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Fermeture des établissements à Mayotte, Gilles Halbout : “Il faut se remobiliser pour éviter des mesures drastiques”

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Trois établissements ont déjà mis en place des mesures pour limiter l’afflux des élèves et les risques de transmission du Covid-19. Alors que les chiffres de l’ARS continuent de grimper, d’autres structures pourraient être concernées par ces réductions des jauges d’accueil… Voire par une fermeture complète. Le recteur Gilles Halbout fait le point sur les zones de vigilance.

Flash Infos : Après le lycée de Sada, le lycée Bamana et le collège de Majicavo ont à leur tour mis en place une réduction de leur jauge d’accueil. Où en est-on de la situation sanitaire dans les établissements scolaires de l’île ?

Gilles Halbout : C’est en effet la situation pour ces trois établissements. Il s’agit, je le rappelle, du niveau 2 des restrictions qui vient aussi avec un dépistage massif des enseignants et de tous les personnels. Le passage au niveau 3, c’est-à-dire la fermeture pure et dure des portes, dépend des contraintes locales ou des chiffres de l’agence régionale de santé (ARS). Pour ne rien vous cacher, si la situation à Sada et à Bamana a l’air bien sous contrôle, les résultats des tests sont moins encourageants à Majicavo… Nous n’avons pas encore les derniers chiffres, mais il y a de fortes chances que nous soyons amenés à fermer le collège. Nos autres points de vigilance, que nous surveillons en lien avec l’ARS et la préfecture, concernent aujourd’hui les collège de M’Tsamboro, Tsingoni, Kani-Kéli, Dembéni, et la cité scolaire de Bandrélé. Là, nous allons certainement passer en jauge réduite également.

FI : Quid des communes confinées, en Petite-Terre et à Bouéni, où les établissements scolaires ont dû fermer ? Un assouplissement pourrait-il être envisagé pour permettre à certains élèves de retourner en classe, selon cette logique d’alternance présentiel/distanciel ?

G. H. : À l’heure où je vous parle, je n’ai pas d’information supplémentaire. Il y avait un léger espoir pour Bouéni, mais rien de concret pour l’instant. Nous restons en lien avec la préfecture et l’ARS et tout dépendra de l’évolution de la situation sanitaire.

FI : Dans le premier degré, certaines critiques ont ciblé le manque de nettoyage des établissements, et un relâchement sur les protocoles sanitaires. Que répondez-vous ?

G. H. : Oui, ces éléments ont été soulignés lors du dernier CHSCT avec les organisations syndicales. Celles-ci ont tenu à rappeler qu’il y avait un relâchement ces derniers temps dans le nettoyage et, d’une manière générale, dans le respect des gestes barrières. Il faut que tout le monde se remobilise sinon cela va nous amener à prendre des mesures plus drastiques. Et il faut notamment remobiliser les communes dans le nettoyage et les gestes barrières, et surtout le port du masque. Nous sommes en train de former des services civiques, en lien avec la préfecture, pour mettre en place des brigades anti-covid chargées de veiller à la bonne application des gestes barrières. Cette piste-là, nous pouvons la déployer très rapidement car nous avons beaucoup de services civiques. Certaines communes ont d’ailleurs déjà instauré ces “vigies”. C’est une très bonne initiative, qu’il faut généraliser.

FI : Est-ce que ce relâchement peut s’expliquer par un manque de moyens, matériel de nettoyage, masques ?

G. H. : Les masques, on dit toujours qu’il en manque… Mais de notre côté, nous en avons encore distribué 300.000 la semaine dernière. Nous tâchons de contrôler les circuits de distribution, après, il peut y avoir une école ici ou là qui n’a pas fait remonter ses besoins à temps, par exemple. Parfois, il s’agit avant tout de faire attention aux chaînes de transmission de l’information, c’est d’ailleurs ce que je réponds aux syndicats.

Quant au nettoyage, il faut garder en tête que nous revenons de loin, de très, très loin. Effectivement, nous pouvons imaginer qu’il y a eu un effort gigantesque à la rentrée, qui aujourd’hui s’est essoufflé… Mais s’il s’agit d’un manque de moyens matériels ou humains, car des personnels d’entretien peuvent par exemple tomber malade. Dans les établissements que nous gérons, le message est clair : s’il faut, nous payons une entreprise pour compenser. Il ne faut pas baisser la garde. Et l’effort fourni à la rentrée doit devenir la norme.

FI : Au lycée de Sada, la direction a fait le choix de mettre en alternance les classes de Seconde générale, car elles avaient en moyenne davantage accès aux supports numériques à la maison que d’autres, moins favorisées. Malgré cela, il semble difficile aux élèves de suivre les cours prévus dans leur emploi du temps, lorsqu’ils sont à distance… Comment assurez-vous la continuité pédagogique ? Quels enseignements avez-vous tiré du premier confinement ?

G. H. : Le premier bilan, comme vous pouvez vous en douter, c’est qu’une continuité pédagogique, surtout qui s’installe dans la durée, est particulièrement compliquée à instaurer à Mayotte. Nous faisons donc le maximum pour éviter qu’elle s’installe dans la durée, car nous savons que les conditions de travail de nos jeunes à la maison ne sont pas les mêmes qu’en métropole. C’est d’ailleurs pour cette raison que nous favorisons ce parti pris de l’alternance un jour sur deux, car nous savons que de longues semaines sans cours entraînerait naturellement de nombreux décrochages. Et ce choix permet aussi de distribuer les cours papiers pour ceux qui ont moins accès à Internet. Et de maintenir le lien. Quand les établissements sont complètement fermés, comme en Petite-Terre et à Bouéni en ce moment, le plus important, c’est ce lien-là et les équipes pédagogiques doivent appeler régulièrement chaque élève pour être sûrs qu’il n’y ait pas de rupture.

FI : Ce jeudi, plusieurs syndicats entendent suivre la grève nationale. Le syndicat CGT Educ’action s’est notamment fendu d’un communiqué pour dénoncer, je cite, des “vies scolaires méprisées”. Le syndicat s’inquiète de l’ouverture des établissements en temps de Covid, sans personnels de vie scolaire, eux-mêmes frappés par l’épidémie…

G. H. : Ce que j’ai déjà répondu, c’est qu’il ne faut pas faire des généralités à partir d’un cas particulier. Il y a eu une fois, un jour, à un endroit, la situation que ce syndicat dénonce, sûrement à cause d’un manque d’anticipation dans l’établissement concerné. Mais s’il n’y a pas de personnel de vie scolaire, nous n’ouvrons pas, il n’y a pas de débat. Quant aux assistants d’éducation (AED), dont le communiqué que vous mentionnez dénonce la situation contractuelle, c’est aussi le rôle des organisations syndicales de dire aux agents ce qui est. Nous savons qu’il s’agit là de contrats réglementés par des textes, et qui ne peuvent excéder six ans au maximum. Il ne s’agit pas d’un CDD pouvant déboucher sur un CDI, c’est très particulier. Mais la couleur est annoncée dès le départ ! Et la plupart vont au bout de leur formation, passent le concours, etc. Nous les accompagnons en ce sens.

Enfin, au sujet de la participation au mouvement de grève, cette dernière a été déclenchée quand le ministre a annoncé de grosses mesures de revalorisation, des primes d’équipement alternatif pour tous les personnels, des rattrapages de rémunération pour les débuts de carrière… Des moyens sont mis sur la table, sans compter les mesures catégorielles pour les directeurs d’école. Après, que l’on dise que ça ne va pas assez loin ou assez vite, nous pouvons l’entendre. Mais c’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous avions organisé juste avant les vacances un Grenelle local à Mayotte avec les députés, qui avait permis de faire des propositions pour aligner les droits à la retraite des instituteurs d’État recrutés à Mayotte sur les autres collègues, pour renforcer les mesures d’attractivité, pour développer la formation… Et tout le monde a désormais l’ambition de porter ces conclusions au niveau national.

Journée mondiale du cancer à Mayotte : l’importance de se faire dépister à temps

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Ce jeudi 4 février est dédié à la journée mondiale contre le cancer. L’occasion de démocratiser le discours autour de cette maladie. Le réseau de santé Rédéca Mayotte a choisi de mettre en avant le cancer du col de l’utérus car il est encore très meurtrier chez les femmes à Mayotte.

Il est silencieux et agit sournoisement dans l’ombre pendant des années avant de faire des ravages. Le papillomavirus est à l’origine du cancer du col de l’utérus. Il évolue lentement et peut générer un cancer au bout de 10 à 15 ans après son apparition. “Nous contractons le virus très souvent lors d’un rapport sexuel”, informe Fatima Kassim, assistante de gestion au centre de santé Rédéca. Selon cette dernière, le cancer du col de l’utérus est le deuxième cancer féminin le plus meurtrier à Mayotte. Pourtant, une femme peut survivre si elle est dépistée à temps. “Le premier frottis, c’est-à-dire le dépistage, doit se faire à 25 ans. Il faut ensuite en faire un deuxième un an plus tard, puis tous les trois ans jusqu’à 65 ans”, explique Fatima Kassim.

En réalité, toutes les femmes sont susceptibles d’attraper le papillomavirus, mais le dépistage est fortement recommandé à celles âgées entre 25 et 65 ans car il est gratuit pour cette tranche d’âge, que l’on soit affilié ou pas à la sécurité sociale. “Se faire dépister régulièrement c’est mettre les chances de son côté. Si nous détectons les cellules malades assez tôt, nous pouvons avoir un traitement moins lourd et nous avons plus de chances de guérir car le cancer est précoce”, prévient la professionnelle. Pour rappel, le papillomavirus peut également toucher les hommes qui ont des relations sexuelles avec des hommes.

 

Rédéca au coeur de la prévention

 

Le réseau de santé prend sa mission de prévention et de sensibilisation très à cœur. Il est possible d’effectuer des frottis au centre Rédéca situé à Mamoudzou, près de l’hôpital. Mais les professionnels sont conscients que toutes les femmes ne peuvent se déplacer jusqu’au chef-lieu. Alors ils vont vers elles. “Nous avons un camion qui se déplace dans chaque commune, chaque village, avec les médiatrices santé et les sages-femmes. Elles font de la sensibilisation mais également des dépistages sur place”, indique Fatima Kassim. Selon les endroits, les femmes sont plus ou moins nombreuses.

mayotte-depistage-cancer-col-uterus-1Les préjugés et les tabous sont encore tenaces puisqu’il s’agit d’un virus que l’on attrape lors d’un rapport sexuel, dans la grande majorité des cas. Peu de jeunes filles affluent, pourtant “elles peuvent faire un frottis même si elles sont mineures”, précise l’assistante de gestion au Rédéca. Mais puisqu’elles ne sont pas censées avoir des rapports sexuels avant le mariage, selon la tradition mahoraise, on ne les voit que très rarement au centre ou dans le camion. Et une autre catégorie de femmes manque aussi à l’appel. “Celles qui ont atteint la ménopause ne sont pas nombreuses parce qu’elles considèrent qu’elles ont déjà eu des enfants et qu’elles ne risquent rien”, constate Fatima Kassim. Une idée reçue, puisque même les femmes ayant eu des enfants peuvent être infectées par le papillomavirus.

Mais le vent tourne. De plus en plus de femmes prennent l’initiative de faire les frottis. Le réseau de santé recense en moyenne 5.000 dépistages chaque année. “Ce n’est pas assez par rapport à la population minime que nous visons. Nous souhaitons atteindre 20.000 femmes qui ont entre 25 et 65 ans. Nous sommes loin du compte, mais le nombre de dépistages est en augmentation”, relativise la professionnelle. Reste, aussi, à sensibiliser les hommes à la cause. Qui pourront en parler à leur entourage… et peut-être sauver leur femme, leur mère, ou leur soeur.

A Mayotte, les mammifères marins aussi ont besoin de distanciation physique

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Depuis ce 1er janvier 2021, tous les usagers de la mer ne pourront plus approcher les mammifères marins de Mayotte à moins de 100 mètres. Une nouvelle qui réjouit le Parc naturel marin mais qui inquiète les opérateurs nautiques.

Approcher les dauphins et les baleines, nager avec eux… des moments uniques qui ne sont désormais plus possible. L’arrêté ministériel du 1er juillet 2011, modifié en septembre 2020, impose une nouvelle restriction. À compter du 1er janvier 2021, la distanciation physique s’impose également auprès des mammifères marins. Cette nouvelle règle s’applique sur toutes les aires marines protégées de France, Mayotte comprise. 100 mètres, c’est la distance à ne pas dépasser. “Cette distance de 100 mètres n’a pas été choisie au hasard. Les experts en comportement des cétacés et les centaines d’études sur le sujet montrent que le well watching (l’observation des mammifères marins) a un impact sur ces espèces. Elles sont perturbées et cela joue forcément sur leur évolution en mer”, affirme Léa Ramoelintsalama, chargée de mission mobilisation citoyenne et appui aux acteurs au Parc naturel marin de Mayotte.

Et gare à celui ou celle qui enfreindra cette nouvelle règlementation. Le Parc naturel marin mettra à disposition deux agents assermentés qui pourront délivrer des amendes. Et la note risque d’être salée si l’on est pris en flagrant délit. “Une contravention de 4ème classe peut être appliquée, autrement dit, la contravention peut aller jusqu’à 750 euros”, prévient Léa Ramoelintsalama. De quoi dissuader les plus réfractaires.

 

Une nouvelle qui ne fait pas que des heureux

 

Si cette nouvelle réglementation réjouit les défenseurs des espèces marines, certains opérateurs nautiques ne voient pas cela d’un bon œil. À l’exemple de Yannick Stéphan, gérant de Mayotte Découverte. “Si l’arrêté est respecté à la lettre à Mayotte, il nous sera impossible de travailler. Autant fermer de suite. Notre fonds de commerce est basé sur l’observation des mammifères marins. On permet à notre clientèle de les approcher sans être dans un aquarium. Ils veulent jouer avec, les voir évoluer près des bateaux.” Le professionnel sait que l’observation en mer ne sera plus pareil, et cela risque fortement de faire baisser son activité.

