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Le nouveau préfet Jean-François Colombet a pris ses fonctions

À l’occasion de la prise de fonction de Jean-François Colombet, préfet de Mayotte, délégué du gouvernement, ce lundi matin, une cérémonie officielle s’est tenue place de France à Dzaoudzi. L’occasion pour le successeur de Dominique Sorain de saluer les forces de l’ordre et les différents officiels. Au cours d’un discours improvisé, il a notamment rappelé ses missions : la sécurité publique et la lutte contre l’immigration clandestine.

 

JIOI 2019 : 8 médailles pour Mayotte à l’aube de la septième journée

Avant la septième journée des Jeux des îles de l’océan Indien ce mercredi, la délégation de Mayotte comptabilise huit médailles : sept en judo et une en athlétisme – au javelot féminin précisément. Les Mahorais espèrent toujours accrocher la cinquième place de ces Jeux devant les Maldives et les Comores, et battre le record de médailles établi en 2015 (13 médailles dont 2 en or).

Pour cela, Mayotte peut compter sur ses équipes de sports collectifs dont le football et le basket-ball, qui se sont qualifiés en ce début de semaine pour les demi-finales de leur compétition. Elle peut également compter sur les sports individuels comme le javelot, où Soultoini Ali et Zoubert Hadhurami sont très attendus, ce mercredi. Ou encore sur le tennis de table en individuel avec Kilomo Vita.

En attendant, la plus belle de toutes a été décrochée en judo par Rudolphe Méchin, ce mardi au dojo de Côte d’Or . Dans sa catégorie des plus de 100 kilos, le licencié du JC Chiconi Sada a battu son adversaire. A elle seule, la délégation de judo de Mayotte compte sept médailles (6 bronzes, 1 or). La dernière médaille de la délégation mahoraise est à mettre à l’actif de Tanzila Jean Jacques.

 

Qualification de l’équipe masculine de basket-ball pour les demi-finales, après sa victoire hier soir à Phoenix, face aux Mauriciens (72-56).

 

Tanzila Jean Jacques a apporté une huitième médaille pour la délégation de Mayotte : la première en argent.

 

Comme en 2015, Mayotte accède aux demi-finales des Jeux des îles de l’océan Indien : une nouvelle qui faisait suite à son succès lundi soir à Mayotte La 1ère. Les footballeurs mahorais affrontent les Mauriciens pour une place en finale.

 

Le volet jeunesse a su gagner sa place dans la compétition.

 

Pas de top 10 pour la sélection mahoraise de cyclisme, battu à l’épreuve du contre la montre

 

Rudolphe Méchin décroche la médaille d’or dans la catégorie des plus de 100 kilos : la première d’une très longue série.

 

Ça ne passe pas pour Mayotte : battu par Maurice puis les Seychelles. L’aventure s’achève en phase de poule pour les volleyeurs mahorais

 

Kilomo Vita est le leader de la délégation de tennis de table. Il croit en une chance de médaille dans l’épreuve en individuel.

 

Droit de retrait des salariés de BDM après le braquage d’un Douka

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Les salariés de Bourdon distribution Mayotte (BDM) ont décidé d’exercer leur droit de retrait. Mardi matin, ils ont manifesté sur le parking de Jumbo score de Majicavo Lamir pour alerter contre les violences dans les Doukas Be à la suite d’un vol à Bandrélé. Ils réclament un agent de sécurité par magasin.

« Il ne se passe pas un seul jour où nous ne connaissons pas des actes de violences« , résume Antoine Tava, délégué du personnel de Bourdon distribution Mayotte (BDM) et secrétaire du Comité d’entreprise au sein de BDM. Mardi matin, une soixantaine de salariés de BDM ont exercé leur droit de retrait en se réunissant sur le parking de Jumbo score de Majicavo Lamir pour manifester contre les violences dans et aux abords des épiceries du groupe. « Les autres employés sont devant leur magasin pour protester. Tous soutiennent le mouvement« , explique Antoine Tava. En effet, ces épiceries seraient la cible fréquente et depuis des années de vol avec violences physiques ou morales.

 Pour preuve, le vol à main armé d’un Douka Be samedi matin à Bandrélé. Le responsable de la boutique, présent lors de la manifestation ce mardi matin, est revenu sur les faits : « Je suis arrivé à mon magasin vers 6h50, j’ai ouvert la porte puis j’ai refermé derrière moi. Ensuite, j’ai désactivé l’alarme, allumé les lumières et fais ma ronde comme tous les matins« . Le responsable se rend alors dans son bureau. « J’ai senti une odeur de cigarette fumée et je me suis dis qu’il y avait quelque chose qui n’allait pas. C’est à ce moment-là que j’ai vu un gros trou dans le mur entre les toilettes et le bureau« . Il entend alors du bruit et retourne vers la porte d’entrée et tombe nez à nez avec le voleur, armé d’un pistolet d’alarme. « Il m’a dit de m’asseoir en braquant son pistolet vers moi. Il voulait s’enfuir mais n’arrivait pas à ouvrir la porte avec toutes ces clés. Il est alors revenu vers moi, m’a demandé d’ouvrir et est parti en m’enfermant à l’intérieur« .

 Un agent de sécurité par magasin

Selon le responsable, il aurait vidé tous les coffres contenant les recettes des trois derniers jours et les rouleaux de monnaie. Les pertes s’élèveraient à une somme comprise entre 24.000 et 24.500 euros. « Il était forcément bien renseigné puisqu’il a su où se trouvaient les clés alors qu’elles étaient cachées. Il a arraché les caméras du bureau ainsi que le disque dur enregistrant les vidéosurveillances« .

Un épisode traumatisant pour le responsable et « qui est la goutte d’eau qui fait déborder le vase » selon les salariés présents sur le parking. Depuis quelques mois, le personnel de ces enseignes connaîtrait des actes de violences de plus en plus graves. Des sujets qui sont évoqués régulièrement avec le délégué du personnel lors des réunions avec la direction. « La direction ne veut pas renforcer la sécurité de ces magasins par souci d’économie. Aujourd’hui, nous connaissons la politique des économies, c’est au péril des vies des salariés« , assure le délégué. Et d’ajouter que « nous voulons un agent de sécurité pour chacun des 33 magasins installés sur l’île, de l’ouverture à la fermeture. »

 Une stratégie qui connaît ses limites

 Même si certains magasins bénéficient de la surveillance d’un agent de sécurité, ceux-ci  ne sont pas présents du matin au soir. « Souvent, ils [les agents de sécurité, ndlr] sont présents de 16h à la fermeture. D’autres magasins en sont totalement dépourvus« . Si cette présence peut dissuader certains voleurs, elle ne permet pas d’endiguer tous les actes de vol et d’agression. « Ce n’est pas aux salariés d’être exposés à des faits aussi graves« .

D’autant plus que d’autres enseignes telles que Sodifram bénéficient d’au minimum trois agents de sécurité par magasin, font valoir les salariés. « Nous savons pertinemment que de mettre des agents de sécurité ne va pas forcément stopper le nombre de vols mais cela va dissuader davantage et de manière conséquente« .

 Pourtant, il y a quelques années, une stratégie de la direction avait été mise en place pour employer du personnel originaire du village dans lequel se trouvait le magasin afin d’apaiser les violences. Une stratégie qui, aujourd’hui, semble trouver ses limites, selon certains employés. « À Tsararano, par exemple, le responsable du Douka Be se fait menacer par des gamins : « on connaît ta famille, on connaît ta femme, on connaît tes enfants ». Une situation qui va beaucoup trop loin !« . Un travail pourrait également être réalisé par la police ou la gendarmerie, selon les manifestants. « Mais c’est tout d’abord à notre direction de nous montrer l’importance de la sécurité« , affirme une gérante de Douka Be dans le Nord.

Depuis quelques semaines, des négociations annuelles obligatoires (NAO) – imposées par le Code du travail (art. L2242-8) – ont lieu au sein du groupe. Une troisième réunion devrait se tenir vendredi prochain, le 5 juillet. « Au regard des avancées des négociations, le personnel se garde le droit de publier un préavis de grève à l’issue de cette réunion« , confirme le délégué CFDT Antoine Tava.

 

 

 

 

Retour en images sur la course de pneus

 

Comme sur des roulettes. La 36ème édition de la course de pneus s’est déroulée dans des conditions idéales, samedi, à Mamoudzou. Les 910 participants ont bénéficié d’une organisation quasi-parfaite tout au long des 1.800 mètres du parcours qui menait de la MJC de M’tsapéré à l’ancienne place du marché.

La belle histoire de la journée, c’est celle de la jeune Hounaida Mahamoud (photo), élève au collège Zéna M’déré de Pamandzi, qui a remporté haut la main la course des filles, comme l’an dernier. Tout sauf une surprise pour l’intéressée, qui « adore courir » et confie s’être « entraînée tous les jours pour la course« .  Elle a aussi suscité la très grande fierté de sa mère Echadi qui l’attendait sur la ligne d’arrivée : « Quand j’ai vu qu’elle était première, j’ai eu le cœur qui battait très fort ! », raconte celle-ci.   

Une convention pour développer et harmoniser l’action sociale communale

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L’Union départementale des centres communaux d’action sociale (UDCCAS) a signé, vendredi 28 juin, un partenariat financier avec la DJSCS de Mayotte. Avec un objectif : permettre la mise en cohérence des politiques d’actions sociales communales.

 

« Les centres communaux d’action sociale sont primordiaux pour assurer le premier relais de la politique sociale« , déclare le directeur de la Direction de la Jeunesse, des Sports et de la Cohésion Sociale (DJSCS), Patrick Bonfils, en amont de la signature de la convention qui lie désormais sa structure à l’UDCCAS, présidée par Anchya Bamana, également présente ce vendredi. Des centres communaux « qu’il faut mettre en musique« , estime la maire de Sada. L’union qu’elle préside affiche ainsi cet objectif : mettre en réseau les seize centres d’action sociale de l’île, assurer la cohérence de leurs interventions, les accompagner dans celles-ci et évaluer leurs impacts. Surtout, du point de vue de l’État et de sa direction dédiée qu’est la DJSCS, cette union doit servir de passerelle entre ses politiques sociales et leurs mises en œuvre, au plus près de la population.

Voilà pour les objectifs, mais pour les mettre en œuvre, il faut des financements. Et c’est tout l’objet de la convention signée ce jour. Avec la subvention de 60.000 euros accordée par la DJSCS, l’Union départementale des centres communaux d’action sociale va pouvoir recruter un chargé de développement et chercher des locaux pour installer ses services. Si la démarche de recrutement n’est pas encore enclenchée, l’UDCCAS devrait s’installer prochainement aux côtés des bureaux du Groupement d’intérêt public (GIP) Politique de la Ville, situés à Dembéni.

Partenaires un jour, partenaires toujours. « Nous avons besoin de cet outil – l’UDCCAS – donc le partenariat a vocation à durer, on ne peut mettre en œuvre de politique sociale sans l’échelon local et nous avons besoin de CCAS bien armés pour la déployer auprès de la population« , considère ainsi Patrick Bonfils. Anchya Bamana, abondant dans le sens de son partenaire, a toutefois tenu à assurer de l’indépendance des centres communaux. Si certains mettent l’accent sur l’aide aux personnes âgées, d’autres se soucient de l’accès au droit des riverains par exemple.  Toujours est-il que pour être indépendants, les centres communaux doivent d’abord se structurer, puis apprendre les uns des autres. D’où le rôle de l’union « pour donner cette impulsion commune« , comme le fait valoir sa présidente.

Car sur le volet social, bien qu’en grand besoin, le 101ème département reste sous doté. Au niveau du conseil départemental, par exemple, « moins de la moitié du budget est dédié à l’action sociale à Mayotte quand plus des trois quarts sont mobilisés sur ce plan dans les départements de métropole« , rappelle Patrick Bonfils. « On sent qu’il y a d’énormes difficultés et que la route est longue pour mettre ce territoire à niveau  mais tous les voyants sont au vert et maintenant il faut démarrer le moteur« , ajoute le directeur de la DJSCS.  

