, la bande en question figurait parmi les casseurs de jeudi, décidée à régler ses comptes.
Car l'insécurité est aussi un problème à l'intérieur : en guise de clôture le lycée ne possède qu'un mince grillage d'un mètre de haut, troué à maints endroits, impossible de savoir qui entre et qui sort, surtout avec seulement trois surveillants. "Certains d'entre nous viennent au lycée avec la crainte de ce qui va arriver, affirme une élève, c'est la banlieue ici, il faut faire quelque chose. Ceux qui sont en TP restaurant se retrouvent parfois à attendre leur bus seuls dehors à 22 heures. Nous voulons être en sécurité dans notre lycée, nous et les prochains à venir."

 

"On nous a abandonné"

Les émeutes de jeudi n'ont fait que mettre en lumière un problème plusieurs fois signalé ces trois dernières années, les violences de la rue se sont déplacées à l'intérieur même du lycée. "Ils sont entrés avec les chombos, les pierres, ont blessé à la tête un des membres de l'administration, plusieurs d'entre nous n'ont du leur sécurité qu'à la protection de leurs élèves, tous unis quelles que soient leurs origines pour défendre leurs enseignants et leurs camarades", racontent les professeurs choqués, qui précisent que la direction a été "exemplaire", le problème vient de plus haut. Ignorants des mesures prises toute la journée par le vice rectorat pour gérer la crise, les enseignants se sont sentis bien seuls.
"Nous avons alerté le vice-rectorat toute la journée, mais ils semble qu'on nous ait abandonné. Alors que le collège de Kawéni était évacué par les gendarmes, nous avons du nous débrouiller seuls toute la journée. Les élèves sont traumatisés, ils ont passé la journée enfermés dans les rares salles qui ont des barreaux, à pleurer." Comble de la journée, le chauffeur d'un des bus qui raccompagnait des élèves à la barge les a fait descendre sur le chemin, exaspéré par leur trop grande excitation. Les jeunes femmes ont fini le chemin à pieds, à 19h, mortes de peur, dans des rues heureusement redevenues calmes.
Décidés à trouver rapidement une solution, les enseignants ont donc écrit un courrier lundi à leur hiérarchie, précisant qu'ils ne pourraient reprendre les cours s'ils ne se sentaient pas, eux et leurs élèves, en sécurité. Le vice-recteur est intervenu dans la salle des profs, son discours n'a fait qu'accroître la colère de ceux-ci, pas assez de promesses et d'actions, qui ont donc utilisé leur droit de retrait et refusé de travailler mardi. Le jour même, un intrus s'introduisait dans le lycée, proférant des menaces. Ceinturé par un professeur, il a réussi malgré tout à fuir les policiers à leur arrivée…

 

Les travaux de clôture débutent immédiatement

"Au départ on voulait organiser une manifestation dehors, pour réclamer des patrouilles de police lors des déplacements d'élèves et aux heures de sortie, et une véritable clôture, racontent les élèves. Les profs nous ont convaincus de faire ça à l'intérieur pour notre sécurité. Nous avons accepté et envoyons certains d'entre nous avec la délégation qui rencontre le vice-recteur." Car mardi le discours a changé. Très tôt le matin, le vice-recteur envoie un technicien étudier les travaux à faire sur la clôture, celle qui devait au départ attendre juillet pour être refaite. Le maire envoie également son adjoint chercher les emplois du temps, pour définir des heures de patrouille des policiers municipaux.
Reçus à 10 heures au vice-rectorat, représentants des enseignants, élèves et parents d'élèves, se sont déclarés "très satisfaits". "Cette fois ci nous avons vraiment été écoutés, et nous avons reçu de vraies réponses, le discours n'était plus le même."
Les travaux de la clôture ont débuté donc dès ce mercredi, les patrouilles de police auront lieu pour protéger les déplacements et les sorties. La carte lycéen, que beaucoup n'avaient même pas pensé à réclamer, servira désormais à trier les élèves des indésirables au portail qui restera fermé. Il aura fallu une émeute et une grève pour que le lycée obtienne gain de cause.

Hélène Ferkatadji
 

Nous nous sommes battus pour le droit à la scolarisation*

Comme toute la population de l'île, nous avons été choqués par la "chasse aux blancs" qui s'est déroulée jeudi dernier. Des dizaines de collègues enseignants nous ont rapporté les agressions insupportables dont ils ont été les victimes. Ces faits sont inadmissibles et nous exprimons notre solidarité à tous ceux qui les ont subis. Nous dénonçons le fait que le collège et le lycée professionnel de Kawéni aient été assiégés durant plusieurs heures et bombardés de jets de pierres. Ces faits ont été commis par des gens se réclamant ressortissants de la communauté anjouanaise.
Nous tenons à rappeler que le Snes, organisation syndicale largement majoritaire chez les professeurs des lycées et collèges, a toujours défendu le droit de toutes les communautés à être traitées dignement, en tant qu'êtres humains. Nous nous sommes battus pour le droit à la scolarisation ou à la santé de tous les habitants de Mayotte. Nous avons toujours combattu tous ceux qui refusaient le principe républicain selon lequel l'école de la République doit accueillir tous les élèves, sans discriminations.
Aujourd'hui nous sommes consternés que des membres d'une communauté s'en prennent violemment à d'autres. Les enseignants de Mayotte, quelle que soit leur couleur de peau, ne sont pas responsables de la présence de Mohamed Bacar sur l'île de Mayotte et s'en prendre à eux sous ce prétexte fallacieux et sous des formes aussi violentes est un acte de racisme insupportable.
Nous tenons cependant à affirmer que notre combat pour la dignité et la tolérance n'en sera pas affaibli pour autant et nous resterons vigilant de manière à ce que ces événements détestables ne soient pas prétexte à la remise en cause des droits fondamentaux à l'éducation pour tous qui continuent, quoi qu'il en soit, à demeurer un principe de base de notre République.

Le Snes de Mayotte
 

Réactions
"Je condamne fermement ces troubles et violences intolérables"*

Les immigrés anjouanais de Mayotte ont perpétré, durant toute la journée du jeudi 27 mars 2008, des violences gratuites contre les biens et les personnes aux alentours de l'aéroport de Pamandzi en Petite Terre et un peu partout à Mamoudzou, le chef-lieu situé en Grande Terre, sous prétexte de protester contre l'arrivée à Mayotte et de réclamer la reconduite à la frontière du colonel Mohamed Bacar, ancien président de l'île d'Anjouan, recherché par les autorités de l'Union des Comores et celles de l'Union Africaine.
De tels inadmissibles troubles à l'ordre public rappellent le douloureux précédent de 2005 qui avait abouti à de graves atteintes à l'intégrité physique de nombreux habitants de notre île et même de certains élus et, surtout, au saccage de la permanence parlementaire du député de Mayotte de l'époque.
L'ampleur des présentes atteintes à la paix publique a été telle que les régulières lignes aériennes de desserte de Mayotte et les rotations de la barge pour relier la Petite à la Grande Terre ont été suspendues.
En ma qualité de représentant de l'ensemble de la population française de Mayotte, je condamne fermement ces troubles et violences intolérables.
Je lance un appel solennel et pressant au Gouvernement pour solliciter un rapide et sérieux renforcement des effectifs de police et de gendarmerie affectés à Mayotte afin de pouvoir prévenir et, en tout cas, remédier plus efficacement à une telle situation à l'avenir.
Je demande aussi instamment à la préfecture de Mayotte de bien vouloir indiquer, à toutes les victimes de violences, les voies et moyens d'obtenir leur juste et effective indemnisation légitimement attendue.