Selon lui, cette décision prise à Paris doit être adaptée à Mayotte. Le tourisme de masse est un concept inexistant sur le territoire, les mammifères marins seraient donc plutôt bien préservés. “On est des professionnels formés. Il y a des milliers de dauphins à Mayotte et on ne les dérange pas, on ne les empêche pas de se reproduire. On ne peut pas comparer Mayotte aux autres territoires”, continue Yannick Stéphan. Le Parc naturel marin voit les choses différemment et estime que cette mesure permet de prévenir d’éventuels débordements dans le futur. “Le tourisme en mer commence à se développer sur l’île. Cette mesure vient à point nommé pour en-cadrer tout cela”, assure Léa Ramoelintsalama. La question qui se pose désormais est l’interprétation des comportements des baleines ou des dauphins qui s’approchent de leur propre chef des bateaux. Comment être certain que c’est le mammifère qui a fait le premier pas et non le contraire ? Réponse en mer.

Pour éviter le confinement total, le lycée de Sada coupe la poire en deux

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Alors que Bouéni, Dzaoudzi-Labattoir et Pamandzi vivent déjà sous cloche depuis une semaine, les établissements scolaires de l’île sont amenés à prendre des mesures pour éviter à leur tour le confinement total. À Sada, les élèves de Seconde générale ont désormais cours un jour sur deux. Une façon de limiter le brassage des 2.200 élèves du lycée. Et donc la transmission du virus. Reportage.

6h20. Le gros bus qui vient de larguer sa jeune cargaison masquée entame un demi-tour hasardeux. Pendant ce temps, les autres transports scolaires défilent, dans un ballet incessant et anarchique, sur ce terre-plein terreux qui fait office de dépose-minute devant le lycée de Sada. Chaque matin, jusqu’à la fermeture des grilles et le début des cours à 7h, c’est la même rengaine. Difficile de faire régner une quelconque harmonie au milieu de ce vacarme de coups de frein et de bavardages. “Nous l’appelons la cour des miracles… “miracles” parce qu’heureusement, nous n’avons jamais eu d’accident”, sourit le principal Jean-Pierre Redjekra, posté en maître d’orchestre en haut de ces marches que piétinent chaque jour quelque 2.000 élèves. Enfin, piétinaient.

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Pas de “miracle” attendu, en effet, dès qu’il s’agit de la crise sanitaire. Afin de limiter la propagation du Covid-19, le lycée de Sada est le premier sur Mayotte à “réduire la jauge d’accueil” pour reprendre les termes officiels. Comprendre : diminuer les effectifs pour repousser au maximum l’hypothèse d’une fermeture pure et dure, comme cela avait été le cas en mars 2020. Une éventualité qui avait été annoncée par le rectorat à l’occasion des nouvelles mesures de restrictions, et du confinement des communes de Bouéni, Dzaoudzi-Labattoir et Pamandzi, le 28 janvier dernier. “En lien avec l’ARS et la préfecture, nous pourrions être amenés à prendre des décisions, au cas par cas, impactant le fonctionnement des établissements”, précisait le communiqué.

 

Sada, Bamana, Majicavo et les autres

 

Avec Sada qui mène la danse depuis ce lundi, c’est désormais chose faite. “Nous avons commencé par cet établissement, et nous avons rajouté le lycée Bamana aujourd’hui (mardi) et le collège de Majicavo dès mercredi. Et nous avons d’autres cibles pour les prochains jours”, confirme le recteur Gilles Halbout. Le “cas par cas”, dépend de la typologie des contaminations, poursuit le représentant de l’Éducation nationale, et des propositions des principaux d’établissement, qui font ensuite l’objet d’une validation par l’institution. À Sada, comme d’ailleurs à Majicavo et Bamana, le choix s’est porté sur une alternance de présentiel et distanciel.

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Une semaine en deux semaines

 

Pour l’instant, cela ne concerne que les quatorze classes de Seconde, qui ont désormais cours un jour sur deux”, décrit Jean-Pierre Redjekra. Lundi, sept classes ont suivi leur emploi du temps normal, et les sept autres sont revenues au lycée ce mardi, donc. La semaine prochaine, rebelote, mais inversée. “Sur deux semaines, ils font une semaine complète.” Quid des jours passés à la maison ? “Le professeur vient quand même au lycée, il est dans sa salle de classe, et il donne les devoirs en ligne”, explique justement dans le combiné le directeur adjoint Akim Dallal à un parent inquiet, qui l’appelle à ce propos.

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Via la plateforme de l’Éducation nationale “Neo” – un ENT, “espace numérique de travail” dans le jargon – via Pronote ou encore par mail, les professeurs assurent la fameuse “continuité pédagogique”, qui a déjà fait taper beaucoup de caractères. Pour les élèves qui n’ont pas accès à Internet chez eux, reste le bon vieux papier… 80% des enseignants confirment y avoir encore recours, couplé pour 73% à du numérique, d’après un formulaire envoyé dare-dare par l’administration du lycée à l’annonce de cette nouvelle organisation des emplois du temps. “Nous avons mis ce questionnaire en place justement pour avoir des éléments concrets à répondre aux parents”, développe Akim Dallal.

 

Moitié moins de monde ce mardi

 

Heureusement, la plupart des élèves concernés ont accès à ces outils en ligne. “C’est pour cette raison que nous avons ciblé surtout les élèves de Seconde générale, car nous savons qu’ils viennent de familles plus favorisées, à l’inverse des Seconde pro”, fait aussi valoir le directeur adjoint. In fine, et en comptant les 477 élèves en stage actuellement, la décision permet de diminuer les effectifs du lycée de moitié. Difficile de vérifier le compte ce mardi matin à vue d’œil, surtout pour une personne extérieure, mais les élèves, eux, le ressentent bel et bien. « Ça se voit qu’il y a moins de monde, oui”, répond un groupe de jeunes filles qui patiente à l’entrée, avant le début des cours. Hier, l’une d’elle a dû rester chez elle au lieu de suivre ses cours de 7h à 16h.

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Problèmes de “corona” et peur des maths

 

Et ce vilain Covid, dans tout ça ? “Nous avons pris la décision car nous avions en moyenne un cas tous les deux jours, et nous avons encore trois cas confirmés”, évalue Jean-Pierre Redjekra. Mais c’est sans compter les nombreuses absences dont les parents taisent parfois les causes, “par honte de la maladie”, déplore le principal. “On nous a dit 17, mais on sait tous que c’est plus, à chaque fois on entend parler d’un nouveau”, chiffre une élève de Seconde générale. “Ce nouvel emploi du temps, ça nous plaît pas ! Il faut le confinement total, ça fait peur ce corona”, marmonne quant à lui Fadel, adossé à un mur deux mètres plus loin. Pas sûr que sa camarade Saima approuve, elle qui “a déjà du mal à suivre à l’école”. Hier, elle a passé une heure et demie chez elle à se triturer les méninges sur l’exercice de maths…


 

Une semaine pour vanter la future classe préparatoire du Lycée

 
Bonne nouvelle par temps de Covid ! Le lycée de Sada se tient prêt à accueillir une classe préparatoire aux grandes écoles. Après le lycée de Chirongui lundi, ce mardi, le principal de l’établissement de Sada avait donc rendez-vous à Dembéni pour présenter cette nouvelle filière. Avec la première formation du genre à Mayotte, qui a été lancée en 2020 au lycée Bamana, la classe prépa “ECG” pour Économie, Commerce et Gestion doit ouvrir ses portes à la rentrée 2021. 24 places seront disponibles pour la nouvelle promotion qui permettra aux élèves les plus méritants d’accéder aux grandes écoles de commerces, HEC, EDHEC, ESSEC, mais aussi à l’École nationale supérieure (ENS), aux Instituts d’études politiques (IEP), ou encore au CELSA, l’École des hautes études en sciences de l’information et la communication. Des locaux seront inaugurés cette année pour accueillir la vingtaine d’étudiants, qui auront accès à des ressources numériques dédiées et pourront être hébergés à l’internat d’excellence de Dembéni, ou en famille à Sada. En cas d’échec aux concours, deux conventions de partenariat avec le CUFR et le CRESS de Mayotte offrent aux malchanceux une possibilité de réorientation. Inscriptions via Parcoursup pour tous les lycéens du territoire français.

À 71 ans, le président du Département de Mayotte reçoit son vaccin sous les projecteurs

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Ce mardi 2 février, le président du conseil départemental, Soibahadine Ibrahim Ramadani, s’est rendu à la MJC de M’Gombani pour recevoir une première dose du vaccin. Un acte citoyen rendu public dans l’espoir que les personnes âgées suivent l’exemple du responsable de la collectivité. Le tout accompagné d’un discours bien ficelé par l’agence régionale de santé.

Carte Vitale et passeport dans les mains, le président du Département, Soibahadine Ibrahim Ramadani, s’apprête d’ici quelques minutes à recevoir sa première injection du vaccin contre le Covid-19. «Vous avez quand même votre entretien pré-vaccinal avec la directrice de l’ARS», lui murmure l’un de ses collaborateurs pour détendre l’atmosphère. Pas de longue file d’attente dans la salle d’accueil pour le chef de file de la collectivité, qui se retrouve nez à nez avec le médecin pour la consultation médicale. Une formalité pour le politicien, âgé de bientôt 72 ans. Pas le temps non plus de s’asseoir pour discuter avec deux habitants que l’infirmier, Said Hassane Abdillahi, l’appelle à se présenter derrière les paravents. «Il est en train d’essayer de ne pas y aller», sourit Dominique Voynet, la responsable de l’autorité sanitaire à Mayotte, avant de l’aider à remonter la manche de sa chemise. «C’est le moment fatidique», ajoute avec un certain entrain un proche conseiller.

L’ambiance bonne enfant ne cache pas pour autant le geste symbolique et le moment solennel de l’instant présent. Malgré le masque, l’émotion se dessine dans les yeux de l’ancien sénateur, un brin tremblant en raison du contexte. En deux temps, trois mouvements, la seringue fait l’aller-retour dans le bras gauche du président du conseil départemental, qui ne cache pas sa joie. «Mon ami Martial ne m’a pas menti, ça ne fait pas mal !», lâche-t-il avec une pointe d’humour au moment de se «rhabiller». Mais devant les caméras, le sérieux revient au galop. «J’ai senti à peine la piqûre», confie-t-il, dans l’optique de rassurer les victimes de la bélonéphobie – eh oui, cette peur de l’aiguille a un nom !

 

Un discours cousu sur-mesure

 

Avec en point d’orgue une sensibilisation auprès des acteurs prioritaires concernés par la campagne de vaccination qui s’articule depuis plus d’une semaine. À savoir l’ensemble des habitants de plus de 65 ans, avec ou sans comorbidités, mais aussi les personnes considérées «à haut risque» sans limite liée à l’âge, ceux aux contacts des publics fragiles et vulnérables, ou encore les professionnels de santé libéraux et de l’Éducation nationale de plus de 50 ans. L’occasion de réciter un discours cousu sur-mesure par l’agence régionale de santé et d’évoquer l’affaiblissement de son système de défense naturel, en raison d’un infarctus du myocarde en mars 2019 – le mois de son anniversaire ! – qui avait nécessité son évacuation sanitaire à La Réunion. «Je souffre d’une maladie chronique comme bon nombre de Mahorais, du fait du changement de notre mode de consommation», ajoute-t-il en bon diététicien, sous le regard bienveillant de Dominique Voynet. «Les Mahorais ont tendance à manger plus gras et plus sucré. Et de ce fait, cela favorise la montée en puissance de l’hypertension, du diabète, de l’obésité, de l’apnée du sommeil… Ce sont des éléments aggravants face à un virus agressif. Nous devons disposer d’un rempart supplémentaire que constitue ce vaccin.»

 

Une invitation à la vaccination

 

Mais c’est surtout sa casquette d’homme public qui le pousse à se frotter à l’étape tant redoutée de l’aiguille. «Mon quotidien consiste à recevoir, à accueillir, à discuter, à négocier avec chacune et chacun mais aussi avec des institutionnels, des collectivités, des entreprises, des associations. Je suis donc exposé aux relations humaines», résume-t-il. Avant de dresser un parallèle avec le quotidien de ses administrés. «La société mahoraise est une société de convivialité, prompte aux regroupements.» Des rassemblements de masse interdits jusqu’à nouvel ordre en raison de la propagation rapide du Covid-19 au cours des dernières semaines, qui sature les capacités hospitalières. «Bien que cette vaccination ne soit pas obligatoire mais fortement recommandée, je souhaite que tous les Mahorais puissent prendre part à cette initiative. Cela ne peut être qu’un élément de plus dans leur protection et celle de leurs proches.»

En tout cas, le message semble de mieux en mieux perçu au sein de la population, puisque de plus en plus de monde se présente à la MJC de M’Gombani pour recevoir le «précieux sésame». «Hier [lundi 1er février], nous avons reçu 136 personnes», annonce l’infirmier libéral sur la commune de Mamoudzou, Said Hassane Abdillahi, qui note une montée en puissance du dispositif comme en témoigne la «grosse» centaine d’injections quotidienne, après 2-3 premiers jours «un peu compliqués». Un rythme de croisière qui doit d’ailleurs s’intensifier dès cette semaine avec une ouverture de centres à Pamandzi et à Bouéni, deux des trois communes touchées par le confinement localisé.

 


 

L’ARS s’attaque aux fake news

 
Dans un communiqué, l’agence régionale de santé a tenu à répondre aux pseudo-informations qui circulent sur les réseaux sociaux et qui ont été relayées par certains médias. L’autorité sanitaire a rappelé que le super congélateur à moins 80 degrés avait été réceptionné le 25 janvier dernier, avec les premières doses de vaccins. «Avant de pouvoir y mettre les flacons, il a dû être installé, puis qualifié par un technicien expert», a-t-elle précisé pour expliquer que les premiers vaccins n’aient pas pu y être stockés. «Ce qui nous a obligés à les consommer dans les 5 jours après décongélation.» Mais depuis, le frigo fonctionne parfaitement et permet ainsi de stocker, avec 6 mois de conservation, les nouvelles livraisons de vaccins. Concernant les aiguilles fournies, l’agence régionale de santé a indiqué qu’elles sont «aux normes et adaptées aux seringues utilisées pour l’injection du vaccin», qui se fait par voie intramusculaire dans le muscle deltoïde.

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Fermetures des lieux de culte et marchés à Mayotte : les nouvelles mesures restrictives ne font pas l’unanimité

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Ce mardi, le conseil représentatif des musulmans de Mayotte (CREMM) a approuvé et surtout adopté les nouvelles mesures restrictives prises par la préfecture. Si le conseil cadial veille à l’application des fermetures des 330 lieux de culte, les commerçants font le forcing pour ouvrir par tous les moyens.