Défilé de mode sur le front de mer

Dans le cadre de la foire artisanale régionale qui a connu un vif succès, la CMA de Mayotte organisait pour la 3ème édition un défilé de mode vendredi soir sur le front de mer de Mamoudzou.

Plusieurs couturiers de Mayotte et sa région ont présenté leurs créations au cours de défilés entrecoupés de morceaux de musique proposés par le groupe Patrick & Co.

Présentée par Denise Harouna, la cérémonie a permis de découvrir des créations traditionnelles mahoraises de boubous du créateur installé à Poroani, très demandé en cette période de mariages ou de bien belles robes valorisant des tissus locaux ou malgaches (photo) utilisant notamment de la soie. Une belle soirée alors que se prépare l’ouverture de l’École régionale de la mode et du design à Mayotte…

Détournement de 56.000 euros : Faouzia Kordjee reconnaît les faits

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Placée en garde à vue mardi pour avoir détourné 56.000 euros lorsqu’elle présidait l’association Les Doigts d’Or, Faouzia Kordjee a reconnu l’intégralité des faits, se justifiant par un « certain laxisme », a-t-on appris de source policière.

 

La célèbre femme leader et présidente de l’Acfav Faouzia Kordjee (orthographié Cordji selon son état civil) est actuellement inquiétée par la justice pour abus de confiance, recel d’abus de confiance et travail dissimulé, selon nos informations. Les faits se sont déroulés entre juillet 2013 et août 2017 alors qu’elle était présidente de l’association d’artisanat Les doigts d’or, dont les activités ont cessé depuis pour raisons économiques.

Le montant total de ce détournement a été estimé dans un premier temps à 56.000 euros. Le bénéficiaire de ces malversations est un membre de sa famille qu’elle a embauché pour un travail de « coaching » en le rémunérant via les fonds de l’association mais sans contrat de travail, nous a appris une source proche du dossier. Cette même source indique le fisc ne conserve aucune trace de cette collaboration rémunérée. Faouzia Cordji a donc été placée en garde à vue pour des faits de « travail dissimulé par dissimulation de salaire et dissimulation d’activité« .

Une enquête a été ouverte après que le secrétaire général de l’association Les Doigts d’or a porté plainte pour travail dissimulé mais les investigations menées ont fait ressortir d’autres infractions commises par l’ancienne candidate malheureuse aux dernières sénatoriales. En effet, c’est en entendant les salariés de la structure, en tant que témoins, que les enquêteurs se sont également penchés sur l’enveloppe de 14.000 euros d’indemnisation qui aurait été promise aux employés n’ayant pas touché leur salaire pendant dix longs mois avant la fermeture de cette association de promotion de l’artisanat mahorais.

Lors de sa garde à vue, Faouzia Cordji a reconnu l’ensemble des faits qui lui sont reprochés, invoquant un certain laxisme pour justifier ses agissements.

Mahopolitains : Ce qu’ils pensent de leur île

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Si l’immigration est souvent mise en avant dans la diminution de la part des Mahorais dans la population de l’île, un autre phénomène joue un rôle majeur dans le processus : le départ des Mahorais de leur île de naissance. Pour des raisons de formations et d’emplois, parfois partis tout jeune avec leurs parents, certains choisissent de ne pas revenir, d’autres si. En cause : l’attractivité du territoire. Témoignages.

« Personne ne semble en parler, [mais se pose la question] de la fixation ou du retour des Mahorais partis de chez eux. Le solde migratoire est négatif (…). C’est quand même une tragédie » : dans notre numéro 878 de mars dernier, le sénateur Thani Mohamed Soilihi soulignait la problématique des départs de la jeune génération de Mahorais vers d’autres territoires, la métropole et La Réunion en tête de liste. Un constat confirmé par l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee). Dans son analyse parue en février 2019 et basée sur le recensement de la population réalisé à Mayotte du 5 septembre au 2 octobre 2017 et intitulé À Mayotte, près d’un habitant sur deux est de nationalité étrangère, l’organisme note : « Le solde migratoire des natifs de Mayotte est très déficitaire et ce déficit s’est accru (-25 900 personnes entre 2012 et 2017, contre -14 900 entre 2007 et 2012). En effet, de nombreux jeunes de 15 à 24 ans quittent le territoire pour poursuivre des études ou chercher du travail en métropole. »

Ce constat – « pour poursuivre des études ou chercher du travail en métropole » – est également confirmé par Céline Leroux, docteure en sciences de l’éducation et auteure d’une étude sur le sujet : La mobilité des jeunes Mahorais en métropole : l’action des missions locales, parue en 2017. Elle y explique : « Dans le cas de Mayotte, la mobilité des jeunes est (…) fortement corrélée à l’emploi, problématique à laquelle doivent faire face les professionnels de jeunesse sans pour autant disposer des mêmes moyens qu’en métropole. »

Un manque de moyens dans la mise en place de politiques publiques destinées à fixer nos jeunes sur le territoire qui n’est par ailleurs pas nouveau. Ainsi, la chercheuse cite dans son étude un ancien coordinateur emploi et formation du Conseil général, auditionné en 2014 et qui estimait « qu’à Mayotte, chaque année, peuvent être créés entre 500 et 1 500 nouveaux emplois alors que le nombre de jeunes sortant du système scolaire et arrivant sur le marché du travail serait de l’ordre de 4 000. Il [soulignait] la nécessité d’ouvrir Mayotte vers l’extérieur et de faciliter la mobilité des jeunes Mahorais. » Un manque de perspectives, donc, qui encourage au départ, et qui, par la suite peut rendre délicat le retour de ces jeunes sur qui Mayotte compte pour son développement. Mises en avant : une attractivité trop faible, notamment en termes d’emplois et de loisirs quotidiens, mais aussi un doute sur la volonté politique locale ou étatique à développer le territoire.

 

Roubouanti Madi – 23 ans – BTS commerce international

« Tant que les élus et les entreprises ne laisseront pas leur chance aux jeunes diplômés, rien n’avancera. »

Un parcours

Ça fait déjà 14 ans que je vis en métropole avec ma mère. Elle a fait le choix de quitter Mayotte pour fuir la précarité éducative sur l’île, et donc pour nous offrir à mes sœurs et à moi de meilleures conditions de vie, et de meilleures conditions d’études. Depuis, je rentre quand même régulièrement à Mayotte pour voir ma famille. L’île me permet de me ressourcer et de me détendre du stress et de la pollution qu’il peut y avoir en métropole. Mayotte est synonyme de joie de vivre, de plages, de barbecues et bien plus encore !

Un regard sur l’île

La dernière fois que je suis venue à Mayotte, c’était en 2008. Comparé à la situation actuelle, il n’y avait pas encore cette violence : on pouvait dormir les fenêtres ouvertes et rencontrer plusieurs jeunes mahorais dans les villages, etc. Les mariages étaient autre chose et les gens étaient plus solidaires. Au départ, je me suis dit que j’allais rester de façon définitive, car j’avais besoin de retrouver les miens, mais plus les mois passaient moins j’avais le sentiment d’avoir ma place. Il faut dire que quand tu ne bois pas ou que tu ne fais pas la prière, tu t’ennuies vite à Mayotte. Les semaines se suivaient et se ressemblaient. Les voulés, les sorties à la plage le week-end, aller à la campagne, etc. : c’est bien un moment, mais on s’en lasse forcément. J’ai connu autre chose que la vie mahoraise et bien évidemment je suis arrivée à un stade où je voulais repartir. À Mayotte, où que tu ailles, tu retrouves les mêmes têtes, les mêmes délires. Et puis, Mayotte ne semble pas évoluer. J’ai l’impression que derrière tout ça, il y a une volonté politique de ne pas faire de Mayotte un département à part entière. À Mayotte, tout est en retard comparé aux autres départements d’outre-mer. La violence est devenue le quotidien des Mahorais. L’immigration clandestine n’a jamais été aussi forte également. Oui, il faut parler de cette immigration qui sature écoles, hôpitaux, et tous les services publics confondus. Les Mahorais sont obligés d’aller se soigner à l’extérieur. Le niveau d’études est catastrophique, et pendant ce temps, nos élus se font la guerre pour être le roi du pétrole. Eh oui, il n’y en a pas un pour rattraper l’autre : le bien-être général n’est pas encore à l’ordre du jour dans leur agenda. Tant que l’on ne cessera pas le principe du « vote pour moi, je te donnerai un poste de directeur même si tu n’en as pas les compétences », l’île n’avancera pas. Tant que les élus et les entreprises ne laisseront pas leur chance aux jeunes diplômés, rien n’avancera. Tant que chacun ne fera pas convenablement le travail pour lequel il est payé, rien n’avancera. Tant que nous ne retrouverons pas la solidarité mahoraise, idem. Nous devons aussi arrêter de copier tout ce qui se fait ailleurs et essayer plutôt de valoriser notre culture et nos traditions. Mayotte reste malgré tout une belle île qui ne demande qu’aux Mahorais de s’occuper d’elle. C’est notre maman à tous.

Un retour, un jour ?

Je ne suis pas encore prête à revenir habiter à Mayotte. J’ai d’autres projets : voyager à travers le monde, découvrir autre chose que ce que j’ai l’habitude de voir et vivre dans un autre pays. Alors, qu’est-ce qui me pousserait à rentrer ? Après plus d’une décennie loin de ma famille, je me rends compte que j’ai raté plusieurs évènements importants ou graves. J’ai raté les mariages de mes frères, cousins et cousines, amis intimes, etc. Je n’ai pu dire « au revoir » à aucun de mes grands-parents décédés suite à de longues maladies. Aujourd’hui, cela me fait réfléchir et me rend triste. Lorsque tu es ici, tu perds la notion du temps. Tu penses que les personnes que tu as laissées vont t’attendre ou ne vont pas vieillir. Retrouver ma famille et avoir un bon travail où je pourrais subvenir aux besoins des miens pourraient être une bonne raison de rentrer. Car oui, il faut avoir un bon travail pour ne pas être tenté de repartir. Je suis consciente que ça ne va pas être facile et que je devrais faire un travail sur moi-même, mais aujourd’hui, j’ai la maturité nécessaire pour surmonter les obstacles. Certains ont réussi à déposer leurs valises de façon définitive, alors pourquoi pas moi ?

 

Faiza Laou Madi – 22 ans – licence biologie

« C’est à nous de proposer des innovations »

Un parcours

J’ai été en métropole pendant quatre ans pour poursuivre mes études. Au départ, je n’étais revenue de métropole que pour les vacances et je n’avais jamais songé rentrer maintenant à Mayotte, et surtout pas définitivement. Mais finalement j’ai fait le choix de rester. J’ai eu besoin de rester, de reprendre ma vie en main ici et de repartir sur de bonnes bases tout en reprenant mes études sur le territoire.

Un regard sur l’île

À mon retour ici, je n’ai pas vraiment remarqué de changement au niveau des infrastructures. Ce n’est pas comme certains le voudraient, mais en termes de développement, je pense qu’on évolue à notre rythme. D’ailleurs je trouve ça dommage, que beaucoup de jeunes qui partent étudier en métropole à la fin de leurs études ne rentrent pas à Mayotte pour aider notre île à évoluer. Il n’y a certes pas tant d’emplois dans les secteurs qu’on recherche, mais on peut tirer profit de chaque expérience et pourquoi ne pas créer sa propre entreprise ensuite ? Le but est de faire avancer l’économie locale et c’est à nous les jeunes de proposer des innovations qui permettraient de faire avancer les choses à Mayotte !

 

Arsène Ali – 22 ans – BTS économie et social

« Dans 10 ans, je reviendrai peut-être »

Un parcours

J’ai vécu la grande majorité de mon enfance à Bordeaux. Huit ans après, je suis rentré à Mayotte avec mes parents jusqu’à l’obtention de mon baccalauréat. Puis, j’ai dû quitter le foyer familial pour poursuivre mes études en métropole. Je n’avais qu’une hâte : quitter Mayotte et retourner dans la ville où j’avais grandi.