Le député,
Abdoulatifou Aly
 

La Famm condamne les agitations violentes des Comoriens sur le territoire français de Mayotte

La journée du jeudi 27 mars 2008 a été marquée par des manifestations violentes, à Mayotte, par des Comoriens, majoritairement en situation irrégulière. Ces derniers s’en sont pris à la population de Mayotte avec pour principale cible les Métropolitains (Mzoungous en mahorais), ainsi qu’aux biens matériels : voitures brûlées et cassées, magasins saccagés…
La Fédération des associations mahoraise de Métropole (Famm) condamne avec la plus grande fermeté ces agissements haineux et racistes, qui n’ont pas leur place dans un territoire français démocratique comme Mayotte, et espère que le gouvernement mettra tous les moyens pour arrêter les auteurs de ces infractions afin de les traduire en justice pour qu’ils soient sévèrement punis.
La Famm interpelle le gouvernement et lui demande de s’engager dans le respect de ses prérogatives régaliennes afin d’étendre la sécurité de la nation à l’ensemble des territoires français et notamment à Mayotte.
S’il convient de comprendre la frustration de la population des Comores face à l’impuissance de leur gouvernement à instaurer un climat de paix, de stabilité et de développement sur leur territoire, ceux et celles d’entre eux qui ont eu la chance de vivre à Mayotte se doivent de respecter les valeurs de la République et d’être reconnaissant de l’hospitalité mahoraise.
La Famm invite la population mahoraise au calme et l’exhorte à ne pas tomber dans le piège des Comoriens qui n’ont pour objectif que la déstabilisation de l’île française de Mayotte. La Famm condamne également l’attitude de certains dirigeants comoriens qui appellent leurs ressortissants à manifester partout où ils sont. C’est une attitude complètement irresponsable. Enfin, la Famm souhaite un bon rétablissement aux victimes gravement blessées par les manifestants et se rangent aux côtés de leurs familles pour leur apporter son soutien.

La présidente de la Famm
Sitti Binti Moussa Maliki
 


A propos des événements à Mayotte

L’arrivée à Mayotte du colonel Mohamed Bacar et d’une vingtaine de personnes fuyant l’intervention des forces de l’Union Africaine à Anjouan a donné lieu à des scènes de violences et à des exactions inadmissibles et condamnables de la part de certains ressortissants comoriens résidants à Mayotte.
Le Parti socialiste assure les victimes de ces heurts de son soutien et adresse une pensée particulière aux blessés de ces dernières journées.
Il prend acte du transfert de Mohamed Bacar à Saint-Denis de la Réunion, mais constate l’incohérence de l’attitude du gouvernement qui consiste à apporter son aide au gouvernement comorien et à l’Union Africaine pour rétablir l’état de droit à Anjouan tout en "exfiltrant" le principal responsable de la situation; le soustrayant ainsi à la justice comorienne.
Il est grand temps que le gouvernement français clarifie sa position vis-à-vis de la République Islamique des Comores et rompe avec des pratiques coloniales qui relèvent d’autres temps.

Victorin Lurel,
secrétaire national du PS à l’Outremer
 
 

Réactions
Dahilou Nabhane, artiste
Les manifestations qui ont dégénéré la semaine dernière sont à mettre sous la responsabilité du préfet. Cela fait 4 mois que la préfecture de Mayotte prépare l’accueil de Mohamed Bacar, mais à aucun moment on a évoqué les conditions de sécurité. L’Etat français n’avait pas à s’immiscer dans la gestion d’un conflit qui ne le regarde pas. L’hélicoptère qui s’est écrasé au large de Sima à Anjouan en est la parfaite illustration. Ils nous ont fait croire que l’appareil était parti effectuer une mission de surveillance du lagon dans le cadre de la lutte contre l’immigration clandestine.
Mystérieusement, les autorités de l’Etat qui prétendent avoir mis en place un service de contrôle accru sur le lagon n’ont pas vu arriver Bacar et ses acolytes. Il faut arrêter de se foutre des gens. Si on demande le départ des ressortissants anjouanais aujourd’hui, le préfet doit aussi prendre l’avion demain car il a une grande part des responsabilité sur les événements qui ont secoué Mayotte. En montant les Anjouanais contre les Mahorais, c’est une façon de remettre en cause le statut que nous revendiquons depuis des lustres, c'est-à-dire la départementalisation de Mayotte.
C’est vrai qu’au pays des aveugles les borgnes sont rois, mais je ne tolère pas ce que nous venons de subir. Je rends au passage hommage à toutes les personnes qui se sont fait agresser lors de ses émeutes, Mahorais comme Métropolitains, ainsi que ceux qui ont perdu leurs biens. Il faut que les services de l’Etat nous aident à démolir les bangas construits de manière illégale sur les terrains appartement à la Collectivité car nous sommes parfaitement prêts à le faire, mais ce qu’il nous faut c’est leur accord.

Doudou Fire, artisan
J’ai été très choqué et je suis très inquiet par rapport à ce qui s’est passé à Mamoudzou la semaine dernière. Je ne sais pas à qui appartient la défense de ce territoire, mais je ne comprends pas comment se fait-il qu’avec l’effectif en terme de défense dont nous disposons et avec les renseignements généraux présents sur ce territoire, on n’ait pas pu mettre en place un moyen de prévention de ces émeutes au point d’arriver à de tels débordements qui ont duré toute une journée.
Si sur ce point on me dit qu’il n’y a pas eu du laxisme ou du laisser aller, qu’on nous explique clairement comment en est-on arrivé là. Quant à la question des clandestins à Mayotte, je ne connais pas grand-chose dans la loi, mais je crois que ce sont des personnes qui sont sur le territoire sans titre de séjour. Mais je crois aussi que j’ai compris que l’Etat français a mis ou soit disant mis des moyens en radar et en police des frontières qui devraient lutter de manière conséquente contre ce fléau.
Dans les quartiers, on constate que les gens qui sont expulsés reviennent toujours sur le territoire au bout d’une ou deux semaines. Là-dessus aussi je me pose une question. Et pour conclure en ce qui concerne les fameux favelas des clandestins, là-dessus je me pose une question pleine d’inquiétude. Dans nos communes nous avons un grand nombre de décasés, c'est-à-dire des gens qui sont à la rue parce qu’on a démoli leurs maisons pour l’intérêt public, et ils passent en deuxième choix dans les commissions, tout cela en faveur des gens qui sont sur place par occupation illégale de terrains. Tout ça, c’est l’inquiétude des Mahorais.

Ali Abdou, alias Djoe Fils
Je pense qu’instaurer l’anarchie au sein de la République est un acte grave. L’Etat doit prendre des mesures à la hauteur de l’événement. Ce qui s’est passé jeudi dernier est inadmissible, cela a encore souillé l’honneur des Mahorais. Ces événements ont montré l’inertie de l’Etat et l’insécurité qui règne sur ce territoire qui doit être garanti par celui-ci. Cela nous amène à nous poser la question suivante : que recherchent ces gens-là chez nous, viennent-ils pour des raisons humanitaires comme le prétendent les associations de droits de l’homme qui ont brillé par leur silence lors de ces émeutes, alors qu’ils sont les premiers défenseurs des clandestins sur Mayotte.
Des Anjouanais rentraient massivement à Mayotte avant l’arrivée de Mohamed Bacar et continuent toujours d’arriver, même après le départ de ce dernier. Un kwassa a été arraisonné hier après-midi avec à son bord plusieurs militaires et des civils. Cela met au grand jour la proposition de l’ancien secrétaire d’Etat à l’Outremer, M. Christian Estrosi, qui, à mon avis avait vu juste. Cette situation doit être réglée au plus vite pour garantir la sécurité des Mahorais. Si un étranger formule une demande d’acquisition de la nationalité française, que cela se fasse à Paris et non à Mayotte.
Je regrette en outre l’absence de nos élus locaux lors de ces terribles événements qui resteront gravés à jamais dans la mémoire de la population mahoraise et métropolitaine.
S’agissant des bangas construits illégalement, les élus locaux, notamment les maires, doivent convoquer les propriétaires de ces parcelles pour les mettre en garde sur leurs responsabilités et que les terrains appartenant à la Collectivité soient récupérés par celle-ci car il ne faut pas mettre en avant que la responsabilité des Mahorais.
Cela fait la deuxième fois que des événements similaires secouent Mayotte, et je constate avec consternation que la sécurité des Mahorais n’a jamais été à la hauteur, comparée au président déchu de l’île d’Anjouan qui est rentré en kwassa avec une horde de militaires armés jusqu’aux dents et accueillis comme des princes sur notre territoire. Nous avons compris que la France néglige la sécurité des Mahorais. La troisième fois que cela se reproduira, cela risque d’engendrer une guerre civile. Mara rarou mrandoua n’gouyo.