Le communiqué de la préfecture de Mayotte paru lundi après-midi réclamant la fermeture des lieux de culte et des marchés a fait bondir les vendeuses de fruits et légumes du marché de Mamoudzou. Une phrase en particulier : « Ces mesures sont applicables dès aujourd’hui, sur l’ensemble du territoire, et ce pour une durée de 15 jours, soit jusqu’au lundi 15 février… » « Les fruits et légumes ne sont pas des produits qu’on peut conserver« , s’emporte Amina devant son espace de vente. « En métropole ou ailleurs au moins, on leur laisse quelques jours le temps de s’organiser et d’écouler un maximum de produits. Ici, la préfecture nous dit, « vous vous débrouillez avec vos marchandises, mais vous fermez et maintenant !« , c’est incroyable ! »

La marchande vient de regagner sa place, quelques peu rassurée. Cinq minutes auparavant dans une réunion improvisée, on venait de lui annoncer que le marché de Mamoudzou devrait rester ouvert. La Chambre de commerce et d’industrie (CCI), responsable des lieux, a en effet sollicité une dérogation, comme la préfecture le lui permet « si les conditions de leur organisation ainsi que les contrôles mis en place permettent de garantir le respect des règles de distanciation et la prévention de regroupements de plus de six personnes« , dixit le communiqué.

 

Le marché de Mamoudzou épargné ?

 

C’est Madi Djoumoi, lui-même commerçant au marché de Mamoudzou, qui a apporté la bonne nouvelle. « Ici, nous avons largement les moyens de remplir les conditions imposées par la préfecture. Mais ça demandera la participation et la vigilance de nous tous« , prévient-il face aux commerçantes. L’éphémère porte-parole des commerçants du marché de Mamoudzou a précisément visé celles et ceux qui étendent leurs produits au-delà de leur espace de vente, sur l’allée dédiée à la circulation des clients, réduisant ainsi l’espace de circulation et obstruant au respect des règles de distanciation.

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Réunion d’urgence des commerçants de Mamoudzou, ce mardi après-midi au milieu du marché. Pour eux, le respect de la distanciation est jouable, par conséquent, le marché de Mamoudzou doit rester ouvert.

« Moi je vous surveillerai toutes ! La première qui ne respecte pas les conditions, je monte à la Chambre et je vais la dénoncer ! Il est hors de question qu’on m’empêche de travailler et que je paye pour les erreurs d’une autre« , menace haut et fort une autre marchande, chaleureusement ovationnée par ses pairs. Les entrées principales du marché de Mamoudzou étaient ainsi grandes ouvertes ce mardi, au lendemain du communiqué préfectoral, et devraient a priori le rester pour les jours à venir. Nul doute que la préfecture, par le biais de la Direction de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (DAAF), à qui il a été demandé d’adresser les dérogations, continuera d’être sollicitée pour permettre aux commerçants de continuer à exercer.

 

330 mosquées fermées du jour au lendemain

 

De dérogations, il n’en est aujourd’hui pas question pour les lieux de culte. Le conseil cadial a immédiatement fait adopter les nouvelles mesures restrictives aux 330 mosquées de l’île. Suspendues les écoles coraniques et les prières communes : la préfecture et le conseil cadial appliquent strictement les consignes de fermeture, au point même d’interdire l’appel à la prière par un muezzin. « C’est la position du conseil cadial, l’autorité religieuse. On se doit de la respecter« , affirme Anouoiri Chanfi, chef de service études et partenariat au conseil cadial.

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Le soleil se couche devant la grande mosquée de Chirongui, pourtant, pas de muezzin pour annoncer la prière et encore moins de responsable des lieux pour déverrouiller les portes. Le CREMM a adopté les nouvelles consignes préfectorales, prises en commun avec le Conseil cadial.

Un message reçu cinq sur cinq par le conseil représentatif des musulmans de Mayotte (CREMM). Le représentant du conseil cadial admet que la nouvelle n’a pas été bien accueilli partout et que les questions ont fusé de la part de certains responsables de mosquées. Mais il considère que tout peut se régler par l’échange et le dialogue. « Il y a des responsables de lieux de culte qui ne comprennent pas, et qui veulent avoir plus de précisions. Ils s’interrogent et s’inquiètent surtout, parce que tout le monde n’a pas la même lecture de l’islam. Le conseil cadial est là pour échanger avec eux et apporter des réponses à leurs interrogations. C’est ce que nous avons fait et c’est pourquoi, même s’il peut y avoir des divergences d’opinions, la grande majorité a suivi nos conseils et fait fermer les lieux de culte« , soutient Anouoir Chanfi.

Les nouvelles mesures mises en place par la préfecture de Mayotte et le conseil cadial pour lutter contre la propagation du virus font suite aux derniers chiffres inquiétants de l’évolution du virus, indiquant une augmentation du taux de positivité (de 14,7% à 16,9%) et du taux d’incidence (de 287,7 à 404 pour 100.000 habitants). Des mesures qui ne laissent présager rien de bon pour Mayotte et les Mahorais…

Claude Hartmann, DG d’EDM : vers une meilleure électrification de Mamoudzou… et de Mayotte ?

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La mairie de Mamoudzou et Electricité de Mayotte (EDM) se sont rendues ensemble à Kawéni ce lundi, afin de communiquer sur leur nouveau travail partenarial pour “le développement du territoire communal”. Claude Hartmann, directeur général d’EDM, revient sur les enjeux de cette opération, et, plus généralement, sur les stratégies du fournisseur d’électricité pour atteindre l’objectif d’autonomie énergétique de Mayotte d’ici 2030.

Flash Infos : Vous étiez ce lundi matin avec les services de la mairie de Mamoudzou pour une visite à Kawéni. Quel était l’objectif de cette opération ?

Claude Hartmann : C’était un choix des deux parties, la mairie de Mamoudzou et nous, pour illustrer une nouvelle manière de travailler. Tout cela avait bien sûr déjà été conclu en amont dans nos bureaux, mais nous souhaitions concrétiser la démarche aux yeux de tous. L’idée est simple : que l’opérateur EDM soit au service de la collectivité, à savoir ici la ville de Mamoudzou, en étant associé le plus en amont possible à tous les projets, de rénovation urbaine comme de développement. Avec un mot d’ordre : faire bien du premier coup ! Tout cela en se basant sur des plans, pour moderniser le réseau en même temps que la ville se modernise. Cela paraît basique dit comme ça… Et pourtant, ce n’est pas ce qui avait été privilégié jusqu’à présent. Ce matin, nous nous sommes donc rendus ensemble sur le terrain pour visualiser la zone, arpenter les lieux, dans la boue parfois, il faut le dire ! Mais avec les habitants, pour montrer que nous avons changé de braquet sur la manière de travailler, électricien et ville. Il s’agit qui plus est d’un projet phare, entre le lycée de Kawéni et la MJC, avec tout un tas de fonctionnalités, des salles de sport et des complexes dédiés à la scolarité mais aussi de l’habitat neuf, qui va venir supplanter de l’habitat existant. Bref, c’est une vraie restructuration de quartier que prévoit là la commune chef-lieu.

FI : Très concrètement, cela veut dire poser les câbles avant le béton, en somme ?

C. H. : C’est déjà une bonne solution, oui ! (rires) Concrètement, le réseau est imaginé, préparé, en même temps que l’on dessine les plans de l’urbanisme. Tout cela, pour amener la puissance électrique aux bons endroits et ne pas se laisser surprendre par les raccordements. Nous avons parfois tendance à mettre d’abord les consommateurs, et, ensuite, à tirer les rallonges, parfois jusqu’à un réseau éloigné, ce qui tisse aussi des toiles d’araignées inefficaces. Là, grâce à cette action en amont, nous allons poser les autoroutes de l’électricité souterraine, de sorte qu’aux endroits des futures constructions, il n’y ait plus qu’à faire les branchements.

FI : Tout cela a-t-il aussi pour but de sécuriser le réseau, en prévenant les raccordements sauvages ? Et aussi d’une manière plus générale à éviter les coupures ou désagréments pour le consommateur ?

C. H. : J’ai bien sûr cet aspect en tête. Ce matin, pour ne rien vous cacher, nous avons vu des endroits dans des zones plus informelles. Dans certaines, la commune ne peut pas laisser l’habitat se développer, la pente est raide, il s’agit de zones à risques, etc. Donc ce n’est pas l’objet de ce partenariat. En revanche, il y en a d’autres en terrain plat, où les voitures accèdent déjà tant bien que mal sur des semblants de route, où vous avez déjà des postes électriques… Là, l’urbanisme peut suivre en quelque sorte l’extension anarchique. Finalement, il devient possible de viabiliser a posteriori l’habitat, quand il est installé sur une zone non critique, parfois depuis dix ou quinze ans. Reste que les branchements sauvages sont une vraie préoccupation, car ils peuvent être dangereux et il faut effectivement remettre tout cela aux normes. Et c’est aussi le sens de notre action : quand la commune choisit de grignoter de l’informel pour en faire du formel, nous sommes prêts à l’accompagner dans ces choix.

Pour l’autre partie de la question, certes, un câble neuf vaut toujours mieux qu’un vieux câble. Mais à Mamoudzou, la qualité n’est pas mauvaise en termes de distribution. Les coupures qui surviennent sont plus liées à l’arrachement de gros câbles ou à des problèmes techniques.

FI : Cette nouvelle manière de travailler concerne-t-elle uniquement Mamoudzou ou les autres communes de l’île vont-elles aussi se mettre au diapason ?

C. H. : Historiquement, Mamoudzou est la seule commune de Mayotte qui est en lien direct avec l’opérateur. EDM assure la maîtrise d’ouvrage, de par la loi, sur le réseau d’extension et de raccordement, mais ce n’est pas le cas sur tout le périmètre de l’île, où le conseil départemental a aussi un rôle à jouer. Pour la leçon d’histoire, l’électrification dite rurale – une vieille dame, elle date des années 1950 – est toujours confiée à un syndicat d’électrification. Ici, c’est le Département. Normalement, à partir de plus de 2.000 habitants, les zones sont toutefois considérées comme urbaines… D’après la loi, l’intégralité de l’île devrait donc être en zone urbaine, et directement placée sous l’opérateur EDM. Je dirais que la loi s’applique à un rythme local… ce qui fait qu’aujourd’hui seule Mamoudzou est concernée. Mais je rêve d’avoir la même relation avec les 17 communes !

FI : À Mayotte, la croissance de consommation d’environ 5% par an, suit une démographie galopante… Et 5% c’est encore aujourd’hui la part, infime, des énergies non-fossiles utilisées dans le département. Une étude de l’Ademe rendue publique récemment analyse d’ailleurs plusieurs scénarios pour atteindre l’objectif d’autonomie énergétique d’ici 2030. Lequel favorisez-vous ?

C. H. : Le solaire, c’est l’atout principal de Mayotte. Devant le vent, qui n’est pas assez régulier, ou la biomasse, car il faudrait davantage de capacité de ramassage des déchets et d’usines. Malheureusement, la production photovoltaïque reste assez faible : nous atteignons 5% en énergie, 15% en puissance, mais je pense que nous pouvons tripler ces ordres de grandeur en quelques années. Je ne l’invente pas, tout cela est le fruit des travaux entamés avec les partenaires, l’Ademe, les associations, les industriels, la sphère politique… Et c’est donc le chemin que nous empruntons pour les quatre années à venir, selon la nouvelle programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). Deux difficultés restent à surmonter : le foncier, qui, comme chacun sait, n’est pas infini ici. Et aussi l’intermittence, car il faut prévoir des solutions en cas de gros orages, ou même la nuit. Pour l’instant, nous nous orientons vers une logique de batterie, pour restituer l’énergie au client à la nuit tombée.

FI : De quoi atteindre l’objectif fixé en 2030 ?

C. H. : Nous ne pouvons pas imaginer un réseau qui ne marche qu’avec le solaire, pour des questions un peu techniques. Pour stabiliser le réseau insulaire, nous allons conserver des machines tournantes. Mais nous allons quand même pouvoir monter à un niveau important d’énergies renouvelables, à 40-50%. Faisons déjà cela ! Pour le reste, j’ai proposé dans le cadre du PPE, et je pense que cela sera accepté, de ne plus utiliser de gasoil sur la centrale technique mais du bioliquide. Certes, il ne sera pas local – il nous vient du nord de la France – mais il est bio, et répond en partie à l’équation. Une expérimentation est prévue en avril sur la centrale des Badamiers. Si elle est concluante, nous ferons passer les deux centrales de Longoni et des Badamiers sur cette huile de colza bio. Je pense que c’est de cette façon que nous pourrons atteindre l’objectif de 100% d’énergies renouvelables.

FBI Mayotte, épisode 3, en attendant la suite…

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Les aventures de l’agent 2K et de son ennemi juré Moilim reprennent de plus bel dans le troisième épisode de la série FBI Mayotte, diffusé le week-end dernier. Les réalisateurs, Naftal Dylan et Mass Youssoufa, ont vu les choses en grand avec un épisode de 20 minutes. Ils veulent désormais passer à l’étape supérieure et réaliser toute une saison, à condition que les financeurs soient au rendez-vous.

L’épisode 2 de FBI Mayotte avait tenu les fans de la série en haleine. L’agent 2K allait-il pouvoir éviter la bombe installée par son ennemi Moilim ? Les téléspectateurs ont la réponse dans le troisième épisode de la série. Comme à leur habitude, les réalisateurs Naftal Dylan et Mass Youssoufa, mettent leurs personnages dans tous les états. Entre peur, suspense, surprise, rire, action, on n’a pas le temps de s’ennuyer durant les 20 minutes qui composent l’épisode. 20 minutes, c’est le double de l’épisode précédent.

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Après un tel succès, les réalisateurs ne pouvaient faire autrement. “On a reçu beaucoup d’encouragement, alors on voulait mettre la barre encore plus haut et faire un épisode plus long afin de montrer qu’à Mayotte aussi on a du talent et les compétences pour faire une série de qualité 100% made in Mayotte”, sourit Naftal Dylan. Mission réussie pour le jeune homme et son associé. FBI Mayotte n’a rien à envier aux séries policières diffusées sur les chaînes nationales. La qualité des images est indéniable. Le scénario, qui mêle le suspense, les scènes d’action, et l’humour, capte l’attention du spectateur de la première à la dernière minute.