Un regard sur l’île

Aujourd’hui, je trouve qu’à Mayotte il n’y a pas assez d’activités, il n’y a pas grand-chose à faire, pas comme en métropole. Pour moi, Mayotte est une île sur laquelle je viendrai pour passer des vacances, mais pas pour y vivre. Les week-ends riment avec plages, fêtes, sorties bateaux ou randonnées. Je pense que Mayotte n’évolue pas parce que les gens qui travaillent au Conseil départemental ne pensent qu’à remplir leurs poches. Ils ne pensent pas à améliorer l’île, ils ne pensent pas à construire les infrastructures nécessaires pour elle. En plus, ils ne font pas grand-chose pour remédier aux problèmes de l’immigration clandestine. Les violences augmentent d’année en année. Vivre à Mayotte n’est plus comme avant : on vit constamment avec la peur, la crainte d’être agressé dans la rue et même dans sa propre maison. Mayotte présente vraiment un retard que ce soit au niveau des infrastructures, des mentalités, mais aussi au niveau de la vie qui est très chère.

Un retour, un jour ?

Peut-être que dans 10 ans je reviendrai à Mayotte. Une fois que je serai stable avec une situation et un travail.

Ramadan : des colis alimentaires pour les personnes âgées

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Afin de renforcer les liens de cohésion sociale entre la commune et les personnes âgées, le CCAS a mis en place le projet « Ramadan pour tous » il y a trois ans. Le principe ? Distribuer des colis alimentaires pendant le mois du ramadan à 143 personnes âgées en situation de précarité. Cette année, le CCAS a décidé de faire de la prévention alimentaire son cheval de bataille face à la situation nutritionnelle préoccupante dans le département.

 

Une personne sur dix, entre 30 et 69 ans, est diabétique à Mayotte. Constatée depuis de nombreuses années, la situation nutritionnelle sur le territoire mahorais est préoccupante. Selon l’Agence régionale de santé (ARS), « des études menées en 2006 et 2008 » ont mis en exergue une prévalence élevée de l’obésité chez les femmes et des maladies qui lui sont liées telles que l’hypertension artérielle et le diabète). Dans le 101ème département, parmi les diabétiques, 79% d’hommes et 94% de femmes étaient en surpoids ou obèses en 2008*. À Mayotte, la population privilégie généralement les aliments riches énergétiquement par rapport aux fruits et légumes. C’est un fait qui est également dû à l’éducation nutritionnelle du territoire.

Face à ce constat, depuis trois ans, le centre communal d’action sociale (CCAS) de Mamoudzou organise une semaine de distribution de colis – d’une valeur de 15.000 euros pour l’ensemble de l’opération – pendant le mois du ramadan. Plus de 140 personnes âgées de plus de 60 ans de la commune de Mamoudzou (une moyenne de 20 par village) ont pu et pourront en bénéficier, du mardi 21 au vendredi 24 mai. « Les personnes ont été +sélectionnées+ par des agents de terrain du CCAS qui repèrent les personnes les plus précaires pour leur venir en aide. Ce ne sont jamais les mêmes personnes« , assure la directrice du CCAS. Plusieurs critères de sélection sont étudiés : les personnes doivent être âgées de plus de 60 ans ou bénéficier de l’allocation spéciale pour personne âgée (ASPA) ou toucher une retraite de moins de 400 euros ou encore être bénéficiaire du RSA. Elles ont néanmoins l’obligation d’être de nationalité française ou de bénéficier d’une carte de séjour de dix ans minimum et d’être résident dans la commune.

 

Gérer son alimentation durant le ramadan

Pour l’édition 2019, le CCAS a souhaité mettre en avant la prévention alimentaire. « Cette semaine consiste en un moment de convivialité et de partage. Notre ambition est de mobiliser les énergies de tous afin d’améliorer la santé de la population« , résume la directrice du CCAS de Mamoudzou, Anziza Daoud.

La structure a donc décidé d’équilibrer le panier, qui n’était composé jusqu’à présent que de poulets congelés et de viande, et s’est attachée les services d’une diététicienne de Rédiab Ylang, Ségolène Guisset. Le panier se compose désormais de féculents (riz, bananes, etc.), de protéines, de fruits et légumes (oranges, poires, concombres, etc.) et de produits laitiers. « Nous avons pu avoir du poisson frais cette année« , se félicite la directrice.  

Mais cet équilibre alimentaire doit passer par des conseils nutritionnels, selon la spécialiste nutrition. En effet, lors du ramadan, les musulmans n’ont pas le droit de s’alimenter de la journée ce qui entraîne souvent une ruée sur une myriade de plats dès la nuit tombée. Le jeûne induit donc nécessairement un changement de régime alimentaire, pas toujours très équilibré, notamment sur le territoire. « Mais nous essayons de sensibiliser la population sur le fait que nous pouvons tout à fait faire des plats sains et équilibrés où nous ajoutons une belle portion de légumes, des protéines maigres comme le poulet ou le poisson au lieu des morceaux de viande très gras. C’est pour cela que nous avons, dans la composition des colis, vraiment mis un point d’honneur sur la présence de fruits et de légumes« , affirme Ségolène Guisset.

Toujours selon la spécialiste, il est important de consommer son quota de calories : « Nous conseillons de fractionner les repas« . L’organisme pourra alors faire des stocks pour tenir une journée de jeûne. Cette fraction permettra de diminuer les prises de poids et la surcharge en graisse et en sucre. « Elle diminue également reflux gastro-œsophagien**« .

 

Sensibiliser dès le plus jeune âge

En outre, la déshydratation est un gros risque pendant le jeûne, « surtout avec cette chaleur« . Boire beaucoup et consommer des aliments riches en eau est donc conseillé. « Les fruits sont un parfait exemple. Au lieu de se forcer à boire une bouteille, l’alimentation est aussi une source d’hydratation« .

Malgré la volonté de vouloir aller jusqu’au bout de ses convictions religieuses, la diététicienne rappelle qu’il est important que les individus écoutent leur corps. « Pour toutes les personnes diabétiques ou atteintes de maladie chronique ou de maladie quelconque, nous conseillons vivement d’aller voir le médecin. C’est à lui de juger de la capacité ou non d’une personne malade à continuer le ramadan« . 

La diététicienne poursuit : « Aujourd’hui, la nécessité est de prévenir la maladie au lieu de la guérir par de la sensibilisation. Les maladies chroniques comme le diabète ou l’obésité prennent des années pour s’installer et il faudra certainement attendre des générations pour constater des changements dans les modes d’alimentation. C’est important d’éduquer les enfants dès le plus jeune âge. Nous essayons, par cette distribution par exemple, de créer le lien entre l’alimentation et la santé« .

Bateaux de pêche : une impossible mise aux normes ?

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Mercredi matin, le directeur de la Copemay et trois pêcheurs comparaissaient devant le tribunal correctionnel pour une affaire de vente et d’achat de produits provenant de la pêche illégale. Mais l’Europe s’est invitée dans le prétoire, pour un débat confus autour de la réglementation européenne, du droit à l’erreur et du manque de subventions accordées aux pêcheurs permettant de remettre leurs bateaux en conformité.

 

L’histoire se déroule un 14 avril 2016, au ponton de débarquement de Mamoudzou. Les Affaires maritimes contrôlent les propriétaires de deux bateaux à qui elles reprochent d’avoir pêché puis vendu illégalement des poissons. Sur place, un acheteur qui n’est autre que Pierre Baubet, le directeur de la Coopérative des pêcheurs de Mayotte (Copemay).

Convoqué devant la cour du tribunal correctionnel ce mercredi matin en présence de trois autres professionnels de la mer impliqués dans l’affaire, Pierre Baubet ne nie pas l’ensemble des faits.

S’il reconnaît bien avoir acheté le produit de la pêche de ces deux navires, il réfute en revanche avoir eu connaissance de la situation administrative hors cadre des pêcheurs et donc, de l’illégalité de son achat.

En effet, les vendeurs sont des pêcheurs professionnels dont les navires sont immatriculés. Cependant, celui appartenant à Ousséni A. avait été frappé en 2013 d’une interdiction formelle de naviguer et de pêcher. Et pour cause : Ousséni A. avait transformé le bateau depuis la première immatriculation et celui-ci nécessitait donc une remise aux normes (plans, structure, motorisation, etc.) avant de jouir de nouveau d’un droit de navigation. L’autre navire, celui de Houmadi S.C., se trouvait dans la même situation, à la différence près (et de taille) que le propriétaire n’avait jamais été informé que la transformation qu’il avait apportée à son bateau nécessitait une remise aux normes.

Ainsi ce mercredi matin, une des responsables des Affaires maritimes est venue apporter son expertise dans une affaire très technique et qui fut bien souvent confuse pour l’ensemble des magistrats, tâchant de démêler la bonne de la mauvaise foi chez ces quatre prévenus confrontés à une tâche des plus difficiles : celle consistant à conformer, quasiment sans moyens financiers supplémentaires, les navires de pêche de Mayotte à la réglementation française mais aussi européenne.

En effet, en 2002, l’Union européenne a suspendu les subventions publiques à la construction des navires de pêche afin d’endiguer la surpêche, décision finalement revue en 2017. Mais pendant ces 15 ans, les pêcheurs des régions ultrapériphériques, françaises comme portugaises et espagnoles, n’ont pu bénéficier de fonds publics dans ce cadre. Un défaut d’accompagnement qui a lourdement pénalisé les professionnels de la mer de Mayotte alors même qu’un nouveau cadre réglementaire européen, rigide, s’abattait sur eux.

Lors de la l’audience, la fonctionnaire des Affaires maritimes a cependant argué que, désormais, 60% des pêcheurs du département étaient financièrement soutenus par des fonds publics pour acquérir de nouveaux bateaux, grâce à une intense campagne de lobbying de l’État français auprès de l’Europe pour obtenir des voies dérogatoires pour l’outre-mer. Elle a également rappelé que l’immatriculation provisoire dont bénéficiaient les deux bateaux à l’époque du contrôle, qui vise à ne pas pénaliser un secteur en souffrance, est toutefois conditionnée à la remise aux normes des navires. Devant la cour, les trois professionnels de la mer, qui ne s’exprimaient qu’en shimaoré, ont expliqué qu’ils avaient tenté de suivre les règles en vigueur, qu’ils s’étaient renseignés auprès des autorités compétentes mais que le coût de remise aux normes était trop important et qu’ils étaient un peu perdus dans ce sac de nœuds administratif.

 

Des subventions publiques « que depuis 2019 »

L’autre question qui a occupé la cour ce mercredi matin consistait à déterminer si Pierre Baubet, directeur de la Copemay et élu de la Capam, avait acheté le produit d’une pêche illégale en toute connaissance de cause. Pour la cadre des Affaires maritimes, le directeur de la coopérative ne pouvait « absolument pas » connaître la situation administrative précise des deux pêcheurs puisque l’immatriculation des deux bateaux n’aurait de toute façon pas changé, qu’ils soient conformes ou non aux règles en vigueur. Il aurait toutefois pu se renseigner auprès des Affaires maritimes, a souligné la procureure, peu convaincue.

À la barre, Pierre Baubet a défendu le cas des pêcheurs : « Ce cas-là n’est pas isolé (…) 98% de la flottille » de ce type de bateau à Mayotte « date d’avant 1993« . Or, « c’est seulement depuis 2019 qu’on peut financer la remise aux normes« , a encore plaidé le directeur de la Copemay. « [Les pêcheurs] n’ont pas de crédits, pas de subventions » et ont donc transformé leur bateau de manière « rudimentaire« . « Il y en deux qui se sont fait contrôler mais ils font tous ça« , a déclaré Pierre Baubet devant la cour. « Ils sont obligés de travailler » pour nourrir leur famille mais ont néanmoins lancé des procédures collectives pour se remettre aux normes, a insisté le directeur. Ce dernier a soutenu qu’il n’avait en tout cas pas connaissance de la situation administrative précise des deux bateaux au moment des faits et qu’il n’avait pas le temps de systématiquement contrôler tous les navires avec lesquels il travaille.

