Accueil Blog Page 750

19/09/2008 – Création de l’Observatoire mahorais de l’énergie

"L'homme ne peut qu'en proportion de ce qu'il sait". C'est par cet adage qu'Augusto Soares Dos Reis, le directeur d'EDM, a présenté les avantages de la création de l'OME, "un outil de savoir au service des décideurs publics et privés". Cette nouvelle structure a en effet pour vocation d'éclairer les acteurs de l'énergie sur l'approvisionnement (la diversité des sources d'énergies et la dépendance énergétique insulaire) et la consommation d'énergie grâce à un indicateur permettant de mettre en évidence le taux d'équipement des ménages et le développement économique de l'île.
Il est vrai qu'avec une croissance annuelle de 15% de la consommation en électricité, Mayotte est le territoire le plus dynamique de France (voir encadré sur le bilan énergétique 2007), signe évident du rattrapage en cours. Grâce à l'OME, l'impact socio-économique et environnemental de cette croissance vertigineuse pourra être évalué à l'aune de la politique énergétique voulue par l'Etat et le conseil général.
"Nos besoins en énergie, en forte croissance, sont uniquement couverts par le pétrole", a souligné M. Douchina, "le conseil général souhaite diversifier les sources naturelles d'approvisionnement et préconise le recours à grande échelle de l'énergie solaire, car il est impératif que Mayotte limite ses importations en hydrocarbures". Le président du conseil général a également souligné que "la mise en place du Plan climat énergie, qui conditionne le développement durable de Mayotte, se combinera à l'OME pour apprécier les politiques énergétiques et les améliorer".
 
 

"Le plus fort taux d'énergie solaire de France, à l'horizon de trois ans"

Les études de l'OME permettront en outre d'établir des synergies entre les différents acteurs sur les deux enjeux essentiels mis en avant par le directeur d'EDM : "favoriser la maîtrise de la demande en électricité et développer le mix énergétique". A ce propos, M. Soares Dos Reis a réaffirmé sa volonté de faire de Mayotte le territoire ayant "le plus fort taux d'énergie solaire de France, à l'horizon de trois ans". Il a toutefois rappelé que ce taux ne pourra pas dépasser 30% de la puissance appelée à un instant "t", car il pourrait y avoir un risque de délestage, voire de black-out, si un nuage passe…

Christophe Peyrel, secrétaire général à la préfecture, a lui aussi souligné "le besoin d'avoir ici une vision partagée sur l'économie d'énergie", mettant en exergue le fait que les solutions dans ce domaine sont très difficiles à trouver car une multitude de partenaires y intervient et la mise en œuvre des politiques "doivent réussir à concilier des intérêts privés et publics parfois contradictoires".

Au niveau de l'Etat, les études de l'OME permettront de "fédérer l'ensemble des services dans les domaines de leurs compétences, le but étant de faire converger l'ensemble de nos connaissances et de nos motivations". M. Peyrel a également rappelé que l'axe 5 du Contrat de projet consacrera 156 millions d'euros aux économies d'énergie, à l'assainissement et aux déchets pour la mise en place d'un développement durable de l'île.

Abdou Dahalani, le président du Conseil économique et social, est également intervenu pour préconiser des conseils de gestes économes chez les usagers particuliers, mais également chez les maîtres d'œuvre pour intégrer les économies d'énergie dans la conception des bâtiments. Il est vrai que la question énergétique, surtout depuis que la problématique du développement durable est devenue une priorité mondiale, doit avant tout réussir à s'intégrer dans l'évolution des mentalités et des habitudes des consommateurs. Nul doute que les études futures de l'OME contribueront à ce travail de longue haleine.

Julien Perrot

Le bilan énergétique de Mayotte en 2007

La première étude réalisée par l'OME est le bilan énergétique 2007 de Mayotte. Cette étude a été réalisée par l'Arer (Agence régionale de l'énergie de la Réunion) grâce au concours de tous les partenaires (Conseil général, Ademe, EDM, etc.). Une version papier tirée à 650 exemplaires sera disponible à partir du mois prochain auprès des partenaires de l'OME et des centres documentaires mahorais. Une version électronique sera également disponible sur les sites internet des membres de l'OME et des observatoires nationaux de l'énergie.

En 2007, la consommation primaire totale est de 88,2 ktep (kilo tonne-équivalent-pétrole), dont 92% provient des importations, qui sont en totalité d'origine fossile (essence, gazole, carburéacteur, etc.). Les importations en 2007 ont crû de 1,8% par rapport à 2006 et de près de 40% depuis 2002. Les 8% restant de la consommation primaire provient des ressources locales (98% de bois et 2% des huiles usagées et l'énergie solaire). Le taux de dépendance énergétique s'élève donc à 92,2% et la part renouvelable (à Mayotte, il s'agit du bois, du charbon de bois et de l'énergie solaire) de la consommation primaire totale s'élève à 7,8%.

En ce qui concerne la production d'électricité, la puissance totale à Mayotte en 2007 est de 49 MW, assurée à 99% par des systèmes de production utilisant le gazole (centrale des Badamiers et groupes de secours de Kawéni). En 2007, la production électrique livrée sur le réseau est de 196 GWh (17 ktep), soit une efficacité de 41% pour la transformation des produits fossiles en électricité. Entre 2006 et 2007, la croissance de la production d'électricité est de 14,7%. A titre indicatif, cette évolution est de 3,9% à la Réunion et elle est négative (-0,8%) en Métropole. Enfin, la consommation électrique en 2007 est de 172,4 GWh, soit une augmentation de 35% entre 2002 et 2007, et surtout 15% entre 2006 et 2007.

En ce qui concerne la consommation des carburants dans les transports, l'OME note une augmentation très importante, passant de 26.080 tep en 2002 à 34.560 tep en 2007. Une augmentation notamment due à l'augmentation du transport routier, passé de 20.996 tep en 2002 à 28.027 tep en 2007.


257.767 tonnes de CO2 rejetées

Au total pour 2007, le secteur énergétique a généré un total de 257.767 tonnes de CO2 rejetées dans l'atmosphère, soit 1.382 kg de CO2 par Mahorais par an. A titre indicatif, à la Réunion, ce chiffre est de 4.740 kg par habitant par an et de 6.190 en Métropole. Parmi ces 1.382 kg de CO2, 701 proviennent de la production d'électricité, 471 du transport terrestre, 66 de l'aérien, 44 du maritime, et 101 proviennent des secteurs résidentiels, tertiaires, industriels et agricoles. Une voiture moyenne essence qui parcourt 10.000 km par an émet 2,2 tonnes de CO2 : ainsi, l'ensemble du secteur énergétique mahorais rejette annuellement autant de CO2 que 117.167 voitures.

19/09/2008 – GTHN – « Nous avons décidé de ne pas parler des questions qui fâchent »

"Les discussions ont été cordiales et franches, et c'est un message d'espoir pour l'avenir de nos populations, avec la perspective concrète d'un accord entre les deux Etats avant la fin de l'année". Philippe Leyssenne, ambassadeur de France délégué à la coopération régionale dans la zone de l'océan indien, a semblé très optimiste quant à l'évolution des négociations bilatérales entre la France et les Comores sur les deux dossiers que sont la coopération régionale et la circulation des biens et des personnes.
Le nouveau préfet Denis Robin a constaté que les travaux du GTHN permettront de "régler des problèmes humains difficiles" concernant l'immigration clandestine et que "le développement des flux économiques entre les îles peut être une solution aux problèmes d'approvisionnement avec des produits agricoles à moindre coût pour les Mahorais et des débouchés commerciaux pour les producteurs comoriens". Une démarche que Mohammed Soihili, chef de la délégation comorienne, a qualifiée de "gagnant-gagnant", soulignant que "dans le cadre globalisé actuel, l'avenir est aux grands ensembles économiques".
M. Soihili a affirmé que "ces négociations tracent une perspective vers l'avenir et non plus vers le passé avec des diatribes lancées aux uns et aux autres". Ahamed Attoumani Douchina, le président du conseil général, était ravi que les élus mahorais participent aux débats et a déclaré que "d'une manière implicite, on s'est reconnu en entités différentes. Nous avons pu aborder le problème de la circulation des personnes d'une manière franche et loyale, sans arrière-pensée. Je me réjouis qu'ils n'ont pas remis en cause le choix des Mahorais et leur avenir institutionnel". Pour M. Douchina, les différents échanges dans les domaines de l'éducation, de la santé, de la culture ou de l'économie, qui existent déjà de manière informelle, seront grâce au GTHN plus "lisibles et transparents pour nos populations".
Pourtant, quand l'ambassadeur comorien a évoqué "la libre circulation des personnes" une fois l'objectif atteint de réduire l'écart de développement entre les Comores et Mayotte, cette "racine du mal" selon les mots de l'ambassadeur français, M. Douchina s'est porté en faux en déclarant que "faciliter la venue de nos voisins doit être l'occasion de freiner les entrées illégales et d'accompagner de manière digne les clandestins qui sont ici en ce moment".
Interrogé sur la reconnaissance de l'appartenance de Mayotte à la France, l'ambassadeur comorien a livré une réponse très ambiguë : "Nous avons décidé de ne pas parler des questions qui fâchent. Nous devons dépasser cette question de positionnement. Nos deux présidents ont dit qu'au lieu de se battre, il faut contribuer au rapprochement des quatre îles". M. Soihili a fait référence au rapprochement franco-allemand pour soutenir sa position, affirmant qu'il avait "confiance en la créativité de l'homme pour regarder vers l'avenir".

Julien Perrot

Bientôt quatre actions concrètes…

Le quatrième round de négociations en novembre sera l'occasion de la réalisation effective des premières actions, notamment : la réouverture de l'antenne consulaire d'Anjouan, la concrétisation d'une action de formation professionnelle à l'initiative du vice-rectorat de Mayotte, des premiers échanges, notamment de produits agricoles, entre les îles et la signature d'un protocole sur les évacuations sanitaires des Comores vers Mayotte.

UNE Mayotte Hebdo N°396 – Vendredi 19 septembre 2008

UNE Mayotte Hebdo N°396 - Vendredi 19 septembre 2008Mayotte – France – Comores

Quel Avenir ?

 > Koungou – Une facture impressionnate
 > Faits divers – La braqueur de la Réunion arrêté
 >
Tourisme – Croisières, 3 millions d'euros en jeu
 > Yves Jégo à Mayotte – Changement de discours de l'Etat

19/09/2008 – GTHN – Douchina pose ses conditions

Mardi soir dans la villa de Kani-Kéli du conseiller général, tout ce que Mayotte compte de décideurs politiques et administratifs, ainsi que les 14 membres de la délégation comorienne et ceux de la délégation française composée de hautes personnalités de l'Etat proches du Président de la République Nicolas Sarkozy et des différents ministères se sont rencontrés en vue du 3e round du GTHN qui se réunit pour la première fois à Mayotte, après Paris (le 4 juin) et Moroni (les 10 et 11 juillet). Sous les nombreux drapeaux français et européens, les membres des deux délégations, les élus mahorais et les plus hauts représentants de l'administration française ont rompu le jeûne ensemble, avant d'écouter les discours d'Ahamed Attoumani Douchina le président du conseil général, et de Mohammed Soihili ambassadeur plénipotentiaire et chef de la délégation comorienne.
"Mayotte est une terre de paix où la population est attachée à sa liberté et à sa sécurité", a déclaré M. Douchina, qui a rappelé que la Collectivité est engagée dans une dynamique de coopération régionale avec tous ses voisins. "Ces négociations s'engagent dans un climat un peu particulier", a commencé M. Douchina, faisant allusion à la récente mise à l'ordre du jour de la question de Mayotte une nouvelle fois à l'assemblée générale des Nations-Unies qui s'est ouverte ce mercredi.
"Je voudrais rappeler à nos frères de l'Union des Comores que Mayotte a fait son choix en 1975 et qu'elle aimerait que l'Union des Comores respecte ce choix", ajoutant encore, pour être plus explicite : "Nous voudrions vous dire que nous tendons notre main, mais à une condition : que le choix de 1975 soit respecté. Les négociations doivent se faire sans l'arrière-pensée de récupérer Mayotte. Les Mahorais ne sont pas des marchandises, quelque chose que l'on peut négocier sans leur demander leur avis".
M. Douchina s'est dit prêt à discuter et voir dans quelles conditions l'Union des Comores et Mayotte pourront tirer profit de ces futurs échanges économiques et culturels, mais il a tenu à préciser à la délégation comorienne que "les élus de Mayotte ne trahiront jamais leur engagement pour la cause mahoraise, à savoir la marche vers la départementalisation. Si nous sentons une arrière-pensée chez nos amis comoriens, nous arrêterons les négociations et nous partirons", a-t-il menacé. S'excusant pour ce "langage assez rude et brutal, mais sincère", le président du CG a appelé les Comoriens à "dépasser ce petit conflit pour le bien de nos populations", espérant des "résultats concrets dans cette démarche entamée le 4 juin dernier à Paris".
M. Douchina a également fait allusion au fait qu'un élu comorien a récemment refusé de descendre de son avion à l'aéroport de Dzaoudzi pour se plier à un contrôle d'identité, considérant que Mayotte faisait partie de l'Etat comorien. "Jamais, nous, nous n'enfreindrons les lois qui sont les vôtres", a tenu à souligner le président du conseil général, rappelant "l'angoisse de la population mahoraise" au lendemain de l'inscription de Mayotte à l'ordre du jour des discussions à l'assemblée générale des Nations-Unies.
Le chef de la délégation comorienne Mohammed Soihili surnommé "Lamartine" (qui par ailleurs a été dans le même lycée que M. Douchina) a ensuite pris la parole pour déclarer que "nous sommes venus ici pour apporter le salut à nos frères et sœurs", rappelant que cette politique de rapprochement entre les deux pays a été initiée en 2007 par les présidents Sambi et Sarkozy.
"Comme l'Europe, nous devons tenir compte de l'Histoire : bien des nations ont été divisées ou en guerre puis se sont retrouvées", a-t-il rappelé, affirmant que la délégation venait avec "un message de paix pour redonner à l'Histoire une autre force, pour lever les barrières de l'Histoire par des hommes qui veulent la compréhension et l'entente".
Les négociations entre les deux groupes de tête des délégations et les sous-groupes "circulation des personnes et des biens" et "coopération régionale" se sont terminées ce jeudi soir.

Julien Perrot

19/09/2008 – Création de l’Observatoire mahorais de l’énergie

"L'homme ne peut qu'en proportion de ce qu'il sait". C'est par cet adage qu'Augusto Soares Dos Reis, le directeur d'EDM, a présenté les avantages de la création de l'OME, "un outil de savoir au service des décideurs publics et privés". Cette nouvelle structure a en effet pour vocation d'éclairer les acteurs de l'énergie sur l'approvisionnement (la diversité des sources d'énergies et la dépendance énergétique insulaire) et la consommation d'énergie grâce à un indicateur permettant de mettre en évidence le taux d'équipement des ménages et le développement économique de l'île.
Il est vrai qu'avec une croissance annuelle de 15% de la consommation en électricité, Mayotte est le territoire le plus dynamique de France (voir encadré sur le bilan énergétique 2007), signe évident du rattrapage en cours. Grâce à l'OME, l'impact socio-économique et environnemental de cette croissance vertigineuse pourra être évalué à l'aune de la politique énergétique voulue par l'Etat et le conseil général.
"Nos besoins en énergie, en forte croissance, sont uniquement couverts par le pétrole", a souligné M. Douchina, "le conseil général souhaite diversifier les sources naturelles d'approvisionnement et préconise le recours à grande échelle de l'énergie solaire, car il est impératif que Mayotte limite ses importations en hydrocarbures". Le président du conseil général a également souligné que "la mise en place du Plan climat énergie, qui conditionne le développement durable de Mayotte, se combinera à l'OME pour apprécier les politiques énergétiques et les améliorer".
 
 

"Le plus fort taux d'énergie solaire de France, à l'horizon de trois ans"

Les études de l'OME permettront en outre d'établir des synergies entre les différents acteurs sur les deux enjeux essentiels mis en avant par le directeur d'EDM : "favoriser la maîtrise de la demande en électricité et développer le mix énergétique". A ce propos, M. Soares Dos Reis a réaffirmé sa volonté de faire de Mayotte le territoire ayant "le plus fort taux d'énergie solaire de France, à l'horizon de trois ans". Il a toutefois rappelé que ce taux ne pourra pas dépasser 30% de la puissance appelée à un instant "t", car il pourrait y avoir un risque de délestage, voire de black-out, si un nuage passe…

Christophe Peyrel, secrétaire général à la préfecture, a lui aussi souligné "le besoin d'avoir ici une vision partagée sur l'économie d'énergie", mettant en exergue le fait que les solutions dans ce domaine sont très difficiles à trouver car une multitude de partenaires y intervient et la mise en œuvre des politiques "doivent réussir à concilier des intérêts privés et publics parfois contradictoires".

Au niveau de l'Etat, les études de l'OME permettront de "fédérer l'ensemble des services dans les domaines de leurs compétences, le but étant de faire converger l'ensemble de nos connaissances et de nos motivations". M. Peyrel a également rappelé que l'axe 5 du Contrat de projet consacrera 156 millions d'euros aux économies d'énergie, à l'assainissement et aux déchets pour la mise en place d'un développement durable de l'île.

Abdou Dahalani, le président du Conseil économique et social, est également intervenu pour préconiser des conseils de gestes économes chez les usagers particuliers, mais également chez les maîtres d'œuvre pour intégrer les économies d'énergie dans la conception des bâtiments. Il est vrai que la question énergétique, surtout depuis que la problématique du développement durable est devenue une priorité mondiale, doit avant tout réussir à s'intégrer dans l'évolution des mentalités et des habitudes des consommateurs. Nul doute que les études futures de l'OME contribueront à ce travail de longue haleine.

Julien Perrot

Le bilan énergétique de Mayotte en 2007

La première étude réalisée par l'OME est le bilan énergétique 2007 de Mayotte. Cette étude a été réalisée par l'Arer (Agence régionale de l'énergie de la Réunion) grâce au concours de tous les partenaires (Conseil général, Ademe, EDM, etc.). Une version papier tirée à 650 exemplaires sera disponible à partir du mois prochain auprès des partenaires de l'OME et des centres documentaires mahorais. Une version électronique sera également disponible sur les sites internet des membres de l'OME et des observatoires nationaux de l'énergie.