 

Financer un projet d’une plus grande envergure

 

Naftal Dylan et Mass Youssoufa sont deux passionnés qui pourraient travailler sans compter les heures. Mais pour continuer à réaliser et produire des épisodes de qualité, il leur faut plus de moyens. “Je ne peux pas me concentrer sur un projet de cet ampleur sans financement. L’idéal est d’avoir un budget pour embaucher plus de techniciens et un scripte, pour nous soulager de certaines tâches. Ainsi, mon associé et moi pourrions vraiment nous concentrer sur la réalisation et le scénario”, souligne Naftal Dylan. Pour l’heure, tous ceux qui ont participé à la série, l’ont fait bénévolement. Cela implique forcément quelques difficultés de planning. “Tout le monde travaille à côté puisqu’ils ne sont pas payés. Alors on a dû tourner sur les temps libres de chacun. Coordonner les plannings était notre plus grosse difficulté”, affirme le réalisateur. Avec un financement, ce dernier pourra payer toute l’équipe de tournage et la mobiliser plus longtemps.

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Les deux réalisateurs n’hésitent pas à toquer aux portes de ceux qui peuvent les aider à l’exemple du conseil départemental, de la direction des affaires culturelles, ou encore des chaînes de télévision. Ils ont reçu beaucoup de promesses mais “tant que ce n’est pas signé, on ne peut être sûr de rien”, se méfie Naftal Dylan. L’objectif est de réussir à financer une série de 10 épisodes de 30 minutes à chaque fois. Des fans ont proposé de mettre la main à la poche, mais le jeune homme refuse l’idée. “Ce n’est pas à eux de payer pour cela.

Selon lui, les institutions territoriales ont tout intérêt à supporter son idée car à travers FBI Mayotte, il redore à sa façon l’image de l’île et en fait sa promotion. “On va mettre en avant notre culture, le tourisme, la gastronomie, etc. De plus, si ça aboutit, je vais créer de l’emploi pendant 6 à 7 mois, donc tout le monde sera gagnant.” Une chose est sûre, la série a déjà trouvé son public. En l’espace de 3 jours, le troisième épisode a comptabilisé près de 17.000 vues, seulement sur Instagram. Nul doute qu’elle ratissera large si elle est diffusée un jour à la télévision.

Violences faites aux femmes : comment s’en sortir ?

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La psychologue mahoraise Rozette Yssouf a publié au mois de décembre dernier aux éditions Edilivre un ouvrage sur la problématique des violences conjugales. Intitulé « Femmes victimes de violences conjugales : quel cadre thérapeutique pour favoriser le processus de résilience ? », ce recueil s’interroge entre autres sur les différents moyens que possèdent les femmes pour sortir du cercle vicieux de cette violence et reconstruire leur vie.

Comment se servir d’un vécu difficile pour en faire une force ? C’est la question que se pose la psychologue Rozette Yssouf dans son ouvrage «Femmes victimes de violences conjugales : quel cadre thérapeutique pour favoriser le processus de résilience». En effet la résilience, terme propre à la psychologie, consiste justement à sublimer les traumatismes du passé pour reconstruire sa vie sur de nouvelles bases, plus saines. Le recueil est en réalité issu du mémoire de M2 en psychologie que Rozette Yssouf a soutenu à La Réunion en 2011. Pour ses recherches, elle s’est basée sur les témoignages de femmes victimes de violences conjugales venues trouver refuge au sein de l’association «Femmes Solid’Air», dont les principales missions sont l’accueil, l’écoute et l’accompagnement des femmes victimes de ces violences. Ces dernières peuvent être de type physique, psychologique, verbal ou économique.

«Certaines femmes que j’ai interrogées ont perdu jusqu’à 60 ans de leur vie aux côtés d’un mari qui les maltraitait», précise Rozette Yssouf. Le but principal de l’association «Femmes Solid’Air» est de reconstruire les liens sociaux et familiaux des victimes afin qu’elles puissent reprendre le cours normal de leur vie. En effet, la violence conjugale va presque toujours de pair avec un isolement social orchestré par l’époux. «Il est très difficile pour une femme de se sortir de ce genre de situation car la plupart d’entre elles croient que leur mari les aime malgré leur comportement violent», explique la psychologue. «Pour qu’elles réalisent qu’il ne s’agit pas d’amour, il leur faut un déclic qui peut parfois venir d’une personne extérieure au couple ou parfois d’une peur que le mari ne s’en prenne aux enfants», indique-t-elle.

 

Se défaire du «mythe du prince charmant»

 

S’il peut paraître insensé au commun des mortels que certaines femmes restent aux côtés de maris violents pendant parfois plusieurs dizaines d’années, Rozette Yssouf éclaire sur ce comportement au sein de son ouvrage. «Les femmes victimes de violences conjugales sont souvent en situation de carence affective ou en proie à un complexe abandonnique. Leur point commun, c’est la mauvaise estime qu’elles ont d’elles-mêmes», affirme la psychologue qui explique le mécanisme de domination mis en place par les maris violents. «Au départ, ils se comportent comme des princes charmants, séduisent ces femmes et lorsque les premières violences surviennent, ils expliquent qu’il ne s’agit que «d’un accident». Les femmes les croient et le cercle vicieux «lune de miel/violences» recommence éternellement», affirme Rozette Yssouf qui recommande aux femmes de «partir dès les premiers signes de violences car elles ne s’arrêteront jamais».

Si la chercheuse reconnaît que certains hommes sont également victimes de violences conjugales, elle assure néanmoins que ce type de situation concerne en très grande majorité des femmes. Pourquoi ? Car elles seraient victimes du «mythe du prince charmant» que la société leur a mis dans la tête dès leur plus tendre enfance. Les femmes tombent en effet plus facilement amoureuses que les hommes, car on leur a affirmé depuis toujours que c’était la clé d’une vie de femme réussie. Résultat des courses, elles se laissent beaucoup plus facilement dominer et agresser en imaginant qu’elles font cela «par amour».

 

Quid de Mayotte ?

 

Le livre de Rozette Yssouf traite des violences conjugales en général, mais que pense-t-elle de ce qui se passe sur son île d’origine ? «La situation inégalitaire entre les hommes et les femmes est déjà très présente en métropole et à La Réunion, mais à Mayotte elle est encore plus flagrante», précise la chercheuse qui explique que sur l’île aux parfums, les hommes n’ont que très peu de respect pour les femmes et «se croient tout permis». La faute à une éducation très patriarcale menée par les pères mais également par les mères qui ont tendance à protéger leurs époux… «Les femmes victimes de violences conjugales sont très peu soutenues à Mayotte car la société est dans le déni de ce qui se passe», déplore Rozette Yssouf qui compte continuer son combat en sortant d’autres bouquins sur le thème des inégalités entre les hommes et les femmes dans la société.

Originaire de Mayotte, la Docteure en psychologie clinique, Rozette Yssouf, vit et travaille actuellement en Bretagne.

Au centre de rétention administrative, une gestion de crise, deux discours

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Depuis le déploiement des tests antigéniques, les reconduites à la frontière ont repris à un rythme effréné. Alors que les cas positifs sont relâchés dans la nature, plusieurs voix s’élèvent sur la gestion du centre de rétention administrative où des risques existent toujours bel et bien. De son côté, la préfecture et la direction territoriale de la police aux frontières assurent que toutes les mesures sanitaires sont appliquées à la lettre.

Samedi. 10h30. Face aux rumeurs concernant le non-respect des conditions sanitaires au centre de rétention administrative, l’autorité préfectorale déploie le tapis rouge en un temps record pour proposer une visite guidée du bâtiment mis en service en 2016. Quelques minutes plus tard, un groupe en instance d’éloignement monte dans le bus pour être amené vers le bateau qui doit les « rapatrier » à Anjouan. « Nous leur donnons tous un masque neuf en tissu au moment de leur départ », glisse le commandant Dominique Bezzina, le chef du centre, au moment de continuer son chemin vers l’une des six zones, choisie au hasard. En théorie, chaque « retenu » reçoit un masque chirurgical lors de son arrivée, s’il n’y a pas de rupture de stock. Car la réalité est tout autre sur le terrain… Et puis, de toute façon, « ils ne le mettent pas, pourtant Dieu sait qu’on leur dit ! », insiste celui qui est à la tête du CRA depuis 18 mois.

Depuis la reprise des reconduites à la frontière le 6 août dernier, le flux d’étrangers en situation irrégulière au sein de la structure explose littéralement, dont la conséquence directe est l’ouverture de cinq locaux de rétention administrative pour éviter la surpopulation de l’antenne principale qui a une capacité d’accueil de 136 individus. « [Ils] ont été un peu plus utilisés entre septembre et mi-décembre », avoue Nathalie Gimonet, la sous-préfète en charge de la lutte contre l’immigration clandestine.

 

Les cas positifs renvoyés dans la nature

 

Or, en période de crise sanitaire, le nombre vertigineux d’interpellations interroge. Comment expliquer un tel rouleau compresseur ? L’appât du chiffre selon Aldric Jamey, secrétaire départemental d’Alternative Police. « Tout le monde est débordé, c’est vraiment le gros bazar ! Les collègues tournent comme des avions de chasse pour atteindre l’objectif de plus de 30.000 expulsions en 2021. » Dans ces conditions, comment s’assurer que les va-et-vient ne multiplient pas la propagation du virus ? « Avec les tests antigéniques [déployés le 15 décembre], il n’y a plus de brassages entre les potentiels positifs et négatifs. Avec les PCR, nous n’avions pas le choix car il fallait attendre 24 heures pour avoir les résultats », justifie Nathalie Gimonet, qui avance un taux de positivité de l’ordre de 5-6% depuis le début du mois de janvier. Sauf que sa fiabilité laisse à désirer et que la contamination a pu se faire quelques heures plus tôt lors de la traversée en kwassa-kwassa… Et donc passer sous le radar !

Pour les cas détectés, l’heure est à l’attente dans l’une des deux salles de mise à l’écart prévues à cet effet, avant le transfert au centre d’isolement de Mlézi Maoré situé à Cavani, pour empêcher toute contamination massive. « Là bas, ils retrouvent le droit commun et sont traités comme tout patient. Nous leur conseillons de respecter la septaine. Si des personnes partent très rapidement, d’autres y restent deux ou trois jours », ajoute-t-elle. Avant la fin de leur rétention, l’unité médicale du CRA, issue du centre hospitalier, les sensibilise à la maladie. « Nous n’avons pas de moyens de contrainte », regrette le commandant Dominique Bezzina. Le risque de transmission auprès de la population n’est donc pas que racontars !

 

Pas d’alerte sur le plan sanitaire ?

 

Pour les autres, direction l’une des ailes (hommes, femmes ou familles) de rétention. « Le CRA est devenu une plateforme à Covid », tance l’une des juristes qui souhaite garder l’anonymat. « Les mesures ne sont pas respectées, ça nous met en péril, tout comme les ESI (étrangers en situation irrégulière ndlr) et les personnels administratifs. » Conséquence : l’accueil dans leurs bureaux est suspendu jusqu’à nouvel ordre. Pourtant, les responsables vantent le ménage des pièces trois fois par jour ainsi que la désinfection systématique après chaque « extraction ». « Pour limiter la transmission, nous distribuons les repas dans les zones », concède le chef du centre. Au lieu de la cantine donc. Soit une précaution supplémentaire, alors que le public est, dès lors, censé être négatif… « J’ai appelé les deux associations avec qui nous travaillons (Mlézi Maoré et Solidarité Mayotte). Aucune des deux directions ne m’a alertée sur le plan sanitaire », s’étonne Nathalie Gimonet. Difficile dans cette situation de démêler le vrai du faux…

Une chose est sûre, le rythme effroyable des reconduites à la frontière pèse sur le moral des effectifs, qui tournent par brigade de 30 agents. « Ce n’est pas possible à gérer. Ils sont usés physiquement et mentalement. Si rien ne change, il va y avoir un gros pétage de câble. Certains partent en dépression, d’autres sont contaminés [cinq nouveaux cas ont été confirmés vendredi dernier, ndlr] », assure Aldric Jamey. « Nous préparons une intervention syndicale au niveau du bureau national pour que la direction centrale de la PAF soit mise en au courant et fasse le nécessaire. Il faut fermer les LRA et faire tourner le CRA dans des jauges acceptables. » De son côté, le commandant Dominique Bezzina rappelle que les gestes barrières sont respectés à la lettre et que le contact tracing est appliqué comme dans n’importe quel milieu professionnel. Un arrêté en date du 25 janvier prévoit également que les policiers soient exemptés de septaine à leur arrivée sur le territoire. « Quand nous sommes cas contact et que nous ne présentons pas de symptômes, nous devons continuer à travailler », ajoute le secrétaire départemental, même si cette directive ne semble pas officielle.

En soi, le centre de rétention administrative fait, comme à son habitude, énormément jaser. Si certains se réjouissent d’une reprise accrue des reconduites, après une année 2020 en demi-teinte, d’autres voix s’élèvent contre le traitement sanitaire réservé aux personnels et aux personnes en situation irrégulière. Et l’arrêté pris ce samedi 29 janvier par le gouverneur de l’île d’Anjouan, stipulant que « tout mouvement de bateau de transport de passagers en provenance de Mayotte est suspensdu jusqu’à nouvel ordre », ne risque pas d’arranger les affaires des uns et des autres.

Couvre-feu, J+8 : au rond-point SFR, les nuits s’allongent pour la brigade de la police municipale

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Alors que trois communes, Bouéni, Dzaoudzi-Labattoir et Pamandzi, viennent d’être reconfinées à cause de la hausse inquiétante des cas de Covid-19 dans leur population, le reste du département vit toujours sous la règle du couvre-feu, instaurée par la préfecture le 21 janvier. Une semaine après la mise en place de cette nouvelle mesure, le message semble être passé. Reportage avec la police municipale de Mamoudzou.

19h53, flexion de genou numéro 1. Accroché d’une main au panneau “Cédez le passage”, l’agent de police municipale qui attend les voitures en provenance de Mamoudzou centre fait le flamand rose. De quoi reposer son pied droit. Puis le gauche. Bientôt deux heures que le couperet est tombé, et aucune lueur de phare ne traverse en cet instant l’obscurité de cette portion de route.

Cela fait déjà une semaine, et l’instauration du couvre-feu le 21 janvier, qu’Anfane M’Godo, le directeur de la prévention et de la sécurité urbaine par intérim de la police municipale de Mamoudzou, et sa brigade de nuit surveillent le rond-point SFR, en lien avec les équipes de la police nationale. “À priori, nous savons qu’ils sont postés au rond-point de la barge, donc les automobilistes qui arrivent de ce côté ont déjà été contrôlés”, explique le chef pour justifier la répartition de ses gars, en bas de la côte Sogea. Une coordination rendue possible par le pacte de sécurité signé en octobre 2020 entre la mairie et la préfecture, précise quant à lui Malidi Mlimi Saïd, l’élu chargé de la sécurité à la commune chef-lieu, venu faire son troisième check-up du dispositif.