Ali Saïd Saïdina, entrepreneur
En 2001, Abdou Saïd Chanfi alors maire de Sada avait réuni la population de Sada pour les informer des conséquences d'un décret appliqué à Mayotte et concernant les gens qui logent, aident et font travailler des sans-papiers chez eux. Il a exposé les risques d'amendes, de peine de prison, etc. Le soir même, la communauté anjouanaise de Sada s'est réunie sur le front de mer pour se concerter. Les jours suivants, ils ont amené tous leurs effets, lits, bagages, matériel et les ont regroupés sur la place de l'hôtel de ville. Ils ont marché de Sada à Mamoudzou.
À l'époque tout le monde a mis à l'index Sada. A RFO, on parlait de "Sada la honte", les Wazungu nous avaient traités de racistes et de xénophobes. Ce qui s'est passé jeudi dernier, Sada l'avait souligné en 2001.
Aujourd'hui, les clandestins se rebellent et c'est normal. On fait tout pour qu'ils se sentent chez eux, on les emploie dans nos champs, ils construisent nos maisons. Je refuse que l'on rejette la faute de ce qui s'est passé sur le préfet. Est-ce le préfet qui loge ces gens-là ? Chacun doit assumer ses responsabilités, nous aussi Mahorais sommes responsables de ce qui s'est passé. La préfecture doit contrôler les frontières et nous ne pas employer de clandestins. Nous devons tous assumer nos obligations. Les gens qui mettent en cause le préfet me rappellent les Comoriens qui mettent le malheur de leur pays sur le dos de la France. Cela fait plus de 30 ans que le pays est indépendant, plus de 30 ans que tous les présidents sont Comoriens, que les administrations sont dirigées par des Comoriens, que les employés sont Comoriens. Si tout va mal ce ne serait que par la faute des Français ? Il faut arrêter et admettre aussi la responsabilité des Comoriens qui ont mal gérés, pris dans les caisses de l'état, développé la corruption et qui ont conduit le pays à sa situation actuelle.

Saïd Ahamadi dit Raos, président du Parti social mahorais
Aucun chef de parti ne s'est mouillé après ce qui s'est passé la semaine dernière. En revanche quand le ministre est venu, tout le monde s'est exprimé sur la consultation, un sujet que l'on connaît déjà depuis longtemps. Je condamne les débordements qui ont suivi la manifestation des Comoriens contre le président anjouanais. Le PSM s'inscrit dans le respect du droit républicain et a pour devise Mayotte dans la France et non pas dans les Comores.
Malheureusement, toute personne douée de bon sens pouvait prévoir ces événements. Avec des collègues enseignants du collège de M'gombani, nous avons discuté des possibles répercussions sur Mayotte du débarquement de l'armée comorienne à Anjouan. Ni le conseil général, ni la préfecture n'ont pris ces menaces au sérieux. En tant que président du PSM, je condamne ces violences, car elles s'adressaient à tout ce qui est Français. C'est une négation du choix des Mahorais d'être Français. En s'attaquant aux métropolitains blancs, c'est la présence française à Mayotte qui est contestée.
D'ailleurs, le débat des intellectuels comoriens va dans le même sens, je soupçonne une complicité des autorités comoriennes dans ces événements. L'État a les moyens de surveiller les côtes, mais des gens arrivent à Mayotte avec des fusils. Les Mahorais sont victimes de cette situation. J'avais demandé il y a quelques années que les demandes de carte de séjour soient faites à la mairie comme pour les passeports et les cartes d'identité des ressortissants français. Le préfet n'a jamais voulu que les maires aient ces compétences. Du coup les maires ne savent même pas qui est qui dans la commune. Ce serait une manière de sécuriser Mayotte de l'intérieur.
On doit également savoir exactement quels sont les termes de la convention d'assistance militaire liant la France aux Comores. On entend tout et n'importe quoi, le CG n'a aucune information, les parlementaires considèrent le sujet des Comores comme tabou. La coopération régionale doit se faire dans les domaines de l'éducation, de l'économie, de la culture et au niveau social.
La question du visa doit être aussi définitivement étudiée. Le Mahorais aux Comores est vu comme un Comorien, il ne paie pas de visa quand bien même il le souhaiterait, contrairement aux Français blancs. C'est une discrimination, personne ne s'est penché sur cette question. D'un autre côté, il faut de la transparence et expliquer exactement pourquoi certains Comoriens ont facilement le visa pour venir ici et d'autres ne l'obtiennent jamais. Il faut que tout soit clair. Si la coopération, qui est censée être une priorité depuis les Accords de 2000, ne se fait pas, ce seront tous les Français qui seront visés, pas que les Français blancs.
Quant au colonel Bacar, s'il ne décroche pas le droit d'asile en France, il doit être renvoyé aux Comores pour y être jugé. Aucun individu et encore moins Mohamed Bacar ne doivent être au-dessus des lois. Il ne doit pas être envoyé dans un pays tiers, et surtout pas à Mayotte.

Je suis Anjouanaise…*
Je suis Anjouanaise et je fais partie de cette minorité silencieuse qui, parce qu’elle donne l’illusion de la parfaite intégration, se tait pour ne pas déranger si ce n’est pour protéger son petit confort. Mais les émeutes de jeudi dernier nous obligent à sortir de notre réserve.
Car ces évènements sont graves, et pas seulement pour la société mahoraise qui a eu à déplorer vandalismes et agressions de toutes sortes. Je présente pour cela mes excuses les plus sincères, au nom de toute la communauté anjouanaise et comorienne, à toutes les victimes de ces violences. Nous condamnons fermement ces actes intolérables qui vont encore exacerber des relations déjà bien compliquées entre les ressortissants comoriens, qu’ils soient ou non en situation régulière, et le reste de la population mahoraise. Nous osons à peine en imaginer le retour du bâton.
Ces évènements nous interpellent aussi pour une raison toute aussi grave au regard des nombreuses répercussions qu’elle engendre au sein de l’archipel des Comores; il s’agit de la politique comorienne de la France ou pour être plus précis des manœuvres de déstabilisation orchestrées par cette même politique.
En effet, ces événements par leur origine montrent le mépris considérable avec lequel la République française traite son ancienne colonie; sinon comment expliquer les accointances régulières et systématiques entre les tyrans comoriens et les autorités françaises. Faut-il rappeler que le colonel Abed et une bonne partie de ses acolytes, après avoir versé le sang des Anjouanais et vidé les caisses de l’île, ont pu échapper à la justice comorienne grâce à l’aide de Mayotte qui a facilité leur entrée en France métropolitaine.
Comment expliquer qu’un tyran notoire tel que Mohamed Bacar bénéficie d’un traitement digne d’un magnat du pétrole ici sur le territoire de Mayotte ? Sa protection était à ce point si considérable qu’il ne restait plus à Mamoudzou assez de policiers pour assurer la sécurité des Mahorais.
L’accueil, la protection des tyrans comoriens par les autorités françaises est tellement systématique qu’ils en deviennent insupportables. On comprend, aujourd’hui avec le recul, l’assurance affichée de monsieur Bacar qui se savait protégé. Et avant les dictateurs, on jouait du Bob Dénard pour faire ou défaire le pouvoir comorien.
Alors après cela, allez expliquer aux derniers des misérables, précarisés par les agissements de ces mêmes dictateurs, qu’une loi de la République (la même République qui les chasse à coups de triques pour entrée irrégulière) que les responsables de leur misère, eux non seulement peuvent entrer ici par les mêmes voies, sans en être inquiétés, mais qu’en plus, ô cerise sur le gâteau, ils ont droit à un traitement de roi…
La justice et le droit, si souvent évoqués, si ils existent réellement doivent être appliqués à tous et ce sans aucune distinction, autrement on crée une injustice, terreau de tous les désordres.
Monsieur des hautes sphères de la France-Afrique, les Comoriens ont déjà assez maille à partir avec leurs propres dictateurs, ce n’est pas la peine d’y ajouter les affres et la tyrannie de l’impérialisme et du néo-colonialisme; et pourtant si vous tenez absolument à préserver la paix à Mayotte, il serait nécessaire d’expliquer aux dictateurs en puissance qui regardent déjà vers Mayotte comme à une porte de sortie, qu’après leurs exactions, ils doivent se trouver une autre issue de secours. Ayez le courage de mettre fin à ce cynisme, il en va aussi de la sécurité de Mayotte et de toutes les communautés qui y vivent. La France que nous aimons et respectons, celle de Schoelcher et des droits de l’homme vaut bien ce sacrifice. Mais, malgré notre naïveté légendaire, nous n’osons pas nous faire cette illusion.