En 2007, la consommation primaire totale est de 88,2 ktep (kilo tonne-équivalent-pétrole), dont 92% provient des importations, qui sont en totalité d'origine fossile (essence, gazole, carburéacteur, etc.). Les importations en 2007 ont crû de 1,8% par rapport à 2006 et de près de 40% depuis 2002. Les 8% restant de la consommation primaire provient des ressources locales (98% de bois et 2% des huiles usagées et l'énergie solaire). Le taux de dépendance énergétique s'élève donc à 92,2% et la part renouvelable (à Mayotte, il s'agit du bois, du charbon de bois et de l'énergie solaire) de la consommation primaire totale s'élève à 7,8%.

En ce qui concerne la production d'électricité, la puissance totale à Mayotte en 2007 est de 49 MW, assurée à 99% par des systèmes de production utilisant le gazole (centrale des Badamiers et groupes de secours de Kawéni). En 2007, la production électrique livrée sur le réseau est de 196 GWh (17 ktep), soit une efficacité de 41% pour la transformation des produits fossiles en électricité. Entre 2006 et 2007, la croissance de la production d'électricité est de 14,7%. A titre indicatif, cette évolution est de 3,9% à la Réunion et elle est négative (-0,8%) en Métropole. Enfin, la consommation électrique en 2007 est de 172,4 GWh, soit une augmentation de 35% entre 2002 et 2007, et surtout 15% entre 2006 et 2007.

En ce qui concerne la consommation des carburants dans les transports, l'OME note une augmentation très importante, passant de 26.080 tep en 2002 à 34.560 tep en 2007. Une augmentation notamment due à l'augmentation du transport routier, passé de 20.996 tep en 2002 à 28.027 tep en 2007.


257.767 tonnes de CO2 rejetées

Au total pour 2007, le secteur énergétique a généré un total de 257.767 tonnes de CO2 rejetées dans l'atmosphère, soit 1.382 kg de CO2 par Mahorais par an. A titre indicatif, à la Réunion, ce chiffre est de 4.740 kg par habitant par an et de 6.190 en Métropole. Parmi ces 1.382 kg de CO2, 701 proviennent de la production d'électricité, 471 du transport terrestre, 66 de l'aérien, 44 du maritime, et 101 proviennent des secteurs résidentiels, tertiaires, industriels et agricoles. Une voiture moyenne essence qui parcourt 10.000 km par an émet 2,2 tonnes de CO2 : ainsi, l'ensemble du secteur énergétique mahorais rejette annuellement autant de CO2 que 117.167 voitures.

12/09/2008 – Délégation du Sénat sur la départementalisation

Il nous est apparu important de faire le point sur la situation de Mayotte au regard des exigences d'une départementalisation qui, je le rappelle, entraîne que la législation soit la même qu'en Métropole dans un certain nombre de domaines. Même si dans les collectivités d'Outremer, dans un certain nombre de domaines il peut y avoir spécialité législative – c'est le cas de Mayotte aujourd'hui – il va y avoir forcément une approche vers une identité législative avec le département de Métropole.
On mélange un petit peu, et c'est normal, comment la loi et les règlements s'appliquent dans une collectivité sur un territoire quelconque, et deuxièmement les compétences des collectivités. Ce n'est pas tout à fait la même chose. D'autant que, en ce qui concerne les compétences des collectivités, aujourd'hui avec les textes qui sont parus, la Collectivité départementale de Mayotte, à l'exception des routes et d'une autre attribution, a des attributions pratiquement d'un département de Métropole. Ce qui ne veut pas dire qu'elle peut l'exercer, parce que certains services sont encore ceux de l'Etat mais l'évolution du statut n'est pas liée au fait que tout se passe d'un seul coup et qu'on dise demain matin : "l'Etat se désintéresse de tout et vous devez exercer toutes vos compétences". Puisqu'il y a eu toujours dans l'histoire de la décentralisation, qui est quand même l'élément fédérateur depuis les lois de1982, il y en a eu avant mais c'est quand même à partir de 1982 les lois Deferre, on a bien vu que c'était progressif. Progressif… Cela veut dire que l'on sait où on aboutit. Si Mayotte est département, un jour Mayotte sera totalement responsable de ses routes.
 
 

"On connaît très bien le choix des Mahorais, mais on connaît aussi combien certains ne souhaitent pas que Mayotte devienne un département"

En ce qui concerne le passage au statut de département et région d'Outremer, pour les modalités, une assemblée ou deux assemblées, le temps viendra mais ce n'est pas cela le plus important. Les Mahorais souhaitent devenir département. Ils l'ont manifesté depuis très longtemps et à plusieurs reprises et je crois que pour la République, compte tenu des engagements pris par les uns et par les autres, il est temps de dire "oui", mais définitivement ! Et qu'on ne revienne plus dessus.

On connaît très bien le choix des Mahorais, mais on connaît aussi combien certains ne souhaitent pas que Mayotte devienne un département. Mayotte est dans la Constitution, je le rappelle, en tant que Collectivité départementale, mais il faudra bien qu'ils comprennent que Mayotte, département français, on ne peut avoir aucune revendication sur lui. Beaucoup de Mahorais nous ont expliqué que, bien sûr, c'était l'objectif principal.

A partir du moment où Mayotte est département, toutes les lois s'appliquent et notamment tout ce qui concerne l'état des personnes, les droits civils et politiques, les libertés publiques, l'égalité entre les hommes et les femmes. Je n'ai pas besoin de vous les décliner, mais c'est la loi de la République. Ce n'est pas une autre loi. C'est la loi de la République ! Et donc la justice de la République. Il n'y a pas d'échappatoire. On ne peut dire : "Ah non, on veut devenir département mais on veut garder notre système de justice, etc.". Non, ce n'est pas possible. Tous les citoyens français sont soumis aux mêmes lois, mais il y a le statut personnel qui est un problème.

 

Etat civil : "La situation actuelle n'est pas acceptable"

On n'a pas de conseils à donner à nos amis mahorais, ils sont assez grands pour gérer leurs affaires, nous ne sommes pas venus pour dire : "Voilà, on va vous donner la solution", puisque nous aurons notre avis à donner bien entendu comme commission des lois, le moment venu quand les projets suivront. Mais il nous est apparu important de voir les problèmes qui se posent, d'ailleurs qui ne sont pas tous liés à la départementalisation. Il nous est apparu globalement qu'il fallait régler d'urgence : numéro 1, le problème de l'état civil.

La situation actuelle n'est pas acceptable car en fin de compte elle enferme certains concitoyens nés à Mayotte : ils ne peuvent pas sortir car ils ne peuvent pas avoir de papiers ! Alors qu'elle était bien commencée, on en est toujours à la moitié du chemin. Et par exemple, si vous avez besoin demain de papiers pour aller faire des études à Paris, on vous dira : "Attendez, non, on ne peut pas vous donner de passeport parce que vous n'avez pas un état civil en règle".

Deuxième point qui nous paraît extrêmement important et qui concourt au développement économique et qui peut aussi avoir des incidences sur l'exercice des compétences par le département : c'est le problème du foncier. On ne conçoit pas qu'il n'y ait pas un foncier… Vous savez, le foncier c'est le cadastre, mais ce n'est pas seulement le parcellaire, c'est le fichier des personnes, savoir à qui appartient telle ou telle parcelle. Et quand il y a une succession, il faut un acte notarié pour dire : "Cette parcelle-là est attribuée à son fils ou sa fille". En passant, le droit civil s'applique et donc les droits de succession sont égalitaires, notamment entre les garçons et les filles. Le sexe ne peut pas être le critère selon lequel on fait des différences entre enfants. Il faut le rappeler car ce ne sont pas les lois qui ont été appliquées jusque-là obligatoirement à Mayotte.

Foncier, état civil et puis bien entendu la modernisation des infrastructures, parce que le désenclavement est une nécessité. Il y a le Contrat de projet qui a été voté et approuvé. Parmi la mise à niveau des uns et des autres, incontestablement le problème numéro un est celui de la formation : c'est une condition nécessaire pour le département. L'Etat souhaite renforcer ses efforts pour l'école élémentaire, mais aussi la scolarisation en maternelle. C'est extrêmement important pour l'acquisition de la langue française.

Il ne faut pas prendre de retard pour l'acquisition de la langue française et je crois qu'il faut faire un effort considérable dans ce domaine. Effort que doit faire l'Etat, mais effort aussi que doivent faire les collectivités pour la réalisation d'établissements dans des temps raisonnables parce que les statistiques d'augmentation de la population scolaire et les prévisions font que l'effort ne doit certainement pas être réduit mais en plus renforcé. Et considérablement, dans des proportions que nous on a du mal à imaginer vu d'un département métropolitain, avec une croissance démographique moyenne.

 

"Tous les efforts faits pour améliorer les infrastructures de santé et scolaires sont annihilés par l'immigration massive"

Alors bien sûr, il faut aussi évoquer la question de l'immigration clandestine : l'augmentation du nombre de personnes en situation irrégulière ne peut qu'avoir des conséquences économiques et sociales très graves puisque tous les efforts faits pour améliorer les infrastructures de santé et scolaires sont annihilés par l'immigration massive.

Si cela se rapportait à la Métropole, le nombre d'étrangers en situation irrégulière serait insupportable. Donc il y a un moment où les choses ne peuvent pas se poursuivre sans prendre des dispositions pour le bénéfice de la communauté. Alors c'est un problème très complexe. Il y a eu un renforcement de la lutte contre l'immigration, avec des moyens extrêmement importants donnés à la police de l'air et des frontières et à la gendarmerie, avec la collaboration d'autres services publics. Mais de toute façon. Ce n'est pas seulement comme ça que l'on résoudra le problème.

D'après ce qu'on nous dit, c'est difficile d'apprécier la population en situation irrégulière mais c'est par dizaines de milliers. Donc à partir de là, je crois que la Collectivité doit s'interroger sur la manière de traiter ceux qui sont sur le territoire et qui ont des raisons de ne pas vouloir partir. Certains sont là depuis longtemps, on connaît ça bien sûr dans tous les territoires de la République. En plus, ça n'est que dans une coopération étroite où on aura bien fait comprendre que ce n'est pas la peine de jouer avec Mayotte sur le grand échiquier international, qu'on pourra trouver une solution.

Donc on ne doit pas se dispenser, pour la France, d'une forte coopération régionale, mais d'abord il faut qu'ils le veuillent, bien sûr… Je crois que c'est significatif que le ministre de la Coopération soit allé à Moroni, et je crois que c'est aussi la condition indispensable pour que le flux migratoire soit fortement atténué, si ce n'est enrayé.

Nous admirons la force de la population mahoraise et la détermination pour rester Français et devenir un peu plus Français s'il était besoin. Il faut qu'on donne satisfaction à cette revendication de vouloir définitivement, sur les symboles, devenir Français et rester Français. C'est un immense travail pour que la Collectivité de Mayotte puisse prendre en charge aussi toutes les responsabilités qui incombent aux collectivités dans le cadre de la décentralisation.

Michèle André, vice-présidente du Sénat :
Il y aura aussi des compétences inévitablement dévolues aux communes, c'est un point qu'il faut préciser, parce qu'être un département, c'est aussi tout l'équilibre démocratique. En tant que commission, nous avons pu entendre beaucoup de choses, y compris la question de l'intégration des agents, les questions de fiscalité, les questions autour de l'espérance d'entrée en Rup (Région ultrapériphérique européenne), alors que certains en voient déjà les inconvénients avant même d'y être, donc je crois qu'il y a beaucoup de choses. C'était un formidable moment de rencontres et d'échanges que nous avons eu avec tout le monde. Nous en avons tiré le meilleur pour pouvoir fédérer nos collègues de Métropole de manière un peu plus aboutie.

Jean-Jacques Hyest : Il y a un élément important qu'il faut souligner, c'est que pour que ça réussisse, il faut que tout repose sur la responsabilité de tous les acteurs et au premier chef des élus, puisque c'est le conseil général qui sera au cœur véritablement de cette avancée.

Yves Detraigne, membre de la commission sénatoriale : J'ajouterai que la population, le corps électoral devra être appelé à se prononcer sur le souhait ou non de départementalisation au printemps prochain. Je crois qu'il est important de dire que l'ensemble du corps électoral ait toute l'information sur les conséquences d'un tel choix. Parce qu'évidemment on rêve, et c'est compréhensible, d'avoir les mêmes droits, les mêmes moyens qu'on imagine de la Métropole, mais la départementalisation c'est des droits nouveaux, mais aussi des obligations nouvelles, des choses à prendre en charge et à assumer pleinement. Donc il faut que tout cela soit dit, soit connu. Il y a des responsabilités nouvelles autant que des droits nouveaux.

4 questions à la Commission des lois


"Il faut déjà connaître le nom, le prénom des personnes, savoir à qui appartient telle parcelle, la valeur de cette parcelle, comment trouver les personnes, l'adressage…"

Visiblement, on est en train de transformer l'essai…

Jean-Jacques Hyest : On est dans un processus. Ce n'est pas nous qui décidons. Il est prévu qu'il y ait un débat au Parlement à ce sujet, enrichi d'ailleurs par tout ce que nous avons appris, pour dialoguer avec le Gouvernement, avec Christian Poncet (le président du Comité de pilotage de la départementalisation). Et puis il y a toutes les informations et le travail fourni par l'administration de l'Etat et des collectivités à Mayotte. Tout cela pour dire : "Attendez, on adapte les conditions, la mise en œuvre des textes, la progressivité". Vous savez que pour les départements métropolitains, la départementalisation a été progressive. En 1982, on a décidé que les conseils généraux seraient l'exécutif, avant c'était le préfet. On était exactement dans la situation dans laquelle on est aujourd'hui, et c'est pratiquement la situation de toutes les collectivités d'Outremer.

Il y a encore des collectivités où c'est le préfet qui est l'exécutif. Et donc la décision ne veut pas dire que demain : "Allez, tout va être comme dans un département métropolitain". Ca serait de la folie. L'Etat doit accompagner cette mise en œuvre d'une décentralisation réussie et je dirais même être plus présent, assez paradoxalement, à cette période pour permettre des transitions et pour permettre l'évolution. Mais cela suppose un investissement des élus et d'énormes responsabilités.

La fiscalité locale permettra-t-elle de faire face à ces nouvelles responsabilités ?

Christian Cointat, rapporteur pour avis des crédits de la mission "Outremer" : Il ne suffit pas de faire un impôt nouveau pour en remplacer un autre, il faut aussi être en mesure de faire le recouvrement de l'impôt. Il faut donc être adapté aux mentalités, être adapté aux structures du pays et ce n'est pas simple, c'est un travail considérable. On évoquait tout à l'heure le problème de l'état civil : il faut déjà connaître le nom, le prénom des personnes, savoir à qui appartient telle parcelle, la valeur de cette parcelle, comment trouver les personnes, l'adressage. Tout cela, c'est quelque chose d'énorme si on change les dispositions fiscales, ce qui sera nécessaire quand le Code général des impôts devra s'appliquer.

Jean-Jacques Hyest : Ce qu'on oublie de dire, c'est que pour les départements d'Outremer, il y a des choses qui ne demandent pas d'adaptation : le droit civil, la justice, etc., mais pour d'autres choses, il peut y avoir des adaptations, compte tenu des contraintes et des spécificités. Et la contrainte principale, évidemment, c'est l'éloignement géographique. C'est d'ailleurs ce que la République a fait pour la Corse, qui est un territoire français comme les autres, mais avec des spécificités fiscales et autres.

Yves Detraigne : Même en Métropole, il peut y avoir des ajustements fiscaux, comme par exemple les zones de revitalisation rurale où la fiscalité n'est pas la même que celle du droit commun. Il y aura certainement des mécanismes comme ça qui pourront être mis en œuvre ici.

Les tribunaux de cadis vont-ils disparaître ?

Jean-Jacques Hyest : Il n'y a qu'une seule justice, c'est la justice de la République. Les cadis peuvent conserver un rôle mais pas rendre des décisions en ce qui concerne les biens et les personnes, certainement pas. Pas plus d'ailleurs qu'en ce qui concerne l'acquisition ou la cession de titres de propriété et les droits de succession. Ce n'est pas notre problème, nous on dit : "Ecoutez, si on est département, je suis désolé, la loi, les lois importantes qui sont celles de la République s'appliquent". A la limite la loi fiscale est celle de la République, mais il peut y avoir des adaptations dans des tas de domaines. En revanche il n'y a pas d'adaptation en ce qui concerne l'état des personnes, en ce qui concerne l'exercice de la justice.

Christian Cointat : C'est la définition du département, on ne peut demander une chose et vouloir qu'elle soit différente. Le département, c'est l'égalité du droit. Il n'y a pas d'ambiguïté là-dessus mais ça ne se fera pas non plus du jour au lendemain. Ce n'est pas au niveau de la décision de justice mais au niveau de l'auxiliariat de justice qu'il peut y avoir un compromis, le cadi conserverait alors son rôle de conciliateur.

Et en ce qui concerne les droits sociaux, vont-ils également s'appliquer à Mayotte ?
Jean-Jacques Hyest :
Là aussi, il y a progressivité. C'est très compliqué, car les gens ont souvent des statuts très particuliers, très différenciés… Il faudra que la solidarité nationale joue un peu, comme cela a été le cas avec la Corse pour créer un régime de cotisations sociales. A partir du moment où vous êtes département français, il y a la solidarité nationale et la montée en puissance d'un régime de cotisations pour avoir les mêmes droits, mais aussi les mêmes obligations. Ca ne se fait pas du jour au lendemain, mais il faut bien reconnaître aussi que la difficulté n'est pas mince compte tenu de la grande pauvreté d'un certain nombre de Mahorais.