Dans ses réquisitions, la procureure a tenu compte de la complexité de l’affaire, démontrée par le « flou au cours du débat« . Pour Houmadi S.C., considérant qu’il n’avait pas eu d’injonction de ne pas naviguer ni de pêcher, elle a requis la relaxe. Pour Ousséni A., qui avait bien été informé de l’interdiction qui lui avait été faite de prendre la mer, elle a requis 1.000 euros d’amende intégralement assortis d’un sursis. Enfin, la procureure a estimé que Pierre Baubet avait agi en connaissance de cause et qu’il avait donc une responsabilité établie car « tout le monde sait à peu près dans quelle situation administrative se trouve chacun« . Elle a ainsi requis à son encontre 1.500 euros d’amende avec sursis. Le délibéré sera rendu le 4 juin prochain.

Port de Longoni, une ville dans la ville

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En novembre 2013, la gestion et l’exploitation du port de Longoni ont été confiées pour 15 ans à Mayotte Channel Gateway dans le cadre d’une délégation de service public organisée par le Département. Dans le but de devenir une référence dans le canal du Mozambique, plus de 50 millions d’euros ont déjà été investis dans les équipements et l’aménagement du site. Et selon les prévisions, le trafic de conteneurs devrait littéralement exploser d’ici 2050.

 

                                        

Dès l’aube, les premiers camions-grues commencent à se présenter devant l’entrée du port. La poussière provoquée par ces va-et-vient permanents – chaque jour, 80 conteneurs sortent et rentrent du port de Longoni, dont 90 % d’entre eux se rendent à Kawéni – attaque le visage des ouvriers, déjà frappé par le soleil brûlant. Casques vissés sur la tête et gilets jaunes enfilés sur le dos, la centaine d’employés présents sur le site déambulent telle une fourmilière dans cette ville géante où les « boîtes » s’entassent les unes sur les autres.

Les yeux rivés sur la série d’écrans devant lui et la main fixée sur la souris, Nahun, responsable des opérations chez Mayotte Channel Gateway (MCG), envoie des directives depuis le logiciel Navis, un système de gestion portuaire, à ses collaborateurs. « On reçoit un fichier de l’armateur dans lequel il y a un plan du navire. Dans le cadre d’un transbordement, chaque couleur correspond à un pays. Une fois déchargée, on a une traçabilité du conteneur en direct », explique-t-il. À ses côtés pour l’épauler, une personne en « back-office » et deux autres en charge des livraisons : « L’enjeu de la place est primordial, il y a un gros travail de préparation en amont. On essaie d’optimiser et de ranger au mieux. » De fait, il est demandé à la grande distribution d’envoyer sa liste de conteneurs à récupérer la veille au soir pour le lendemain, sachant que des groupes comme Sodifram, Somaco ou Bourbon Distribution peuvent venir en chercher « entre 20 et 30 par jour. »

 

Doubler l’activité de transbordement et le trafic global

Il faut dire que depuis que le Département a confié dans le cadre d’une délégation de service public la gestion et l’exploitation du port en novembre 2013 pour une durée de 15 ans à la société présidée par la Sud-africaine Ida Nel, les objectifs sont colossaux : doubler l’activité de transbordement en cinq ans et le trafic global en 10 ans. La première des deux missions a été remplie facilement avec +92 % en 2016 (27 000) et +60 % l’année suivante. « C’est très significatif de la crédibilité du port », confie Vincent Lietar, directeur développement et infrastructures à MCG, qui joue sur les drapeaux français et européens, « un gage de stabilité aux yeux des entreprises », pour vendre l’image de marque de Mayotte dans le canal du Mozambique.

« Actuellement, on ne représente que 0,6 % du trafic maritime régional », ajoute-t-il. En effet, avec un tonnage global estimé à 1,15 million en 2017 (contre 369 000 en 2008), Longoni ne joue pas dans la même catégorie que ses concurrents des pays voisins : 26 millions de tonnes pour Mombassa au Kenya, 20 millions pour Dar es Salam en Tanzanie, 24 millions pour Beira, Nacala et Maputo au Mozambique ou encore 81 millions pour Durban en Afrique du Sud.

Néanmoins, ce statut franco-européen pourrait lui permettre de jouer un rôle majeur dans les années à venir. Comment ? Grâce aux réserves sous-marines de gaz et de pétrole découvertes à proximité de la fracture géologique DAVIE qui vont être exploitées de manière imminente au nord du Mozambique. La période du chantier immense entamée à Afungi, pour un total de 50 milliards de dollars, est une source de retombées possibles pour l’économie du port et pour Mayotte. « Dans le futur, le quai 1, une fois rénové, pourrait devenir une possible base arrière pour une compagnie de type supply travaillant sur les équipements et la logistique des équipages. »

Une opportunité déjà évoquée publiquement par le président du Conseil départemental, Soihabadine Ibrahim Ramadani, à l’occasion de la cérémonie de voeux au mois de janvier dernier.

Trois grues et quatre ponts roulants pour 24 millions d’euros

Depuis sa prise de fonction il y a bientôt 6 ans, la MCG met la main à la poche pour devenir un pôle de référence. « En 2015, on a investi 24,2 millions d’euros pour financer trois grues de 400 tonnes avec un rayon d’action de 60 mètres, qui ont permis de multiplier par deux la performance horaire de débarquement des navires, quatre ponts roulants de stockage de 140 tonnes et trois maxis élévateurs », livre Jacques-Martial Henry, le bras droit d’Ida Nel. Et d’ici 2028, deux nouvelles grues et quatre autres ponts roulants devraient faire leur apparition. Mais ce n’est pas tout. À cela, s’ajoute l’agrandissement sur 4,5 hectares de la zone de stockage dont la capacité maximum atteint 7 550 conteneurs (triplement par rapport à 2013), en attendant la livraison, à l’horizon 2020, de l’extension des plateformes logistiques sur 8,5 hectares pour un montant global de 25,5 millions d’euros, dans le cadre d’un dossier FEDER validé en janvier 2017.

Parmi les chantiers programmés jusqu’en 2022, il y a également la construction d’un nouvel accès dernière génération, comprenant un portique de cinq voies, et la mise en place de l’ISPS, le code international de sécurité-sûreté. « Il y a encore sept ans, on pouvait rentrer en faisant un petit signe », se remémore Vincent Lietar, un brin nostalgique, mais conscient que toutes ces démarches peuvent faire passer le port dans la cour des grands. Avec cette nouvelle entrée, la MGC prévoit la création d’une zone de transit de quatre hectares comprenant un parking pour les véhicules légers et les poids lourds, un parc attente d’une superficie de 2 230m2, mais aussi un parc des transitaires (quatre parcelles grands importateurs, 15 parcelles équipées de hangars et six à huit parcelles locatives). Au total, les investissements prévus, initialement établis à 104,8 millions d’euros, devraient atteindre 159 millions d’euros à la fin des 15 années de la délégation de service public.

Un futur quai flottant à 40 millions d’euros ?

Pour améliorer la desserte portuaire, deux idées sont actuellement sur le feu : le prolongement du quai 2, mis en service en 2010, vers l’intérieur ou l’extérieur de la darse ou bien l’installation d’un quai flottant de 270 mètres de long sur 35 mètres de large. Selon le directeur développement et infrastructures, la seconde option aurait les faveurs de l’entreprise privée en raison de son prix abordable – environ 40 millions d’euros – et de son délai de livraison relativement faible. « Il faut compter moins de deux ans pour qu’il soit fabriqué, livré et posé » alors que la première option demande une douzaine d’années d’études et de travaux : « Actuellement, on est à 80 % de vérification ! » Il y a donc fort à parier que cette opportunité devienne réalité au plus tard en 2030, dans le but de répondre au marché de transbordement. « Les compagnies maritimes veulent décharger le TGV et recharger le train de campagne immédiatement », s’ose-t-il à comparer.

Selon les statistiques de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), l’année 2050 laisse entrevoir une population officielle estimée à 500 000 habitants à Mayotte. Ce chiffre impressionnant risque forcément d’avoir des répercussions sur l’activité. Le prévisionnel imaginé par Vincent Lietar porte à 250 000 le trafic de conteneurs par an au port (contre 75 000 en 2017) et à 560 transports routiers quotidiens. D’ailleurs une étude est actuellement menée par le Département pour réfléchir à des liaisons maritimes par le lagon tout autour de l’île dans le but de désengorger les routes mahoraises. Un défi de taille donc : « Il faut que l’on soit ambitieux. Ida Nel nous répète sans cesse que l’on vit dans un monde qui change et que ce n’est pas le moment de dormir ! ».

 

L’évolution de la zone portuaire de Longoni entre 2013 et 2018

Lorsque Mayotte Channel Gateway se voit attribuer la délégation de service public, elle dresse un état des lieux du port. Mis en service en 1992 et logiquement dégradé avec le temps, le quai 1 attend impatiemment sa rénovation, mais aussi son extension. En mauvais état, les berges de la darse ont été restaurées à 50 % via des enrochements, où il est prévu de réaliser de nouveaux quais (pêche, services, cabotage). La capacité de stockage est passée de 2 500 conteneurs en 2013 à 7 550 en 2018, notamment grâce à la rénovation en 2015 de la plateforme de 3,5 hectares et la construction d’une nouvelle de 4,5 hectares. Durant ces cinq premières années, la société privée a investi 31 millions d’euros dans le matériel et 11 millions d’euros dans les aménagements. « On a triplé la capacité du port et doublé l’activité », expliquent Vincent Lietar et Jacques-Martial Henry. Pour remplir ses différents objectifs quantitatifs, l’idée de travailler 24 heures sur 24 germe dans les têtes de la direction.

 

Un pôle d’activités pour 2028 ?

La convention de délégation de service public inclut le développement d’un pôle d’activités, en étendant la petite zone dite Vallée 2 de cinq hectares, qui rassemble aujourd’hui 16 sociétés. L’aménagement permettrait l’implantation de 160 à 200 entreprises, la mobilisation d’investissements privés et la création de 3 500 emplois. Un projet ambitieux présenté aux élus dans le cadre du schéma d’aménagement régional. « L’opération consisterait en l’utilisation du volume de la colline qui sépare les 61 hectares de la zone portuaire en deux pour réaliser un remblai sur le platier bordant la côte ouest », dévoile Vincent Lietar. Pour rassurer les associations environnementales, plusieurs études ont déjà été réalisées, comme un constat environnemental des fonds marins, des relevés bathymétriques, un constat de l’état des mangroves proches et des relevés géotechniques mer et terre. « C’est un projet unique, contrôlé et maîtrisé », assure-t-il.

Dans l’idée, il y aurait une extension en remblai de 30 hectares sur le platier est et de 9 hectares gagnés par des terrassements, réunissant respectivement des activités industrielles et commerciales, un quartier-technopole, un chantier naval, une marina, mais aussi des activités logistiques liées au port. « On a déjà une demande d’activités sur 20 hectares », précise le directeur développement et infrastructures. Autre bonne nouvelle, deux emprises sont déjà réservées à des implantations de production électrique sur le terminal pétro-gazier, dont la surface représente 2,5 hectares. « Sigma-Engie prévoit une enveloppe de 140 millions d’euros pour créer une centrale électrique à gaz tandis qu’Albioma souhaite investir 80 millions d’euros dans une centrale électrique biomasse avec des déchets de bois. » Toutefois, ces deux projets sont conditionnés à un accord de la Commission de régulation de l’énergie.

La Croix Rouge en quête de dons

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Les journées nationales de la Croix-Rouge ont débuté ce week-end à Mayotte, après avoir été annulées en 2018 à cause des mouvements sociaux. Une vaste levée de fonds menée chaque année dans toutes les délégations territoriales de France sera reconduite les 25 et 26 mai dans le 101ème département, où les besoins sont toujours plus nombreux. Président de l’antenne mahoraise de la Croix-Rouge, Yassine Boinali fait le point.

 

Flash Infos : Comment la population peut-elle vous soutenir pendant ces journées nationales ?