 

37 agents à faire tourner pendant 24h

 

Campés devant la boutique SFR, ce sont donc six à sept agents de la police municipale qui sont mobilisés sur ce poste fixe, de 18h à 2h du matin, avant d’être relayés par la police nationale pour la fin du couvre-feu. Une nouvelle note de service est toutefois venue réajuster le dispositif mercredi soir. À compter de ce jeudi, la bande doit garder les yeux ouverts jusqu’à 4h du matin, afin de “dégager les équipes qui devaient nous remplacer pour leur permettre de faire des rondes dans les villages”, poursuit Anfane M’Godo. Roulement et temps de travail obligent, le chef de la police envisage donc de réduire sa patrouille nocturne à quatre hommes, pour ne pas se retrouver en sous-effectifs pendant le reste de la journée. Entre les formations des uns et les congés des autres, difficile d’avoir la totalité de ses 37 agents sur le pont matin, midi, soir et nuit…Surtout qu’au rond-point, la consigne du couvre-feu a plutôt bien imprégné les esprits.

 

 

350 contraventions

 

Mais il n’en est pas forcément de même dans les hauteurs reculées de Kawéni. “Là-bas, il faut sans doute retravailler un peu le dispositif, car il y a encore des jeunes qui ne respectent pas la consigne”, fait valoir Malidi Mlimi Saïd. Comme pour lui donner raison, trois ou quatre adolescents un brin oisifs balancent leurs guiboles sur un muret à une dizaine de mètres de là. Mise à part cette petite troupe, ceux qui font vrombir leurs moteurs devant les agents de police semblent avoir une bonne raison d’être là, pour la plupart. “Au tout début, nous avons eu quelques contraventions, parfois jusqu’à une dizaine par nuit”, retrace Anfane M’Godo. Désormais, entre la valse des camions Colas et SMTPC, les pompiers et les livreurs en scooter, rares sont les badauds qui s’aventurent dans la nuit sans leur précieuse attestation. Les 40 fonctionnaires de police mobilisés pour faire appliquer la nouvelle restriction – et au moins autant chez les gendarmes – y sont sans doute un peu pour quelque chose. Bilan des courses, à J+7 : plus de 4.000 véhicules sont passés sous la lampe-torche, pour un résultat de 350 contraventions. Soit, à 135 euros l’amende, un joli pactole de 47.250 euros, qui devrait a priori être rétrocédé à la collectivité et aux communes.

 

Perdus dans les attestations

 

Mais la jauge baisse. Ce jeudi soir au rond-point SFR, les habitués défilent, prévoyants pour la plupart. Comme cet homme qui colle automatiquement sa pochette plastifiée toute préparée à la vitre, l’autre main sur le volant de sa petite Clio, presque sans un regard. Ou cette équipe de boulangers, qui passe visiblement tous les soirs. “Eh, vous nous faites du bon pain !”, hèle l’un des fonctionnaires de Mamoudzou, sans prendre la peine de passer la tête par la vitre baissée. Un ou deux chanceux parviennent quant à eux à passer entre les mailles du filet. “Ça c’est l’attestation du confinement, là on vous contrôle pour le couvre-feu…”, tente d’expliquer le policier, pédagogue. L’histoire ne dit pas si le document présenté par le fautif venait de Bouéni, aujourd’hui reconfinée, ou du premier confinement de 2020… Outre ces quelques surprises, le temps passe lentement pour la patrouille. “Avec ce travail de nuit, ma femme me dit qu’on ne se voit plus !”, soupire l’un. “C’est vrai que c’est long. Mais bon, il faut qu’on soit là”, renchérit l’autre. Bon élève.

“Si l’État faisait son travail à Mayotte, les gens n’auraient pas envie de se faire justice eux-mêmes”

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Sentiment d’abandon, perte de confiance, envie de se faire justice soi-même… Les Mahorais arrivent à point de non-retour. La violence croissante étouffe l’île et aucune solution apportée par l’État ne semble efficace à long terme. Et si le problème était plus profond ? Les délits et crimes dont le peuple mahorais est témoin actuellement sont les fruits d’années de négligence de la part des différentes autorités présentes sur l’île. Aujourd’hui, la population n’a plus confiance dans le système judiciaire français, qui ne semble plus adapté à la situation chaotique de Mayotte.

Justice à deux vitesses”, “On n’a plus confiance en la justice”, “La justice encourage les délinquants”… Ce florilège de commentaires, du genre qui tourne en boucle sur les réseaux sociaux à chaque épisode de violences, reflète plutôt bien l’état de l’opinion publique mahoraise. Une opinion teintée de ressentiment depuis ces dernières années. Les Mahorais, pourtant si attachés à la France, grincent des dents dès qu’il s’agit de sa justice, jugée trop peu efficace face à la situation ingérable que traverse l’île. Tant et si bien que beaucoup appellent désormais au boycott du droit commun français… voire à la vengeance. Crue, s’il-vous-plaît. Un sentiment justifié ? Affirmatif, répondent sans détour un bon nombre d’observateurs de la société mahoraise. À l’exemple de Said Ali Mondroha, chargé d’études et de recherches au sein du conseil cadial. “Lorsque la justice attrape un délinquant, au lieu de prendre les choses en mains rapidement et de donner des peines exemplaires, elle prend tout son temps et est trop laxiste. Si l’État faisait son travail, les gens n’auraient pas envie de se faire justice eux-mêmes.” Les Mahorais ont choisi d’être libres en décidant de rester français, rappelle-t-il. Ironie du sort, ils ne sont plus libres aujourd’hui de vaquer à leurs occupations, sans craindre de se faire arracher leur sac, sans se faire caillasser, ou pire… Le week-end de violences en Petite-Terre la semaine dernière, où trois personnes ont perdu la vie, en a fait une cruelle piqûre de rappel. Inédit, même à Mayotte.

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L’occasion de jeter un petit coup d’œil dans le rétro. Car, nous assure-t-on, à une époque pas si lointaine, l’île aux parfums passait même pour un territoire calme et paisible ! Vraiment ? “Tout cela n’a pas été vécu par le passé. Le peuple mahorais était très harmonieux. Nous sommes un peuple qui n’a pas beaucoup souffert, contrairement aux autres pays d’Afrique par exemple”, rembobine Salim Mouhoutar, écrivain mahorais qui a traité la question à plusieurs reprises.

 

Les origines du mal

 

Pour comprendre le phénomène, il faut un peu remonter le temps. Au moins jusqu’à la fin des années 1990, début des années 2000. “À partir de ces années, des parents ont été expulsés et des mineurs ont été laissés sur le territoire, seuls. Ils n’ont pas été pris en charge assez tôt. Il aurait fallu les encadrer dans des structures d’accueil ou les envoyer avec leurs parents. Au fil du temps, ces mineurs du début des années 2000 se sont constitués en bande organisée, vivant de violence, de racket, de mendicité. Nous avons fermé les yeux. Donc nous récoltons notre négligence d’il y a 15-20 ans”, analyse Elad Chakrina, avocat à la Cour. Ces délinquants qui n’étaient que des enfants ont appris à vivre avec leurs propres réglementations, leurs codes, sans aucune autorité pour les encadrer. Parents absents, structures institutionnelles qui ne prennent pas leurs responsabilités, autorités religieuses non compétentes… Un cocktail explosif, qui a généré un sentiment de toute puissance. La bombe à retardement aura fini par éclater en 2011. “Lorsque nous avons eu la grève de 2011, il y a eu des barrages érigés un peu partout. Cela a été l’occasion pour ces mineurs qui n’étaient pas regardés de s’en donner à cœur joie pour racketter. Nous n’avons jamais fait le bilan des casses qu’il y a eu, et les personnes qui ont commis ces actes n’ont jamais été sanctionnées”, se souvient Elad Chakrina. Ces jeunes délinquants se sont par la suite adonnés à tous types de violences, terrorisant peu à peu les habitants de l’île. Depuis, Mayotte doit jongler entre des périodes d’accalmie et d’autres, où délinquance et criminalité repartent en flèche.

 

Système judiciaire français inadapté à Mayotte

 

Depuis le début des années 2000, les mineurs isolés se sont accrus de manière considérable. Officiellement, on en recense 3.000. Un chiffre bien en deçà de la réalité, selon l’avocat. Et la croissance démographique n’arrange pas les choses. Le système serait dépassé par l’ampleur de la situation. Les moyens humains au tribunal et au sein des forces de l’ordre ne suffisent plus pour traiter les dossiers et encadrer la société. “À la base, il s’agissait d’effectifs pour gérer un territoire d’environ 200.000 habitants mais pas de 400 à 500.000 habitants. Ce n’est pas que le système judiciaire ne fonctionne pas, mais le nombre croissant d’actes délictuels commis sur le territoire rend plus difficile leur traitement chaque jour qui passe. Il faudrait davantage de magistrats et de forces de l’ordre pour un territoire réellement de 400.000 habitants”, fait valoir Elad Chakrina.

 

Du point de vue cadial, les services de l’État n’ont pas su relever le défi de la sécurité. “L’État n’apporte pas la paix sur cette île. Il est trop laxiste et c’est ce qui nous embête. Il doit faire son travail et nous (le conseil cadial) nous faisons le nôtre : conseiller”, abonde Said Ali Mondroha. Même lorsque les juges prononcent des peines de prison, elles ne semblent pas assez répressives. C’est un fait, la case prison ne fait plus peur aux jeunes délinquants qui sévissent à Mayotte. D’ailleurs, les juristes notent au contraire une augmentation des récidives. “Il semblerait que les conditions d’emprisonnement sur un territoire français, ne sont pas assez dissuasives par rapport au mode de vie de ces délinquants quand ils sont libres. Le centre pénitentiaire de Majicavo propose davantage d’insertion que lorsqu’ils sont à l’extérieur, livrés à eux-mêmes. Ils mangent à leur faim, ils sont soignés, ils ont une possibilité de pouvoir travailler et s’instruire” décrit Elad Chakrina. Et lorsque ces prisonniers sont libérés, ils retrouvent leurs gangs et s’adonnent une nouvelle fois à leurs activités.

 

Système judiciaire traditionnel mahorais désuet

 

Le droit commun français arrivé à Mayotte en 2007 n’est pas efficace. Soit. Le problème ? La justice islamique ou traditionnelle ne l’est pas non plus. La société mahoraise s’articule autour de valeurs que sont la communauté et la spiritualité. Elle est d’ailleurs fortement influencée par l’Islam. Un Islam tolérant qui n’applique pas la charia. Et dont le principal objectif est de maintenir la paix sociale. Cette dernière étant ébranlée, la société est désordonnée et la population, autrefois paisible, veut créer ses propres règles au détriment de ce que préconise l’Islam. « Aucune violence n’est autorisée dans aucune religion, encore moins dans l’Islam. Il est interdit de se faire justice soi-même. Il faut plutôt aller porter plainte auprès des autorités compétentes. Se venger n’est pas digne d’un musulman”, souligne le conseiller cadial. Une interdiction difficile à entendre pour les Mahorais qui pointent du doigt l’inaction de l’État et la lenteur des procédures judiciaires sur le territoire. Mais Said Ali Mondroha reconnaît que lorsque ces mêmes autorités “ne prennent pas en compte la douleur du plaignant”, ce dernier perd logiquement toute confiance en la justice. La légitime défense est cependant autorisée dans la religion musulmane. “Il faut que la personne attaquée se défende au moment où elle est attaquée. Et si elle ne le fait pas, elle aura des péchés”, rappelle le Said Ali Mondroha.

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Quant aux procédures infra-judiciaires mahoraises, elles sont aujourd’hui dérisoires au vu de la situation qui s’aggrave chaque jour. “Souvent dans les conflits, on fait référence à Dieu pour qu’il statue, pour qu’il prononce une peine. On fait par exemple le “Badri” (prière)”, explique Salim Mouhoutar. Il y a ensuite le “Soulouhou” qui est la réconciliation. “C’est une procédure qui va inciter le plaignant et le coupable à faire la paix. C’est ce qu’utilisent essentiellement les Cadis.” Puis vient le “Maou”, l’amende civile. “On ne donne pas d’argent. On fait plutôt une grande fête de village, on paye à manger et à boire à tout le monde pour se faire pardonner auprès de la communauté” continue Salim Mouhoutar. Un fauteur peut également demander pardon lorsqu’il est en conflit avec un aîné, ou une personne hiérarchiquement supérieure à lui. Enfin, le dernier recours est le bannissement, qui ne se pratique plus de nos jours. Toutes ces mesures étaient efficaces lorsque l’île n’était pas sujette aux violences inouïes qu’elle connaît aujourd’hui. Désormais, les victimes de violences passent à l’acte et font leur propre justice.

 

Comment réussir à sortir de cette impasse ?

 

Même si la population mahoraise ne voit pas le bout du tunnel, Salim Mouhoutar est persuadé qu’il ne s’agit que d’une mauvaise passe. “Tout ce que l’on vit, La Réunion l’a connu. Nous sommes en phase de transition entre une société calme et une société qui va bouger. Et nous avons du mal à trouver nos repères pour le moment, mais tout cela va passer.” Pour ce faire, des solutions existent. La première serait de démanteler efficacement les réseaux de gangs. “Il faut prendre les têtes de ces groupes et les enfermer. La répression face aux meneurs doit être forte et ne doit pas donner le sentiment d’impunité. La peine prononcée doit être suffisamment dissuasive, et on ne doit pas chercher de circonstances atténuantes”, selon l’avocat Elad Chakrina.

Il faudrait également repenser l’organisation sociale et remettre les foundis, les cadis, les instituteurs au cœur de l’éducation et l’encadrement des jeunes, comme cela se faisait autrefois. “On pourrait aussi mettre en place des conseils de quartiers comme cela se fait ailleurs en France, pour identifier les poches de délinquance”, détaille Elad Chakrina. L’avocat préconise également un nouveau fondement de la coopération judiciaire avec les pays voisins. “Une personne qui n’a pas de papier, peut-elle se faire incarcérer dans son pays d’origine ? Nous devons pouvoir négocier cela au sein de la commission de l’Océan Indien qui regroupe les 5 pays de la région. C’est une manière de désengorger le centre pénitentiaire de Majicavo, et d’éviter les récidives.” Bonne idée sur le papier ! Les conditions d’incarcération chez nos voisins sont certes dissuasives… Encore faudrait-il qu’ils acceptent de récupérer leurs ressortissants.