Propos recueillis par Julien Perrot

12/09/2008 – Réinsérer l’élève en difficulté dans un cursus scolaire normal

La classe de 6e Segpa du collège de Kawéni est bien silencieuse ce mardi matin. Les 16 élèves se concentrent du plus qu'ils peuvent sur la traditionnelle évaluation de mathématiques du début de collège. A la lecture de l'évaluation de français remplie plus tôt on ne peut s'y tromper : ces élèves sont loin du niveau requis en 6e. La majorité de leurs phrases sont en phonétique, l'énoncé ne semble jamais parfaitement compris.
"C'est évidemment plus difficile pour eux, mais cela permet de vérifier le diagnostic qui nous a conduit à les orienter en Segpa", estime Thierry Denoyelle. "Pendant cette courte période, ils peuvent se considérer comme les autres élèves de 6e. C'est le seul moment de l'année où il y a une demande institutionnelle pour les Segpa, le reste du temps leur professeur adapte le programme officiel à leurs compétences."
Si ces 16 élèves se trouvent aujourd'hui dans ce cursus adapté – mis en place cette année à Mayotte dans trois établissements – c'est qu'ils répondent à des critères particuliers observés en primaire : difficultés graves et durables, un an de retard à l'issue du CM2 et un quotient intellectuel évalué entre 60 et 80. Mais avant la décision d'orientation en section adaptée, le Rased travaille en primaire avec tous les élèves repérés comme étant en difficultés, pour leur donner une chance de remonter le niveau avant l'entrée en collège.
Le Réseau d'aides spécialisées aux élèves en difficultés, Rased pour les initiés, ce sont 51 personnes divisées dans les 8 circonscriptions de l'île, des maîtres surnuméraires voués entièrement au recul de l'échec scolaire. Les 8 Rased possèdent chacun un psychologue scolaire, un maître G, instituteur spécialisé à dominante rééducative, et un nombre de maîtres E, instituteurs spécialisé à dominante pédagogique, qui varie selon les besoins.
 
 

Impliquer les parents dans la scolarité

Djailane Mohamed et Bacar Abdou font partie de ces spécialistes de la pédagogie. "Lorsqu'un enseignant repère un élève en difficulté dans sa classe et qu'il ne parvient pas à l'aider, il remplit une demande d'aide à destination du Rased, qui comprend quatre feuillets : scolaire, social, médical et psychologique. Nous étudions son cas ensemble et déterminons lequel d'entre nous est le mieux placé pour traiter son cas. Après une première visite sur le terrain nous avons une idée plus précise du travail à effectuer avec l'élève."

Quelle que soit sa difficulté, l'objectif du Rased reste toujours de la surmonter pour permettre à l'élève d'atteindre le collège comme les autres. Les maîtres E fonctionnent ainsi en aide complémentaire à la scolarisation, une aide à la fois directe – ils interviennent auprès de l'élève et lui apportent des outils supplémentaires – et indirecte – les actions mises en place permettent à l'instituteur d'enrichir ses pratiques pédagogiques et de se renforcer. "L'idéal serait bien sûr qu'à terme plus aucun instituteur n'ait besoin du Rased", rêve M. Denoyelle.

Attention, les maîtres E ne sont pas des conseillers pédagogiques, leur rôle n'est pas de juger le travail de l'instituteur. "Nous sommes avant tout des collègues du maître, précise Djailane. L'aide que nous apportons se construit en partenariat avec tous les acteurs : enseignants, parents, direction…" Les parents, chaînon indispensable, doivent être mobilisés. "Souvent les parents pensent que le domaine de la scolarité ne les concerne pas, ils avaient l'habitude de les confier au foundi qui s'occupe de tout", expliquent Bacar et Djailane.

"C'est à nous de leur expliquer le rôle qu'ils ont à jouer, il y a une pratique à construire. A Mayotte, de plus en plus, les gens commencent à intégrer leur rôle de parent, mais il y a trois types de cas distincts : d'abord la nouvelle génération qui fait des parents intéressés. A côté il y a ceux qui n'ont pas eu accès à une éducation et donc ne sont pas impliqués dans celle de leur enfant, d'autant plus qu'ils ne se pensent pas capables de les aider. Et enfin les clandestins qui n'osent pas venir à l'école par peur de l'arrestation. Il faut toujours se demander à quel type de parents on s'adresse."

 

L'aide n'est pas du soutien

Même les parents qui s'impliquent n'ont pas toujours la réaction adaptée selon Thierry Denoyelle. "Dans la famille, quand un enfant est en difficulté scolaire, on pense tout de suite à prendre quelqu'un pour faire du soutien. Ça ne fonctionne pas forcément car le prof de soutien n'est pas en liaison avec ce qui est fait en classe. Il joue le rôle de répétiteur mais ne travaille pas sur le fond du problème. Et quand l'élève reste en échec malgré le soutien, il va de plus en plus mal."

C'est là toute la différence entre l'action du Rased et le soutien scolaire : le but des enseignants spécialisés est d'apprendre aux élèves à mieux apprendre, mettre en place des outils pour lui permettre de mieux comprendre et mieux travailler. Pour ce faire ils disposent de deux fois 45 minutes par semaine en tout petit groupes de 6. Il faut ensuite transférer ces outils dans la classe pour permettre à l'élève de s'y réintégrer. D'où le besoin d'associer l'instituteur aux travaux faits avec l'élève.

"Souvent, celui qui ne sait pas se tait pour éviter l'erreur et la punition. Il faut l'amener à comprendre qu'il peut se tromper. L'élève mahorais est habitué à recevoir des ordres sans rien dire, ça se passe comme ça à la maison et à l'école coranique", diagnostique Djailane. "Pour lui, l'éducation est à sens unique, or à l'école on lui demande autre chose, à savoir de comprendre et de s'exprimer. Certains vieux enseignants sont eux-mêmes bloqués dans ces pratiques car ils ont été éduqués de cette façon."

Une aide qui concerne donc les élèves comme leurs enseignants. A Mayotte ils sont 35 maîtres E à sillonner les classes pour travailler au cas par cas. 35 postes non affectés à des classes pour améliorer le qualitatif, pour ne pas faire de l'éducation que du remplissage de salle. Autrefois, une formation spécifique à Mayotte remplaçait celle de maître E qui est désormais accessible à l'IFM, cette année ils sont 12 instituteurs spécialisés stagiaires prêts à grossir les rangs du Rased.

Les Segpa, des filières spécifiques pour mieux revenir au normal

Pour ceux à qui l'aide du Rased n'a pas suffit à remonter le niveau, deux options sont possibles à la fin du CM2. Il y a les PPF, classes pré-professionnelles de formation spécifiques à Mayotte, qui comptent quelques 1.500 élèves. Le but est de réussir à les amener en 5e PVP (préparation à la voie professionnelle, en collège), puis en CAPP (cycle d'adaptation pré professionnel, en deux ans) et enfin au CAP pour avoir un diplôme et un métier. La majorité sort malheureusement sans diplôme à l'âge limite de 16 ans.

Autre option nouvelle à Mayotte depuis la rentrée : les Segpa, sections d'enseignement général et professionnel, qui récupèrent des élèves avec un profil ciblé de la 6e à la 3e. Leur emploi du temps est le même que les autres, à ceci près qu'ils ont un seul maître pour toutes les matières générales, un enseignant spécialisé maître F.

A Kawéni, M. M'déré assure toutes les matières à l'exception de l'anglais et de la technologie. "Pour chaque activité, je remplis une fiche d'évaluation individuelle pour voir la progression de chacun", explique celui-ci. "Ils n'ont pas les mêmes capacités de compréhension que les autres élèves de 6e, ils lisent un texte sans le comprendre par exemple. Je dois d'abord les connaître, les comprendre, voir pourquoi ça ne fonctionne pas et les mettre en confiance. Mon objectif est de leur donner les moyens d'être autonomes dans leur vie future, de se construire."

Les 16 élèves, nombre maximum autorisé en Segpa, bénéficient de deux heures par semaine pendant lesquelles M. M'déré les fait travailler sur les outils d'apprentissage, sur leur projet, ils peuvent débattre de leurs difficultés et de leurs idées. Tous sont assidus aux cours. "Les élèves de Segpa sont destinés à des filières professionnelles courtes", précise M. Denoyelle.

"Le but est qu'ils apprennent un métier et qu'il soient certifiés. En général ils ne dépassent pas le CAP, c'est pourquoi leur projet professionnel doit se définir rapidement." En 6e et 5e ils bénéficient d'un enseignement général, à partir de la 4e celui-ci se partage avec un enseignement professionnel autour de plusieurs disciplines pour leur permettre de faire un choix et de se spécialiser dès la 3e. Ensuite, ils rejoignent un CAP en lycée professionnel et donc ainsi un cursus "normal", mais ils ont été armés pour affronter ce cursus.

Hélène Ferkatadji

UNE Mayotte Hebdo N°395 – Vendredi 12 septembre 2008

UNE Mayotte Hebdo N°395 - Vendredi 12 septembre 2008Rentrée 2008-2009

Des renforts contre l'échec scolaire

 > Révélations sur le marché de Mamoudzou

11/09/2008 – Carte Postale : Les Tortues

Isabelle m'a appris que l'apparition des tortues datait de 230 millions d'années, et qu'elles ont même survécu à l'extinction des dinosaures il y a 65 millions d'années ! A l'époque, elles étaient beaucoup plus grandes – on a retrouvé des fossiles de 4 mètres de long – mais elles sont restées quasiment identiques aujourd'hui et on les retrouve sur tous les continents.

Malheureusement, sur les 300 espèces de tortues terrestres, marines et d'eau douce, 200 sont en voie de disparition… Ce qui est le cas des 8 espèces de tortues marines dans le monde, dont 5 sont présentes dans l'océan indien et 2 à Mayotte : les tortues vertes et les tortues imbriquées. Les tortues caouanne, olivâtre et luth auraient également été observées hors du lagon.

MAGAZINE / Carte Postale - Les TortuesUne fois adulte, les tortues mangent des phanérogames, les herbes des herbiers, et rien qu'à N'gouja, il y en a 7 sortes ! L'association d'Isabelle a mis en place un chenal de bouées au mois de janvier pour empêcher que l'herbier disparaisse à cause du piétinement des baigneurs. J'ai aussi appris que depuis 10 ans, l'Observatoire des tortues marines a bagué plus de 10.000 tortues à Mayotte, dont 300 sont des imbriquées.

Les plus courantes sont les tortues vertes : elles mesurent plus d'un mètre, pèsent 150 kg et ont 2 écailles entre les yeux. La tortue imbriquée, beaucoup plus difficile à observer car elle pond plus vite, est plus petite et elle a 4 écailles entre les yeux. Dans le musée, il y avait une carte qui mettait en évidence la chute vertigineuse du nombre de plages fréquentées par les tortues : en 1972, l'étude Frazier avait recensé 45 sites de ponte, alors qu'aujourd'hui, il n'y en a plus qu'une dizaine, à cause de l'urbanisation, de la pollution, de la détérioration des herbiers, mais aussi du braconnage et des prises accidentelles des pêcheurs dans leurs filets.

Aujourd'hui, il y a encore 800 montées de tortues par an à Moya, et c'est justement là-bas que Mathias m'a emmené hier soir, après m'avoir demandé de m'habiller avec des vêtements sombres. Nous avons rejoint un couple qui était accompagné par une amie en vacances, venue admirer les richesses naturelles de Mayotte dans un cadre qui respecte les valeurs de l'écotourisme, prônées par Mathias depuis la création de son agence Bleu Ylang il y a bientôt trois ans.

Au clair de lune et autour d'un plat de samossas, Mathias m'a expliqué que les nouvelles prédations subies par les tortues sont dangereuses car leur équilibre est déjà fragile. Les prédateurs apportés par l'homme, comme les meutes de chiens errants et les rats qui mangent les œufs, s'ajoutent aux prédateurs naturels que sont les crabes, les oiseaux et les petits requins de récif. En plus, les tortues marines ne savent pas rentrer leurs pattes et leur tête dans leur carapace, ce qui les rend très vulnérables quand elles sont à terre pour pondre.

J'ai été très étonné d'apprendre que les tortues qui pondent et se reproduisent ne sont pas les mêmes que celles qui se nourrissent sur les herbiers, car elles ont deux zones de vie bien distinctes, l'une consacrée à la reproduction, l'autre à la nutrition, situées à des centaines de km l'une de l'autre, voire même éloignées de plus de 1.000 km !

Le plus étrange, c'est que les tortues reviennent toujours pondre sur la plage sur laquelle elles sont nées. Lors de l'émergence, quand les 100 à 200 œufs éclosent en même temps environ 50 jours après avoir été pondus, la nuit les bébés sont attirés par la faible lueur de l'horizon pour se diriger vers la mer. Tout comme lors de l'approche des pondeuses aux abords de la plage, il ne faut surtout pas utiliser de lampes torches ou de flash pour ne pas perturber le cycle naturel.

MAGAZINE / Carte Postale - Les Tortues

Une fois qu'il a atteint l'eau, le bébé tortue va dériver pendant plusieurs mois hors du lagon, dans le désert océanique où il va se cacher dans de petits écosystèmes, comme des bois flottants ou des bancs d'algues, et se nourrir de zooplancton et de petits crustacés. Quand il atteint 20 cm, il va commencer à se rapprocher des côtes et devenir herbivore.

Ce n'est qu'à l'âge d'une douzaine d'années (elle mesure alors 50 cm) que la tortue atteint la maturité sexuelle. Elle va alors migrer pour retrouver sa plage de naissance pour se reproduire. Mathias m'a raconté qu'on ne comprend toujours pas très bien le mécanisme, peut-être que ce sont la position des étoiles, les lignes magnétiques terrestres ou encore les odeurs qui la guide. Toujours est-il que la tortue va se reproduire pendant 3 à 4 mois à Mayotte, période pendant laquelle elle ne mangera plus et vivra sur ses réserves, puis retourner vers sa zone d’alimentation pendant 3 ans avant de revenir pour un nouveau cycle.

Elle continuera ainsi jusqu'à sa mort, vers 60 ans…

Les femelles font une montée tous les 20 jours environ, ce qui fait qu'elles vont pondre en tout 1.000 à 1.500 œufs chacune ! Les mâles profitent de leur épuisement après la ponte pour aller les féconder dès leur retour à l'eau… L'accouplement dure plusieurs heures, parfois en surface, et la femelle peut conserver la semence du mâle dans une poche pendant plusieurs jours et décider elle-même du moment le plus propice pour la fécondation.

Après le récit de cette histoire, Mathias nous a emmenés sur la plage où des gardiens-animateurs employés par le service environnement du conseil général étaient chargés d'accueillir le public non encadré (pour leur dire d'étendre leurs lampes !) et de mesurer et baguer les tortues pondeuses. Mathias m'avait prévenu qu'il fallait être patient pour pouvoir observer une ponte, mais nous avons eu beaucoup de chance : une tortue était déjà en train de creuser sa cavité corporelle juste derrière nous ! Avec ses deux pattes avant, elle projetait du sable très loin, et même des roches allant jusqu'à 1 kg, pour pouvoir installer son énorme carapace et se camoufler. Tant qu'elle n'a pas entamé la ponte proprement dite, la tortue est très méfiante et peut s'arrêter à tout moment si elle sent un danger. Grâce à la lunette à infrarouges de Mathias, j'ai pu la regarder à distance sans la déranger.

MAGAZINE / Carte Postale - Les TortuesMais dès qu'elle a commencé à creuser le puits de ponte avec ses pattes arrière, elle terminera son travail jusqu'au bout, même si elle est entourée d'observateurs curieux : ce n'est qu'à ce moment-là qu'on peut l'approcher. Une fois le puits de 40 cm de profondeur et 30 cm de large creusé, elle va déposer du mucus pour humidifier le nid. Elle va pondre les œufs pendant une demi-heure, qui ne cassent pas car leur coquille est molle : on dirait des balles de ping-pong ! La tortue rebouche ensuite le puits sans trop tasser avec ses pattes arrière, puis fabrique un leurre avec ses pattes avant : elle va faire une petite butte et un faux trou pour tromper les prédateurs. Pendant l'incubation des œufs qui dure 40 à 60 jours, la température va décider du sexe des futurs petits : s'il fait moins de 24 °C, ce seront plutôt des males qui sortiront de terre.

Quand nous sommes repartis, il y avait trois autres tortues qui se hissaient péniblement sur la plage autour de nous pour accomplir à leur tour leur tâche. Parfois, elles creusent à l'endroit où il y a déjà eu un nid et elles le détruisent pour le remplacer par le leur. Alors que je prenais la barge pour rentrer chez moi, je me suis dit que j'avais vraiment eu de la chance d'assister à un tel spectacle, qui deviendra de plus en plus rare si on ne fait rien pour protéger l'environnement naturel unique de Mayotte.

 

Je t'embrasse très fort, chère maman,

Julien

 

UNE Mayotte Hebdo N°394 – Vendredi 05 septembre 2008

UNE Mayotte Hebdo N°394 - Vendredi 05 septembre 2008

Départementalisation / 1958 – 2008

50 ans d'attente

 > Education – "on atteint 40 élèves par classe !"
 > Carte Postale – des baleines dans le lagon
 >
Mayotte Eco – Maison des Livres, entreprise culturelle

05/09/2008 – Mission sénatoriale sur la départementalisation

 
Mayotte Hebdo : Quelles sont les grandes pistes de réflexions que vous allez poursuivre durant votre séjour ?
Jean-Jacques Hyest : La Commission des lois du Sénat suit avec beaucoup d'attention l'évolution des départements et collectivités d'Outremer. C'est une de ses missions. Nous nous déplaçons régulièrement dans ces collectivités, comme par exemple récemment en Polynésie pour le problème des statuts des communes.
Le bureau de la commission a jugé utile, dans la perspective de la départementalisation de Mayotte, et compte tenu de l'engagement du Président de la République et des perspectives, de venir faire le point sur place avec les élus et les représentants de l'État, où il est clair que nous apprendrons plus de choses qu'en restant à Paris.

MH : Parmi vous, lesquels sont déjà venus à Mayotte ?

Michèle André : Le président Hyest connaît bien Mayotte. Il est déjà venu quatre fois. Personnellement, j'en avais une connaissance, mais assez lointaine et sur un sujet très spécifique qui était la question du droit des femmes, puisque j'étais venue ici en 1990, lorsque j'étais secrétaire d'État du gouvernement de Michel Rocard, chargée du droit des femmes. Et j'avoue qu'aujourd'hui, je vois des choses qui me paraissent avoir bien évolué.