Yassine Boinali : La première solution, c’est de se rapprocher de nos différents quêteurs. Nous avons mobilisé une centaine de salariés et de bénévoles, déployés essentiellement sur la zone de Mamoudzou : dans les stations-services, les magasins Sodifram et Sodicash, au centre commercial Baobab, à la barge, à l’aéroport… Tous nos quêteurs sont reconnaissables à leurs tenues de la Croix-Rouge. Mais il faut faire attention car il y a toujours des gens mal intentionnés qui peuvent se faire passer pour un de nos bénévoles. Nos quêteurs ont tous une carte nominative tamponnée par la préfecture, alors il ne faut pas hésiter à demander à la voir. On peut aussi donner en ligne via le site de la Croix-Rouge, ou nous appeler, passer dans nos bureaux… Dans le cadre des Journées nationales, on appelle aux dons monétaires, mais rien n’empêche de donner des vêtements par exemple, comme durant le reste de l’année.

FI : Quelles actions financera l’argent récolté ?

YB : Depuis 2017, l’année où nous avons récolté le plus de dons, avec un total de 3.000 euros, nous avons décidé de tourner cette quête vers la formation du grand public, particulièrement en matière d’initiation aux premiers secours, comme nous le faisons avec l’opération « caravane du secourisme » qui fait le tour de l’île pour pouvoir initier la population aux gestes qui sauvent et aller dans les établissements scolaires pour sensibiliser les jeunes. On a encore du mal à trouver des financements pour pouvoir former gratuitement le public, alors que ce besoin est toujours présent, d’autant plus que la population de Mayotte ne cesse d’augmenter. Un autre problème, c’est qu’une partie des habitants vit dans des quartiers défavorisés et très difficile d’accès pour un véhicule de secours quand une intervention est nécessaire. Donc l’idée, c’est de pouvoir former ces personnes-là aux gestes de premiers secours pour augmenter les chances de survie des victimes, ce qui évidemment ne peut être que bénéfique pour toutes ces familles et ces enfants.

FI : La Croix-Rouge connaît-elle d’autres freins spécifiques au territoire ?

YB : Oui, tout à fait. Malgré le fait que nous soyons une association d’aide humanitaire reconnue d’utilité publique, on est un peu pris à partie sur le problème de l’immigration. La population considère qu’on fait partie des organismes qui favorisent le flux migratoire et qui aident les migrants, alors que cela n’entre pas du tout dans nos objectifs. Nous, on intervient auprès de la population quelle qu’elle soit, qu’elles que soient les origines et l’identité des personnes. Ce que nous on voit, ce sont des êtres humains.

FI : Quels sont vos principaux champs d’action à Mayotte ?

YB : D’une manière générale, le volet secourisme prend beaucoup d’ampleur. Concernant l’action sociale, on travaille avec des éducateurs et les collectivités pour intervenir dans certains quartiers et y mettre en place des équipes de prévention spécialisées, comme récemment à Koungou et Dembéni. Aussi, on coordonne le dispositif d’hébergement d’urgence avec différents partenaires. Puis il y a ce gros volet de l’aide alimentaire qui prend de l’importance au fil des années. On sait qu’une grande partie de la population vit encore sous le seuil de pauvreté, les besoins sont là, et on a beaucoup de personnes qui sont orientées vers la Croix-Rouge par les centres communaux d’action sociale (CCAS), les assistants sociaux, la protection maternelle et infantile… Nous ne choisissons pas nous-mêmes à qui nous distribuons des bons alimentaires, tous les bénéficiaires nous sont envoyés par ces différents organismes.

Cécile Bruckert-Pelourdeau, Porte-voix de la musique à Mayotte

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Elle est à la tête de la seule école locale de musique depuis plus de 20 ans. À travers son association « Musique à Mayotte », Cécile Bruckert-Pelourdeau s’engage pour sauvegarder la culture traditionnelle d’une île qui est devenue la sienne.

 

Rien ne prédestinait cette couturière à diriger l’unique école de musique du 101ème département. Pourtant, en 1998, c’est bien vers Cécile Bruckert-Pelourdeau que se tournent trois familles mahoraises, inquiètes de ne voir aucune formation musicale dispensée sur leur île. Cela faisait déjà presque dix ans que la « mzunguette » avait débarqué à Mayotte, en y suivant son mari recruté par le Centre hospitalier de Mayotte (CHM). Issue d’une famille de musiciens, Cécile connaît bien le quatrième art, qu’elle a joué dès son plus jeune âge. Alors, la mère de famille accepte de relever le défi. En seulement quelques mois, l’école associative « Musique à Mayotte » voit le jour. Vingt-et-un ans plus tard, elle dispense chaque année scolaire quelque 5 544 heures de cours.

Pour mener à bien cette entreprise inédite, Cécile Bruckert-Pelourdeau a dû raccrocher les aiguilles. Formée aux métiers de la mode, elle avait choisi, en arrivant ici, d’enseigner la couture au sein de l’Association pour la promotion de la culture de Mayotte (APCM). Comme une sorte de présage. « Des religieuses de l’est de la France avait monté cette structure », se souvient-elle. « C’est elles qui ont mis en place les premières maternelles et les centres de formation pour les jeunes filles. » Finalement, leur atelier se privatise, les machines sont envoyées à Madagascar. Rien qui ne décourage Cécile : « On a rouvert d’autres ateliers, puis on a fait Ouhayati », raconte-t-elle au gré de ses souvenirs. Pendant presque vingt ans – jusqu’en 2008 –, cette association forme des artisans mahorais dans plusieurs domaines : couture bien-sûr, mais aussi sculpture, peinture, encadrement, etc., avec toujours cette même volonté de préserver le savoir-faire traditionnel qui fait la richesse du patrimoine local.

Contre la fuite des traditions

C’est ce patrimoine immatériel que transmet aujourd’hui l’école Musique à Mayotte à plus de 365 adhérents de trois ans à point d’âge. Au programme : chant, instruments classiques comme la guitare, le violon ou le piano, mais aussi instruments mahorais ancestraux. « Chaque année, sur trois périodes d’un mois, on axe sur les musiques traditionnelles », développe

Cécile Bruckert-Pelourdeau. « On fait venir le directeur de l’académie musicale de Zanzibar, qui connaît les mêmes problématiques que nous : la perte de la pratique et même de la connaissance des instruments traditionnels. »

Pour aller plus loin, Musique à Mayotte a organisé un stage dédié en 2018, dans le cadre du dispositif national « C’est mon patrimoine ! ». Des enfants de cinquième et sixième sont ainsi allés à la rencontre de plusieurs fundi pour apprendre à confectionner eux-mêmes leurs propres instruments locaux comme les masheve, des petites percussions. Reconduite cette année, l’opération permettra cette fois aux apprentis de la première édition de devenir, à leur tour, formateurs auprès des plus jeunes. « Et les plus grands iront à Chiconi où ils rencontreront Colo Assani, artisan-créateur de gabussi ! », ajoute Cécile Bruckert-Pelourdeau. Enfin, début juillet, une quarantaine d’enfants suivront un stage sur les halé halélé à la bibliothèque de Pamandzi, qui abrite les locaux secondaires de l’école de musique. Les jeunes élèves créeront leurs propres contes autour des instruments de Mayotte.

« Certains vont travailler sur l’écriture des textes, d’autres sur l’expression scénique et l’improvisation, ou avec des enseignants de l’école sur la mise en musique des contes », se réjouit Cécile Bruckert-Pelourdeau, qui s’est également engagée en faveur de la formation professionnelle des musiciens intervenants. Avec le collectif Arts Confondus, elle encadrera début juin la venue du directeur du centre dédié de Poitiers, le seul de France à accueillir des musiciens issus de la transmission orale, qui ne savent ni lire ni écrire la musique.

 

Mon endroit favori

Il y a un endroit que j’adore en Petite-Terre ! C’est la petite plage de sable blanc en contrebas du four à chaux. Il y a toujours des enfants qui y jouent, pendant que les pêcheurs arrivent dans leurs barques, du côté droit. Elle offre une vue qui reflète toute l’immensité du lagon, et en même temps, on peut y voir presque tout le relief de Mayotte du nord jusqu’au sud : le mont Choungui qui pointe, le Bénara, la ville de Mamoudzou et les îlots.

 

Mon meilleur souvenir à Mayotte

Il n’y en a pas qu’un, mais ils sont tous liés au collectif. Ici, il y a toujours cette force d’être ensemble, de faire ensemble. Parfois je me demande si les Mahorais savent vivre seuls. Peut-être pas ! J’ai plein d’images en tête : les femmes qui dansent le debaa, les hordes de gamins qui courent tous sous les gouttières lorsqu’il pleut, ces gosses qui jouent, préparent des gâteaux, etc. Ici, le collectif prend toute la place et ça nous donne parfois de belles leçons.

 

Mon œuvre préférée

Je me suis beaucoup occupée de l’artisanat, tout ce qu’on fait avec ses mains est un art. Alors je pense à Conflit, le sculpteur qui a fait ce grand homme en marche sur le rond-point de Dembéni. Malgré sa canne, il vieillit plutôt bien et je trouve qu’il n’y a pas énormément de pièces visuelles de ce genre. Celle-ci n’est faite qu’à base de végétaux, ça décline toute la tradition du tissage et ça va aussi avec la musique. Les masheve, c’est aussi un système de tressage et de tissage.

 

Ma photo marquante

Depuis le temps, j’en ai des photos ! Mais je me rappelle particulièrement de celle-ci, prise à Sada en 1989. Je venais d’arriver avec mes trois enfants. La plus jeune, Juliette, n’avait même pas un mois quand notre nounou m’a demandé d’emmener dans son village mon bébé pour la nuit. Je n’étais pas rassurée, mais j’ai passé un contrat de confiance avec elle en la voyant insister. Je n’ai pas beaucoup dormi cette nuit-là ! Le lendemain, je les ai rejointes à Sada. Quand j’y suis arrivée, c’était la fête, l’hystérie autour de Juliette : elle était maquillée, il la faisait danser, mon bout de chou mzungu ! Ensuite avec les habitants, nous avons râpé de la coco et fait des gâteaux. C’était un très beau moment de partage en plein ramadan. Sur la photo, c’est ma fille et sa nounou, dans sa maison.

 

Ma bonne idée pour Mayotte

Il y a une idée de l’ancien lieutenant de police Chamassi que j’aime beaucoup : plutôt que d’avoir une base militaire à Dzaoudzi, qui est un peu protégée, pourquoi ne pas l’installer à M’tsamboro ? On sait que c’est la porte d’entrée des clandestins, et ce n’est pas deux vedettes rapides qui vont changer la donne. Au lieu de faire de la répression à l’intérieur de l’île, il vaudrait mieux se protéger des arrivées et ça serait moins violent pour tout le monde. Quand on voit la situation aux Comores, je comprends ceux qui veulent venir à Mayotte, mais l’île est en train d’étouffer. Il faut stopper l’hémorragie, pour ensuite pouvoir traiter les symptômes.

 

Une chorale à M’Gombani

Toute l’année, l’association Musique à Mayotte organise des rencontres et évènements musicaux. Le prochain rendez-vous est donné à la MJC de M’gombani où 100 petits choristes de classes de CM2 viendront chanter mercredi 26 juin à 17h. Une soixantaine d’autres enfants, issus des classes option musique, formeront un orchestre complet

À la recherche d’un nouveau vice-recteur

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Le 9 mai dernier, le vice-recteur de Mayotte, Stephan Martens, démissionnait officiellement pour des raisons familiales et personnelles. Un départ précipité qui n’a pas permis son remplacement immédiat. Toujours sans chef de file, le ministère de l’Éducation nationale vient de publier une offre d’emploi sur son site.

 

Le 101ème département toujours sans vice-recteur. Alors qu’il avait été nommé le 22 juin dernier pour succéder à Nathalie Costantini en tant que vice-recteur de l’académie de Mayotte, Stephan Martens a donné sa démission le jeudi 9 mai à la surprise générale. Dans un bref communiqué rédigé sur la page d’accueil de l’académie, Stephan Martens s’est justifié en évoquant des raisons familiales et personnelles. Pourtant, plusieurs personnels et syndicats de l’Éducation nationale auraient d’autres suppositions pour expliquer le départ précipité du vice-recteur. En effet, la demande d’un bateau personnel, d’une piscine et l’hébergement à l’hôtel Caribou  impliquant d’important frais pour l’Éducation nationale seraient les principales raisons de son départ.