Covid-19 : Un confinement localisé à Mayotte « pour éviter que toute l’île ne flambe »

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Mercredi soir, les habitants de Mayotte ont appris la décision du préfet, Jean-François Colombet, de confiner les communes de Bouéni, de Pamandzi et de Dzaoudzi-Labattoir à partir de ce jeudi pour une durée de 15 jours. Néanmoins, le délégué du gouvernement s’interdit pour le moment un confinement généralisé pour éviter d’ajouter une crise humanitaire à la crise sanitaire. Entretien.

Flash Infos : La situation sanitaire s’est considérablement dégradée au cours des deux dernières semaines. Le président de la République, Emmanuel Macron, a préféré repousser son allocution télévisée prévue initialement mercredi soir pour se laisser le temps de la réflexion sur les suites à donner. Pourquoi cela n’a pas été le cas pour Mayotte ?

Jean-François Colombet : L’Agence régionale de santé et Santé Publique France nous ont transmis des chiffres alarmants sur au moins trois communes, qui ont un taux d’incidence très élevé. Il y a eu une très forte dégradation sur Petite-Terre et Bouéni, qui dépasse tout ce que nous aurions pu imaginer en métropole. Il a fallu réagir rapidement et brutalement pour éviter que toute l’île ne flambe.

Pour bien comprendre, lors du premier épisode de la crise, le taux d’incidence avait moins de portée en raison d’un nombre de tests restreint. Aujourd’hui, nous en réalisons autant qu’à La Réunion. Cet indicateur, crédible dorénavant, a motivé ma décision, en concertation avec Paris, d’installer un confinement total pour deux semaines. C’est un nouveau modèle, nous analyserons les résultats dans sept, dix ou quinze jours pour voir si nous pouvons lever cette restriction. Par ailleurs, si d’autres communes sont amenées à être dans la même situation, nous suivrons le même procédé !

 

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FI : À l’échelle nationale, le porte-parole du gouvernement a expliqué mercredi que le couvre-feu n’avait pas les effets escomptés, considérez-vous que c’est également le cas à Mayotte dans la mesure où le nombre de porteurs de virus et la présence des variants sud-africain et britannique s’envolent ?

J-F. C. : Non car nous ne sommes pas sur le même agenda que la métropole. Il est encore trop tôt pour le dire. Une semaine ce n’est pas suffisant, il faut plus de temps pour tirer des conclusions. À l’heure actuelle, seules la fréquentation du centre hospitalier de Mayotte et les indicateurs – les taux de positivité et d’incidence – importent.

Le nombre de personnes porteurs du variant sud-africain est effectivement en très forte progression, notamment dans les trois communes concernées. Et un premier cas du variant britannique a été révélé hier [ce mercredi], même s’il y en a déjà sûrement davantage sur le territoire. Le confinement est le prix de la réactivité.

FI : Plus concrètement, quelles sont les modalités de ce nouveau confinement en termes de déplacements ?

J-F. C. : Nous réinstaurons le dispositif qui avait été mis en place l’an dernier. Le confinement en un mot est une contrainte à la mobilité, au culte et à certaines activités économiques. Par conséquent, seuls trois groupes de personnes peuvent se déplacer à compter de ce jeudi, 18h. Le premier recense tous les professionnels de santé, les personnels de la préfecture, de la douane et de l’aéroport et les effectifs des forces de l’ordre qui peuvent, sans attestation, aller et venir dans l’exercice de leur fonction. Le second concerne les salariés qui, avec attestation, se rendent et reviennent du travail, en zone non-confinée ou non, dans le cas où ils ne peuvent pas télétravailler. Le troisième rassemble les habitants qui vont au distributeur d’énergie, à la pharmacie, à la banque, à la poste, à la supérette, à la station-service, chez le médecin. Dans ce cadre-là, tous les commerces « non essentiels » doivent baisser le rideau. Les restaurants pourront continuer à produire de la nourriture à emporter ou à livrer mais ils ne pourront plus ouvrir leurs salles. Par ailleurs, il a été décidé avec le Grand Cadi de fermer toutes les mosquées de ces trois communes.

 

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FI : Quelle est la stratégie élaborée par l’État concernant Mayotte ?

J-F. C. : Je me suis entretenu très longuement avec Sébastien Lecornu, le ministre des Outre-mer, hier après-midi [mercredi]. Il est très attentif à notre situation, que ce soit sur le plan sanitaire ou sécuritaire. Il m’a dit, sans trahir de secret, que le sujet de Mayotte avait été largement commenté en conseil de défense. Mais aussi que le président de la République, Emmanuel Macron, portait un regard avisé à notre égard. Je n’ai aucune idée de ce que le gouvernement va décider, mais il fera probablement connaître notre sort ce week-end.

FI : Y-a-t-il un risque que l’ensemble du territoire soit confiné dans les prochains jours ?

J-F. C. : Je ne veux pas ajouter une crise humanitaire à la crise sanitaire ! Nous nous souvenons tous que lors du premier confinement, la première victime de cette mesure a été l’économie informelle qui n’est pas assistée par le dispositif de soutien du gouvernement et ceux pour les entreprises déclarées. Elle a plongé des dizaines de milliers de familles dans des conditions très dures qui ont entraîné la distribution de bons alimentaires d’un montant de sept millions d’euros mais aussi des actes d’appropriation de richesses.

S’il faut en arriver-là, nous n’hésiterons pas, mais nous ferons tout pour l’éviter ! Nous allons déjà voir les effets de ce confinement total et localisé. Un confinement généralisé plongerait l’île dans le chaos alors que certaines communes sont moins critiques que d’autres. Le défi est que le territoire se trouve dans de bonnes conditions sanitaires à la mi-mars pour la période de ramadan.

 

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FI : L’une des autres craintes est la fermeture des liaisons aériennes, comme cela a pu être le cas l’an dernier. Or, il se murmure que le gouvernement ne comprend pas que la restriction des déplacements aux motifs impérieux ne réduise pas davantage le flux de voyageurs.

J-F. C. : La question aérienne est un sujet fondamental. Nous devons tout faire pour garder nos liaisons, c’est la raison pour laquelle il faut être rigoureux sur l’examen des motifs impérieux et s’assurer que les voyageurs qui prennent l’avion ont bien fait un test. Énormément de passagers sont refoulés par les compagnies. Conséquence, nous avons déjà une ligne directe entre Mayotte et la métropole. Il faut maintenir cette rectitude sinon nous nous dirigeons vers la suspension des vols. Et si demain, nous perdons notre lien avec La Réunion, nous perdons de facto toute correspondance avec Paris, car nous fonctionnons en triangulation. Ce serait catastrophique car il faudrait remettre en place un pont aérien. Dans le cas contraire, l’ensemble des matériels vitaux n’arriverait plus dans les bons délais…

Pas de confinement généralisé, mais Tsingoni et Sada sous haute surveillance de l’ARS

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Les chiffres du Covid-19 à Mayotte ne sont pas bons. Et après les communes de Bouéni, Pamandzi, et Dzaoudzi-Labattoir, d’autres localités pourraient à leur tour être mises sous cloche si la situation continuait à se dégrader. L’agence régionale de santé fait le point.

Mayotte est sur le fil du rasoir. Et les derniers chiffres de l’agence régionale de santé (ARS) sur la propagation du Covid-19 à Mayotte ne font plus guère de doute sur la présence du variant sud-africain dans le département. Jeudi soir, ce sont pas moins de 798 cas supplémentaires qui ont été recensés, et surtout un taux d’incidence – le nombre de cas pour 100.000 habitants – de 285. Quant au taux de positivité des tests, de 14%, il figure “parmi les plus élevés de France”… “Avec 40% des prélèvements positifs au variant d’Afrique du Sud, (sur les 124 envoyés pour séquençage, NDLR), nous pouvons dire qu’il est présent de façon importante”, souligne Dominique Voynet, la directrice de l’ARS. Sans compter la découverte d’un premier cas positif au variant britannique, en la personne d’un voyageur anglais en transit à Dubaï.

Ambiance tendue donc, qui explique le reconfinement des trois communes de Bouéni, Pamandzi et Dzaoudzi-Labattoir dès ce jeudi 18h. Moins d’un jour après cette annonce coup de poing, l’ancienne ministre n’exclut pas de devoir en faire de même ailleurs sur l’île. Dans son viseur : Tsingoni et Sada où les taux d’incidence sont “aussi en train de monter”. “Nous préparons une grosse campagne de tests dans les communes concernées”, annonce-t-elle.

 

“Le confinement général serait le plus efficace”

 

La raison de cet emballement ? Potentiellement des rassemblements peu respectueux des protocoles sanitaires. L’agence régionale de santé évoque à ce titre deux cérémonies d’obsèques marquées par “une violation massive des gestes barrières malgré les efforts faits par certains”. Sans s’aventurer à donner plus de détails, tant le sujet est sensible. Pourquoi, alors, ne pas cloîtrer tout le monde chez soi une bonne fois pour toutes ? “Le confinement général serait le plus efficace, mais nous avons vu les dégâts que cela pouvait générer sur la société mahoraise.” D’où ce compromis, entre “efficacité” et “responsabilité sociale”.

Au CHM, en tout cas, on relève déjà les manches des blouses. Trois actions y sont menées pour répondre à une saturation éventuelle. Mobilisée dès dimanche, la réserve sanitaire déjà sur le pont pendant la première vague, arrivera à Mayotte dimanche matin. Une trentaine de personnels, notamment des infirmiers en réanimation et aux urgences viendront grossir les rangs de l’hôpital. Le service de santé des armées va aussi venir prêter main forte, et quatre militaires arrivés ce jeudi matin se chargent d’une mission de préfiguration “dans la perspective d’envoyer une trentaine de professionnels de santé capables d’armer cinq lits de réanimation supplémentaires”.

 

61 décès depuis le début de la crise, 5 ce mois-ci

 

Enfin, l’option des Evasan, pour des patients non-covid et “si nécessaire covid” reste sur la table. De quoi monter en puissance en réanimation, même si pour l’heure, les enseignements tirés de la première vague, comme les traitements par anticoagulants, ont déjà permis de limiter les branchements sous respirateur des patients atteints de forme grave et hospitalisés en service de médecine. Espérons que cela suffise ! Depuis le premier cas recensé en mars 2020, 61 personnes sont mortes du coronavirus à Mayotte. Dont 5 depuis le début du mois…

 

Les vaccins efficaces ?

 

Un point positif vient toutefois éclairer ce tableau morose : l’annonce ce jeudi par les laboratoires pharmaceutiques Pfizer et BioNTech de l’efficacité de leurs vaccins sur ces mutations. Des tests in vitro « n’ont pas montré la nécessité d’un nouveau vaccin pour faire face aux variants émergents« , ont assuré les compagnies, en s’appuyant toutefois sur une étude de chercheurs de l’université du Texas et d’un chercheur de Pfizer, qui n’a pas encore été relue par d’autres experts. À noter que la firme américaine Moderna, elle aussi engagée dans la course aux vaccins, avait également garanti l’efficacité de son produit contre les variants, quelques jours plus tôt. Voilà pour le verre à moitié plein.

 

1.170 bras à piquer

 

Pourtant, de notre côté du globe, les candidats à la vaccination ne se pressent pas vraiment aux portes de la MJC. Or l’heure tourne. Car il faut avoir consommé les 975 doses d’ici vendredi soir, soit cinq jours après la décongélation des flacons reçus lundi matin. “Nous aurons consommé les doses avant demain soir” assure la directrice de l’autorité sanitaire. Confiante, même si elle n’entend pas communiquer des chiffres tous azimuts.

À la base, nous voulions organiser un système avec des bus en lien avec les maires (commune par commune NDLR) pour accompagner les plus de 75 ans jusqu’au centre de M’Gombani. Il est vrai que cela a moyennement marché, d’où l’ouverture dès cette semaine du dispositif à la ville de Mamoudzou.” Même bilan un peu magnegne pour la nocturne de ce mercredi dédiée aux professionnels de santé libéraux. Mais alors que le deuxième stock de 975 doses, déjà livré, patiente à Longoni, le compte devrait être atteint avec le centre hospitalier et désormais les patients en dialyse. Et plus si affinités, car “nous avons réussi à faire six doses sur la quasi-totalité des flacons, prévus théoriquement pour cinq doses”. Soit 1.170 bras à piquer en tout. Merci Pfizer !

Vaccination : La tournée des villages de Mamoudzou pour faire vacciner les personnes âgées

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La ville de Mamoudzou et son centre communal d’action sociale (CCAS) ont mis à la disposition des personnes âgées, un bus pour faciliter leur déplacement jusqu’au centre de vaccination qui se trouve à la MJC de M’Gombani. L’objectif est de faire vacciner un maximum de personnes, mais sur le terrain, peu de gens répondent à l’appel.

Allô, je suis le chauffeur du CCAS de Mamoudzou. On m’a demandé de vous récupérer pour aller vous faire vacciner.” Assani Madi ne compte plus le nombre de fois où il pro-nonce cette phrase en une journée. Depuis maintenant deux jours, il se charge de trans-porter les personnes âgées de plus de 75 ans, originaire de la commune de Mamoudzou, afin qu’elles aillent se faire vacciner. Assani commence sa tournée dès 7h30. Installé dans sa fourgonnette de 9 places, il sait que la journée sera longue, mais garde le sourire. Muni de sa liste et de son portable, il passe les premiers coups de fil. L’objectif est de ne pas perdre de temps et pour cela, il doit s’organiser. “Pour chaque voyage, j’essaye de prendre les personnes qui sont sur le même trajet”, explique t-il. Mais son organisation est rapidement mise à mal puisqu’il rencontre beaucoup de difficultés à joindre les personnes inscrites sur sa liste. Le téléphone sonne dans le vide plusieurs fois ! Et lorsque quelqu’un décroche le combiné, la personne demandée n’est pas là…

 

 

Mais Assani ne désespère pas et persiste. Il n’a pas d’autre choix. Il ne peut pas abandonner car les instructions sont claires : toutes les personnes figurant sur la liste doivent pouvoir se faire vacciner. Lorsqu’il arrive à avoir quelqu’un au bout du fil, il est rapide-ment confronté à une autre difficulté “De temps en temps j’ai du mal à trouver les adresses. Je dois tourner plusieurs fois, questionner le voisinage avant de trouver l’endroit”, affirme-t-il. Cette fois-ci, il se perd dans les hauteurs de Passamaïnty. N’arrivant pas à joindre une dame prénommée Roukia, il demande à chaque passant si elle habite aux alentours. Au bout de 10 minutes… “Je ne l’ai pas trouvée, alors je continue ma tournée et je reviendrai plus tard la chercher.” La persévérance et la patience sont les maitres mots malgré les nombreuses tentatives qui n’aboutissent pas. “Transporter des personnes âgées requiert beaucoup de patience parce qu’on a souvent du mal à les contacter. Et quand c’est le cas, je dois attendre qu’elles finissent de se préparer. Elles prennent tout le leur temps”, sourit-il.