MH : En l'espace de 20 ans, quels changements avez-vous observé ?

Michèle André : De ce que j'ai pu voir, pour l'instant, les infrastructures, l'urbanisme, ce que j'ai vu à l'aéroport. Je n'ai rien reconnu, pour vous dire les choses simplement. Sur toute la question de l'état civil, même si nous y reviendrons, j'ai pris note d'une évolution favorable.
En tout cas nous sommes, tous les collègues de la Commission des lois, très attachés depuis des années, comme le disait M. le Président Hyest, aux débats des territoires et départements d'Outremer, qui sont contrairement à ce que certains pourraient penser, toujours très suivis, par beaucoup de collègues, et pas uniquement pour leur aspect exotique, mais bien pour mieux comprendre ces territoires et les problématiques de nos collègues parlementaires qui les représentent. Nous avons besoin de mieux maîtriser les aléas, les difficultés de ces territoires qui sont sans doute tous différents, pour mieux légiférer et trouver les meilleures réponses

"Il ne suffit pas de claquer des doigts pour devenir département. (…) Il y a de sérieuses conséquences et ce que nous voulons, c'est que ces conséquences soient bonnes"

MH : Peut-on connaître la teneur de vos discussions avec le président du conseil général et avec les représentants de l'État ?

Jean-Jacques Hyest : Le président nous a tenu informé à la fois du souhait de sa collectivité, qui est aussi régulièrement émis par tous les élus de Mayotte, et puis aussi bien entendu des initiatives prises. La résolution, bien sûr, qu'il a fait voter à l'unanimité par son conseil général et puis la commission qu'il a mise en place, pour préparer ce changement institutionnel, en fixant les mesures qui doivent être remplies pour que la Collectivité, comme département, fonctionne dans de bonnes conditions.
Pareillement du côté de l'État, il y a aussi la préparation de cette départementalisation. Il était important aussi que l'on sache, du point de vue de l'État, quelles étaient les difficultés rencontrées et les conditions à remplir. Il fallait également pointer les problèmes d'adaptation qui peuvent survenir une fois la décision prise, et la progressivité, éventuellement, de certaines mesures.

Changer de statut pour une collectivité territoriale, ce n'est pas une mince affaire, ça demande une préparation solide, ça demande également de savoir ce que l'on veut et comment le faire pour que ça fonctionne. Tout cela entraîne des changements non négligeables. Et pour les législateurs que nous sommes dans ce domaine, il est bien clair que ce n'est qu'en venant sur place et en discutant avec les uns et les autres pour voir la faisabilité de l'opération, que nous serons à même de voter la loi qui sera la meilleure possible pour Mayotte. C'est cela que nous cherchons à faire. Il ne suffit pas de claquer des doigts pour devenir département. Ça ne se fait pas comme ça. Il y a de sérieuses conséquences et ce que nous voulons, c'est que ces conséquences soient bonnes.

"Il faut aussi réfléchir à renforcer les capacités des communes, obligatoirement"

Jean-Jacques Hyest : Dans le cas de la Collectivité départementale de Mayotte, en ce qui concerne la structure institutionnelle, il y des cantons, il y a un conseil général, il y a des services… C'est donc moins un problème d'institutions que de compétences. Les compétences d'un département, qu'il soit d'outremer ou métropolitain, c'est très important. Il y a des compétences en matière sociale, qui sont extrêmement lourdes en terme de budget, comme l'aide aux familles, aux personnes handicapées, la formation professionnelle… Même si la Collectivité départementale de Mayotte assume déjà une partie de ces compétences, en matière routière par exemple, elle aura à gérer de nombreuses compétences. Parallèlement, il faut aussi réfléchir à renforcer les capacités des communes, obligatoirement. La base d'une collectivité, ça reste les communes, et aujourd'hui, hormis celle de Mamoudzou, elles restent sans gros moyens. Il faut donc déterminer quelles ressources, quels impôts, quelle fiscalité locale, pour que ces compétences soient assumées. Tout ça fait partie de la mise en oeuvre d'un département.

Il y a déjà des travaux menés à ce sujet au ministère de l'Outremer, avec M. Poncet, également le rapport établi par le conseil général, et puis aussi la préfecture bien sûr, qui réfléchit à cette perspective qui va arriver plus vite qu'on ne le pense… Et puis, une fois que ça sera fait, ça sera fait. Il faudra donc que l'on ait bien tout prévu pour que ça réussisse. Personne n'a le droit de se planter.

MH : Quels sont, selon vous, les obstacles importants subsistant face à cette évolution statutaire ?

Christian Cointat : L'état civil, le cadastre, c'est fondamental, le code général des impôts, la fiscalité, c'est nécessaire, et comme nous l'avons dit, la répartition des compétences entre les communes et le conseil général. Une fois qu'on aura réglé tout ça, le reste suivra. Même si nous devons reconnaître qu'il y a déjà eu des choses de faites, de gros efforts de fournis, peut-être que les procédures n'ont pas permis de réaliser plus, plus vite, mais il faut reconnaître que beaucoup de choses ont été faites depuis 2000.

MH : Si Mayotte devient département, deviendra-t-elle aussi de fait une région ultra-périphérique aux yeux de l'Union européenne ?

Christian Cointat : Ce n'est pas lié. Il faudra le négocier avec la Commission. Mais il est vrai qu'en étant département de plein exercice, la négociation se fera d'autant plus facilement.

MH : Est-ce que vous pouvez nous dire si M. Sarkozy viendra à Mayotte comme il l'avait annoncé ?

Jean-Jacques Hyest : Alors, je ne suis pas porte-parole du Président. La dernière fois que je l'ai vu, le lendemain de la révision constitutionnelle, je n'ai pas pensé à le lui demander. Mais je pense que oui, car il tient toujours ses engagements. Il ne fait jamais de promesses, mais il tient ses engagements.

François Macone

05/09/2008 – Comité sur la départementalisation

Et c’est devant un parterre de grands électeurs (maires, conseillers municipaux, conseillers généraux), de représentants des principaux partis politiques, syndicats, associations, chefs de services de l’Etat et du conseil général, le sous-préfet Christophe Peyrel, le Grand cadi Mohamed Hachim, les présidents et représentants des trois chambres consulaires, etc., que le comité a présenté ses travaux.
"Après trois mois et demi de fonction, le comité a tenu une dizaine de réunions, une quarantaine d’auditions à Mayotte et à Paris, une dizaine de contributions écrites, plusieurs déplacements dans les communes et rencontres avec quelques maires", a précisé le rapporteur du comité, le conseiller général de Sada Ibrahim Aboubacar. Il a fait "un état des lieux des dispositions statutaires conformément aux Accords signés rue Oudinot le 27 janvier 2000" et a exposé "la vision que les élus et responsables politiques ont de la transformation de Mayotte en région et département d’Outremer, conformément à la résolution du 18 avril 2008".
 
 

"Le gouvernement a bien avancé"

Grandement satisfait du travail déjà accompli et du respect des délais, le comité a tout de même précisé que la période qui s’ouvre, celle de la deuxième phase allant de septembre à décembre 2008, est l’une des plus importantes puisqu’une mission d’information de la Commission des lois du Sénat séjourne actuellement sur le territoire pour fixer le calendrier et les modalités législatives du référendum.

L’autre temps fort de cette seconde phase sera "la tenue d’un débat au Sénat avant le 15 novembre et des discussions avec le Gouvernement afin de parvenir à une union partagée dans la départementalisation de Mayotte", a ainsi précisé le sénateur Soibahaddine Ibrahim Ramadani. Des discussions à l’issue desquelles la troisième et dernière phase commencera, "celle de la consultation et de l’adoption de la loi". Cette période sera aussi celle de la transformation de ce groupe en "Comité de campagne", s’en réjoui déjà le sénateur.

Mais avant la campagne une longue période s’impose car des doutes subsistent toujours chez beaucoup de Mahorais, mais pas pour le sous-préfet Peyrel pour qui "le gouvernement, malgré un travail assez lourd de coordination, d’échanges et d’expertise de l’ensemble des services, a bien avancé (…)". " On franchit un moment démocratique particulier pour Mayotte et pour la France", s’est-il exclamé. Et pour Ibrahim Aboubacar, Mayotte aussi a bien avancé en présentant ce "rapport d’étape stabilisé, reflétant l’opinion de la majorité, de la totalité des membres, puisqu’adopté à l’unanimité".

 

"Les Mahorais attendent une question claire"

Dans son état des lieux, ce document présente les bilans des Accords du 27 janvier, de la loi du 11 juillet 2001, de la loi DSIOM du 21 février 2007 et de la Résolution du 18 avril 2008. Pour le rapporteur, cette période devrait marquer "la concrétisation des engagements de l’Etat" en référence aux promesses de 1976, de 1979, de 1984 et de 2000. Et de cette concrétisation, "les Mahorais, a-t-il dit, attendent une question claire car ce comité n’a pas travaillé pour l’évolution institutionnelle, mais uniquement sur la départementalisation (…)". "Nous avons travaillé exclusivement sur comment départementaliser Mayotte, un processus indépendant de toute pression extérieure, de politique intérieure et internationale."

Le comité suggère, si bien sur le résultat du référendum l’approuve, une "mise en œuvre rapide du statut par une loi organique" avec bien sur des adaptations, comme le permet l’article 73 de la Constitution, au régime législatif et à l’organisation administrative car pour Ibrahim Aboubacar, "rien ne s’oppose à ce que le régime du droit commun soit étendu à Mayotte (…)".
"Il n’y a pas d’obstacle juridique particulier s’opposant à cette adaptation". Ce dernier demande à ce que l’on s’approprie "l’outil administratif départemental" et que l’on adopte "l’organisation départementale telle qu’elle existe dans le Dom. Nous ne voulons pas être un département à part". Et cette impulsion devrait se prolonger jusqu’au niveau européen : "la présidence française de l’Union Européenne doit faire de la départementalisation de Mayotte et de sa transformation en Rup, une de ses priorités", a conclu Ibrahim Aboubacar.

 

"Nous voulons rester Français pour être égaux aux Français de France"

Concernant les questions relatives au développement économique et social, le comité par la voix de son rapporteur soutient qu’"il faut apporter une réponse politique aux questions sociales, permettre la formation des Hommes, adopter une politique foncière commune", en créant notamment, comme le soutient la conseillère économique et sociale Anziza Moustoifa, un établissement foncier.

L’objectif est de parvenir à "une vision partagée des patrimoines de l’Etat et de la CDM, apporter des réponses claires au sort des immigrés présents sur le territoire – un vrai problème pour le développement, à terme pour la paix sociale, être soucieux vis-à-vis de la préservation à l’environnement et du cadre de vie, un réel désenclavement aérien et numérique du territoire, accompagner les secteurs en mutation qui se battent pour prendre le virage du développement économique… avec pour objectif d'éviter l’assistanat !"
Mais l’une des priorités du comité, c’est aussi d’améliorer les services à la personne – "un gisement d’activités, un moyen d’éradiquer la clandestinité" –, "mettre au diapason les actes et les paroles" au niveau touristique, "exploiter le potentiel aquacole à grande vitesse…". Des propositions adoptées à l’unanimité des membres siégeant au comité et qui sont aujourd’hui soumises à réflexion aux diverses forces présentes, notamment les partis politiques.

Pour Néma, par la voix de Moussa Abdou, "une seule voix compte : celle de la départementalisation sans équivoque, sans ambiguïté", rappelant au passage que son parti a voté pour la résolution et soulignant par ailleurs que la demande d’admission au comité de Saïd Omar Oili en tant qu’ancien président du CG n’a été acceptée que le 22 août, alors que celle-ci avait été adressée dès le début des travaux. Néma considère que "le statut permettra à la France d’assurer la paix sociale, la sécurité des biens et des personnes" (…) "Nous avons besoin de cette France solidaire dans le territoire français où on a le plus d’analphabètes. Nous voulons rester Français pour être égaux aux Français de France. Néma, conclu Moussa Abdou, n’est pas favorable au statu quo".

 

Des doutes, du scepticisme et des interrogations

Mais certains ont affiché des doutes, notamment le président du Smiam Issihaka Abdillah, car pour lui "les auditions n’ont pas franchi les frontières de l’intercommunalité". Celui-ci a demandé où en était le bilan de la loi du 11 juillet 2001 puisque celle-ci prévoyait une réunion annuelle qui n’a eu lieu qu’une seule fois à Dzaoudzi sous le haut patronage de Brigitte Girardin. Il préconise un "retour sur les éléments déjà engagés depuis 1999". Ces doutes, le président du Smiam n’est pas le seul à les avoir exprimés.

Mieux encore, le sénateur Giraud a lui fait savoir qu’il était "encore sceptique" en interpellant directement le sous-préfet : "à qui doit servir ce statut que les Mahorais réclament depuis 1958 ? Quelles sont les raisons du refus du gouvernement" ? Pour le sénateur, rien n’est clair car "nous sommes trois à discuter : les Mahorais, le Gouvernement et les Comoriens. Le problème de Mayotte n’a rien à voir avec les discussions entre la France et les Comores. Je ne peux accepter le double langage de la France", a-t-il fait savoir, avant de surprendre quelques uns en annonçant qu’il n’est "pas sûr que les Mahorais voteront en grande majorité pour la départementalisation car le bilan de la loi du 11 juillet 2001 n’a pas été fait et son application, notamment les mesures sociales positives".

 

"Il y a un engagement extrêmement ferme et un choix totalement assumé"

Mais pour le sous-préfet Peyrel, "il faut éviter que se développent certaines idées trompeuses. Nous avons réalisé un bilan de tout ce qui a été fait à Mayotte depuis 2001". Pour lui, pas d’ambiguïté : "le statut sert aux Mahorais pour garder une stabilité politique dans un contexte régional et mondial pas si stable. Mayotte est une richesse pour la France, notamment dans la façon dont les Mahorais vivent l’Islam. Ce statut sert aussi à répondre à un engagement. Je n’ai pas de doutes sur le statut, a-t-il dit, même s’il y a eu des lenteurs. Il y a un engagement extrêmement ferme et un choix totalement assumé. On ne discute pas avec les Comoriens sur le département. Le GTHN n’est pas une machine pour ouvrir les frontières de Mayotte aux Comores. On discute avec eux dans le cadre du GTHN, sur l’immersion de Mayotte dans l’économie régionale et les moyens d’améliorer en amont la lutte contre l’immigration clandestine, en améliorant les contrôles et en contribuant au développement des Comores. La lutte policière ne suffit pas. On n’accepte pas n’importe quoi aux Comoriens. Quand ils franchissent les limites on leur dit, notamment le refus des parlementaires comoriens de se soumettre aux contrôles policiers à l’aéroport. La feuille de route du Gouvernement contiendra cette conjonction des flux".

Cette réunion de présentation des grandes lignes du travail du comité sur la départementalisation a eu pour mérite d’avoir réuni toutes les forces vives. "Un travail dense et riche, dans un esprit simple pour faire participer toute la société, personne n’a été exclu", se félicite le président du CG. Pour lui, "chacun doit s’approprier le contenu de ce travail. Il faut adopter une telle attitude pour faire adopter ce texte à la consultation. Il faut être de nature optimiste, a-t-il appelé dans un esprit d’"unité".

Il a également tenu à souligner au sous-préfet que "les Mahorais détestent l’incertitude du statut actuel, le désordre qui règne chez nos voisins. Ils adorent la démocratie, la stabilité. Les Mahorais détestent le mépris, ils ne sont non plus partisans de la pensée unique". Une manière bien ferme de démontrer qu’un demi-siècle s’est écoulé depuis 1958, mais que la détermination mahoraise reste, elle, intacte. La sera-t-elle le jour du référendum ?

R.T Charaffoudine Mohamed

UNE Mayotte Hebdo N°393 – Vendredi 29 août 2008

UNE Mayotte Hebdo N°393 - Vendredi 29 août 2008

Rentrée scolaire

12/20 Peut mieux faire …

 > Petit dÉjeuner de Mayotte Hebdo – Fahar-Eddine Cheick Ahmed et Alexandre Charambakis
 > Dugong – les dernières sirènes du lagon
 >
Comores – le président de Mohéli reconnait Mayotte française

29/08/2008 – Rentrée scolaire 2008-2009 – S’améliorer au niveau quantitatif et qualitatif

Après l'école primaire de Koungou plage, on passe au collège de Kawéni, où l'attend la toute nouvelle classe de Segpa, une filière spécifique existante depuis plusieurs année en Métropole, destinée à accueillir de la 6e à la 3e les élèves présentant de grosses difficultés scolaires (lire page Education). Les collèges de Dembéni et Tsingoni accueillent également cette nouveauté qui permettra de décharger en partie les PPF, pour lesquelles il a été décidé de ne plus augmenter les effectifs. Trois ou quatre autres Segpa devraient ouvrir dans les prochaines années. Devant les 12 élèves présents à Kawéni et les parents de plusieurs d'entre eux, le vice-recteur explique le fonctionnement et les objectifs de la Segpa et répond aux questions des mamans inquiètes.
Le café avalé on reprend la route, direction Dembéni, l'IFM où M. Cirioni a choisi de rencontrer la presse et surtout la nouvelle promotion d'instituteurs stagiaires, pour mieux marquer l'importance donnée à la formation des futurs maîtres, chevilles ouvrières de l'élévation du niveau scolaire de l'île. Le nombre de places au concours a d'ailleurs été augmenté de façon conséquente pour répondre à l'exigence de scolarisation de tous les enfants de 4 ans en 2009 et de ceux de 3 ans en 2010. "Avec cette augmentation des effectifs des instituteurs stagiaires, nous allons manquer de place pour les autres étudiants de l'IFM, il va donc falloir mettre en route rapidement le centre universitaire de Mayotte", précise le vice-recteur qui ajoute "avoir dépassé le stade du simple projet."
 
 

"Mayotte est un cas exceptionnel"

A ce même moment, les quelques 300 étudiants des 5 filières universitaires proposées par l'IFM se pressent dans les bureaux de l'administration pour compléter leurs inscriptions. L'occasion pour Françoise Nissen, responsable de l'orientation, de préciser que cette année le recrutement des étudiants de l'IFM a été sélectif pour éviter une "incohérence de parcours", à savoir laisser des étudiants choisir des filières qui ne leur conviennent pas, uniquement pour rester étudier dans l'île.