D’autres évoquent également le déplacement d’une mission de l’inspection générale du ministère, le 26 mars dernier, qui aurait fait part de nombreux dysfonctionnements au sein du vice-rectorat mettant en cause le vice-recteur lui-même. Des accusations qui ont trouvé écho jusque dans les bureaux du ministère. Dans un communiqué du 15 mai, le ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, a ainsi assuré que le départ de Stephan Martens était volontaire et que « la continuité du service public de l’Éducation nationale [serait] pleinement assurée sur ce territoire, grâce à l’investissement des personnels administratifs et enseignants.« 

 

Prendre en compte les « spécificités » du département

Toujours est-il que l’académie est encore à la recherche d’un vice-recteur. Mais peut-être plus pour très longtemps. En effet, le ministère de l’Enseignement supérieur vient de publier une annonce pour une offre d’emploi de « Vice-recteur de Mayotte » sur son site www.fonction-publique.gouv.fr.

Une situation d’autant plus urgente à régler compte tenu de la place prépondérante du système éducatif dans le département. Premier employeur avec 7.646 agents – dont un tiers de contractuels –, premier acteur économique avec 532 millions d’euros de budget et premier investisseur immobilier pour 80 millions d’euros annuel dans le cadre du plan d’avenir, le système éducatif accueille au quotidien une population en perpétuelle augmentation. Une tâche colossale attend donc le successeur de Stephan Martens qui devra, en priorité, suivre l’évolution du vice-rectorat en rectorat de plein exercice au 1er janvier 2020.

En outre, il devra prendre en compte les nombreuses « spécificités » du territoire. Une population particulièrement jeune, avec 52.083 élèves scolarisés dans le premier degré – répartis dans 12 circonscriptions – et 44.907 élèves dans le second degré, le vice-rectorat se caractérise, notamment, par le fait que la langue française, qui est un support des apprentissages, n’est pas la langue maternelle pour une grande part des élèves.

 

Répondre aux retards structurels

Le vice-rectorat, faute d’une collectivité locale en responsabilité pour le secteur, gère seul le système éducatif pour le second degré. Il construit les établissements, assure leur fonctionnement et leur maintenance. Or, depuis un an, Mayotte est touchée par un essaim de séismes qui fragilise les infrastructures scolaires alors qu’elles sont déjà en nombre insuffisant.

Le nouveau vice-recteur sera donc en première ligne pour développer l’académie de Mayotte qui s’inscrit d’une part dans le cadre des politiques publiques déclinées au sein du plan Mayotte 2025, dans le livre bleu pour l’Outre-mer mais aussi autour du Plan de convergence et du Plan d’avenir pour Mayotte. Il devra répondre aux retards structurels du territoire et à la situation de tension rencontrée au printemps 2018. Le nouveau vice-recteur, qui devra déjà avoir exercé en tant que recteur au cours de sa carrière, sera nommé par arrêté conjoint du ministre chargé de l’Éducation et du ministre chargé de l’Outre-mer.

Depuis deux ans, les eaux usées se déversent dans sa cour

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Ayouba Sarouma a entrepris en 2007 la construction de sa maison à Dembéni. Or, depuis deux ans, les eaux usées du quartier se déversent dans sa cour à cause d’une canalisation bouchée, l’empêchant d’emménager dans sa nouvelle habitation. Sollicité pour intervenir, le SIEAM prétexte un manque de fonds.

 

En arrivant au 10, lotissement Baobab à Dembéni, une odeur nauséabonde s’échappe de la cour. « C’est invivable !« , peste Ayouba Sarouma, le propriétaire. « Je ne peux accueillir ni ma famille, ni mes amis. Il est impossible de rester plus de cinq minutes dans mon jardin… » Ce calvaire, l’habitant le vit depuis maintenant deux ans, mettant entre parenthèses son rêve de pouvoir occuper avec ses trois enfants et sa femme dans cette demeure, construite depuis plusieurs années mais toujours pas habitable. La raison de ce retard ? « La canalisation principale est bouchée par un poteau électrique qui affaisse le tuyau. De ce fait, les eaux usées n’arrivent pas à se rendre jusqu’à la station d’épuration et se déversent chez moi… Et comme la terre n’absorbe plus rien, il existe un réel risque pour les fondations de ma maison ! »

Malgré de nombreuses sollicitations et plusieurs échanges avec le Syndicat intercommunal d’eau et d’assainissement de Mayotte (SIEAM), la situation ne s’améliore guère au fil des mois. « J’ai envoyé plus de vingt emails à Michel Jousset, le directeur général des services« , insiste-t-il. Un acharnement qui, semble-t-il, fait bouger les lignes puisqu’il note que « de temps en temps, Maore Assainissement Propreté [MAP, ndlr] vient pomper un regard  [coffre d’évacuation destiné à évacuer ou récupérer l’eau de pluie, ndlr] mais au bout de dix minutes, c’est déjà de nouveau rempli« . À la louche, il estime à cinquante le nombre d’interventions de la MAP depuis l’apparition de ce problème. Interpellé, le maire de la commune, Ambdi Hamada Jouwaou, s’est même déplacé en personne en fin d’année dernière pour constater les dégâts avec l’un de ses responsables techniques. « C’est un problème de santé publique. Si rien ne change rapidement, la prochaine étape consistera à contacter l’agence régionale de santé« , souligne Ayouba Sarouma.

 

Même pas 50.000 euros dans les caisses ?

Contacté, le SIEAM, par l’intermédiaire de Michel Jousset, semble pris au dépourvu. En premier lieu, le bras droit du président confie « ne pas être au courant » et se montre agacé « d’être appelé pour ça« … Mais au fil de la conversation, il prend conscience du dossier et tente d’argumenter : « il faut refaire une extension de réseau, mais on n’a pas les budgets. » Le coût prévisionnel de l’opération, d’une durée de deux semaines, se chiffre à « 50.000 euros« . Un montant qui apparaît pourtant comme dérisoire pour une structure de cette envergure. « Ce n’est pas un manque de volonté de notre part. C’est prévu et on le fera. Mais un article ne fera pas avancer les choses plus rapidement. Ça va peut-être se débloquer d’ici deux ou trois semaines« , avance-t-il finalement. Une promesse qu’a déjà entendue Ayouba Sarouma par le passé. La dernière en date remonte à février. Sur la messagerie vocale de son téléphone, le directeur général de services avait alors évoqué que « les travaux commenceraient sous quinze jours« . Surpris par ce qu’il estime être un manque de considération et de réactivité, l’homme s’interpelle : « j’ai vraiment le sentiment que toutes les autorités compétentes s’en moquent. On me prend pour un débile ! » Réponse au début du mois de juin ?

 

Un volcan sous-marin à 50 kilomètres de Mayotte

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À peine plus d’un an après le début de l’épisode d’essaim de séisme à Mayotte, une importante part du mystère vient d’être levée : les milliers de secousses ressenties seraient liée à l’apparition d’un volcan sous-marin à l’est de l’île. 

 

Du zébu enterré vivant aux forages pétroliers au large des Comores, depuis un an, toutes sortes d’hypothèses plus ou moins crédibles circulent pour tenter d’expliquer les milliers de secousses sismiques ressenties par la population. Les diverses missions scientifiques menées depuis le mois de juin 2018, dont la dernière campagne océanographique MAYOBS réalisée à bord du navire Marion Dufresne, qui vient de rentrer à quai mercredi, ont finalement livré un début d’explication nettement plus tangible, dévoilé à la presse jeudi après-midi en présence du préfet Dominique Sorain. Il s’agit d’ailleurs d’un « éclaircissement majeur » qui « permet de mieux comprendre les séismes constatés sur l’île depuis un an« , selon les termes de la préfecture.

Et pour cause, un volcan sous-marin, situé à 50 kilomètres à l’est de l’île et à 3.500 mètres de profondeur, est en train de naître.

« Une cartographie de 2014 démontre clairement par rapport à la cartographie actuelle récente effectuée par la mission, la naissance d’un volcan« , a confirmé jeudi Nathalie Feuillet, physicienne à l’Institut de physique du Globe, chef de la mission MAYOBS, ajoutant que « dès le mois novembre, l’hypothèse de mouvements de plaques tectoniques fut écarté« . La taille actuelle du nouveau volcan est évaluée à 800 mètres de hauteur avec une base de 4 à 5 kilomètres de diamètre. Le panache de fluides volcaniques – nuage de gaz volcaniques chauds et de téphras, majoritairement des cendres et de la roche – de 2 kilomètres de hauteur n’atteint pas la surface de l’eau. « En outre, les émanations de gaz constatées sur le littoral de Petite-Terre par la population sont, selon la mission, un signe habituel rencontré dans ce type d’activité volcanique et feront l’objet d’études spécifiques« , relaie de son côté la préfecture. Dès le mois de janvier, en effet, des témoignages d’habitants et de pêcheurs faisaient état d’étranges bulles de gaz au large de Petite-Terre pour les premiers et d’importantes quantités de poissons morts flottant à la surface de l’eau à l’est de Mayotte pour les seconds.  

 

Évaluer les risques sismiques, volcaniques et de tsunami

Cette découverte géologique exceptionnelle est le résultat de la mission menée conjointement par la Comité national de la recherche scientifique (CNRS), le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), l’Institut physique du Globe (IPGP), l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer), l’Université de La Réunion, l’Institut de physique du Globe de Strasbourg (IGPS), l’Ecole normale supérieure (ENS), le Centre national d’études spatiales (CNES) et le Service hydrographique et océanographique de la marine (SHOM). Cette mission est venue « ajouter des observations terrestres » à la campagne océanographique du Marion Dufresnes, précise la préfecture. L’objectif de la mission MAYOBS, qui s’achèvera samedi, consistait à récupérer les six sismomètres de fond de mer déployés en mer à l’est de l’île en février dernier. Leurs données vont continuer à être analysées pour préciser la zone active des séismes. Ces instruments ainsi que huit autres micro-sismomètres ont à nouveau été remis à l’eau au plus près de la zone des séismes pour les localiser très finement et comprendre leur origine. Il est également prévu d’acquérir des données de géophysique (bathymétrie, réflectivité sismique très haute résolution) pour imager les fonds océaniques dans la zone où se produisent les séismes.

L’exploitation de toutes les données acquises ces derniers mois « nécessitera des travaux approfondis pour évaluer les risques induits pour Mayotte en matière de risque sismique, risque volcanique et de tsunami« , ajoute la préfecture. Le programme d’étude devrait ainsi être actualisé et renforcé à mesure des nouveaux éléments découverts. Enfin, alors que chaque volcan dispose déjà d’un observatoire dans les outre-mer, Mayotte devrait également avoir le sien, indique Nathalie Feuillet. D’autant plus utile qu’un « volcan qui est en mer est beaucoup plus difficile à surveiller« . 

 

Un plan d’action en cinq axes  

En relation avec les élus et les autres acteurs impliqués, le gouvernement a défini un plan d’action qui repose sur cinq axes, à savoir :

 » – Compléter dans les meilleurs délais les dispositifs de surveillance et instruments de mesure (tels que les sismographes et les balises GPS) pour suivre en continu le phénomène,

– Compléter, par des missions adaptées, la connaissance scientifique ;

Procéder immédiatement à une actualisation de la connaissance des risques que présente ce phénomène et les impacts potentiels pour le territoire mahorais, dont les résultats pourront être présentés d’ici trois mois ;

– Renforcer sans attendre le dispositif de planification et de préparation à la gestion de crise. A cet effet, une mission d’appui à la planification de la sécurité civile est dépêchée pour apporter un appui au préfet (actualisation des dispositifs de gestion de crise tels que les plans ORSEC). Elle sera sur place dès ce vendredi 17 mai ;

– Informer régulièrement la population, en lien avec les élus locaux ».

Les nouveaux éléments de connaissance acquis seront partagés au niveau international dans la zone de l’Océan Indien, assure la préfecture de Mayotte.