Après Passamaïnty, direction Vahibé où Ali Moussa, âgé de 76 ans, l’attend sur le bord de la route. Ce dernier est ravi d’avoir été appelé. “Je n’aurai pas pu aller à Mamoudzou par mes propres moyens alors que je veux me faire vacciner. Je sais que certains ont peur, mais ce n’est pas mon cas car j’ai confiance aux médecins et j’ai confiance en Allah”, ra-conte le vieil homme.

 

Les petits couacs

 

12 personnes figurent sur la liste du chauffeur. En principe, elles devraient toutes être âgées d’au moins 75 ans car seule cette catégorie est pour l’instant appelée au centre de vaccination. Mais la réalité est tout autre puisque des personnes qui n’ont pas l’âge re-quis se sont glissées sur la liste. Oili Ahamadi, originaire de Passamanïty en a fait les frais. Cet homme de 70 ans a fait le déplacement depuis son domicile jusqu’à la MJC de M’Gombani, mais une fois sur place, il tombe des nus. “Vous n’avez pas l’âge monsieur. On ne peut pas vous vacciner”, lui dit-on. Oili Ahamadi repart bredouille, lui qui se faisait une joie de se faire vacciner. “Ils m’ont dit que je vais devoir attendre mon tour parce que je n’ai pas 75 ans. J’attendrai et quand il le faudra, je viendrai me faire vacciner car j’ai des problèmes de santé donc je pense que ce vaccin peut me protéger”, dit-il. Ce septuagénaire n’est pas le seul dans ce cas. Une autre dame, également âgé de 70 ans, a été appelée par le CCAS de Mamoudzou et se retrouve dans la même situation. Malgré ce petit désagrément, aucun des deux ne s’indigne, bien au contraire. “Cela m’aura au moins permis de me balader”, relativise Oili Ahamadi.

 

Un centre de vaccination vide

 

Ceux qui ont l’opportunité de se faire vacciner, à l’exemple d’Ali Moussa, doivent passer par trois étapes. Une fois arrivé au centre de vaccination, un médecine le reçoit et relève toutes les informations nécessaires liées à sa santé. Ali Moussa s’installe ensuite dans un coin aménagé pour recevoir l’injection. Une étape cruciale qui ne dure que quelques secondes. D’un pas confiant, il se dirige ensuite vers le dernier stand où des femmes l’attendent pour lui fournir son certificat de vaccination. Un document important qui lui permettra de retourner au centre dans 6 semaines pour recevoir la deuxième dose.

Par mesure de précaution, toutes les personnes vaccinées sont ensuite surveillées pen-dant 15 minutes au sein de la MJC. Ali Moussa a pu passer toutes ces étapes sans se presser puisqu’il était seul lors de son arrivée. Au grand désespoir du personnel de l’ARS et des soignants… Pourtant, le centre est désormais ouvert à toutes les personnes de plus de 75 ans de toute l’île. Alors ont-elles peur du vaccin ? N’ont-elles pas eu l’information ? Est-ce par manque de moyen de transport ? Tout est possible, mais le coordinateur du centre de vaccination l’affirme : “Aucune dose de vaccin ne sera jetée.

Bouéni, Dzaoudzi-Labattoir et Pamandzi confinées jusqu’à nouvel ordre

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L’annonce est tombée comme un cheveu sur la soupe. À partir de ce jeudi 28 janvier, 18h, les communes de Bouéni, Dzaoudzi-Labattoir et Pamandzi sont confinées pour une période indéterminée en raison de leur taux élevé d’incidence. Les établissements scolaires sont fermés tandis que les commerces essentiels restent eux ouverts. Les déplacements entre Grande-Terre et Petite-Terre sont quant à eux limités à certaines professions.

856… 743… 577… Le taux d’incidence de Pamandzi, de Bouéni et de Dzaoudzi-Labattoir fait froid dans le dos. Il s’agit du nombre de cas pour 100.000 habitants. «Face à ce contexte qui s’est dégradé brutalement au cours des dernières 24 heures, en parfait accord avec l’agence régionale de santé, Jean-François Colombet, préfet de Mayotte, délégué du gouvernement, a décidé de confiner [ces] communes pour une période indéterminée», annonce la préfecture dans un communiqué envoyé peu avant 19h ce mercredi. Ce confinement «total», approuvé par les trois maires respectifs, prend effet dès ce jeudi 28 janvier, à partir de 18h.

Conséquences pour les habitants : tous les commerces sont fermés à l’exception des établissements qui vendent des denrées alimentaires et des phamarcies. Les sorties sont interdites sauf pour les individus qui se rendent dans ces commerces pour y faire des achats dits «essentiels» ou qui vont à un rendez-vous médical ne pouvant être reporté. «Les déplacements sur l’espace public devront être justifiés par les attestations qui seront présentes sur [notre] site à partir de demain matin.»

 

On n’est pas sorti de la barge

 

Autre information à prendre en considération, les barges ne comptent accueillir que des passagers qui doivent prendre l’avion, munis d’un billet, les fonctionnaires de police, les militaires de la gendarmerie et du détachement de légion étrangère, les personnels hospitaliers, les particiens libéraux de santé comme les médecins et les infirmiers, les personnes qui viennent se faire tester à l’aéroport pour un vol ultérieur, les agents de la douane et du syndicat des eaux ainsi que tout le personnel justifiant d’une intervention urgente.

Cette décision radicale intervient alors que Mayotte enregistre une soixantaine de cas porteurs du variant sud-africain et que l’île aux parfums vient de détecter la présence du variant britannique sur son territoire. Dans son ensemble, la situation sanitaire se dégrade très fortement dans le 101ème fortement puisque le taux d’incidence augmente dans l’ensemble des classes d’âges, y compris chez les moins de 14 ans et les personnes ne présentant pas de comorbidité. «Cette dégradation se traduit par une hausse de plus de 30% du nombre d’appels au 15.»

 

Fin du présentiel dans les écoles

 

Plus contagieux à 50% que la souche initiale, les variants touchent donc plus fortement les jeunes, jusqu’alors plutôt épargnés par le virus. D’où la fermeture de tous les établissements scolaires, premier et second degré, de ces trois localités. Il n’est d’ailleurs pas à exclure que d’autres connaissent la même sentence, à l’instar du lycée Younoussa Bamana à Mamoudzou où trois clusters seraient formellement identifiés.

Que retenir alors de cette déclaration ? Et surtout quelle suite pouvons-nous attendre ? Selon nos informations, les habitants de Bouéni, Dzaoudzi-Labattoir et Pamandzi devront rester chez eux jusqu’à nouvel ordre tant que la situation ne sera pas favorable à un desserement des contraintes. Quant aux autres communes, un tel sort ne serait pas encore envisagé dans le seul but d’éviter un effondrement de l’économie locale. Toutefois, voyant la vitesse de propagation de l’épidémie depuis le début de l’année 2021, aucune alternative n’est à exclure sachant que le couvre-feu n’aurait pas l’effet escompté selon les mots du gouvernement… Réponse dans les prochains jours.

“Oui à la piste longue à Mayotte, mais pas au détriment de l’environnement”

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Le temps presse et le débat est loin d’être clos. L’allongement de la piste de l’aéro-port ne fait pas l’unanimité tant sur le fond que sur la forme. Les associations envi-ronnementales sont souvent pointées du doigt, accusées d’être un frein au dévelop-pement de Mayotte. La Fédération mahoraise des associations environnementales explique clairement sa position. Son président, Ali Madi, est favorable à la piste longue, mais l’environnement ne devrait pas en faire les frais. Une autre alternative est possible.

Flash Infos : Quelles sont vos réticences, vos peurs, concernant le projet de la piste longue qui date de 2011 ?

Ali Madi : Le problème est qu’ils veulent mettre de la terre pour remblayer alors que la terre brut envase la mer. C’est nocif pour le lagon et les espèces qui vivent dedans. À cela s’ajoute la question de l’aménagement. Déjà en 2011, nous nous demandions ce que nous ferions des personnes qui habitent à Pamandzi et vers la colline de Four à Chaux. Entre temps, des habitations se sont rajoutées, la gendarmerie de Pamandzi a été agran-die, et maintenant nous sommes en train de construire une caserne de pompiers. La sta-tion-service, qui a été rénovée, est un établissement sensible classé, un avion ne peut passer au-dessus. L’aménagement ne correspond pas au projet de l’aéroport. Pour ce faire, il faudrait tout enlever et quel élu courageux tiendrait ce discours ? Aucun car beaucoup d’argent a été investi. Si je devais avoir peur d’une chose, ça serait des poli-tiques non consensuelles, des politiques qui disent que nous allons faire la piste longue alors qu’ils font tout pour que cela ne se fasse pas. Parce qu’en autorisant toutes ces constructions et rénovations, ils montrent clairement leurs intentions de ne pas rallonger la piste.

FI : Que risquons-nous si nous rallongeons la piste longue sans prendre compte de tous ces paramètres ?

A. M. : Il faudra s’inquiéter pour la santé des gens qui seront autour et qui absorberont tous les jours du kérosène. Il y a aussi la pollution sonore ! À cause du bruit, les maisons se fisseront. Et je vous laisse imaginer les dégâts si un avion tombe sur la station-service.

FI : Quelle alternative proposez-vous ?

A. M. : Il faudrait plutôt mettre des pierres et du béton comme cela a été fait à La Réunion pour la route du littoral. Cela permettra de créer une piste convergente sur pilotis. Nous faisonscette proposition depuis 2011, mais les autorités n’en veulent pas car cela coûte beaucoup plus cher. Nous devons faire cet aéroport, Mayotte en a besoin, mais nous de-mandons des mesures compensatoires. La FMAE demande la protection des espèces marines qui sont dans cette zone. Nous pouvons les déplacer, cela implique un coût non négligeable, mais c’est absolument nécessaire. Et cela doit être écrit noir sur blanc. Je lance un appel pour que nous nous mettions au travail. Nous avons jusqu’en 2023 pour trouver la meilleure solution, et pour cela, il faut un comité locale qui suivrait les travaux. Ce qui n’est pas le cas, puisqu’actuellement c’est la seule direction générale de l’aviation civile, basée à La Réunion, qui est en charge. Et elle ne fait rien. Les Mahorais doivent porter leur projet.

 

 

FI : Avez-vous des exemples de projets de développement qui ont été créés et ache-minés à Mayotte et qui finalement dégradent l’environnement ?

A. M. : En 1995, nous avons déjà allongé la piste avec de la boue. L’ensemble de la mer de Pamandzi était rouge. À cause de cela, la falaise de Petit Moya est en train de s’écrouler parce que nous avons dévié les courants. La même chose s’est produite au port de Longoni. Nous avons mis de la boue partout en utilisant la technique de dragage qui consiste à mettre un filet entre la mer et la terre. Sauf que le filet s’est ouvert et la boue s’est déversée sur le lagon. Il suffit d’un rien pour que ce type d’incident se produit. Nous avons construit le nouveau marché de Tsararano sur une zone humide et mainte-nant il n’est pas fonctionnel. Idem pour le collège d’Iloni alors que nous avions mis en garde les autorités et que nous avions fait une autre proposition qui n’a jamais été prise en compte. Aujourd’hui, l’ensemble des salles sont fissurées. Nous sommes en train de mettre des préfabriqués sur le parking en guise de salles de classe et certains élèves sont envoyés dans d’autres établissements.

FI : Vous semblez faire beaucoup de propositions sans jamais être réellement écouté. Êtes-vous sûr que cette fois-ci votre avis sera pris en compte ?

A. M. : Oui, parce que jusqu’à maintenant, tout se jouait à Mayotte. Mais depuis la prise de parole du président de la République, Emmanuel Macron, nous avons le soutien de l’autorité environnementale. Son avis doit être pris en compte. Les décisions seront prises à Mayotte, mais également à Paris et à Bruxelles. C’est ce qui embête les détracteurs des associations environnementales d’ici.

FI : Qu’avez-vous à dire à ceux qui accusent les associations environnementales d’être un frein pour le développement de Mayotte, notamment à travers la piste longue ?

A. M. : Les Mahorais disent que des projets environnementaux se font à La Réunion, mais ils ne se demandent jamais de quelle manière. Là-bas, les associations environne-mentales ont leur mot à dire. Nous mettons toutes nos propositions par écrit. Elles sont faites pour être lus, donc que ces gens-là se mettent à lire. Qu’ils consultent l’avis de l’autorité environnementale, et aussi le projet de 2011. Les mêmes questions étaient déjà posées et elles n’ont jamais reçu de réponses. C’est bien beau d’aller crier à la radio et à la télé, mais en attendant, nous n’avons rien de concret de l’autre côté. C’est du fainéan-tisme et de la bêtise de ne pas le faire. Tous ces élus et autres autorités ne le font pas parce qu’ils ont peur d’assumer leurs propos. La piste longue est un projet structurant pour Mayotte. Nous le soutenons fortement mais pas au détriment de l’environnement. Nous nous battrons pour que ce projet soit fait comme ailleurs c’est-à-dire en respectant l’environnement.

Il se glissait dans leur lit la nuit : quatre ans de prison dont six mois avec sursis pour le prévenu

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Après avoir passé trois ans en détention provisoire dans l’attente de son procès, un homme comparaissait ce mercredi devant le tribunal correctionnel pour avoir agressé sexuellement deux mineures en 2017. Malgré sa défense bancale, le prévenu n’a plus que quelques mois à passer derrière les barreaux.

Son mode opératoire était presque rodé. Dès qu’il avait un peu bu, l’homme entrait par effraction dans un domicile. Et tandis que tout le monde dormait à poings fermés, il se glissait discrètement dans la chambre d’une fillette pour s’allonger à ses côtés. Et faire ses affaires… Par deux fois au moins, le 14 novembre et le 14 décembre 2017, le prévenu a ainsi été pris la main dans la culotte. Manque de pot pour la deuxième victime, il était parvenu à s’échapper la première fois. C’est donc pour ces doubles infractions de violations de domicile et d’agressions sexuelles imposées sur mineures de moins de quinze ans que cet habitant de Combani était convoqué ce mercredi au tribunal correctionnel.