La sonnerie annonce 10 heures, l'amphithéâtre se remplit de la "nouvelle génération d'instituteurs", venus écouter leur futur patron leur parler du métier qu'ils ont choisi et des enjeux de l'éducation à Mayotte. "Mayotte est un cas exceptionnel", leur rappelle-t-il en annonçant les chiffres toujours plus impressionnants chaque année : 73.383 élèves de la maternelle au supérieur, 434 créations de postes d'enseignants dans le secondaire, 310 dans le primaire !… Puis il présente ce qu'il considère comme le "symbole de la rentrée" : le projet académique élaboré l'année dernière, qui met l'accent fort sur la maîtrise de la langue française.

"Le système éducatif de Mayotte n'est pas parfait mais il est en constante évolution, tant sur le plan qualitatif que quantitatif." En témoignent, sur le plan quantitatif, l'ouverture du nouveau lycée de Chirongui, actuellement en préfabriqués en attendant une construction en dur programmée d'ici 4 ou 5 ans (…), les extensions dans plusieurs établissements et l'ouverture de nouvelles écoles primaires. On compte actuellement 80 à 85% des élèves de 5 ans scolarisés en grande section de maternelle, 60% des 4 ans scolarisés en moyenne section et 40% des 3 ans en petite section. Les manques se situent essentiellement sur Mamoudzou, Koungou et Petite Terre.

 

25 élèves maximum par classe en CP

Sur le plan qualitatif, en plus du lancement des Segpa il est prévu cette année la limitation des effectifs de CP à 25 élèves par classe, qui devrait être effective pour 99% des classes cette année. Une structure particulière est mise en place dans chacune des neuf circonscriptions pour lutter contre l'échec scolaire. L'objectif est de cibler très rapidement les enfants qui présentent des difficultés à la lecture, pour éviter qu'ils n'arrivent en sixième avec des lacunes impossibles à combler. Conformément aux directives nationales, des heures de soutien seront mises en place au primaire dès la rentrée d'après Toussaint.

L'enseignement secondaire n'est pas en reste avec entre autres la généralisation de l'option MPI (math physique informatique, en 2de) dans tous les lycées pour éviter les déplacements d'élèves dans les établissements trop loin de chez eux. Enfin, M. Cirioni a tenu à féliciter les lauréats du concours d'instituteur présents devant lui, en précisant qu'ils ont un niveau des plus respectables, en témoignent les moyennes : 17,76 pour le major de la promo, 12,5 pour le dernier.

"Ce n'est pas parce qu'il manque un U à IFM que la formation des enseignants n'est pas la même qu'ailleurs", a-t-il martelé. Après un long entretien avec ces jeunes gens, le vice-recteur s'est envolé pour Paris, où il assistait à la conférence des recteurs mardi et mercredi.

Hélène Ferkatadji

29/08/2008 – Portrait de Deenice – Un nouveau studio de musique pour les artistes locaux

"La technique, le son, la musique m'ont toujours passionné". Une passion dont Deenice a décidé de faire son métier, lui qui a commencé à jouer au piano à l'âge de 4 ans et qui possédait un ordinateur quand il avait 10 ans, au tout début de l'informatique grand public des années 1980. C'est pourquoi, une fois son bac en poche, il décide de passer un BTS Audiovisuel option Son à l'Institut supérieur des techniques du son (ISTS) à Paris. Tout au long de sa carrière professionnelle, Deenice a su allier son activité d'ingénieur, pour accompagner des artistes sur scène ou en studio, et son goût pour la composition musicale dans de nombreux groupes.
Deenice a d'abord travaillé dans différents studios d'enregistrement pour la télévision où il faisait du bruitage, du mixage et du "sound design", c'est-à-dire des effets spéciaux sonores, en créant des sons pour des publicités par exemple. Au sein des studios Ramses et Bellx-1 à Paris, il a mixé et même composé des chansons pour une centaine de pubs de voitures, a mixé le long métrage Vidocq, fait l'habillage d'un clip d'Ophélie Winter, a travaillé sur la bande-son française des dessins animés Dragon Fly ou Rapido…
"Parallèlement à ça, je faisais partie de plusieurs groupes de musique. J'ai également accompagné de nombreux artistes sur scène, beaucoup de "world music" comme Alan Stivel, des aborigènes d'Australie, des groupes tziganes et de l'électro-jazz." Car Deenice n'est pas seulement un ingé son, c'est aussi un musicien professionnel qui a fait des concerts et qui a des notions sur quasiment tous les instruments, et surtout leur interface avec l'ordinateur. Il a participé à de nombreux concerts en Métropole, notamment des festivals de jazz, et continue d'être devant la table de mixage pour beaucoup de "live" à Mayotte.
Arrivé au début de cette année avec sa femme et sa fille, il a été très bien accueilli ici et a trouvé immédiatement du travail à Clap Production : "J'ai fait des concerts avec des musiciens et ça a un peu fait boule de neige". C'est surtout le fait qu'il soit à la fois musicien et ingé son qui a séduit tous les groupes avec qui il a travaillé.

"Contribuer à ce que les artistes d'ici s'exportent"

"J'ai travaillé avec tout le monde ici : des musiciens traditionnels, des artistes M'zungu, des entreprises privées et des institutions publiques, des associations…" Son expérience professionnelle est un atout à Mayotte, lui qui a déjà produit quelques groupes quand il habitait à Lille en 2006-2007 et qui a fait le son des pubs de clients prestigieux comme Cofidis, Décathlon ou Hollywood chewing gum. Deenice a décidé de créer son entreprise au mois de mai dernier, notamment grâce au dispositif de l'Accre (Aide aux chômeurs créant ou reprenant une entreprise) qui lui permet de bénéficier d'exonérations de charges sociales pendant un an.

Avec l'aide de la Boutique de gestion, il a pu monter un dossier qui lui a permis d'avoir son local qui était à l'abandon et qui a nécessité beaucoup de travaux. Et s'équiper en "matos", avec une régie de production audio et tout l'attirail des studios d'enregistrement de qualité. Ce local est également utilisé comme salle de répétition par les groupes Maoris et Daddy Happy, avec qui Deenice a créé une association appelée Nafassi ("Liberté"), qui vise à faire de ce local un lieu incontournable de la musique à Mayotte. Tom, le vice-président de l'association et batteur de Daddy Happy explique qu'"à terme, en parallèle de l'activité de Deenice, on aimerait en faire un lieu de résidence pour des artistes de l'extérieur".
Deenice a déjà enregistré de nombreux concerts et des maquettes pour Daddy Happy, Lathéral, Maoris. Il a aussi effectué le "mastering" du dernier album d'Eliasse et créé la bande-son du Ballet de Mayotte. Il a travaillé en post-production et enregistré un titre avec Patrick Millan de 100% Mayotte et c'est lui qui va "masteriser" la voix de Djazou, la gagnante du concours Jeunes talents SFR. Et il commence à produire des artistes locaux comme Trio, Bo'Houss ou Mafio.
"Je voudrais contribuer à ce que les artistes d'ici s'exportent. J'ai été vraiment super bien accueilli par les Mahorais et tous les gens du spectacle ici. Et sans vouloir être prétentieux, les musiciens me disent souvent que nous avons des rapports agréables car je suis musicien moi-même, ce qui me permet de mieux comprendre leurs attentes."
Deenice est en train de créer un site internet pour recenser tous les artistes mahorais : "J'ai eu beaucoup de mal à trouver des informations sur Mayotte avant de venir et je crois qu'il y a un problème au niveau de la communication. Je veux faire un site qui regroupera tous les groupes pour que Mayotte ait une vitrine à l'extérieur. C'est pourquoi je sollicite tous les artistes, sans aucune obligation commerciale bien sûr".
En attendant, Deenice fait un peu de mix-live à Koropa, prépare son prochain album qui sera du "trip hop rapide" et projette de remixer des chants et de la musique traditionnelles version "électro". Une bouffée d'oxygène bienvenue pour la scène musicale mahoraise.

Julien Perrot

29/08/2008 – Nouvelle centrale électrique de Longoni – 5 énormes moteurs dans leur écrins

C'est une centrale clef en main. Comme si vous achetiez un meuble à monter vous-même. La comparaison est osée, mais il y a de cela. En janvier 2007, EDM passe un contrat avec la société finlandaise Wärtsilä, spécialisée dans la conception de pièces, de mécanismes et de sites pour l'ingénierie pétrolière, gazière et électrique. Pour environ 30 millions d'euros, EDM paraphe le contrat et se dote officiellement d'une nouvelle centrale électrique qu'elle recevra en février 2008. Mais pas seulement. Le contrat inclut aussi tous les aménagements annexes : le réseaux de sécurité incendie, une réserve d'eau de plusieurs centaines de mètres cube, un atelier, un magasin pour stocker les pièces de rechanges et un bâtiment administratif.
D'août 2007 jusqu'au printemps de cette année, les grands travaux de terrassement ont mobilisé une centaine d'ouvriers, chefs d'équipes et de chantier, d'ingénieurs et autres conducteurs de travaux. Cette partie, qualifiée de génie civil, fut suivie avec une extrême attention. Ici, le moindre affaissement de terrain ou un mauvais drainage pourrait avoir des conséquences dramatiques. Evidement, les constructions répondent aux normes antisismiques et les risques inhérents à l'environnement climatique ont été pris en compte.
 
 

30 millions d'euros pour une centrale clef en main

En février 2007, les pièces de la centrale arrivent dans des dizaines de conteneurs. La société Wärtsilä livre les cinq moteurs capables de produire chacun une puissance de 8 MW et dépêche sur place une équipe de techniciens pour amorcer l'assemblage.
Aujourd'hui, sept mois plus tard, la structure en elle-même est impressionnante. Les moteurs sont situés dans cinq chambres juxtaposées, reposant chacun sur un châssis de quelques centaines de kilos, qui lui-même se stabilise sur des ressorts pour éviter que l'assemblage ne transmette des vibrations au sol. Chaque salle dispose d'équipements annexes et elles sont toutes parcourues par des énormes gaines permettant l'aspiration de l'air nécessaire à la combustion qui engendre les 16 cylindres de ces moteurs en V, tout autant que l'échappement des gaz. 

Reliés à la grande cheminée, ces tubes permettent aux fumées d'être recrachées à plus de 50 mètres, ce qui facilite leur dissolution dans l'atmosphère. Sur le toit, des dizaines de ventilateurs capturent l'air nécessaire pour refroidir les moteurs. Etrangement, cela ressemble à une champignonnière géante… Le courant produit est ensuite démultiplié en passant dans des transformateurs, avant d'être dirigé vers un centre de "dispatching", qui aiguillera l'énergie dans le réseau jusqu'au consommateur.

 

Cinq moteurs d'une puissance de 8 MW chacun

Au total, la nouvelle centrale de Longoni pourra assurer une puissance installée de 40 MW. Pourtant, la capacité d'utilisation devrait être limitée autour de 30 MW. En effet, au moins un moteur doit pouvoir prendre le relais en cas de panne ou de révision. De plus, la station historique des Badamiers viendra ajuster la production en offrant des compléments.
"C'est une logique d'économie d'énergie", affirme M. Bietrix, assistant maîtrise d'ouvrage, "pourquoi lancer un moteur qui produit 8 MW lorsque l'on a besoin que d'un ou deux mégawatts ? Les Badamiers peuvent jouer ce rôle de modérateur". La station de Kawéni sera elle bientôt démantelée. De plus son fonctionnement peut être assuré au quotidien par une équipe composée de seulement 4 ou 5 personnes.

Mais le grand atout de ce type de centrale reste financier, autant par la rapidité de son installation, que son fonctionnement et sa capacité à l'adapter aux besoins. On peut en effet mettre en fonctionnement des moteurs indépendamment les uns des autres, les éteindre rapidement, et en rajouter si nécessaire. Très répandues là où l'on ne trouve pas de réseau interconnecté, comme les îles ou les zones reculées, ces centrales sont également légions en chine.
Au début de l'ère industrialisante qu'a connu l'Empire du milieu, la question énergétique devait être solutionnée au plus tôt. Pas le temps d'attendre les centrales thermiques ou nucléaires, trop coûteuses et trop gourmandes en temps pour se dresser, au risque de voir passer le train de la croissance. La décision d'implanter des dizaines de centrales au gazole a permis de produire l'énergie nécessaire encore jusqu'à aujourd'hui, même si le pouvoir central privilégie désormais la construction de grandes centrales thermiques ou le nucléaire civil.

 

1,6 m³ de carburant par heure et par moteur

A l'heure où tout le monde ne jure plus que par les énergies renouvelables, on peut s'étonner, ou du moins s'interroger sur le choix d'une centrale dont chaque moteur consomme 1,6 mètre cube de carburant par heure.

"Les alternatives plus écologiques existent en effet, mais elle ne sont pas encore en mesure d'offrir des volumes de production équivalent. A titre d'exemple, une éolienne peut produire 1 MW au maximum de sa capacité. Il en faudrait 40 pour se substituer à cette centrale. De même, il faut un hectare de panneaux solaires pour produire un mégawatt. Et encore, la production reste aléatoire en fonction des conditions d'ensoleillement", explique M. Bietrix.

Le ballet des camions citerne qui approvisionneront les moteurs risque donc d'être aussi spectaculaire. Tout autant qu'éphémère. En effet, la proximité du nouveau site de dépôt d'hydrocarbure permettra la construction d'un pipeline qui alimentera directement la centrale en carburant. D'ici l'année prochaine, les deux édifices devraient être reliés par une conduite, souterraine ou aérienne, cela reste à décider.

François Macone

40 millions d'euros pour 40 mégawatts de plus

La production, le transport et la distribution d'énergie électrique sont assurés à Mayotte par EDM, société d'économie mixte créée en mai 1997. Cette société, dont les actionnaires sont la CDM (50%), EDF-EDEV (25%), Saur International (25%) et l'Etat (une part) employait, en 2007, plus de 150 personnes.
Il y a pour l'instant une centrale aux Badamiers (38,8 MW) et une centrale provisoire à Kawéni (11 MW). La nouvelle centrale de Longoni, qui représente un investissement de plus de 40 millions d'euros, disposera d'une capacité initiale de 40 MW extensible à 80 MW, permettant de doubler les capacités actuelles.

14% de croissance de la consommation par an

En 2007, la consommation facturée d'énergie s'est établie à plus de 172 millions de kWh, en progression de 14% en un an et de près de 60% par rapport à 2003. Cette hausse est majoritairement imputable aux clients industriels, dont la consommation a progressé de 180% en un an. Les particuliers (clients domestiques ou professionnels dont la puissance souscrite est inférieure ou égale à 120 kWh), qui représentent plus de 70% de l'électricité facturée, ont vu leur consommation augmenter de 14% en un an et de plus de 35% par rapport à 2004.
L'augmentation de la consommation électrique à Mayotte s'explique par la forte croissance démographique, la progression du taux d'équipement des ménages, ainsi que la hausse de l'activité économique des clients professionnels et industriels.


Les actions en faveur de l'énergie solaire

Actuellement, l'énergie électrique produite à Mayotte est exclusivement le résultat de la transformation de gazole en électricité. Pourtant, de par sa situation géographique, le nombre d'heures d'ensoleillement à Mayotte est considéré comme l'un des plus élevés du territoire français. Le potentiel dans la production d'énergie photovoltaïque est donc conséquent et doit être encouragé, dans la perspective de baisser la dépendance de Mayotte aux énergies non renouvelables.

Pour favoriser le développement de l'énergie solaire, la législation nationale a imposé une obligation d'achat de l'électricité produite par les installations utilisant l'énergie radiative du soleil par l'arrêté du 10 juillet 2006. Pour Mayotte, le tarif d'achat a été fixé le 1er janvier 2008 à 0,41561 euros par kWh, voire 55 cents si les équipements de production assurent également une fonction technique ou architecturale essentielle à l'acte de construction.

Ces mesures ont encouragé les acteurs publics et privés à faire installer des panneaux solaires. Une première centrale photovoltaïque expérimentale connectée au réseau d'EDM a été mise en service en mai 2007 sur le site EDM de Kawéni, pour produire un peu moins de 5 kW crête. De plus, le CG a fait installer des panneaux solaires sur le bâtiment de la DEDD (direction de l'environnement et du développement durable), d'une capacité de 8 kW crête, soit l'équivalent de la consommation annuelle de 15 foyers mahorais. Cette initiative a été imitée en début 2008 pour la nouvelle mairie de Mamoudzou ou la société Mayotte Equipement. Actuellement, deux entreprises réunionnaises se partagent le marché : Ténésol et SCEM. Si l'électricité produite par ces équipements est encore minime, d'autres projets sont en cours ou en consultation (établissements scolaires, entreprises, DE, nouveau marché de Mamoudzou, future centrale EDM de Longoni, futur terminal pétrolier de Total, etc.), ce qui permettra, à plus ou moins long terme, de réduire significativement la dépendance énergétique de Mayotte au pétrole. EDM estime à 900 MWh les prévisions de rachat d'électricité photovoltaïque pour 2008.

Source : Rapport 2008 de l'IEDOM (Institut d'émission des départements d'Outremer)

 

29/08/2008 – Une pièce d’Alain-Kamal Martial présentée dans 27 pays

Avant d'être chargé du département Littérature et Théâtre, puis de devenir directeur du service culturel, Alain-Kamal Martial est avant tout un brillant auteur et dramaturge contemporain. Il contribue beaucoup à la reconnaissance de son île dans le monde, à travers ses œuvres artistiques. Bien qu'il soit actuellement dans l'île, AKM ne manque jamais les grandes occasions nationales.
AKM est sélectionné pour représenter la France à Trait d'Union, un exceptionnel projet de théâtre décidé à l'occasion de Saison culturelle européenne qui se déroule jusqu'en décembre 2008, dans le cadre de la présidence française de l'Union européenne. Trait d'Union consiste à sélectionner 27 pièces européennes contemporaines, une par pays membre de l'UE, qui seront traduites en langue française, éditées et présentées en lectures publiques.
Initié par Cultures France, l'opérateur délégué des ministères des Affaires étrangères et européennes et de la Culture et de la communication pour les échanges culturels internationaux, ce projet veut faire entendre la diversité et la richesse de l’écriture théâtrale contemporaine européenne, tout en faisant découvrir au public des auteurs de théâtre européens reconnus dans leurs pays, mais encore inédits en France.
 