Un conseiller d’éducation condamné à 20 mois de prison ferme

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Un Mahorais d’une quarantaine d’années comparaissait mercredi matin devant le tribunal correctionnel de Mamoudzou pour plusieurs agressions sexuelles sur mineure de moins de quinze ans. Les faits visés auraient été commis à La Réunion où il résidait entre janvier 2004 et août 2006. Il a été condamné à une peine de prison ferme aménageable. 

 

Doté d’un « bon contact« , « respectueux« , « obséquieux » et « manipulateur« , le prévenu « ne laisse rien paraître et ne lâche rien« . Tels sont les termes des experts psychiatres et psychologues chargés d’analyser la personnalité de M.A, un conseiller principal d’éducation mahorais de quarante ans qui comparaissait ce mercredi devant le tribunal correctionnel de Mamoudzou pour des faits d’agressions sexuelles répétées sur une mineure de moins de quinze ans.

Prévenant et courtois, l’homme l’est assurément à la barre ce mercredi. Reste qu’il lui est reproché d’avoir, à au moins trois reprises, imposé des relations sexuelles à une jeune fille âgée de 13 ans à l’époque des faits, en l’occurrence, sa demi-sœur. Aujourd’hui âgée de 28 ans, cette dernière n’est pas présente à l’audience et ne s’est pas constituée partie civile. En chemise sombre et mocassins cirés, lui se lève, quasi au garde-à-vous, lorsque retentit la sonnerie qui signale le début de l’audience. Droit comme un I, le quadragénaire écoute religieusement le président lui relater l’ensemble des faits qui lui sont reprochés. D’une voix inaudible, presque aussi fluette que sa carrure est imposante, il choisit de répondre à la cour, mais semble avoir des difficultés face à certaines questions élémentaires. Les faits – qu’il nie – remontent à 2004 et s’étendent sur une période de deux ans. Ils ne seront dénoncés à la gendarmerie qu’en 2010, par la grande sœur, puis par la mère de la victime. À l’époque, c’est de viol, et non d’agression sexuelle dont il est question.

La jeune fille de treize ans, Salimata*, est entendue à son tour et dépose plainte. Elle décrira aux enquêteurs au moins trois viols avec violence dont deux qui seraient survenus au domicile du prévenu. La mère de l’enfant indique de son côté avoir emmené sa fille voir un gynécologue immédiatement après les faits, mais que ce dernier lui aurait déclaré que « tout allait bien » malgré les dires de l’adolescente, qui se plaignait de sévères lésions. Pour autant, aucune trace de cette visite médicale, ni d’aucune autre expertise gynécologique d’ailleurs, ne figure au dossier. 

« C’est interdit par la loi »

De ses auditions, il ressort que la jeune fille est allée régulièrement rendre visite au prévenu – à son invitation – alors qu’il résidait avec sa femme et une partie de ses (huit) enfants à Saint-Louis (La Réunion), entre 2004 et 2006. Accompagnée de sa grande sœur de 14 ans et de son petit frère de 8 ans, elle allait passer weekends et vacances chez ce « grand frère qu’elle n’avait jamais eu« , « très gentil, surtout avec moi« , et qui venait d’apparaître dans leur vie. Elle raconte aussi que lors de l’après-midi au parc qui aurait précédé le premier viol, il aurait déclaré aux trois enfants qu’il les aimait « comme un frère, comme un père« . De son côté, le prévenu nie, mais ne parvient pas à expliquer à la cour pourquoi la jeune fille, sa sœur et sa mère, l’accusent. Plus tard, alors que le juge lui demande ce qu’il pense, au-delà de son cas personnel, des agressions sexuelles sur mineurs, il esquive. Après une réponse axée sur la procédure de signalement  à suivre, il réessaie, à la demande du magistrat, et se focalise sur la question de la violence. Perdant patience, le juge insiste : « Mais par rapport à la connotation sexuelle des faits qui vous sont reprochés ? Pourquoi c’est spécialement grave ? » La réponse –  l’une des rares que le public pourra clairement entendre  – est éloquente : « Parce que la loi l’interdit« . Rien sur la dimension morale de l’acte ou sur les traumatismes qu’il cause aux victimes. Malaise dans la salle.

Déjà condamné pour violences

L’autre élément qui ne plaide pas en faveur du prévenu, c’est son casier judiciaire, soulève la substitute du procureur Chloé Chérel. L’homme a déjà été condamné en 2006 à 500 euros d’amende pour violences volontaires, puis à trois mois d’emprisonnement avec sursis pour violences aggravées. Il a notamment été accusé de maltraitances par sa propre fille : des coups de pied ou de ceinturon et des humiliations telles que de demander à une autre de ses filles de se dévêtir. Au-delà des zones d’ombre et des « faiblesses » du dossier, comme l’absence de preuve matérielle, deux éléments viennent affaiblir les dénégations du prévenu : le témoignage d’une infirmière scolaire employée dans le même collège que M.A et qui fait valoir qu’il est dans un « rapport de séduction » avec les jeunes élèves et l’une des expertises psychologiques, qui le décrit comme un « pervers probable« . Sur la base de ces éléments et malgré l’ancienneté des faits, le parquet a requis à son encontre une peine de quatre ans d’emprisonnement avec sursis, dont la moitié en sursis mise à l’épreuve (obligation de soins, interdiction d’être en contact avec la victime et de travailler au contact des mineurs). De son côté, l’avocat du prévenu a essayé de mettre en doute les motivations de la première accusatrice, la grande sœur de Salimata, qui aurait voulu se venger après avoir été empêchée par son demi-frère de fréquenter un garçon. Il s’est également appuyé sur l’absence d’expertise gynécologique au dossier pour demander la relaxe pour son client, et dans le cas où le tribunal déciderait d’entrer en voie de condamnation, l’exclusion d’une mention de celle-ci au casier judiciaire. Cela lui a finalement été refusé, le prévenu se voyant condamner à vingt mois de prison ferme, aménageables par un juge d’application des peines.

 

*Le prénom a été modifié.

Jeux des îles 2027 : quels enjeux ?

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Mayotte s’est positionnée pour l’organisation des Jeux des îles de l’océan Indien en 2027 et sa candidature a été jugée recevable par le Conseil international des Jeux. Une formidable opportunité pour construire et rénover des infrastructures sportives, dans le double objectif d’accueillir cet événement régional mais aussi de permettre à la population de jouir d’équipements aux normes internationales.

 

Une piscine, un stade d’athlétisme et un dojo pour les sports de combat. Voici a minima les équipements sportifs qu’il faudra construire dans l’optique des Jeux des îles de l’océan Indien (JIOI) en 2027, que Mayotte s’est proposée d’accueillir. Aucun équipement sportif de l’île n’étant aux normes pour une compétition internationale, il sera également nécessaire de rénover en profondeur l’existant. En effet, deux disciplines sont obligatoires (natation et athlétisme) et les autres sont au choix (handball, football, basket-ball, tennis, etc.) – l’occasion d’utiliser les nombreux plateaux polyvalents du territoire qui méritent une véritable remise aux normes internationales.

Le dossier que le 101ème département français a déposé chiffre à un peu moins de 100 millions d’euros le montant de cet effort de construction et de rénovation. Mais l’enveloppe totale s’élève à 150 millions puisqu’il faudra également travailler sur le réseau routier, les capacités de prise en charge sanitaire et d’hébergement : l’accueil des 2.000 participants pose particulièrement problème, 1.000 lits seulement étant disponibles sur l’île hippocampe à ce jour.

 

Un véritable parcours du combattant

Le chemin vers l’acceptation de la candidature de Mayotte ne fut pas sans embûches. Les Comores l’ont évidemment toujours rejetée, arguant que le département n’était pas membre à part entière du Conseil international des jeux. « Faux« , ont contredit les autres pays qui ont validé la candidature de l’île aux parfums. En outre, pour pouvoir se porter candidate à l’accueil des JIOI, l’île au lagon avait besoin de l’aval de l’État. Or, pour 2023, ce dernier avait estimé que le département ne serait pas prêt en termes d’infrastructures. Mais pour 2027, l’île bénéficie non seulement du soutien de l’État mais également du conseil départemental, et compte solliciter les fonds structurels européens (notamment le Feder voire le FSE) sur la prochaine programmation.

Pour Madi Vita, président du Comité régional olympique et sportif (CROS), ces Jeux sont une formidable opportunité de développement car « c’est à travers [ce genre d’évènement] qu’on acquiert les infrastructures« . Le responsable donne un exemple simple : avant 1979 et les premiers JIOI à Saint-Denis, « il n’y avait pas grand-chose à La Réunion, pas même une piscine« . C’est dire si cet évènement, qui se déroule tous les quatre ans et qui réunit sept délégations (les Seychelles, les Comores, Madagascar, Mayotte, La Réunion et les Maldives), constitue une opportunité inespérée de structuration d’un territoire.  Ainsi, l’objectif est double : être compétitif face à des îles qui remportent des centaines de médailles lors de ces Jeux en raison d’un taux d’équipement leur permettant de se positionner en haut du podium, comme les Seychelles. Mais également construire et mettre aux normes internationales les infrastructures sportives existantes.

 

Des lacunes à combler

Car le potentiel existe sur l’île aux parfums : les Mahorais excellent particulièrement dans les sports collectifs (football, handball et surtout basket-ball), certainement grâce à la construction dans les années 80 des premiers plateaux polyvalents, avance Madi Vita. « On n’a jamais pu développer réellement le haut niveau« , regrette-t-il cependant. Ceci en raison d’un manque d’infrastructures, d’une part – le député Mansour Kamardine (LR) a d’ailleurs rappelé dans sa dernière proposition de loi de programme que le taux d’équipement sportif est 20 fois inférieur par jeune de moins de 20 ans à la moyenne nationale. Mais aussi, d’autre part, en raison de l’absence de certains organes comme, encore récemment, le CREPS. L’application tardive de certaines réglementations (le code du sport n’a été applicable à Mayotte qu’à la fin des années 2000, par exemple) a également porté préjudice au département.

Fort heureusement, les choses évoluent. La formation commence à se déployer : par exemple, tous les ans, ce sont 20 diplômés d’un brevet professionnel de la jeunesse, de l’éducation populaire et du sport (BPJEPS) qui viennent grossir les rangs des animateurs. Autre exemple de l’évolution positive du sport à Mayotte : les femmes, peu représentées dans le sport il n’y a pas si longtemps, combattent petit à petit les préjugés et s’adonnent de plus en plus à une activité physique. « Les femmes qui font du sport sont mal vues, mais c’est de moins en moins vrai« , se réjouit le président du CROS. « C’est affolant comme d’une génération à l’autre, ça va vite« , se rassure-t-il encore. Mayotte saura après les Jeux de 2019 si sa candidature à l’accueil des JIOI de 2027 est retenue ou non.

 

Les JIOI en 2019

Avant 2027, Mayotte participera aux Jeux des îles de l’océan Indien 2019. La délégation mahoraise se rendra donc sur l’île Maurice du 17 au 30 juillet. Cette compétition présentera 14 disciplines dont  l’athlétisme, le basket-ball, le cyclisme, le football, le judo, le rugby, le volley-ball et le tennis de table. Ce sera la quatrième fois que Mayotte participera aux Jeux avec sa propre délégation. L’objectif, cette année, selon Madi Vita : terminer cinquième. L’écart entre les pays ayant un taux d’équipement sportif important, comme les Seychelles et les autres, se calcule « en centaine de médailles« , regrette le président du CROS. Pourtant, en 2015, Mayotte a remporté des médailles « dans à peu près toutes les disciplines où elle a concouru« . Preuve que le potentiel est là.

Février 1967 – Carnet de bord d’un militaire en mission à Mayotte

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C’était il y a 52 ans : le 4 février 1967, les chatouilleuses font le siège de l’ORTF pour protester contre le transfert de la chaîne vers Moroni. La situation dégénère et le contexte devient insurrectionnel. Pour la contenir, le 2ème RPIMA, basé à Madagascar, est appelé en renfort le 6 février. Parmi les militaires, l’appelé Jean-Louis Lebigot, alors âgé de 19 ans, qui a rédigé un carnet de bord de sa mission à Mayotte. Un document que nous avons retrouvé et que nous publions en exclusivité.