 


 

L'Etat indemnise les victimes des manifestations du 27 mars

Mise à l'index par de nombreuses victimes des débordements violents du 27 mars dernier, la préfecture de Mayotte veut montrer qu'elle n'est pas indifférente à la sécurité et aux dommages subis par les habitants de Mayotte. Ainsi, sous certaines conditions, l'Etat indemnise les dommages corporels, matériels ou commerciaux causés par des délits commis dans le prolongement direct des attroupements avec usage de la violence.
Pour cela, il faut apporter la preuve du préjudice et de son lien direct avec les attroupements, évaluer et justifier le préjudice, notamment par des factures ou des photos, prouver que si vous êtes assurés, le dommage ne peut être pris en charge par votre assureur (vous pouvez néanmoins faire payer la franchise à l'Etat). Ces démarches peuvent être effectuées par l'assureur lui-même qui doit adresser une demande de quittance subrogatoire par laquelle l'assuré atteste qu'il confie cette tâche à son assureur. Les demandes des indemnisations doivent être adressées au secrétaire général de la préfecture à l'adresse suivante :
Préfecture de Mayotte – A l'attention du secrétaire général – BP 676 – 97600 Mamoudzou.

 


Déclaration du président Ahmed Abdallah Mohamed Sambi
Sur le site officiel de l'Union des Comores, le jeudi 27 mars 2008

"Il ne reste plus que Mayotte…"

Le président de l'Union des Comores, Ahmed Abdallah Mohamed Sambi s’est adressé à la nation jeudi 27 mars au soir, en langue nationale, à l’occasion de la cérémonie de Maoulid du Palais de Beit-Salam. "Nous venons de remporter une immense victoire. Ne laissez personne gâcher votre joie, ni voler votre victoire" a déclaré le chef de l’Etat, repris sur le site officiel de l'Union des Comores, jeudi dernier, au soir des graves évènements ayant enflammé Mayotte.

Comme il est de tradition, le chef de l’Etat a d’abord chanté les louanges de Dieu et imploré le salut et la paix pour le prophète Muhammad, sa famille et ses compagnons. Il a ensuite prié pour toutes les Comoriennes et tous les Comoriens, de l’intérieur et de la diaspora avant d’entamer son discours dont nous vous livrons ci-après, la traduction.
"Mes chers compatriotes,
Muhammad, que la Paix et le Salut soient sur Lui, qui fut le meilleur des Prophètes, le meilleur des maîtres, le meilleur des époux, le meilleurs des cadi, le meilleur des éducateurs, la meilleure des autorités, était issu de la meilleure descendance.
Celui pour qui nous nous rassemblons toutes ces nuits, était, de toute l’Histoire, le meilleur, et le plus pur de tous les Hommes. Relater sa vie qui était toute une leçon, demanderait alors plus qu’une nuit, des jours et des mois.
Mais puisque nous venons de remporter une éclatante victoire, puisque Dieu vient de nous prouver son amour pour notre pays, puisque les saints hommes de ce pays, du passé et du présent, viennent de nous prodiguer de leur protection, il convient alors d’évoquer en cette occasion un seul des aspect de la vie du prophète : son attitude et son comportement en cas de victoire.

Mes chers compatriotes,
Nous venons de remporter une immense victoire. Notre armée et nos alliés ont libéré l’île d’Anjouan, consacrant ainsi sa réintégration au sein de la République. Oui, malgré le désir de certains, une grande victoire a été remportée. Plus que la victoire, nous ne déplorons aucun blessé ni aucun mort parmi nos soldats, malgré les armes lourdes déployées et utilisées de part et d’autre. Il s’agit d’un miracle de Dieu.
"Lorsque vient le secours d’Allah, ainsi que la victoire et que tu vois les gens entrer en foule dans la religion, d’Allah, alors , par la louange, célèbre la gloire de ton Seigneur et implore Son pardon. Car c’est Lui le Grand Accueillant au repentir"

Comoriennes, Comoriens,
Je vous demande de ne laisser personne gâcher votre joie, ni voler votre victoire.
Il est vrai que nous ne réalisons pas encore ce grand événement dont il faudra des mois, voire des année pour en mesurer la portée.
Ce qui a été réalisé, nous en avons payé le prix par nos invocations. Tous les Comoriens, à l’intérieur du pays et à l’extérieur, ont en effet prié pour notre armée. Alors ce qu’il convient de faire lorsque Dieu nous a accordé Sa miséricorde, c’est de Lui rendre grâce.
Ce qu’il convient de faire alors, c’est de ne laisser personne voler notre victoire.
Je dis cela parce qu’aujourd’hui même, celui-là qui a ordonné les tortures sur nos compatriotes et qui a humilié le pays, s’est réfugié à Mayotte.
Je dis cela parce que tous les Comoriens ont manifesté leur colère envers les autorités françaises de Mayotte qui l’ont accueilli.
Manifester est un droit et personne ne doit, ne peut vous en empêcher. Alors vous pouvez manifester. Mais nous ne devons en aucun cas encourir des reproches en le faisant. Ainsi, vous pouvez déployer vos banderoles et dire aux Français qu’ils ne doivent pas accueillir un tel personnage. Mais de grâce, pas d’insultes, pas de jets de pierres, surtout à l’encontre de ressortissants étrangers dans notre pays.
Des mandats d’arrêt ont été délivrés. Le gouvernement a demandé l’extradition. Il appartient à la France de tenir compte de ce qui s’est passé à Ngazidja, à Ndzouani, à Mwali, à Maore ainsi qu’à la Réunion et en France. Le gouvernement français doit comprendre que les Comoriens soient mécontents.
On nous rétorque l’existence de la peine de mort dans notre pays. Alors je demande qu’il soit envoyé là il n’y a pas de peine de mort, à Arusha ou à La Haye, mais qu’il soit jugé pour ses crimes. J’ose espérer que ce message sera entendu. J’ai appris que le dossier était à l’étude. Mais aucune réponse ne nous a encore été donnée.
Alors manifestez dignement : ne vous en prenez ni aux personnes ni aux biens. Donnons l’exemple et faisons la démonstration que les Comoriens sont des gens civilisés qui réclament leurs droits. Car certains n’attendent qu’un léger égarement de notre part pour transformer notre victoire en défaite.