 

"J'ai beaucoup d'espoir pour cette île. Ses jeunes sauront porter des choses grandes et s'affirmer dans la région et sur la scène internationale"

AKM a été choisi grâce à son texte "Les Veuves", avec lequel il était en tournée internationale dans les centres culturels français en 2007. En apprenant, en avril dernier, qu'il allait représenter le théâtre contemporain français et la langue de Molière dans 27 pays d'Europe, la première réaction que l'auteur mahorais a eu : "je ne croyais pas que ce soit un auteur d'un territoire qui n'est pas encore dans l'Union européenne qui ait été sélectionné pour représenter la France".

L'auteur avoue que cette réaction est presque la même qu'en 2002, lorsque lui a été décerné le 1er Prix du théâtre de l'océan indien pour "Zakia Madi, la chatouilleuse". Mais AKM, fondateur de la compagnie IstaMbul en 2000, ne peut que manifester "une joie et une fierté immense", surtout de voir qu'un auteur de l'Outremer, en l'occurrence lui, "arrive à être mis au centre de l'action gouvernementale". Pour lui, cette opération entre dans la politique française : "A l'occasion de sa présidence européenne, la France tient à rendre hommage à sa langue. Elle a surtout envie de marquer son empreinte et son identité, inscrites dans la pensée littéraire et contemporaine. Une façon de montrer ce qui fait sa grandeur, un pays de traditions littéraire et philosophique".

La participation d'AKM à cette manifestation littéraire d'envergure internationale montre en effet que le travail que les jeunes auteurs mahorais font et en lequel ils "croient" est remarquablement reconnu. "J'ai beaucoup d'espoir pour cette île. Ses jeunes sauront porter des choses grandes et s'affirmer dans la région et sur la scène internationale", est-il persuadé.

 

Au Festival d’Avignon et à l’Odéon, le Théâtre de l’Europe

Trait d'Union s'organise autour de trois cycles de lectures : au Festival d’Avignon, au Festival de la Mousson d’été et à l’Odéon, le Théâtre de l’Europe. Elles feront ainsi découvrir les 27 auteurs, traduits avec l’appui de la Maison Antoine Vitez, de l’Atelier européen de la traduction, publiés par les Editions théâtrales (Paris) et distribués dans les 27 pays membres de l’UE.
Créé par le metteur en scène Michel Didym en 1995, le 13ème Festival de la Mousson d'été commence ce vendredi 22 août. L'auteur mahorais est bien présent de par son œuvre "Les Veuves". Cette pièce sera, jusqu'à la fin du mois, confrontée au public : auteurs, éditeurs, acteurs, traducteurs, directeurs de structures théâtrales, responsables institutionnels, journalistes, universitaires, etc.

Du 11 au 15 septembre 2008, "Anéantissement", qui est un extrait de son dernier écrit "Organique", sera joué sur la scène nationale de Saint-Etienne. Commande de l'Ecole nationale supérieure du théâtre, cette pièce est mise en scène par Jean-Claude Barrouti, directeur de la scène nationale stéphanoise.

 

AKM au Musée du Louvre en novembre

Après "Epilogue des noyés" en 2006, "Epilogue d'une trottoire" d'AKM qui a été présentée en lecture lors du Festival d’Avignon en juillet 2007, sera jouée au CCM Jean Gagnant, les 29 et 30 septembre 2008, dans le cadre des 25èmes Francophonies en Limousin (du 23 septembre au 5 octobre). Plus de trente nations, du monde entier, prendront part à ce festival de théâtre, danse, musique et autres arts sur le thème de la francophonie dans le monde. Mise en scène par Thierry Bédard, artiste associé à Bonlieu, la scène nationale d’Annecy dans le cadre du Centre d’art et de création, avec Marie-Charlotte Biais et Joao Fernando Cabral, "Epilogue d'une trottoire" sera également présentée cet été au Festival d'Avigon puis à Cuba, avec une lecture de l'ensemble des "Epilogues". "Epilogue d'une trottoire" est à paraître aux éditions Acte Sud.

Enfin, l'auteur mahorais sera le 5 novembre prochain à la salle de l'auditorium du Musée du Louvre (Paris) et fera une lecture de ses textes au public.

Rafik

AKM, auteur du" théâtre des énergies"

Alain-Kamal Martial est né le 25 juillet 1974 à de M'zouazia, au sud de l'île. Après l'obtention de son baccalauréat, il se rend en France poursuivre ses études universitaires, notamment à Mulhouse, Bordeaux III, Avignon et à Cergy-Pontoise où il prépare une thèse de doctorat en littérature.

En 2000, AKM crée la compagnie de théâtre IstaMbul qui est aujourd'hui menée par des jeunes mahorais formés. Il a écrit et mis en scène plusieurs de ses pièces, dont "P'pa m'a suicideR", qui a été présentée au Centre dramatique de l’océan indien.

Il entame, depuis 2002, un travail de recherche et de collaboration avec des artistes de l’océan indien et de l’Afrique australe. Il travaille sur un "théâtre des énergies". Il a écrit depuis 2005 une série de textes intitulés "Les Épilogues", joués à la Réunion et en France. Il a progressivement acquis une réputation internationale et ses pièces ont été jouées dans 18 pays différents ces dernières années.

Ses dernières pièces : "17 millions d’enterrements pour une dépouille nationale", traduite en portugais par l’auteur mozambicain Mia Couto, a été jouée au Teatro Avenida de Maputo au Mozambique, "Les Veuves" en tournée internationale depuis 2007 dans les centres culturels français, l’ensemble de ses "Epilogues" sera présenté en lecture cet été au Festival d’Avignon. A la direction du Service culturel de la Collectivité départementale de Mayotte depuis janvier 2008, AKM préfère mettre provisoirement entre parenthèses sa carrière d'auteur.


Distinctions

2001 Premier Prix Défi-jeunes Mayotte 2001, pour "La rupture de chair".
2002 Premier Prix du théâtre de l'Océan Indien, pour "Zakia Madi, la chatouilleuse".
2002 Premier Prix du grand Concours littéraire de l'Océan Indien, pour "Zakia Madi, la chatouilleuse".
2005 Prix Arlequin d'or au 19ème Arlequin de Cholet, pour "P'pa m'a suicideR".
2005 Premier prix du jury littéraire du lycée de Sada, pour "La rupture de chair".

UNE Mayotte Hebdo N°392 – Vendredi 22 août 2008

UNE Mayotte Hebdo N°392 - Vendredi 22 août 2008

Dossier 4 pages

Je viens de …

 > Culture – Alain Kamal Martial représente la france en europe
 > Electricité – la nouvelle centrale à longoni
 >
Spectacle – théâtre & danse toute la semaine

 

Août 2008 – Société – Les « Je viens de… »

 
"Le 'Je viens de…' doit revenir avec un plus social"

La fin des grandes vacances approche et de nombreux "Je viens de…" s'apprêtent à retourner sur leur lieu de résidence habituel. L'anthropologue Mohamed M'trengouéni a bien voulu essayer de nous dresser le portrait-type du Mahorais vivant à l'extérieur et venant passer ses congés auprès des siens à Mayotte. Ces "expatriés" – installés durablement ou étudiant temporairement hors du territoire avec ou sans projet de revenir s'installer ici – ont parfois du mal à trouver leur place dans la vie villageoise et ont parfois une image décalée de leur île.

Mayotte Hebdo : Qui sont les "Je viens de…" ?
Mohamed M'trengouéni : Ce sont des Mahorais qui vivent à l'extérieur de Mayotte, principalement en France métropolitaine et à la Réunion. Deux raisons principales les poussent à partir là-bas. Tout d'abord, il y a ceux qui sont à la recherche d'une vie meilleure. Et puis il y a aussi ceux qui partent pour des raisons scolaires. En fonction de l'objet de leur départ, leur retour est perçu différemment.

Mayotte Hebdo : Quelles sont les raisons qui les amènent à revenir à Mayotte ?
Mohamed M'trengouéni : Je ferai une distinction entre les étudiants et les autres "Je viens de…". Pour la seconde catégorie, ils ne viennent pas simplement pour passer des vacances. Ils viennent pour se marier, ou assister à un mariage, construire leur maison. D'ailleurs, ils ne reviennent à Mayotte que s'ils ont les moyens financiers pour réaliser tout cela. Pour les étudiants en revanche, ils reviennent et essaient de s'écarter de toute la pression sociale qu'engendrent les mariages et les autres activités familiales et culturelles en allant à la plage et en faisant des voulés. Vous remarquerez qu'ils ne font pas des pique-niques mais des voulés, c'est leur façon à eux d'avoir une activité typiquement mahoraise qu'ils pourront raconter à leurs amis qui n'ont pas pu faire le déplacement.

Mayotte Hebdo : Quelle est la perception des "Je viens de…" par ceux qui sont restés à Mayotte ?
Mohamed M'trengouéni : Le "Je viens de…" doit revenir avec un plus social. On considère qu'il a acquis quelque chose en plus, même si là-bas il n'a pas amélioré sa situation professionnelle, il n'a pas suivi de formation. L'effet est symbolique, il a vu un autre monde, il peut le comparer au nôtre. S'il a ramené des diplômes ou amélioré sa situation sociale, cela rejaillit sur le prestige de la famille restée à Mayotte. Cela est d'autant plus vrai s'il réalise quelque chose de concret : une maison, un mariage. C'est une situation compliquée à gérer, car par la suite tout le monde s'attend à ce que ce capital social soit fructifié. De nombreux Mahorais restent deux mois ici puis repartent, car ils n'ont pas les moyens de valoriser leur capital. Pour ceux qui reviennent définitivement, si au bout d'un an ils n'ont rien fait, le jugement social que l'on a d'eux se déprécie. Il faut montrer que tu as fait quelque chose, sinon le prestige acquis se perd.

"Il faut participer aux activités collectives pour obtenir toutes les clés nécessaires à la compréhension de la société et avoir sa place au sein de la communauté"

Mayotte Hebdo : Comment les Mahorais qui ont vécu à l'extérieur font face à ces attentes de leur famille et de leur village ?
Mohamed M'trengouéni : Certains le vivent très mal et se sentent étrangers. Il y a une difficulté à être reconnu pour ce qu'ils ont fait. Ils ont l'impression d'être en retard par rapport à la société mahoraise. Le paradoxe, c'est que certains se disent qu'ils vont repartir pour rattraper ce retard, mais ils ne le pourront pas car pour être complètement intégrés, il faut se conformer aux usages culturels locaux. Ce n'est pas évident quand on a des repères d'ailleurs. Ici les gens ont envie de te connaître, il faut se raconter sur la place publique. La communication est collective, les gens se réfèrent à la communauté pour délivrer une opinion. L'individu n'existe pas en dehors du groupe, contrairement aux sociétés occidentales. L'exclusion commence par l'auto-exclusion. En fait, il faut participer aux activités collectives pour obtenir toutes les clés nécessaires à la compréhension de la société et avoir sa place au sein de la communauté. Cela prend du temps, surtout pour les personnes qui n'ont pas vécu à Mayotte entre l'âge de 10 et 25 ans.

Mayotte Hebdo : Ces deux mondes sont-ils irréconciliables ?
Mohamed M'trengouéni : On ne peut pas les mélanger. Chacun a ses institutions et son organisation. Mais pour moi, c'est un faux débat. Le phénomène des "Je viens de…" est un fait social. On en a une meilleure compréhension si on a vécu à Mayotte et à l'extérieur. D'ailleurs, les "Je viens de…" n'essaient même pas d'expliquer le fonctionnement du monde extérieur à ceux qui sont restés à Mayotte. Cela reviendrait ici à accepter une façon de faire extérieure à la culture mahoraise. Mais le fait d'avoir vécu ailleurs peut enrichir certaines pratiques endogènes. Auparavant, à l'occasion des mariages, il n'y avait pas d'invitation lors des manzaraka. Tout le monde venait préparer et manger. Aujourd'hui, sous l'influence des invitations pour les dîners dansants, il y a aussi des invitations pour les manzaraka. De nombreuses choses peuvent changer en 20 ou 30 ans.

Propos recueillis par Faïd Souhaïli
 

 


Alawa Maore

Littéralement, "Je viens de…" se traduirait "Tsi lawa" en shimaore. Une traduction qui nous fait immanquablement penser au tube de Lathéral "Alawa Maore" ("Il vient de Mayotte"). Dans cette chanson, le lauréat de 9 semaines et 1 jour raconte la vie à Mayotte des sans papiers anjouanais qui font croire à leur famille restée sur leur île natale que leur vie se déroule sans problème, alors qu'ils sont dans une galère totale, poursuivis par la Paf, accomplissant des travaux pénibles et s'entassant à 20 dans un banga.
Pour Mohamed M'trengouéni, le terme de "Je viens de…" traduit une autre réalité. "Il est vrai qu'à une certaine période, les Mahorais de l'extérieur renvoyaient une image décalée de leur vie quotidienne en France et l'enjolivaient. Mais si on devait traduire en shimaore, "Wami de mtru.." (je suis celui qui…, c'est moi qui…) serait plus approprié. En effet, "Je viens de…" est un terme ironique inventé par ceux qui sont restés à Mayotte pour caractériser la vantardise de ceux qui étaient partis et qui se donnaient de l'importance en disant tout connaître. Or aujourd'hui ce n'est plus vrai, avec la télé les Mahorais voient ce qui se passe en France. Tout le monde a la voiture, la maison, en fait ils n'ont plus d'argument pour se valoriser, ils n'apportent plus la bonne parole."

 


M'kaya Ali, 2ème dauphine de Miss Mayotte 2008
Ceux qui agissent et ceux qui traînent

À défaut de venir à Mayotte pour y rester, M'kaya Ali qui vient de la Réunion s'en est retournée mercredi dernier dans cette île où elle demeure depuis l'âge de cinq ans. "Je me sens bien ici !", s'est exclamée l'habitante de la ville du Port avant de partir, à propos du phénomène des "Je viens de…".

Cette année, le séjour de la native de Dzaoudzi n'a pas été tout à fait comme les autres, elle qui débarque sur son île d'origine assez régulièrement. La Mahoraise, inscrite par sa sœur, a vécu cet été la fameuse aventure de Miss Mayotte de l'intérieur en se portant candidate. Cerise sur le gâteau, c'est avec l'écharpe de deuxième dauphine qu'elle regagne la Réunion.
"C'était pour moi une aventure inoubliable où j'ai appris énormément. Une grande solidarité et beaucoup de rigueur de la part de tous les coachs m'ont marqué l'esprit et ont fait que le spectacle final a été une réussite", nous explique-t-elle. Pour commencer cette nouvelle semaine, la jolie fille de Labattoir a accepté de donner son avis au journal sur le phénomène des "Je viens de…", sans pour autant être vraiment certaine d'en faire partie…
"En voyageant on découvre toujours une autre culture, une autre socialisation que celle de la vie locale, donc je pense que c'est toujours bien de partir et de voir autre chose", affirme-t-elle. "Ce n'est pas pour autant que le "Je viens de…" doit se croire meilleur qu'un autre Mahorais, en particulier envers celui qui n'a jamais voyagé. Certains sont conscients de cette opportunité qui leur est donnée que de découvrir ou de vivre en France. Ils en profitent pour réaliser des choses bien. D'autres n'ont pas conscience de leurs chances. Ceux-là passent leur temps à ne rien faire là-bas et ce sont en général eux, à leur retour ou pendant leur séjour, qui se sentent au-dessus des autres", continue la toute nouvelle étudiante en BTS Tourisme.
Celle-ci répond sans hésitation lorsqu'on lui demande à quoi on peut les reconnaître : "leur tenue vestimentaire". Cependant, le vêtement métropolitain n'a plus de secret pour les Mahorais selon elle. "Moi par exemple, je suis habillée comme ça car c'est dans cette culture que j'ai grandi. Mais aujourd'hui, on peut trouver des personnes habillées de cette manière, sans pour autant qu'elles aient voyagé", conclut celle qui rêve d'ouvrir un atelier de confection.
Déjà auteur de quelques créations personnelles, M'kaya veut devenir styliste de mode à l'avenir. Repartie mercredi "avec regret", elle affirme que beaucoup de choses vont lui manquer, "surtout l'aspect naturel et relationnel qui est unique ici. Quand il y a un mariage par exemple, c'est tout le village qui se mobilise, c'est vraiment exceptionnel. Les voulés vont aussi beaucoup me manquer, ce sont des choses qu'on ne retrouve pas là-bas."

Ichirac Mahafidhou
 

 


Saturnin, 37 ans, fonctionnaire à Bourg en Bresse
Planifier un retour définitif à Mayotte

Ce jeune père de famille est originaire de Mayotte où vivent les membres de sa famille et ses proches. Afin de poursuivre ses études, il quitte son île en 1990 pour partir en Métropole et revient seulement en 2001 dans le but de travailler. En 2004, à l'occasion d'une formation il est renvoyé en France mais très vite la vie active lui manque et il intègre la fonction publique. Depuis, il travaille dans un lycée agricole à Bourg en Bresse.
S'il n'a pas l'intention de rentrer au pays pour l'instant à cause de ses ambitions professionnelles, il tient quand même à planifier son retour définitif en demandant une mutation à Mayotte. "Nous avons hâte de nous installer au bled pour y agrandir notre famille", ajoute sa femme, qui elle aussi veut réussir sur le plan professionnel avant de rentrer définitivement. S'ils vivent en France, leurs cœurs restent à Mayotte et ils suivent régulièrement l'actualité de l'île grâce à internet et aux chaînes du câble.
Ainsi, Saturnin note que Mayotte connaît des mutations, surtout sur le plan social comme par exemple avec l'évolution du Smic horaire qui se rapproche progressivement de celui de la Métropole ou encore les voyages, qui sont rentrés dans la culture mahoraise. "Aujourd'hui tout le monde voyage, que ce soient les jeunes ou les vieux". C'est en ce sens qu'il fait aussi remarquer que les mentalités des Mahorais changent "de manière positive mais aussi négative". Et pour cela il donne des exemples et nous dit que c'est à son grand regret qu'il constate que le système de "musada" (l'entraide) qui était le ciment de la société mahoraise, n'existe plus aujourd'hui.
Même si il se sent toujours chez lui à Mayotte, il a toujours une certaine "appréhension par rapport à l'évolution de l'île" et se dit déçu par l'impression qu'il a d'une "espèce de régression de certaines administrations de l'île". Toutefois, le Mahorais est très fier que Mayotte possède de plus en plus des infrastructures qui continuent à se développer sur l'île. D'ailleurs, il ajoute qu'en rentrant sur l'île dans un futur proche, il veut "contribuer au développement de l'île et lui rendre ainsi ce qu'elle m'a donné".