Il a d’abord enlevé mon salouva, et quand je me réveillais, il faisait comme s’il dormait”, retrace trois ans après les faits sa première cible, alors âgée de quatorze ans. Le même manège se répète, jusqu’à ce que l’adolescente, de dos et tétanisée, sente ses mains sur ses fesses. Elle parvient à s’extraire pour prévenir son petit frère, qui réveille sa mère. Alertés à leur tour, les voisins tentent de l’attraper, mais le saoulard parvient à dénouer ses liens avant que les gendarmes n’arrivent. Quand enfin ils rappliquent, la mère a déjà eu le temps de tout ranger. Et même de passer un coup de serpillère ! Il faut dire aussi que l’intrus, complètement alcoolisé, s’était fait dessus dans son salon… “Depuis, j’ai peur de sortir dehors. Même chez moi, toute seule, je n’y arrive pas”, murmure la mineure entendue ce mercredi à la barre.

 

“J’ai eu un instinct”

 

Non content de ce premier exploit, le fugitif remet le couvert un mois tout pile après son intrusion chez cette famille de Tsingoni. Dans la nuit du 13 au 14 décembre, une autre petite fille est tirée des bras de Morphée par ce cauchemar de chair et d’os. Elle a neuf ans. Cette fois-ci, c’est la maman elle-même qui découvre la scène. “J’étais malade, et je me suis réveillée d’un coup. J’ai eu un instinct”, rembobine-t-elle. Le gaillard est allongé sur son enfant, il a déjà retiré ses vêtements et son propre short. La fillette est en pleurs. “Quand il était sur toi, il a bougé ?”, lui demande aujourd’hui la juge. Hochement de tête. Si le certificat médical établi peu après l’agression n’aura relevé aucune lésion corporelle permettant de caractériser un viol, du sperme sera néanmoins retrouvé un peu partout sur les draps, la culotte et la jupe de la victime.

 

Un QI dans la moyenne basse

 

mayotte-agression-sexuelle-alcoolique-2Le problème, c’est que le prévenu a toujours nié les faits. “Cette nuit-là (celle de décembre NDLR), j’étais juste venu voler une télé”, répète-t-il à l’audience, comme il l’a déjà martelé pendant sa garde à vue et devant le juge d’instruction. “Quand vous voulez voler une télévision, vous vous masturbez aussi sur une petite fille ?”, s’étonne la juge. “J’ai pas commis ça. Je me souviens pas. Je voudrais pas faire ça, j’ai des sœurs« , rétorque-t-il coup sur coup, d’un air un peu benêt. Face à ses réponses godiches, même le traducteur du tribunal en perd son latin ! Et force un peu le ton, au point d’être poliment rappelé à l’ordre par la magistrate. Visiblement, ce nigaud n’est pas de la trempe d’un Einstein : d’après le psychologue qui l’a suivi en prison, son quotient intellectuel (QI) se situe “dans la moyenne basse”. Ajoutez à cela un fort alcoolisme, qui le pousse à des comportements dangereux, et voilà un joli personnage. “Moi, quand j’ai bu, faut pas venir me chercher des histoires”, marmonne-t-il en effet. Heureusement, en prison où il a été placé en détention provisoire depuis trois ans, il a réglé le problème. “Je prie Dieu, si je sors, de pas recommencer”. “Je ne compte pas trop sur Dieu mais sur vous”, lui réplique-t-on.

 

Coupable mais presque libre

 

Face à cette négation des faits, le risque de récidive est bien réel. Sans parler du préjudice moral pour ses deux victimes, rappelle Maître Soilihi, avocat de la partie civile. “Il est dommage qu’il ne se rappelle pas, car ces jeunes filles auraient bien aimé entendre une reconnaissance des faits, pour se reconstruire”, souligne-t-il. Pour le procureur de la République, les faits sont bien caractérisés, que ce soit par les témoignages des uns et des autres, que par les éléments récoltés sur place par la police scientifique. Sa culpabilité ne fait pas de doute. Reste que le mis en cause a déjà passé trois ans sous les verrous… D’où la condamnation finalement retenue par le tribunal, à quatre ans de prison dont six mois assortis d’un sursis probatoire de deux ans. En clair, l’homme retourne à Majicavo… mais pour quelques mois seulement. Un sursis révocable s’il ne respecte pas ses obligations de soins, de travail ou de formation et ses interdictions d’approcher les victimes. Gare à la levée de coude !

Le mode survie activé par les hôteliers et restaurateurs mahorais

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Cellule de crise, remboursement des consommables, flambée du prix du fret, relance, exonération, cotisations, dette sociale, activité partielle, fonds de solidarité… L’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie de Mayotte a convié ce mercredi plusieurs services de l’État pour tenter de rassurer hôteliers et restaurateurs. Morceaux choisis.

Dans la salle du restaurant L’Orient Express, une réception un peu particulière se déroule ce mercredi 27 janvier. Face à plusieurs hôteliers et restaurateurs de Mayotte se dresse un florilège de services de l’État (CSSM, Dieccte, SGAR, DRFIP). Le but de la rencontre : anticiper les mesures et répondre aux interrogations de ces professionnels frappés de plein fouet par le Covid-19. « Le travail de fond a payé au cœur de la crise et dans la relance », introduit en signe d’encouragement Alexandre Kesteloot, adjoint au secrétaire général des affaires régionales. « On est dans l’adaptation permanente, même si on fonctionne sur des stratégies à long terme ». Dans l’assemblée, les têtes font grise mine. Pas de doute, le moral est au plus bas. « On subit et on est en mode survie. On ne s’adapte pas ! », lui répond sèchement l’une des convives, bien décidée à ne pas mâcher ses mots.

Comme pour tous les établissements recevant du public, restaurants et hôtels doivent se plier à un protocole sanitaire strict. Des mesures indispensables à respecter pour ne pas risquer une fermeture administrative. « Les tarifs des consommables – les masques et le gel hydroalcoolique – ne sont pas stables », assène Marcel Rinaldy, président du groupe 3M, chargé de jouer le rôle de Monsieur Loyal lors de cet échange. Qui préconise de mettre en place une bonne fois pour toute une centrale d’achat gérée par la préfecture. Une idée évoquée lors du confinement… Rapidement renvoyée aux calendes grecques. Car si les prix sont réglementés et contrôlés par un décret en vigueur, les montants réels ont de quoi donner le tournis ! « Une boîte de 50 masques, c’est 4.50 euros en métropole, 12 euros à La Réunion, et entre 17 et 35 euros à Mayotte », s’époumone le gérant du Jardin Maoré, complètement estomaqué par ces disparités.

 

« Le mal est fait »

 

Un gouffre financier pour ces entrepreneurs aux perspectives déjà peu reluisantes. «Concernant les équipements qui protègent sanitairement, le Département va mettre en place une plateforme dès mi-février pour que vous puissiez envoyer vos factures et être remboursés», annonce tel un messie, Enfanne Haffidhou, le directeur général adjoint au sein de la collectivité. Une bouffée d’oxygène en cette période de vaches maigres. Car le couvre-feu instauré jeudi dernier assène un nouveau coup de massue sur leur tête. «Nous, on veut être associés aux discussions et aux décisions. Pourquoi devrait-on payer pour les manzarakas de 300 personnes ?», s’interroge dans une colère noire celle qui a ouvert le bal quelques minutes plus tôt. «Il faut faire respecter les règles ! Confinez les clusters plutôt que de fermer les entreprises.» Silence de cathédrale. «Le mal est fait», marmonne-t-elle, dépitée.

Pour ne rien arranger, la récente réglementation sur les vols pour tenter de contrôler l’envolée de l’épidémie a des conséquences désastreuses sur l’approvisionnement. «On est dans un contexte concurrentiel. Le fret est dépendant du trafic des passagers», leur rappelle Alexandre Kesteloot. Et au vu de la situation : priorité aux matériels sanitaires. «Si on a un magret, c’est déjà bien», ironise l’une des participantes à la réunion. À défaut d’une belle pièce de viande, ils peuvent toujours se rabattre sur des menus plus healthy… à condition de payer 12.90 euros le kilo d’endives.

Délinquance : Ils se faisaient appeler la bande de Gotam, 9 interpellations après les violences de Petite-Terre

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Une cellule d’enquête surveille depuis décembre les agissements d’une bande du quartier de Cetam, en Petite-Terre. Depuis lundi, et après un week-end entaché de barbarie, la gendarmerie, avec l’appui de la police nationale, a enfin pu mettre à terre une partie des fauteurs de trouble.

C’est une véritable Hydre de Lerne que les enquêteurs de la gendarmerie de Pamandzi ont démantelée. Après les violents affrontements de ce week-end en Petite-Terre, qui ont provoqué la mort de trois personnes, huit individus ont été interpellés, placés en garde à vue et présentés au tribunal ce mercredi. Un neuvième avait été interpellé avant ces événements dramatiques. Une information judiciaire a été ouverte pour des chefs de vols aggravés, destructions, violences aggravées, associations de malfaiteurs et vols aggravés en bande organisée. Le parquet a requis leur placement en détention provisoire et ils devaient passer ce mercredi soir devant le juge des libertés et de la détention.

En haut de la pile ? Abdallah D. I., dit “Crochet”. Cet homme de 19 ans est considéré comme le chef de “la bande de Gotam”, du nom de ce groupe né dans le quartier de Cetam. Le “h” est tombé, mais difficile de passer à côté de cette référence à la ville fictive, temple de tous les vices, qui a fait sa réputation dans les comic books américains de DC Comics… La comparaison s’arrête là. Car les faits qui sont reprochés à ce “meneur” et sa dizaine de sbires n’en font pas vraiment un justicier à la Bruce Wayne.

Modes opératoires particulièrement ficelés, coordination d’une cinquantaine de jeunes, processus de recrutement avec certains mineurs enrôlés de force, le tout pour perpétuer vols, cambriolages, et crimes en tout genre… Les enquêteurs ont visiblement affaire à des criminels aguerris. Quant à la question, particulièrement polémique sur l’île, de savoir si les mis en cause sont d’origine étrangère ou non, il semblerait que “la majorité sont nés à Mayotte, pour certains de parents français, et sont français”. À ce stade, “les éléments ne permettent pas de dire s’ils sont Comoriens ou non”, insiste le procureur de la République, Yann Le Bris.

 

Premier individu retrouvé début janvier

 

Peu importe. Cette organisation aura, quoi qu’il en soit, donné du fil à retordre aux enquêteurs. Les interpellations de cette semaine n’étant d’ailleurs pas les premières : à l’occasion du cambriolage d’un Douka Bé début janvier, les enquêteurs étaient parvenus à retrouver la zone de rassemblement des suspects. Là, un bel attirail d’une dizaine d’armes blanches, des machettes, des chumbos mais aussi des trouvailles moins “classiques”, comme une béquille avec des clous ou une épée de type rapière, avaient été collectés. Et juste au-dessus, planqué dans l’arbre, le numéro 2 de la bande…

L’île de Petite-Terre, d’habitude préservée, a été marquée depuis octobre 2020 par une hausse significative de délits et d’actes criminels”, retrace le procureur de la République, en introduction d’une conférence de presse solennelle pour répondre aux interrogations qui n’ont pas manqué de fleurir depuis le week-end. Face à ce constat, et dès le mois de décembre 2020, une cellule spéciale d’une vingtaine d’enquêteurs a donc été mise en place pour apporter une “réponse efficace et durable” à cette situation inhabituelle – avec l’envoi de la “task force” annoncée par le ministre des Outre-mer Sébastien Lecornu, ce sont dix enquêteurs de plus qui viennent grossir les rangs de cette équipe de fins limiers.

 

150 à 200 faits recensés par la cellule d’enquête

 

En quelques semaines, la cellule a alors recensé près de 150 à 200 faits, avec parfois jusqu’à une dizaine d’infractions relevées chaque jour. Le nombre d’auteurs a suivi la même pente ascendante, jusqu’à atteindre près d’une cinquantaine d’individus. Ce sont donc ces jeunes, âgés parfois de moins de dix ans, qui ont mené la vie dure à la Petite-Terre ces dernières semaines.

 

Victime collatérale et déferlement de violences

 

Jusqu’à ce week-end, où la violence a atteint son paroxysme. Et un bilan sanglant, de trois meurtres, dont deux adolescents. Ce que l’on sait pour l’instant : l’homme de 36 ans, d’origine comorienne, dont le corps sans vie a été retrouvé vendredi à la Vigie serait “une victime collatérale” d’un conflit entre bandes rivales. “L’enquête s’oriente vers un crime commis gratuitement par un certain nombre de membres du groupe de Gotam”, complète le procureur.

Visiblement, la bande se rendait vers la Vigie, et a croisé sur son chemin l’agriculteur, qui a alors fait les frais de cette “émulation guerrière”, précise le capitaine Depit, chargé de la police judiciaire. L’enquête n’a, pour l’instant, pas permis de déterminer si les meurtres de deux jeunes, samedi et dimanche, étaient liés à la bande de Gotam ou à cette première affaire. Même chose pour l’agression d’un homme la semaine dernière, en amont de ces violences, qui a échappé à la mort mais qui est toujours hospitalisé. Un individu a toutefois déjà été interpellé et placé en détention pour cette dernière attaque.

 

Le calme enfin revenu ?

 

Une chose est sûre : ce déferlement de violences a mis des bâtons dans les roues de la gendarmerie, nous dit-on. “L’opération d’interpellation était prévue initialement lundi et la mort de cet homme de 36 ans nous a obligés à nous réarticuler car cela a conduit les bandes à se disperser entre la Grande-Terre et la Petite-Terre”, analyse le commandant de gendarmerie Olivier Capelle. Qui insiste par ailleurs sur les moyens déployés par la gendarmerie, d’abord de 63 puis 95 militaires mobilisés pour procéder à ces interpellations et aussi s’interposer entre les communautés de la Vigie et de Cetam. “Sachant le passif de ces deux quartiers, nous avons sollicité quarante militaires de la gendarmerie mobile qui sont arrivés hier pour ce dispositif d’interposition, qui sont là de jour comme de nuit, pour éviter toute représaille.” Avec pour l’instant, un bon point. “Depuis dimanche, on dirait que nous avons un peu figé la situation. C’est très calme en Petite-Terre”, se gararise le commandant. Trop calme ?

Mayotte Hebdo de la semaine

Mayotte Hebdo n°1116

Le journal des jeunes