Mes frères, aujourd’hui notre espace territorial et aérien est entre nos mains. Il ne reste plus que Mayotte que nous n’obtiendrons pas de la même façon. Notre guerre sera dans ce cas, le droit international et la sagesse. Alors nous serons sûrs d’avoir gain de cause.

Frères Mahorais,
Vous devez comprendre que tous nos malheurs passent par Mayotte pour nous arriver. Or Mayotte est notre territoire, à vous et à nous. Son espace territorial et aérien appartient aux Comores. Mais j’espère que l’occasion nous sera donnée d’aborder ce sujet ultérieurement.
Pour le moment, les Comoriens doivent savourer leur victoire et ne pas laisser œuvrer la "fitna". Ils doivent savoir que l’extradition de Bacar ne rime pas avec le saccage et le vandalisme.
Mes amis, j’ai été agréablement surpris de vous voir tous, pour célébrer l’amour que Dieu a pour nous. Le débarquement nous a rassemblé. La victoire nous a rassemblé. L’exigence de l’extradition de Bacar nous a rassemblé.
Alors nous devons imiter le Prophète en pareille circonstance. Lui qui a été humilié, taxé de folie, subi les pires exactions jusqu’aux tortures physiques, forcé à l’exil, a été contraint à la guerre et eut une dent brisée aux cours d’un combat.
Suivons son enseignement, car "à côté de la difficulté est, certes une facilité". Prenons exemple sur lui et sur son comportement le jour où, par une attaque massive et surprise, il entra victorieux à la Mecque. Il rassembla alors tous ses tortionnaires et les assassins de ses compagnons et leur tint ce langage : "à quoi vous attendez-vous de ma part aujourd’hui ?". Ils répondirent : "que du bien, car vous êtes un noble frère et le fils d’un noble frère". Alors le prophète leur dit : "allez votre chemin, vous êtes des hommes libres".
Ainsi le Prophète a pardonné. Prenons cette leçon car le pardon est un signe d’humanité et de grandeur d’âme. Certes, certains ne méritent pas le pardon. Mais il y a les pions et les responsables. Alors à grande victoire, grand pardon. Ne laissons pas filer notre chance car même au milieu de l’atmosphère de ces derniers jours, des investisseurs arabes sont arrivés dans notre pays.

Pour terminer, je dis grand merci à nos soldats sur qui je vous demande, mes chers compatriotes de prendre exemple et grand merci à nos alliés. Nous sommes fiers de vous tous. Le jour viendra où nous vous exprimerons solennellement la reconnaissance de la Nation. Mais votre salaire appartient à Dieu qui récompensera dans ce monde et dans l’au-delà. D’ores et déjà, je vous annonce que le 25 mars sera désormais célébrée comme la journée de l’Armée Comorienne.
Je remercie les pays alliés et je leur demande de poursuivre l’œuvre commencée, en nous aidant à bâtir notre pays.

Quant à vous, honorable assistance, je vous remercie et je vous demande d’être mes porte-parole auprès de nos concitoyens en général et de nos jeunes en particulier, pour leur dire de refuser la transformation en défaite, de notre éclatante victoire.
Dieu dit "si vous êtes reconnaissants, Je vous augmenterai (ma grâce).
Que la Paix, la Miséricorde et les bénédictions d’Allah soient sur vous.

Sambi en Syrie
Le président Sambi a quitté Moroni jeudi soir après son discours, à destination de Damas où il prend part à la 20ème session du Sommet de la Ligue des Etats Arabes. La situation aux Comores, entre autres, figure à l’ordre du jour de ce Sommet.
Le président de l’Union des Comores qui a été, parmi les dirigeants arabes, le premier arrivé à l’aéroport international de la capitale Syrienne, a été a accueilli par le Président de la République Arabe Syrienne, Son Excellence Monsieur Bashar al-Assad.
Après la cérémonie d’ouverture du Sommet, samedi, le Chef de l’Etat Comorien s’est adressé à ses homologues arabes pour leur parler, notamment, de la victoire que vient de remporter l’Armée Nationale de Développement et les forces de l’Union Africaine à Anjouan et pour en appeler à la solidarité arabe pour la construction du pays.
Le président Sambi n’a pas manqué d’aborder les crises qui secouent plusieurs pays du monde arabe : Irak, Somalie, Soudan et la question palestinien. Le discours du chef de l’Etat, "d’une rare qualité, de part la pertinence des propos et l’éloquence linguistique, émaillée de vers poétiques, a été très applaudi", se félicite son site internet. Sa traduction vous sera proposée sur ce site, dès qu’elle sera disponible.

* titre de la rédaction

25/03/2008 – Election du président du CG – Ahamed Attoumani Douchina succède à S2O et Bamana

Le Mouvement départementaliste mahorais (MDM) et l'UMP ont réussi (avec le soutien du PS local) à ouvrir une nouvelle page dans l'histoire politique de Mayotte en élisant hier matin, jeudi 20 mars 2008, Ahamed Attoumani Douchina, conseiller général UMP de Kani kély, nouveau président du conseil général, succédant à Saïd Omar Oili.
De longs mois de tractations ont été nécessaires pour ficeler cette entente entre les deux principaux partis politiques qui se sont longtemps combattus tout en ayant le même idéal : obtenir de Paris la transformation de Mayotte en département français d'Outremer.

Un objectif qui commençait à perdre sa consistance dans l'esprit des jeunes générations, sous les coups que lui ont portés Saïd Omar Oili, Bacar Ali Boto et d'autres, parfois dans des déclarations publiques contradictoires et purement politiciennes. Conscients des risques d'opposition au sein des ailes dures de leurs formations respectives, les dirigeants de l'UMP et du MDM (canal historique) ont démarré leurs négociations dans le grand secret depuis le mois de juin dernier pour l'imposer peu à peu à leurs troupes, aidés en cela par un contexte politique globalement inquiétant pour l'ensemble des habitants de Mayotte, consécutif à la mise en place progressive du droit commun.

C'est dès le début des discussions que fut acté le principe de confier la présidence du conseil général à un élu UMP pour faciliter le contact avec le gouvernement de François Fillon et s'assurer ainsi que rien ne vienne entraver le déclenchement du processus de départementalisation.

La semaine qui s'achève fut riche en rebondissements et suspicions de toutes sortes, faisant craindre un moment un éclatement de cette alliance difficilement obtenue. En effet, différents scénarios d'union parmi les élus rescapés de la purge électorale de dimanche dernier se sont imposés dans les discussions de la population, faisant craindre le pire aux observateurs et acteurs de la vie économique et sociale de Mayotte.

Le premier enjeu de ces multiples tractations a été d'assurer une majorité forte et stable. Il s'agissait aussi pour certains d'empêcher Saïd Omar Oili (et son parti le Néma) de conserver le pouvoir et installer durablement son hégémonie dans le pays. S'il est le seul élu sortant à avoir retrouvé son siège dès le premier tour du scrutin le 9 mars dernier, l'ancien président du conseil général n'a réussi à faire élire qu'une seule personne sous les couleurs de son nouveau parti, Mme Sarah Mouhoussoune à Dembéni, où elle a battu Maoulida Soula, le dauphin désigné de Mansour Kamardine, l'ancien député et conseiller général de Sada, logiquement pressenti pour succéder à S2O.

 

L'alliance historique scellée sur le Coran

Finalement, chacun des deux camps a réussi à obtenir un consensus dans ses rangs pour faire aboutir, mercredi soir à Tsingoni chez Zoubert Adinani, président du MDM, l'alliance historique. Deux précautions valant mieux qu'une, ce pacte fut scellé mercredi en début de soirée, chacun des conseillers généraux engagés dans la formation de cette future majorité ayant prêté serment sur le Coran. Devant son échec à former une majorité, Saïd Omar Oili ne s'est pas porté candidat à sa succession au cours de l'élection de jeudi. C'est donc sans surprise pour le public qu'Ahamed Attoumani Douchina a été élu président du conseil général par 14 voix contre 5, sous une montagne d'applaudissements.