 

« Nous sommes arrivés à Dzaoudzi à 8h du matin. En atterrissant, nous voyions cette mer couleur d’émeraude, c’était fantastique » : nous sommes le 6 février 1967, et pour la première fois de sa vie, Jean-Louis Lebigot, un appelé de 19 ans, s’apprête à poser le pied à Mayotte. Deux heures plus tôt, la 2ème compagnie du 2ème régiment de parachutistes d’infanterie de marine (RPIMA), décollait d’Ivato, à Madagascar. « Nous avons été réveillés à 2h du matin, et sommes partis quatre heures plus tard », se rappelle-t-il en précisant : « Initialement, nous devions sauter en parachute sur Dzaoudzi, mais les avions ont finalement pu atterrir, nous débarquer, et repartir pour aller chercher des légionnaires à Diego-Suarez. Une fois arrivés, nous avons fermé l’aéroport, car des manifestants voulaient le prendre pour ne pas que d’autres renforts arrivent, et nous les avons repoussés vers la mer. »

Motif de cette arrivée en urgence : un contexte jugé « insurrectionnel » sur l’île aux parfums, pour reprendre les mots de l’homme, aujourd’hui âgé de 72 ans. La raison de ce climat tendu ? Cinquante-deux ans après, les raisons précises se sont quelque peu effacées de sa mémoire, mais « des allocations avaient été retenues, ou bien Mayotte n’y avait pas eu droit, peut-être. Cela avait provoqué une révolte », croit-il se rappeler sans omettre que « c’est en tout cas ce qu’on nous avait dit, car on ne nous donnait pas trop de renseignements. » Un mouvement d’ordre purement social, donc ? Pas forcément, trop d’évènements déterminants dans la lutte pour Mayotte française se sont en effet déroulés durant ces quelques journées.

Deux jours plus tôt en effet, les Chatouilleuses font le siège de l’Office de radiodiffusion-télévision française (ORTF) : le gouvernement territorial comorien – institution existante à l’époque puisque les trois autres îles des Comores sont alors toujours françaises – a en effet décidé de transférer la radio alors installée à Pamandzi vers Moroni, en Grande Comore, « ce que les Mahorais [considéraient] d’un mauvais œil », rappelle Jean-Louis Lorenzo dans son article Une histoire de la radio à Mayotte*.

Mais la grogne permet aussi de « faire entendre sur les ondes leur protestation contre l’insuffisance des mesures sociales adoptées par le gouvernement local »**. Un fait également souligné par Rémi Carayol dans son ouvrage Histoire de Mayotte 1946-2000***, qui mentionne : « Le 4 février 1967, ces mêmes « chatouilleuses » font le siège de l’ORTF en guise de protestation contre le déficit de mesures sociales et scandent ce qui deviendra le slogan de leur lutte : « Nous voulons rester Français pour être libres ». Encore une fois, la manifestation dégénère. »

Dès le lendemain, le 5 février, et suite à ce blocage, deux députés mahorais de l’Assemblée, Soufou Sabili et Saïd Toumbou, font l’objet d’un mandant d’amener, tout comme d’ailleurs un militant, Silahi Madi, et trois représentantes des femmes, Zéna M’Déré, Zaïna Boinali et Moitsoumou Djaha. Mais les prévenus refusent de se rendre à la gendarmerie et se réfugient au domicile de Souffou Sabili. Furieux, le président du conseil du gouvernement du territoire des Comores, Saïd Mohamed Cheick, les convoque à Moroni afin qu’ils rendent des comptes. Bien que prêts à faire le voyage, les deux élus ne pourront s’y rendre. Les femmes sont en effet opposées à leur départ et font le siège de leur domicile toute la nuit. C’est ici que le témoignage de Jean-Louis Lebigot rejoint l’histoire de Mayotte, puisque le 6 février au matin, les parachutistes arrivent en renfort de Madagascar.

Députés rebelles 

Dans le carnet de bord tenu par le jeune militaire lors de sa mission à Mayotte (voir de la page 18 à la page 35), il est en effet mentionné, au sujet de ce 6 février 1967 : « À 11h00 locale, la compagnie est enfin appelée à intervenir au village de « l’Abattoir » (sic) où les députés rebelles se sont réfugiés sous la protection de la population. » L’ambiance est alors très tendue : curieux de ce déploiement de forces aéroportées et inquiets des inhabituels mouvements sur l’île, nombre d’habitants de Grande-Terre tâchent de rallier Labattoir. Avec succès, malgré les tentatives de la Garde comorienne d’empêcher le débarquement des boutres à la jetée de Dzaoudzi. Le militaire, posté au niveau de la digue peu avant l’intervention de sa compagnie au domicile du député, le relate : « On faisait barrage au niveau de la digue, mais les boutres la contournaient. » L’attroupement est estimé à 1 500 personnes par la gendarmerie, dont certaines sont armées, selon divers témoignages de l’époque « de piques, de couteaux, de coupes-coupes (sic), et de pierres. »**** De ce contexte pour le moins tendu, Jean-Louis Lebigot garde un souvenir des plus marquants et des plus difficiles, celui d’une « d’une femme enceinte » à qui un militaire – « il y avait parmi nous des anciens de la guerre d’Algérie » – aurait « mis un coup de baïonnette dans le ventre », provoquant de fait « son accouchement ou son avortement. » Et de conclure sur ce point : « C’est la seule charge que nous avons eue à mener. »

Finalement, « après de longs palabres, les députés rebelles se rendent enfin. Les manifestants tentent de franchir le barrage du PK4, mais en vain. » Effectivement, en accord avec les dirigeants du Mouvement populaire mahorais (MPM), alors en pleine structuration, les députés Soufou Sabili et Saïd Toumbou acceptent de se livrer. Zéna M’Déré et Moitsoumou Djaha, pour leur part, se rendront elles-mêmes aux gendarmes dès le lendemain pour être placées en garde à vue.

Le blocage et ses suites auront de larges répercussions sur l’avenir politique des deux hommes, qui ont finalement rallié la cause de l’unité des Comores, notamment en créant le mouvement des « Serrer la main » : suite à la manifestation, ils sont condamnés à quatre et six mois de prison, et sont déchus de leurs mandats. Un contexte sur lequel revenait Saïd Toumbou quelques mois avant sa mort*** : « Alors qu’on a essayé de calmer les femmes, c’est nous qui avons été jugés coupables. » Et d’évoquer « un coup monté » par Marcel Henry, quelques mois avant les élections législatives : « Il savait très bien qu’on serait députés à vie, or le fait d’être en prison nous empêchait de nous présenter, on devait être remplacés. Il a exploité le transfert de la capitale pour faire croire à la population que nous étions d’accord avec les décisions prises à l’encontre de Mayotte. C’est lui qui a poussé les femmes à se révolter ! Quand Souffou a voulu s’expliquer devant la population, on l’en a empêché. » Vrai ? Faux ? Quoi qu’il en soit, Marcel Henry et le MPM remporteront lesdites élections, première étape politique permettant d’aboutir, à terme, à la départementalisation de Mayotte en 2011.

Surveillance et découverte 

Bien qu’ignorant de ces faits liés à la prise de l’ORTF, Jean-Louis se souvient que « les troubles se sont vite arrêtés. La situation a été maitrisée en deux jours, et nous sommes restés trois jours en alerte. Nous avons été postés sur le boulevard des Crabes, que les boutres continuaient à contourner. » Le reste de la mission se déroulera sans encombre, entre patrouilles à la baie de Moya et marches à la Vigie, comme en témoigne le carnet de bord : « Nous devions sauter sur Grande-Terre pour un exercice, mais cela ne s’est finalement pas fait », complète-t-il. Il y aura aussi la rencontre avec les habitants, notamment lorsqu’un pêcheur les dépanne. « Nous n’avions plus rien à manger, c’est le paradoxe de l’armée française », détaille-t-il en poursuivant : « Il nous a fallu manger de la noix de coco pendant deux jours, jusqu’à ce qu’un pêcheur accepte d’amener deux sous-officiers avec lui pour qu’ils prennent du poisson. »

Le 25 février 1967, 19 jours après son arrivée à Dzaoudzi, la 2ème compagnie du 2ème RPIMA quittait Mayotte avec un certain regret, comme en témoignent les mots employés dans les légendes des photos : « paradis », et « douce île. » Plus de cinq décennies plus tard, Jean-Louis Lebigot le confirme : « Mon séjour là-bas a été très bon, entre baignades et quelques rapports avec la population, qui était gentille malgré sa pauvreté. Toutefois, ces contacts demeuraient menus, car il faut se rappeler que nous étions tout de même venus pour maîtriser la situation. »

C’est ensuite à La Réunion que la compagnie sera envoyée pour assurer le bon déroulement des élections législatives, dans un tout autre contexte. À l’issue de son service militaire, notre homme retrouvera la vie civile, où il reprendra son métier de cuisinier. De Mayotte, il n’aura plus que de vagues nouvelles de la part d’un ami et de sa nièce, qui y ont tous deux vécu : « Je crois savoir que l’ambiance a changé, que ce n’est plus comme avant ». Et de finir, enfin, sur un lien étrange : « Il faut aussi ajouter mon grand-oncle qui, avant moi, y avait été en poste avec la Légion étrangère. Cela fait trois générations d’une même famille à être passées par Mayotte. Comme quoi, on a peut-être des liens avec certains endroits sans le savoir. »

Gaz : « pénurie » de bouteilles vides

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Comme chaque année durant le mois de ramadan, il devient difficile de se procurer une bouteille de gaz dans les points de vente de Mayotte. Il n’est pour autant pas question de pénurie à proprement parler, mais seulement d’une inéquation entre fournisseurs, consommateurs et bouteilles consignées. Explications.

 

Chaque année c’est la même chose, les bouteilles de gaz se font rares dès le début du mois de ramadan. Aussitôt livrées, elles partent comme des petits pains. Les chanceux qui arrivent à temps  en profitent pour faire du stock et achètent leurs bouteilles par lots. Ceux qui arrivent trop tard partent à la recherche d’un autre point de vente ravitaillé ou attendent la prochaine livraison. Pourtant, la Somagaz nie toute rupture de stock. Leurs services de livraisons sont bien opérationnels, assurent-ils. Même son de cloche chez Total, qui assure d’ailleurs avoir prévu des réserves supplémentaires en vue du mois sacré. Le fond du problème serait pourtant moins mystérieux qu’il n’y paraît : selon plusieurs sources du secteur, les acheteurs mettraient tout simplement plus de temps à rapporter leurs bouteilles de gaz consignées… qu’à les acheter.

En effet, les bouteilles de gaz, une fois vides, doivent impérativement être restituées aux vendeurs afin de pouvoir être à nouveau remplies par le fournisseur. Par la suite, elle sera de nouveau mise en vente. Un cercle vertueux qui ne peut fonctionner qu’à condition que tous les acteurs de la chaîne se coordonnent. Si les consommateurs stockent leurs bouteilles vides ou oublient de les retourner aux vendeurs, le fournisseurs manquent alors vite de contenants pour assurer un service équilibré. Une inéquation qui se ressent davantage pendant la période du ramadan, où la demande est plus forte.

Total, qui assure 12% du marché du gaz à Mayotte, estime à 210 le nombre de bouteilles de gaz qui ne reviennent pas en point de vente chaque mois. Soit 2.520 bouteilles par an. « En parlant avec les consommateurs, on s’est rendu compte qu’ils avaient chez eux de 3 à 5 bouteilles de gaz« , avance Yasmine Saïd, responsable de la communication chez Total Mayotte. « Peut-être que les clients ont peur des pénuries, comme pendant les périodes de grèves ou de blocages, du coup, ils stockent. Durant le ramadan, on cuisine plus, on a donc plus besoin de gaz et on ressent donc les conséquences de ce manque de bouteilles. » Pour inciter les consommateurs à rapporter leurs bouteilles consignées, Total pense même augmenter les prix des consignes dans les semaines à venir, en les faisant passer de 20 à 28 euros.

Mayotte Hebdo de la semaine

Mayotte Hebdo n°1116

Le journal des jeunes