Fatihat Cheick-Ahmed
 

 


Soihadine, 24 ans, technicien informatique
"Je vois des constructions de maisons partout où je passe dans les villages"

Soihadine, natif de Mayotte a vécu à la Réunion pendant près de 14 ans. Parti dans l'île voisine à l'age de 9 ans pour des raisons familiales, il y grandit et fait ainsi toutes ses classes là bas, du primaire au supérieur. Titulaire d'un BTS, le jeune homme est rentré au mois de juin à Mayotte car il a obtenu un poste dans une entreprise locale et a vu ainsi son souhait de retour aux sources se réaliser.
Malgré tout il reste attaché à son ancienne île d'accueil car il avait l'impression de s'être bâti un foyer avec sa mère et ses frères et sœurs, parmi lesquels certains sont aussi rentrés pour travailler dans l'île natale. Soihadine ne connaît pas très bien son île d'origine car il n'est revenu que 2 fois en vacances (en 2002 et 2006) pour assister aux mariages de ses sœurs. Ce qui le marque beaucoup c'est de voir autant de bâtiments construits sur l'île et des infrastructures en tous genres.
"Je suis impressionné qu'en une dizaine d'années Mayotte ait connu un tel développement, par exemple pour les routes et il y a beaucoup plus de voitures ". De plus il remarque que l'immobilier est devenu la priorité des Mahorais : "je vois des constructions de maisons partout où je passe dans les villages". Toutefois il est surpris de la lenteur de l'administration dans l'île et remarque une communication inefficace auprès du public.
Il travaille depuis peu et se dit "dégoûté du comportement de certains patrons d'entreprises ou bien de responsables de services dans les administrations mahoraises", auprès desquels il doit souvent intervenir. "Ils vous traitent comme un moins que rien", nous dit-il avec un soupir. Il ajoute ironiquement à cela qu'il est choqué par la "courtoisie" des automobilistes à Mayotte.
Par ailleurs, il porte un regard critique sur les mentalités de la population mahoraise. "J'ai l'impression qu'il y a une perte d'identité, c'est-à-dire que surtout les jeunes essaient de s'approprier une culture qui n'est pas la leur et renient leurs traditions. Je trouve ça bien dommage." Ce qu'il regrette aussi c'est l'entraide entre les personnes qui existait sur l'île et dont il se souvient. "Les Mahorais sont devenus tellement individualistes."

Fatihat Cheick-Ahmed
 

 


Lattuf, 23 ans, étudiant en droit
Revenir sur l'île à long terme, avec des références et des expériences

Ce jeune homme originaire de Sada est venu à Mayotte pour passer ses vacances d'été auprès de sa famille. Après avoir obtenu son baccalauréat économique et social au lycée de Sada, il s'envole pour la ville de Bordeaux où il habite maintenant depuis bientôt 5 ans. Il connaît très bien l'île car il y a grandi et fait remarquer que Mayotte s'ouvre de plus en plus sur le monde et que c'est une excellente chose, "les Mahorais voyagent beaucoup".
Cet étudiant ambitieux envisage de devenir professeur de droit et revenir sur l'île à long terme, avec des références et des expériences. "Je ne veux pas être un novice mais un professionnel", déclare-t-il en rajoutant qu'il envisage de s'installer ici à long terme et d'y faire sa vie. Mais tout d'abord il a l'intention de poursuivre en 5ème année en droit des affaires et par la suite effectuer un séjour aux Etats-Unis dans le cadre de ses études "pour améliorer l'anglais".
Il constate que les Mahorais évoluent, notamment les jeunes. "J'ai l'impression que de plus en plus les jeunes ont conscience de leur île et veulent participer à son devenir". Mais il déplore que "le CG soit devenu la première entreprise de Mayotte".
Selon lui, les Mahorais devraient avoir beaucoup plus d'initiatives plutôt que de chercher à tout prix à travailler dans l'administration, d'autant qu'il souligne que "ça dort dans l'administration". Lattuf a la volonté de créer une sorte de parrainage pour les nouveaux étudiants qui débarquent en Métropole. L'idée serait que des volontaires les prennent sous leurs ailes pendant un certain temps pour les guider dans les démarches à effectuer à leur arrivée et les intégrer, car il déplore malheureusement que ces jeunes soient laissés pour compte et ne soient pas mieux accompagnés.

Fatihat Cheick-Ahmed
 

 


Opinions sur rue….
Que pensez vous des "Je viens de…"?

Allaoui Azhar Ben, 21 ans, animateur école privée, Pamandzi
"Je viens de…", c’est un terme qu’on emploie vu que quand les élèves partent faire des études en Métropole, ils reviennent en disant : "Je viens de Paris", "Je viens de Marseille"…, voilà. C’est un "truc" qu’on emploie mais ce sont des gens comme nous, ce sont des Mahorais et il n’y a rien qui change. Ils s’habillent comme des Métropolitains avec des marques de bas en haut et j’en passe. Leur hygiène de vie change, ils partent sales mais ils reviennent propres, ils changent de couleurs ou changent d’attitude, de caractère le plus souvent, ils sont autres, ils deviennent généreux pour la plupart. Mais certains ne changent même pas, ils reviennent avec le même caractère et comme on dit en shimaoré, les gens qui reviennent de la Métropole, ils deviennent "guédzé" ("ignorants", ndlr) !


Lavita, 17 ans, Première STC, Petite Terre

Les "Je viens de…", parfois ils sont un peu bizarre. Par exemple, si on se connaissait quand on était petit, en revenant ils se foutent un peu de notre gueule, ils font genre ils ne nous connaissent pas et là, ça nous fait trop la honte. Et leur façon de s’habiller, certaines s’habillent comme des p…, désolée de dire le mot mais c’est grave. Elles viennent ici pour voler les mecs des autres et ce n’est pas bien du tout. En revenant ici, ils font comme si ils étaient les stars de Mayotte.

Attoumani Tava, Pamandzi
Moi je pense que les "Je viens de…" sont des personnes qui se la pètent, pas tous mais la plupart d’entre eux ils se la pètent parce que quand ils partent de Mayotte ils oublient leurs racines. Ils se croient supérieurs à tout le monde, ils croient qu’ils sont les boss. Ils font comme s'ils te connaissent pas alors que ce sont des gars avec qui tu traînais avant… Leur façon de s’habiller, c’est amusant parce qu’on voit qu’à Mayotte il n’y a pas trop de trucs à acheter, alors qu’en Métropole il y a des trucs à acheter, moins chers.

Moussa Abchia, 20 ans, Pamandzi
Ce que je pense des "Je viens de…" ? C’est que dès qu’on arrive à Mayotte on sent que c’est différent de la Métropole. Les modes de vie changent, mais surtout la manière de s’habiller, il y a aussi une évolution dans leur hygiène. Mais c’est normal car Mayotte aussi s’est développée économiquement, les jeunes aussi ont évolué, voilà !

Ben Marouane, 18 ans, Pamandzi
Les "Je viens de…" pour moi, ça dépend. Ils ne sont pas tous pareils. Il y en a qui sont à l’aise parce que c’est leur pays natal, mais il y en a qui veulent se montrer comme quoi ils viennent d’arriver. Certains aussi oublient leurs racines. Au niveau de leur tenue vestimentaire, on sait bien qu’à Mayotte, en Métropole ou quelque soit le pays, on ne s’habille pas de la même manière. Ici aussi ça évolue mais ce n’est pas la même chose, quoi ! Donc quand ils viennent ici ils sont bien habillés, leur tenue s’améliore.

Mistoihi El-Dine, 17 ans, première S, Pamandzi
Le nom de "Je viens de…" pour nous c’est un truc nouveau, parce qu’on considère que si une personne a eu son bac ou est partie depuis longtemps de Mayotte… ce n’est pas une question qu’il se la pète, mais il y a une différence. C’est pour ça qu’on les appelle les "Je viens de…" parce qu’ils vont acheter des nouveaux trucs, des nouvelles fringues, c’est pourquoi on les remarque, en gros.

Saïd Naxies, 17 ans, BEP vente action marchande, Pamandzi
Les "Je viens de…", c’est simple. En fait, quand ils partent et qu’ils reviennent à Mayotte, on dirait qu’ils sont beaucoup plus vantards qu’avant, ils se la pètent de plus en plus et ils ne sont pas comme avant, c’est tout !

M'djassiri Ali Mohamadi dit Bamhé, Tsingoni, éducateur sportif
Il y a un peu plus de présence, plus d'animation dans le village quand ils sont là. Je trouve que les "Je viens de…" participent beaucoup aux activités culturelles et sportives. Ils sont aussi toujours présents dans les grands rendez-vous, comme les mariages. Ils sont engagés en fait, en dehors de quelques-uns qui font ce que les jeunes ne doivent pas copier. Je peux dire aussi qu'avant, les "Je viens de…" étaient bien accueillis quand ils arrivaient, mais ça a changé. Tout le monde peut se permettre de voyager aujourd'hui, c'est sûrement la raison de ce changement de comportement envers eux.

Abassi, 16 ans, Kavani, futur lycéen en 2nd sciences médico-sociales
Moi je m'en vais mardi en Métropole, dans la ville de Toulouse, et tout ce que j'espère c'est qu'on ne me dise jamais que je suis un "Je viens de…" quand je reviendrais. Ce nom à un sens très négatif pour moi. Je n'en serais pas un, c'est sûr. Ça me fait vraiment mal au cœur de voir comment ils se là pètent et se prennent pour ce qu'ils ne sont pas, c'est-à-dire meilleurs que tous. En achetant des habits chers en France, ils croient qu'ils valent mieux que les autres, alors qu'il n'y a aucune différence.

Saïd Fidèle, 16 ans, Kavani, entre en 1ère S au lycée de Mamoudzou
Les "Je viens de…" reviennent avec la grosse tête. Ils racontent leurs histoires, leurs aventures d'une manière… comme s'ils veulent provoquer ou nous blesser, comme s'ils veulent qu'on rêve d'être comme eux ou comme s'ils veulent qu'on les envie. Leur manière de se comporter avec les gens est mauvaise. Il y en a même, s'il fait chaud, qui mettent des pulls et des gros pantalons pour montrer qu'ils viennent de France, qu'ils ont acheté tout ça en France. En tout cas, si eux sont des "Je viens de…", moi je suis un "Je reste !", et bien sûr fier de l'être.

Abidi Moustadirane, 17 ans, Nyambadao, futur cuisinier
Je n'y pense pas vraiment à ces gens là, mais pour moi ils sont gentils. En tout cas ceux que je connais. Il n'y en a quelques-uns dans mon village et ils ont changé. C'était des bad boys avant de partir en France, maintenant ils sont tranquilles. Ils ont peut-être compris l'importance des études. C'est une bonne chose et ça me donne envie d'y aller. Il y a ma sœur à Paris, donc si j'ai l'occasion de faire ce voyage, surtout pour mes études, je n'hésiterais pas.

Assani Mohamed alias Daan, 20 ans, Chirongui, en terminal Bac pro à Sada
Comme la mentalité est différente et que les choses sont plus développées en France, quand les "Je viens de…" reviennent, ils se croient en avance, plus intelligents que ceux qui sont ici. S'il y a une organisation dans un village un peu ratée, ils se disent qu'on est à Mayotte donc c'est normal, c'est sauvage ici, on est encore loin… C'est le genre de propos qu'ils tiennent. Je pense que même si tu as été bien éduqué à Mayotte, tu apprends beaucoup de choses en allant en France, c'est une autre éducation. On reconnaît le "Je viens de…" parle son look et sa façon de s'exprimer. Souvent ça s'entend quand il parle.

Issouf Alidou, mécanicien, 18 ans, Majicavo
Très franchement, la plupart reviennent métamorphosés ! C'est fatal. Si vous en croisez un dans la rue, impossible de ne pas le reconnaître. Déjà ils portent tous des nouvelles fringues, et c'est un vrai plaisir de découvrir des nanas toujours plus sexy à chaque fois qu'elles reviennent. Puis les potes, pour ceux qui n'ont pas trop pris la grosse tête et qui n'ont pas oublié leurs copains d'enfance, il ont toujours un peu de monnaie pour allez boire un coup. Mais quand ils changent, c'est fatal. Surtout les filles ! La plupart se prennent pour des reines et ne vous adressent même plus la parole. Mais il y a quand même de bons cotés. Des fois la famille ramène des cadeaux, ou alors on peut passer commande aux collègues qui rentrent pour qu'ils nous ramènent des fringues ou des baladeurs…

Ahamadi Moussa, 17 ans, Cavani
C'est bizarre, mais dans ma famille, lorsqu'ils reviennent pour les vacances d'hiver, on remarque toujours un changement. Même moi qui ai vécu à la Réunion, j'ai du mal à m'expliquer ce phénomène, encore plus aux autres. Il est vrai que vivre loin de Mayotte, c'est s'éloigner de la tradition, de la famille, de la religion aussi parfois, mais cela n'explique pas tout. Beaucoup développent un complexe de supériorité et oublient leur passé. Je comprends que le fait de s'exiler fasse évoluer les mentalités, et je dirais même que c'est nécessaire car c'est toujours positif d'aller voir ailleurs ce qui se passe.

Salima 17 ans, élève de 2nde, Cavani
Ce que je pense des "Je viens de…" ? Simplement qu'ils se la "pètent" trop. Ils reviennent ici avec leurs nouveaux habits et leurs nouvelles idées, ne restent plus qu'entre eux et ils nous ignorent complètement. Comme si on n'avait jamais existé pour eux, alors qu'on à grandi ensemble. C'est un comportement marqué surtout chez les filles. Mon frère vit à la Réunion depuis 4 ans. Il est marié et a 26 ans. Heureusement lui n'a pas changé. Il est toujours aussi content de revenir à chaque fois qu'il le peut et il donne régulièrement des nouvelles. Si je dois partir un jour pour mes études, je ferais bien attention à suivre son exemple et surtout pas celui des trop nombreux anciens amis qui m'ont déçue.

"Ce sont des vantards, certains se croient supérieurs par rapport à ceux qui sont restés parce qu'ils ont voyagé et vu autre chose, c'est bien d'évoluer mais pas comme ça."

"Déjà il y a un énorme changement de mentalités. Il y en a qui se croient les rois du pays et qu'il faut qu'on leur lèche les bottes. Moi aussi je vais bientôt partir et j'espère ne pas devenir comme ça."

"Moi, les Je viens de… m'impressionnent car je les vois plus autonomes que nous et certains nous disent qu'à l'extérieur de Mayotte c'est beaucoup mieux qu'ici."

"Je suis un Je viens de… et j'en suis fier. De toute façon je m'affirme en tant que tel. D'ailleurs j'ai plus de succès auprès des filles qui sont impressionnées dès qu'elles me voient !"

"Un Je viens de… se voit tout de suite. Pour les filles ce sont des vêtements souvent très colorés avec des bijoux en tous genres et les cheveux avec des mèches ou des tissages. En ce qui concerne les garçons ce sont les grosses lunettes, les piercings sur les oreilles, la casquette à l'envers et bien sûr la démarche…"

"Je suis surpris de voir que certains font semblant d'avoir oublié nos habitudes ici à Mayotte. C'est comme s'ils reniaient leurs origines."

"Moi, en les voyant bien sapés et tout, ça me donne envie de partir aussi."

"Il y en a certains qui n'aiment pas te parler parce qu'ils considèrent que tu n'es pas à la hauteur par rapport à eux."

 
 

 


L’avis d’une "Je viens de…" sur les "Je viens de…"
Salima Charafoudine, 24 ans, Master 2 droit public fondamental à Toulouse, de Chiconi

Je trouve ça vraiment ridicule d’appeler les jeunes Mahorais ou les gens qui se déplacent et quand ils reviennent ici des "Je viens de…". C’est l’évolution de la société, on n’y peut rien. Les jeunes d'ici, quand ils partent en Métropole ils découvrent un autre territoire, un autre mode de vie, ils sont obligés de s’adapter. Ils ne peuvent pas débarquer avec leurs salouvas, leurs boubous et leurs chapeaux comme des extraterrestres, ce n’est pas possible. Déjà que c’est difficile pour un noir de s’intégrer dans un pays comme ça, on est mal vu, on est mal accueilli, c’est une réalité en France, alors que eux, les blancs, je suis désolée mais quand ils viennent ici on les accueille les bras ouverts.
Nous on doit faire beaucoup d’efforts pour s’adapter, pour qu’ils nous acceptent, qu’ils ne nous rejettent pas et c’est comme ça, on y peut rien. Les vêtements d’aujourd’hui ne sont pas les vêtements d’il y a 100 ans, donc on n’a pas le choix en fait. La société évolue comme ça. Et ce n’est pas parce qu’on se met en pantalon qu’on est moins bien élevé qu’une fille qui porte un salouva ou je ne sais quoi. Je veux dire par là que moi je suis en pantalon et t-shirt, mais je fais des études, je fais le Ramadan, je lis le Coran… Après c’est vrai qu’il y a des frimeurs, mais ça aussi c’est la vie, on n’y peut rien.