Mhamadi Abdou (conseiller général de Bandraboua et secrétaire général du MDM, un des principaux artisans de cette alliance) est élu 1er vice-président, suivi d'Ahamada Madi Chanfi (conseiller général MDM de M'tsangamouji), Hadadi Andjilani, conseiller général UMP de Ouangani est 3ème vice-président, Mirhane Ousséni (MDM) nouvellement élu dans le canton de Bouéni étant 4ème vice-président, et Ali Assanali, nouveau conseiller général (UMP) de Mamoudzou 1, fermant la marche de ce bureau du CG avec la 5ème vice-présidence.
S'adressant pour la première fois aux Mahorais, dans sa qualité de président de l'assemblée départementale, Ahamed Attoumani a déclaré avoir conscience des grandes attentes de la population et promis d'essayer de ne pas la décevoir.

 

Saïd Issouf

25/03/2008 – Semaine de la presse – « Longue vie à Soma ! »

12 pages A4 en couleurs, des articles culturels, des portraits d'artisans, des interviews… Le premier numéro de Soma est une réussite. Vaste projet lancé par le vice-rectorat et le CDP à l'occasion de la Semaine de la presse, il a débuté par un stage de formation sur la presse à l'école organisé au mois de janvier pour des enseignants volontaires de 14 établissements scolaires avec des journalistes, parmi lesquels plusieurs représentants du Mayotte Hebdo.

Revenus en classe, les enseignants ont animé un module "Presse à Mayotte", autour de 5 thèmes : connaissance de la presse à Mayotte, étude de la Une, hiérarchisation de l'information, le rôle de l'image et les règles de l'écriture journalistique. Des ateliers dits de "pédagogie active", coordonnés par les professeurs de français et les documentalistes.

"Les élèves ont appris à écrire quelque chose voué à être lu par de vrais lecteurs", a souligné le coordinateur de l'opération Yves Busière, principal adjoint du collège de Doujani, qui accueillait la cérémonie de lancement du journal mardi. "J'ai pu faire passer des apprentissages très pointus qui auraient été beaucoup plus durs en cours de français classique, renchérit Mme Magoma la documentaliste du collège. Les élèves se sont réellement intéressés à la lecture et à l'écriture, et leurs liens avec nous ont été transformés."

Après avoir salué le "travail remarquable" des élèves, le vice-recteur a souligné l'importance de la maîtrise de la langue française pour laquelle "la presse à Mayotte a un rôle fondamental de partenaire." Le Mawana et Mayotte Hebdo ont été vivement remerciés pour leur participation dans cette aventure, en fournissant leurs invendus comme support de travail et des intervenants (Mayotte Hebdo) pour le stage des enseignants.

 

1.500 exemplaires pour un résultat de qualité

"L'Education nationale a aussi pour rôle de faire de vous des citoyens, a ajouté M. Cirioni. Ce travail sur la presse vous a appris à développer votre esprit critique." L'esprit critique et la curiosité. Les 25 articles du premier numéro de Soma montrent un intérêt particulier des jeunes pour le développement de leurs communes, les métiers de l'artisanat, certains en voie de disparition, et l'évolution de la société : place de la femme, enjeux environnementaux…

Les articles sont le fruit du travail des collèges de Doujani, Chiconi, M'tsangamouji, Sada, Tsimkoura et du lycée de Kahani, seuls des 14 établissements à avoir pu tenir les délais de rendu des textes. Réouverture du gîte de M'liha, nouveau terrain de foot et gendarmerie à Sada, sinistrés de Fame, portraits d'une potière, d'un fabriquant de bijoux, belles rencontres avec un pêcheur retraité et des anciennes de M'tsangamouji, les jeunes journalistes en herbe sont allés à la rencontre de leur île et le résultat est de qualité.

"Ce travail nous a aidé à connaître notre commune, confient les élèves de Doujani. Nous avons découvert des métiers que nous ne connaissions pas." "Nous avons découvert des choses sur notre patrimoine", renchérissent ceux de Chiconi. Les collégiens ont suivi le but de ce journal, résumé d'une phrase sous son titre : "Savoir lire, savoir écrire, comprendre Mayotte, comprendre le Monde."

Pour les prochains numéros, ils ont déjà plein d'idées de sujets, comme la délinquance, un phénomène qui en intéresse plus d'un, ou l'environnement. Car ce premier numéro de Soma, tiré à 1.500 exemplaires et distribués dans tous les établissements scolaires de l'île, n'est que la première pierre.

 

Un trimestriel l'an prochain

Comme un leitmotiv, chaque intervenant lors de la cérémonie de lancement a conclu par un vibrant "longue vie à Soma". A partir de l'année prochaine, il devrait sortir un numéro par trimestre, chacun réalisé par deux établissements. M. Busière envisage sept rubriques : "Métiers", "Vie locale", "Comprendre Mayotte", "Comprendre le Monde", "Vie des établissements", "Conseils santé prévention" et "Culture loisirs".

Chaque année la Semaine de la presse à l'école est très suivie dans les établissements de l'île, qui invitent des journalistes à intervenir auprès des élèves et à travailler avec eux sur des projets de journaux. Cette année a permis de mettre tout ce travail et cet intérêt qu'ont les élèves en lumière, alors… longue vie à Soma !

Hélène Ferkatadji

 

UNE Mayotte Hebdo N°373 – Vendredi 21 mars 2008

UNE Mayotte Hebdo N°373 - Vendredi 21 mars 2008

Elections d'Ahamed Attoumani Douchina à la présidence du Conseil Général

Fort majorité UMP – MDM

 > Elections – portrait des 19 conseillers généraux
 > Education – semaine de la presse
 > Région – un hélicoptère français s'écrase à Anjouan

UNE Mayotte Hebdo N°372 – Vendredi 14 mars 2008

UNE Mayotte Hebdo N°372 - Vendredi 14 mars 2008

Elections cantonales et municipales

Younoussa Bamana, Saïd Omar Oili ?

 > Elections – cantonales & municipales: tous les résultats
 > Education – des classes vertes pour 19 écoles

14/03/2008 – Des jeunes pour préserver notre culture

Arrivés sur le territoire national le vendredi 29 février, la vingtaine de jeunes composant ce groupe, âgés de 6 à 16 ans et accompagnés de six adultes ont offert, ce samedi 8 mars – Journée internationale de la femme – un spectacle de grand talent à Saint-Denis (93), en région parisienne. Invité par l’Association de la communauté mahoraise en Île-de-France (ACMI), le Cclej de Pamandzi avait déjà offert un premier spectacle, au lendemain de son arrivée – le 1er mars – dans le stand de Mayotte au Salon de l’agriculture, Porte de Versailles. Un avant-goût qui avait émerveillé les nombreux curieux présents pour la fermeture du salon.

Emerveillement, cela a aussi été le cas à Lyon, le même jour. Invités là aussi par une association mahoraise, celle des Mahorais du Rhône (AMR), les jeunes danseurs de Pamandzi ont ici surpris des Mahorais assez réservés au départ, à l’idée de venir assister à un spectacle assuré par des enfants. Mais à la fin du spectacle, tous ont été étonnés de la manière dont ces enfants ont assuré ces danses qu’on ne voit plus et dont l’existence nous parait si lointaine. Car malgré les dires de certains – selon lesquels la culture traditionnelle mahoraise aurait perdu son authenticité et qu’il ne resterait aujourd’hui que de simples traces de son vécu – il est important de souligner que d’autres travaillent, dans l’ombre, pour faire revivre cette culture et surtout la faire partager.