 


Yazidou Maandhui, étudiant en DEA Littérature anglaise à Toulouse
Un "Je viens de…" sportif, littéraire et engagé

Yazidou Maandhui est étudiant en DEA Littérature anglaise à Toulouse à la rentrée, auteur et dramaturge ayant déjà publié un recueil de poésie "Le palimpseste du silence ou le silence des Dieux" en 2005 aux Editions du Baobab. Il écrit aussi des pièces de théâtre comme "L’Evangile de l’espace et du temps", produite la même année; une commande d’écriture du conseil général ou encore "Epître aux lucioles", présentée cette semaine dans le cadre du festival La Passe en S, jouée par une troupe professionnelle de Toulouse, le Théâtre Extensible, composée de professionnels et de semi-professionnels.
Pour lui, ces quelques semaines de vacances ont été rythmées non pas par les voulés, les mariages ou le tourisme. Ce fut surtout une période dont il a profité pour mettre en avant ses productions artistiques.

Après sa terminale littéraire à Limoges, Yazidou a décroché son bac L dans la Ville rose avant de valider son Deug d’Anglais. Assoiffé de culture, il partira une année avec Erasmus au Pays de Galles d’où il devrait revenir avec une licence en poche. De retour à Limoges, son parcours le mènera jusqu’à décrocher son master, avant de tenter le concours du Capes. Très attiré par les voyages et la découverte, la Métropole et le Pays de Galle ne sont pas ses premières terres d’évasion.
Peu avant de gagner l’Hexagone, ce jeune pamandzien de 25 ans a vécu à l’île voisine de la Réunion où il a passé sa première L. Parallèlement à ses études, Yaz, comme l’appellent ses proches, suivait un cursus sportif en sport études au Creps (Centre régional d’études physiques et sportives) de Saint-Denis en intégrant le pôle espoir judo de l’île Bourbon. Sportivement, cette expérience lui a permis d’atteindre le niveau de champion régional puis d’intégrer le pôle espoir de Limoges.

"Très tôt, en 4ème, j’ai été attiré par l’écriture (…) un plaisir, une passion, une vocation"

Aujourd’hui, le sport demeure pour lui un simple plaisir car c’est surtout dans le domaine littéraire et artistique qu’il s’exprime, puisque "très tôt, en 4ème, j’ai été attiré par l’écriture", nous confie-t-il. Sa "crise d’adolescence" passée, il redécouvrira l’envie et le plaisir de la littérature en première. "On m’a initié à la poésie de Francis Ponge et j’ai découvert le courant postmoderne, alors je me suis remis à l’écriture. J’ai travaillé le style, j’ai essayé de découvrir un peu l’écriture, ce qui s’est soldé en 2005 par l’apparition de mon premier recueil", reconnaît-il aisément.
Pour moi, "l’écriture est devenu un plaisir, c’est plus qu’ une passion, c’est une vocation", dans la mesure où il fait cela parallèlement à ses études. Une gestion pas toujours facile, ce qui fait que Yaz prend son temps pour écrire. "La gestion est plus ou moins aisée, nous dit-il puisque je ne subis pas une quelconque pression, à moins que cela ne soit une commande d’écriture". Plein d’ambitions, il a envie de se faire un nom à travers son écriture en affinant son style pour que "Mayotte soit bien représentée".

Très à l’aise en Anglais où il "excelle", selon ses propres mots, Yaz se prépare au professorat alors que sa passion première voulait le mener à effectuer une seconde théâtre. Mais "une fois à la Réunion, la combinaison des deux était trop difficile". Du coup l’anglais a fini par l’emporter, même si aujourd’hui ces deux aspects se retrouvent avec ses engagements universitaires rythmés par la littérature anglaise et son amour pour le théâtre.
Mais dans ses projets, l’intérêt n’est pas tant de revenir à Mayotte ou de rester en Métropole : "l’important est de trouver ma voie. (…) On ne doit pas se priver d’aller ailleurs, que ce soit aux Etats-Unis ou en Angleterre". Mais il reconnaît tout de même que la culture pourrait le faire revenir à Mayotte "non pas par nationalisme mais pour être plus au contact avec la réalité du terrain".

Après tant d’années à l’extérieur, il constate que Mayotte s’est développée même s’il tient à souligner que beaucoup d’efforts restent à faire, notamment au niveau du renouvellement des générations dans le monde actif. C’est en cela qu’il remarque une "concurrence rude entre nous, jeune génération, qui partons et qui ambitionnons d’avoir le plus de diplômes possible, et l’ancienne génération ou ceux qui n’ont pas eu la chance d’aller très loin dans les études, qui sont là depuis longtemps et qui comptent vraiment garder, qui s’agrippent à leurs places. Du coup, ceci crée un frottement, ce qui fait que les jeunes, on a du mal à s’intégrer".

"Il faut qu’il y ait déjà une clarté par rapport à la Dasu elle-même"

Mais comme tout jeune Mahorais, Yaz remarque ces efforts à faire aussi au niveau de la prise en charge des jeunes qui partent effectuer leurs études hors du territoire. Pour lui, "cet échec est quelque part lié à une mauvaise gestion" administrative. Son expérience réunionnaise lui a montré qu’il est plus facile de réussir à l’île Bourbon qu’en métropole où l’intégration reste difficile et où se débrouiller est un crédo pour des étudiants qui se retrouvent "livrer à eux-mêmes". Il constate par ailleurs un fort manque de communication et d’information : "il faut qu’il y ait déjà une clarté par rapport à la Dasu elle-même", mais pour lui "c’est la bourse souvent versée en retard qui pèse le plus, ainsi que le manque ou plutôt une mauvaise orientation pour des jeunes dont la plupart ne disposent pas de réel projet professionnel".
Pour cet étudiant, la mise en place progressive de formations universitaires ne doit pas permettre de "confiner, empêcher les élèves de partir car on a besoin de partir en Métropole pour aller découvrir. Les empêcher d’aller chercher là-bas et ramener ici serait une sorte de régression (…). Il faut partager la responsabilité de cet échec. Est-ce que les acteurs qui s’occupent des élèves ne participent pas, inconsciemment, à cet échec ?" Pour lui, la base de tout cela serait une réorganisation du dispositif administratif entre les responsabilités de la Dasu et celles du vice-rectorat ; "il faut revoir l’organisation, médiocre, de ces administrations", propose-t-il.

Mais Yaz n’exclue en rien la responsabilité des jeunes Mahorais qui, "une fois en Métropole, se sentent libérés de quelque chose, toujours dans l’outrance, car beaucoup tombent dans l’alcool et dans l’excès", ce qui ne garantit pas forcément le retour sur investissement dans lequel la Collectivité s’est engagée. Il propose aussi de "mettre en avant ceux qui réussissent et publier chaque année des statistiques pour savoir qui réussit, où, quelle filière marche et qu’est-ce qui ne marche pas. Au moins en mettant en avant ceux qui réussissent, on pourrait montrer l’exemple aux primo arrivants qui auraient peut-être plus d’ambition, mais à ceux-là on leur met toujours dans l’esprit qu’ils sont partis pour échouer".
Ce qui le pousse à dire que "quand les conditions sont réunies, quand l’élève a été pris en charge vraiment intelligemment et surtout quand il se prend en main, la réussite est assurée. Mais le dispositif est là justement pour aider ceux qui n’arrivent pas à se prendre en main". Un engagement que Yaz défend et qu’il dégage à chaque fois que l’occasion se présente. Un bon tremplin pour démontrer que la poésie, la littérature ou le théâtre restent aussi un moyen d’engagement et participent à éveiller les consciences.

R.T Charaffoudine Mohamed
 
 

Céline Ahmed Ben Ali, ancienne étudiante en assurance
Diplômée, à la recherche d'un emploi et déçue de Mayotte

Alors que certains rentrent en vacances pour se reposer, voir les familles ou participer aux mariages, d'autres demeurent toujours en Métropole et ont du mal à quitter leur quotidien métropolitain pour, ne serait-ce que venir constater ce qu'est devenu Mayotte. Mais quelques uns s'accrochent vaille que vaille et se laissent séduire par l'envie de rentrer au pays et de servir du peu qu'ils peuvent. Voici l'exemple d'une jeune fille qui, depuis plusieurs mois déjà, s'est décidée de rentrer après un brillant parcours. Mais l'absence d'opportunités professionnelles pourrait la faire retourner à Paris, une issue à laquelle elle n'a pas envie de penser, mais qui demeure toutefois comme l'ultime solution.

Agée de 24 ans, Céline Ahmed Ben Ali a quitté son Chirongui natal après son bac décroché en 2003. A Paris, elle a obtenu un BTS en Assurance avant de valider une licence professionnelle, toujours dans le même domaine. Et c'est avec fierté qu'elle vient de rentrer dans l'objectif de servir son île, surtout après avoir acquis une expérience de deux ans au sein d'un cabinet parisien.
Mais depuis son arrivée, Céline cherche et ne trouve toujours pas. Elle cherche bien sur à travailler dans le domaine des assurances, mais pas seulement : "d'autres domaines aussi m'intéressent, nous dit-elle, sachant qu'à Mayotte il n'y a que trois entreprises évoluant dans le domaine des assurances. Je recherche aussi dans les postes administratifs, juridiques", mais c'est un bilan plutôt décevant qu'elle nous dresse puisque jusqu'alors, sur toutes les demandes adressées, aucune de positive ne lui est revenue. De quoi tirer la sonnette d'alarme;
"Je compte rester jusqu'à janvier sinon je rentre à Paris". Là-bas, elle compte faire un master mais elle sera obligée de passer par une autre licence avant d'effectuer sa formation. "Vue la situation dans laquelle je suis ici, je serais obligée de partir dans cette perspective", à moins que la chance lui sourit d'ici janvier.

Beaucoup de points négatifs sur Mayotte

Sa galère de trouver un emploi lui fait dire que les dispositifs d'aides à la recherche d'emploi sont plutôt décevants : "il n'y a pas d'informations, on ne connaît que l'ANPE, il n'y a aucune structure pour aider les jeunes à trouver leur emploi. Je suis vraiment déçue car on m'a souvent dit que Mayotte a changé, ça a évolué. La famille t'encourage et te dit "ne t'inquiète pas, tu vas trouver car Mayotte est en développement, on cherche des gens qualifiés", alors que ce n'est pas du tout le cas. J'en ai bien la preuve : pour trouver un emploi il faut connaître du monde, mais je pense qu'il faut quand même persister et j'espère que d'ici janvier je trouverais quelque chose. Je me dirais ouf ! Je me serais déjà sortie d'un gouffre.
Sur Mayotte, son état actuel et son évolution, Céline ne voit "que des points négatifs". Quant à la religion, pour elle "l'Islam est compatible avec la République, mais c'est un peu compliqué parce qu'on a l'impression que l'Islam est très présent, mais seulement quand ça nous arrange. L'Islam à Mayotte n'est pas le même que l'Islam en Tunisie ou au Maroc. A Mayotte, c'est un peu particulier et des fois je trouve que c'est un peu hypocrite, notre façon de voir et de vivre l'Islam".
Malgré son pessimisme avoué, Céline conseille à ses concitoyens de "réfléchir à leur façon de contribuer au développement de l'île". Elle tient aussi à dénoncer certains déboires dans l'administration comme "aller cinq fois par jour à la préfecture pour une carte grise" ou les queues interminables à la BFC de Mamoudzou. Une situation "inadmissible" vu l'élan de développement auquel Mayotte aspire. Une conscience qui devrait sans aucun doute lui permettre, elle aussi, de trouver sa place dans cette société qui s'occidentalise et qui oublie souvent ses enfants.

R.T Charaffoudine Mohamed
 

 


Daniel Djadi, bachelor en relations internationales
"Le métier de diplomate me fascine beaucoup"

On parle souvent de l'échec cuisant des étudiants mahorais dans l'Hexagone, mais on parle moins de ceux qui réussissent et qui sont dans ce que le sénateur Soibahadine nomme "les pôles de l'excellence". Voici un exemple, ils se comptent sur les doigts de la main, mais ils existent bel et bien. Agé de 25 ans, Daniel Djadi prépare actuellement un bachelor en relations internationales niveau licence dans une école spécialisée, l'Institut libre d'études des relations internationales à Paris avant d'intégrer le master 1 Affaires internationales, stratégie et négociation.
Son parcours est "assez atypique", car avant les relations internationales Daniel a obtenu une maîtrise de philosophie et trois licences, notamment de philosophie et pluridisciplinaire en vue d'une préparation d'entrée aux écoles de journalisme et instituts d'études politiques. Sa fibre journalistique passée, ce Pamandzien aspire plutôt à évoluer dans les milieux de la diplomatie et des relations internationales. "Le métier de diplomate me fascine beaucoup". Parallèlement à sa dernière année de master 2 l'année prochaine, il préparera un concours organisé tous les ans par le ministère des Affaires étrangères de "secrétaire général cadre Orient", un concours administratif pour devenir diplomate, un milieu où la concurrence est très rude.
Actuellement, Daniel est en stage à la direction des Affaires européennes du conseil général "pour percevoir la réalité locale et pour connaître les besoins de l'économie et de la société mahoraise". Son premier constat est qu'il manque de spécialistes sur tout ce qui concerne les questions européennes. Pour lui, il est impératif de se spécialiser sur l'Europe "dans l'optique de contribuer à la gestion du Fed (Fonds européen de développement) dont Mayotte bénéficie". Il rentre "assez souvent, au moins une fois par an et à chaque fois que je rentre j'essaie toujours de travailler car c'est là qu'on se rend compte vraiment de ce que c'est que le monde du travail, car lorsqu'on est juste étudiant en vacances, on ne se rend pas vraiment compte de la réalité des choses".

"A Mayotte on a peur du mzungu car on ne le connaît pas assez"

Pour sa part, Daniel jette un regard assez morose sur le développement de l'île en constatant beaucoup d'inégalités notamment au niveau salarial : "90% des Mahorais ne gagnent pas bien leur vie, donc je pense qu'un jour ou l'autre ça va péter". Pour lui, ceux qu'on appelle les "Je viens de…" sont des "privilégiés" (…). "On leur accorde une certaine importance, mais quand ils viennent ici ils ont une position assez critique des choses car dans le domaine professionnel j'ai l'impression qu'on se méfie un peu d'eux. Ils sont vus comme une menace car peuvent concurrencer les anciens qui détiennent les postes à hautes responsabilités".
Face à un communautarisme de plus en plus fort des Mahorais vivant sur le territoire national, Daniel conseille aux compatriotes d'être plus ouverts notamment aux mzungus, car "à Mayotte on a peur du mzungu car on ne le connaît pas assez". Quant à l'échec scolaire, il considère que cela est avant tout une question de volonté personnelle, d'encadrement (…). Il n'y a que la persévérance et le combat de tous les jours qui peuvent donner aux gens les moyens de réussir".

R.T Charaffoudine Mohamed
 

 


Nasra, 20 ans, étudiante en communication, Chiconi
Nasra habite à Mayotte depuis 1994. Installée avec sa famille à Chiconi depuis, elle a obtenu son baccalauréat littéraire l'an dernier et a décidé de partir en France pour continuer ses études. Si elle est partie c'est parce que la filière Information communication est inexistante sur l'île. En effet, la jeune fille en stage à Télé Mayotte souhaiterait faire un master Journalisme pour ensuite revenir travailler à Mayotte.
Après un an à l'extérieur, l'étudiante remarque plusieurs petits changements dans l'île au lagon, comme par exemple la fin des travaux du marché de Mamoudzou et se demande quand il sera ouvert. "Par contre les vendeurs ambulants ont disparu", nous dit-elle avec un sourire. Mais pour Nasra il y a des choses dans l'île qui vont trop vite à son goût et craint que cela ait des répercussions négatives sur la société mahoraise : "aujourd'hui Mayotte est devenue une véritable société de consommation et on a tendance à délaisser certaines activités, notamment agricoles ou artisanales".
De plus elle déplore l'état de l'environnement de l'île aux parfums, même si elle note une nette amélioration à ce niveau : "on ne voit plus autant de détritus partout". D'ailleurs elle pense que le sujet de l'environnement devrait être la priorité des politiciens mahorais, car c'est l'écosystème que l'on est en train de détruire.
Elle conclue en nous disant qu'elle pense que Mayotte a encore beaucoup de "route à faire" avant d'atteindre certains de ses objectifs, comme par exemple le tourisme qui pourrait être un véritable secteur dynamique, développé, et qui générerait des emplois et des revenus importants pour la Collectivité.

 


Mina, 17 ans, nouvelle bachelière, M'ramadoudou
Cette jeune mahoraise est en vacances à Mayotte. Cela est devenu un rituel depuis qu'elle est partie en pension à l'âge de 14 ans à l'île de la Réunion. Cette bachelière a ainsi passé 3 ans dans un lycée réunionnais pour préparer un bac STL qu'elle vient d'obtenir avec mention bien.
Elle revient 2 fois par an en vacances pour rendre visite à sa famille : à Noël et en juillet. Elle se dit toujours un peu choquée lorsqu'elle rentre en vacances car elle constate les différences entre la Réunion et Mayotte par rapport aux infrastructures. "Mayotte évolue, mais trop lentement, on a un gros retard par rapport à la Réunion", déclare t-elle.
D'ailleurs elle regrette beaucoup que certains parcours scolaires n'existent pas sur l'île et que les élèves se retrouvent obligés de quitter leurs familles. Cependant, elle ajoute que "les voyages forment la jeunesse et partir m'a forgé dans la tête". Aujourd'hui elle se dit prête à repartir, mais cette fois ci à Lyon pour y préparer un DUT de génie biologique et biochimique.
L'adolescente rêve d'avoir un jour son propre laboratoire d'analyses à Mayotte, mais veut avant cela "voir le monde". Passionnée de chimie, elle veut faire de la recherche dans le domaine médical et pharmaceutique et pense que "Mayotte serait un excellent terrain de recherche car nous sommes dans une zone tropicale, donc avec certaines spécificités".
Sinon Mina est fière de constater que la réussite scolaire soit devenue une priorité pour beaucoup de jeunes mahorais. "Le taux de réussite au bac ne fait que progresser depuis quelques années" et remarque que "les étudiants sont nombreux à partir pour poursuivre leurs études à l'extérieur".

UNE Mayotte Hebdo N°390 – Vendredi 08 août 2008

UNE Mayotte Hebdo N°390 - Vendredi 08 août 2008

Rapport du Sénat. Le coût de l'immigration clandestine

62 millions d'euros par a

 > Exclusif – entretien avec Ahamed Attoumani Douchina – 3 pages

Mayotte Hebdo de la semaine

Mayotte Hebdo n°1116

Le journal des jeunes