C’est exactement le cas de ce centre de loisirs de Pamandzi qui dispose en autre d’un atelier permanent de danses traditionnelles, tenu par Nouriatti Mohamed, dont l’objectif est d’apprendre à des jeunes de 6 à 16 ans, voire au-delà, certaines danses qui, sans cet atelier et les souvenirs des anciens, ne feraient plus partie que de l’histoire ancienne de Mayotte.
Au sein de cet atelier, ces jeunes apprennent à chanter et à danser le karama, le kwézi coco, le mengochouma, le bazo, le haïlolo, le namachololo, le chirondroa, le chipanga, le bomo, le tratrumbé, le chakacha, le biyaya, le chigoma, le mlélézi ou mchogoro, le mgodro authentique (traditionnel, ndlr) le magandja et tant d’autres.

Des danses et des chants ancestraux qui tentent de se frayer un chemin au sein d’un paysage culturel dominé par des musiques modernes en tous genres. "Ce qui est difficile pour nous, c’est qu’au-delà de 17 ans, il nous est difficile de garder ces jeunes", regrette Souraya Abdourahamane, animatrice au Cclej de Pamandzi qui nous explique qu’arrivés à cet âge de la majorité, les jeunes ont du mal à supporter le fait de danser autour de la tradition.

 

La santé, la jeunesse et le sport ne font qu’un

Les Cclej, associations de type loi 1901, ont été mis en place à l’initiative du conseil général pour permettre aux animateurs communaux de Mayotte de créer des activités ludiques et éducatives dans les villages de l’île. Le Cclej de Pamandzi vit au moyen des festivités qu’il organise, mais aussi et surtout des subventions que lui accorde la commune. L’année dernière, le Cclej avait reçu de cette dernière une somme non négligeable de 40.000 euros, principalement dédiée à la gestion du centre, des ateliers, au financement des costumes ainsi qu’aux échanges comme celui-ci avec l’ACMI.

Pour commémorer à sa manière la Journée internationale de la femme, cette dernière a fait appel au Cclej. Ce samedi 8 mars, ils se sont fait attendre, les Mahorais de Paris et d’Ile-de-France, mais ils sont quand même venus encourager ces jeunes, très à l’aise dans leur engagement à faire vivre la culture traditionnelle mahoraise. Ils ont laissé sans voix ces Mahorais qui ont fait durant quelques heures un petit retour aux sources.
A la fin, tous étaient convaincus qu’il fallait absolument faire en sorte que ces danses ne se perdent pas. Et la manière d’aider ceux qui s’engagent à les faire vivre est un fort soutien public à travers des politiques culturelles de qualité et des échanges comme le Cclej de Pamandzi, pris pour exemple, a l’habitude de faire, à Mayotte mais aussi dans la région, comme récemment au festival Donia à Madagascar, à Zanzibar ou encore dans le reste de l’archipel des Comores.
Ces échanges concernent aussi l’Hexagone et l’Europe. Une initiative à soutenir car après cette représentation réussie à Saint-Denis, les danseurs du Cclej se sont produits dans une école de Montreuil, toujours en région parisienne, avant de reprendre l’avion ce jeudi pour Mayotte. Ce groupe qui a aussi remporté le 1er Prix de danses traditionnelles lors des derniers Jeux de l’avenir est encouragé par les Affaires culturelles du conseil général. Comme quoi, la santé, la jeunesse et le sport ne font qu’un. Vive la culture !

R.T Charaffoudine Mohamed

14/03/2008 – Environnement – Des classes vertes pour 19 écoles

 

L'organisation de ces séjours est également cette année l'occasion d’organiser une formation en collaboration avec le vice-rectorat sur le montage de projets et l’éducation à l’environnement auprès des instituteurs. Cette formation, qui a eu lieu du 21 au 25 janvier dernier à l'IFM s'est déroulée pour moitié sur le terrain pour travailler l'animation nature avec les animateurs de la cellule éducation à l'environnement de la DEDD. L'autre moitié, la partie théorique, consistait à donner aux enseignants les bases de la méthodologie de projet et leur apporter des connaissances sur le déroulement des séjours de mineurs. A la fin de la formation chaque enseignant a rédigé son projet de séjour, ainsi que l'exploitation prévue en classe.

Chacun des 19 séjours est donc le projet propre de l'enseignant, qui détermine le circuit et les sites à visiter. Les deux animateurs du Ceméa recrutés spécialement apportent leur aide logistique pour l'hébergement, la nourriture et les animations diverses. Les animateurs de la DEDD peuvent intervenir sur des sites spécifiques. Le conseil général est le financeur.

 

Un travail en aval du séjour

Pointe de Sazilé, parc botanique de Coconi et retenue collinaire de Dzoumogné pour la classe de Labattoir 3 ; maison du gouverneur et site de Moya pour ceux de M'tsangamouji 4 ; retenue collinaire de Combani, station dépuration, kayak à Passamainty et lac Karéhani pour Tsoundzou 2… Chaque classe verte a son parcours, qui s'intéresse au choix au thème de l'eau, de la forêt ou des sites historiques. Lors de la formation des enseignants, les animateurs de la DEDD ont évoqué plusieurs pistes à travailler : la forêt primaire, les sites de ponte des tortues, les parcs de la Collectivité…

Ces séjours, qui débutent dès la rentrée de lundi pour se terminer en juin, seront ensuite l'objet d'un travail en classe. Tout de suite après le retour, l'enseignant fera faire aux élèves diverses activités d'exploitation des choses apprises et préparera avec eux un travail de restitution du séjour qui peut être un film, un carnet de voyage, une exposition photo, etc.
En fin d'année scolaire chaque école concernée organisera une journée spéciale avec présentation du projet et des travaux des élèves. Organisés en 2007 pour 10 classes du cycle 3 (CE2 au CM2), cette année pour 19 classes, ces séjours découverte environnement permettent à la fois sensibilisation à l'environnement – des enfants et des adultes – et découverte de leur île.

Hélène Ferkatadji

 

10/03/2008 – Portes ouvertes – Le lycée de Kawéni exhibe ses talents

Dès leur entrée dans l'établissement, les collégiens sont accueillis par les élèves de bac pro service accueil qui leur distribuent des dépliants sur les formations du lycée. Les élèves de terminale bac pro vente ou Bep vente action marchande prennent en charge les différents groupes pour une visite guidée. Après le restaurant, c'est parti pour le tour des salles qui présentent les différentes filières. Les élèves de CAP petite enfance montrent comment elles préparent des collations pour des enfants, proposent une animation maquillage avec du m'sindzano et la fabrication de poupées et marionnettes. Chaque groupe a droit à un spectacle de marionnettes qui raconte la formation qu'elles suivent.

Salle suivante, les élèves de bac pro vente se lancent dans le commerce de produits locaux, négociés avec des partenaires. Leurs collègues de vente action marchande montrent aux collégiens l'exercice de la revue de presse. Devant chaque salle, un descriptif de la section est affiché, agrémenté des explications du jeune guide. Un questionnaire est distribué à tous les élèves visiteurs sur ces différentes filières, le gagnant remportera un dîner pour deux personnes au restaurant d'application.

 

Améliorer l'orientation des collégiens

"Le but n'est pas vraiment de recruter des élèves pour l'année prochaine, tous les établissements de l'île ont l'assurance d'être pleins. Cette journée a plutôt pour but d'aider les collégiens dans leur orientation, bien souvent ils se lancent dans une section qu'ils ne connaissent pas et découvrent après la rentrée que ça ne leur convient pas." Des élèves de restauration qui constatent avec fatigue qu'il faut rester debout plusieurs heures, à l'unique garçon de petite enfance qui se dit qu'il aurait du choisir mécanique, les erreurs d'orientation sont nombreuses et en partie responsables de l'échec scolaire. Vendredi, l'ensemble des collèges de l'île ont envoyé des élèves de troisième découvrir les enseignements proposés à Kawéni.
Démonstration des gestes de premiers secours et jeu de Kim (mémoire des sens) par les élèves d'ATMFC et de carrières sanitaires et sociales, observation de microbes avec les SMS… Malheureusement, si les visiteurs ont apprécié leur journée, ils n'ont pas posé grand nombre de questions ni eu l'air particulièrement intéressés. Il faut espérer qu'ils retiendront l'essentiel au moment de remplir les feuilles de souhaits d'orientation en avril.

Hélène Ferkatadji

Les formations professionnelles du lycée

4 CAP

Agent technique en milieu collectif et familial
Cuisine
Restaurant
Petite enfance
+ à la rentrée Agent de prévention et médiation

 

3 BEP
Carrières sanitaires et sociales
Hôtellerie restauration
Vente action marchande

 

3 bacs pro
Commerce
Services (accueil)
Restauration

Une formation complémentaire restauration rapide


Les formations de l'UFA

6 CAP en alternance
Boulanger
Cuisinier
Employé de restaurant
Coiffeur
Agent d'entreposage
Vendeur spécialisé

10/03/2008 – Elections – Le profit personnel prédomine sur les projets

Plus que deux jours de meetings et de réunions publiques pour les candidats aux élections municipales et cantonales de cette année. Malgré la menace cyclonique qui pèse sur notre île, 17 sièges de maires devraient être pourvus ce dimanche ou du moins se préciser, et 10 au conseil général, un tiers des élus de cette assemblée bénéficiant d'un répit de 3 années. Ils sont 54 candidats à se présenter aux cantonales, parmi lesquels 8 femmes : 1 à Bouéni, Mamoudzou II et Mamoudzou III, 2 à Dembéni, 3 à Dzaoudzi-Labattoir.

Outre ce nombre important de femmes qui se présentent, la grande nouveauté de ces élections demeure le respect de la parité homme/femme sur les listes municipales, et l'arrivée de remplaçantes (ou remplaçants) aux cantonales. Autre élément notable, l'explosion du nombre de listes pour les municipales. La palme d'or revient à la commune de M'tsamboro avec 8 listes pour la mairie et 8 candidats pour le CG ! Près d'un électeur sur 30 inscrits sur les listes se présente à ce scrutin, ce qui nous ramène à un chiffre global de 2.349 candidats.

Les listes d'union sont légions, des jeunes diplômés pour la plupart qui espèrent rassembler au-delà des partis, en fédérant les compétences au service de leur territoire. Le phénomène est suivi à la loupe par les partis politiques qui constatent impuissants la désertion massive des électeurs de leurs rangs. Il y a un travail d'ouverture, de réflexion à mener d'urgence par ces partis afin que les énergies se fédèrent en leur sein, eux qui sont normalement inscrits dans la durée et disposent d'une structure à même de renforcer les actions et pour disposer de relais à Paris. Le patriotisme politique d'antan ne fait plus recette ! Si cette cohorte de jeunes prétendants ne réussit pas à franchir le cap du premier tour, la population aura du souci à se faire.
En effet, au sein des grandes formations locales, l'heure est toujours aux enfantillages et au verbiage inutile qui dénote la fin d'une époque et un changement radical de mentalités.

A quelques exceptions près, cette campagne des municipales et des cantonales n'aura pas reçu un grand écho auprès des citoyens. Du moins en apparence. La grande passion du Mahorais pour la politique a perdu quasiment toutes ses couleurs, et les lendemains d'élections pourraient être déchantants pour les nouveaux élus, contrairement aux habitudes du passé.
Le Mahorais n'hésite plus à dire haut et fort qu'il en a marre du "blabla" et des effets d'annonce sans suite dont ses élus sont coutumiers. Nombreux sont ceux qui ont choisi leur candidat sur d'autres critères –plus personnels – que la compétence ou l'efficacité à se mettre au service des citoyens. C'est le cas de nombreux électeurs inscrits. D'une façon générale, on entend dire ici là : "comme de toute façon nous allons nous remplacer des nuls par d'autres nuls, autant que ce soit un membre de ma famille plutôt qu'un inconnu".

 

Le glas pour certains "dinosaures"

Les élus sortants ont réussi à propager dans la population leur goût immodéré pour leurs intérêts personnels. Pour les candidats en lice, surtout aux élections cantonales, la victoire dépendra sans doute en très grande partie du poids de leurs poches et de leur volonté à distribuer pour s'attirer la bienveillance d'un électorat méfiant, plutôt que du projet développé durant la campagne. Hormis quelques candidats qui ne peuvent suivre ce mouvement faute d'en avoir les moyens, la plupart des appareils politiques s'en accommodent et se laissent même aller dans une certaine surenchère. Nul ne croit en son capital confiance au sein de l'électorat, ce qui n'empêche pas certains d'afficher une certitude apparente de victoire ce dimanche soir, même si en réalité le cœur n'y est pas.

Ce scrutin de 2008 sonnera peut-être le glas pour certains "dinosaures" de la politique locale qui risquent de se voir infliger une retraite forcée. Parallèlement, des jeunes loups pourraient se voir infliger des défaites cuisantes qui les obligeraient à aller revoir leurs copies et ranger leurs ambitions pour encore 6 années, quitte à intégrer un parti politique ou un autre pour disposer de plus de soutien. Encore faudra-t-il que les partis s'ouvrent vraiment.
Certains auront pêché par manque de notoriété dans leurs villages d'origine, leur manque de cynisme et de démagogie à deux sous et leur trop grande envie de rendre à l'action politique son honnêteté perdue. Après tout, n'est pas prophète qui veut (en son royaume) au seul motif d'avoir entendu les mêmes voix que Jeanne de France il y a quelques siècles, ou Moïse dans les montagnes du Sinaï au temps de Ramsès le deuxième. Dans ce contexte, le lecteur comprendra la difficulté pour les analystes politiques de la place et des rédactions de presse à établir des pronostics fiables pour ces élections.

Qui faut-il plaindre dans cette affaire ? L'électeur qui se laisse corrompre pour si peu ou l'homme politique qui essaye d'acheter son élection à coup de cartons de mabawas et de boissons alcooliques (dans le nord), de stocks de nambaoinis pour femmes enthousiastes (à Sada), de pique-nique géants avec viande de zébus fraîchement abattus (à Labattoir) ? Ceux-ci ne sont que les cas les plus flagrants dans cette course effrénée de tentative de "rapprochement" avec des électeurs, pour compenser le manque d'imagination des candidats et de consistance de leurs projets politiques.

Certains n'hésitent pas à faire de la surenchère, en promettant de doubler le nombre de zébus à abattre une fois les élections gagnées, en guise de remerciement aux électeurs. Assurément, ce n'est pas la démocratie italienne, mais ça lui ressemble fortement. Dans le doute, certains candidats vont même jusqu'à faire des économies sur les affiches électorales et les professions de foi à imprimer, pour s'assurer de disponibilité de liquidité, les billets de banque faisant le bonheur des électeurs les plus malins, ceux qui passent d'un camp à un autre pour soutirer le maximum d'avantages aux candidats. Rendez-vous ce dimanche dans l'un des 130 bureaux de vote.

Saïd Issouf

75 listes pour 17 communes
Il y a 5 listes qui s'opposent à Mamoudzou pour 45 conseillers nécessaires, mais seulement 2 à Chirongui; 3 à Bandrélé, Ouangani et Tsingoni; 4 à Acoua, Bandraboua, Chiconi, Kani-Kély et M'tsangamouji; 5 Dzaoudzi-Labattoir, Koungou et Pamandzi; 6 à Bouéni et Sada, 8 à M'tsamboro.

 

Mayotte Hebdo de la semaine

Mayotte Hebdo n°1116

Le journal des jeunes