Des ses propres mots, Isma Kidza est un “fou de la photo”. Autodidacte qui s’affranchit des règles de la photographie, ce quadragénaire capte chaque instant comme si c’était le dernier pour lui. Passionné depuis plus de 25 ans, il s’est donné corps et âme à l’univers de la photo sans jamais cesser d’innover dans son travail.
Casquette vissée sur sa tête et sac accroché sur le dos, Isma Kidza passerait presque inaperçu dans la rue. Presque, car un objet attire souvent l’attention. Toujours à portée de main, son appareil photo lui permet de capturer l’instant présent, sans filtre. “Ce que j’aime le plus, c’est le street-art, parce que j’immortalise des scènes de vie spontanées et concrètes. Il n’y a pas de mise en scène”, explique Isma. Des enfants dans la mer, des sportifs en pleine action, ou encore des femmes assises en plein bavardage, le photographe a l’art de rendre chaque moment magique. “Si la plupart des gens utilisent des mots pour s’exprimer, j’utilise la photo pour faire passer des messages. Chacune d’elles a une signification particulière”, souligne-t-il.
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La flamme de la passion fait briller les yeux de Isma Kidza dès qu’il parle de photographie. Un sujet de conversation qu’il pourrait évoquer durant des heures sans s’arrêter. Pourtant, pendant ses jeunes années, rien ne le prédestinait à être le talentueux photographe d’aujourd’hui. “Cuisinier de profession, j’ai commencé à prendre en photo mes plats dans l’idée de publier un livre culinaire”, rembobine-t-il. De fil en aiguille, le goût de la photo prend le dessus sur la gastronomie et le fait sortir de sa cuisine pour aller photographier tout ce qui attire son regard dans la rue. Si le street-art est son domaine de prédilection, l’artiste fait également des séances photos millimétrées et scénarisées mettant en avant les traditions de Mayotte et de l’Union des Comores. Ainsi, il travaille beaucoup avec le tanimalandi, une poudre blanche utilisée lors des rituels pour évoquer les djinn (esprits).
Mais sa récente découverte est le light painting, une technique de prise de vue pour capter la lumière. Un procédé que Isma Kidza est le seul à utiliser dans l’archipel. “Je voulais changer de style et ne pas faire comme tout le monde, parce que les photos de couchers de soleil et de dauphins on en a plein. J’ai donc regardé quelques tutos et je me suis lancé.” Peu importe les règles de cadrage et de composition, l’autodidacte se forme, seul, sur le tas, au détour de conseils dénichés à droite à gauche. Une manière de rendre ses photos si particulières.
La photo, une addiction
Passionné depuis plus de 25 ans, Isma Kidza n’a pas honte d’avouer sa période de dérive, durant laquelle la photographie ne le motivait plus. “J’étais jeune et je me suis laissé entraîné dans l’alcool. Cela fait maintenant 13 ans que j’ai arrêté de boire, 13 ans que je me saoule avec des shoots photos”, ironise-t-il. Devenu une référence en la matière à Mayotte, le quadragénaire aime vivre dans l’ombre. Son exposition médiatique, il la doit à ses pairs qui l’ont poussé à dévoiler son talent aux yeux du grand public. “Je publie ce que je fais sur les réseaux sociaux, il m’arrive de faire quelques expositions, mais je suis de nature timide alors je n’aime pas trop me montrer.”
Isma Kidza ne vit pas de sa passion, mais il se dévoue corps et âme pour toucher les gens au-delà des frontières mahoraises. “J’échange avec les photographes de l’océan Indien. J’estime que l’art n’a pas de frontières. À travers mes photos, il n’y a pas de différence entre Mayotte et les Comores par exemple. La politique n’a pas sa place dans mon travail”, prévient-il. La célébrité ? Très peu pour lui ! Idem pour la recherche de likes “car on finit par ne pas faire ce qu’on veut mais ce que les autres attendent juste pour leur plaire”. Alors il préfère continuer à travailler dans son coin, et à conseiller les plus jeunes qui veulent se lancer. À l’image de sa fille de 12 ans qui partage la même passion. En bon professeur, il lui apprend tous les rouages de la photographie qu’elle maîtrise déjà comme un chef !
Alors que deux opérations loi Élan aux quartiers Cétam et la Vigie se heurtent au refus de propriétaires privés, la présidente du collectif des citoyens de Mayotte 2018 s’est rendue en Petite-Terre pour obtenir des garanties de la mairie de Dzaoudzi-Labattoir. Une mobilisation qui illustre le ras-le-bol d’une partie de la population, prête à “prendre son destin en main”.
Le collectif des citoyens de Mayotte 2018 s’est rendu ce vendredi en Petite-Terre, direction l’hôtel de ville de Dzaoudzi-Labattoir. Objectif : obtenir des réponses de la mairie au sujet des deux opérations de destructions de cases en tôle qui doivent se tenir dans un peu plus de deux semaines, à Cétam et à la Vigie. “Ce sont deux quartiers sensibles, informels, il n’y a pas eu une journée sans violences depuis plusieurs mois et au moment de passer aux démolitions, il y a un couac !”, s’agace Safina Soula Abdallah, la présidente du collectif.
Tristement célèbres depuis les violents affrontements de janvier dernier, qui avaient provoqué la mort de trois personnes, ces deux quartiers étaient visés par des arrêtés loi Élan en date respectivement des 3 et 19 février 2021. Seulement voilà : les périmètres définis pour ces deux opérations ont visiblement été tracés un peu à la hâte… et ont intégré quelques parcelles privées, à côté de celles appartenant à l’État ou au conseil départemental. Or dans les deux cas, les propriétaires ont refusé la destruction des cases bâties sur leurs terrains. Ce qui a conduit, pour l’opération Cétam, à établir un nouveau périmètre, rempli de trous, par un nouvel arrêté en date du 19 mars 2021. Quant à celle de la Vigie, elle est tout bonnement annulée.
Le rôle de la mairie en question
“Ils se sont rendus compte qu’il y avait aussi des propriétaires fantômes, mais ces gens-là ne sont même pas sur le territoire, ce sont des marchands de sommeil qui se permettent d’envoyer un courrier pour empêcher la procédure de démolition !”, dénonce encore Safina Soula Abdallah. Pour tenter de faire bouger les lignes, la présidente du collectif a donc sollicité une entrevue avec le maire de Dzaoudzi-Labattoir, car “nous pensions qu’il était derrière tout cela, qu’il manipulait ces mêmes personnes (les propriétaires, ndlr) à des fins électorales.” Le principal concerné étant absent du territoire, c’est finalement avec son premier adjoint que les membres du collectif 2018 ont pu s’entretenir.
“Ils avaient vraisemblablement eu des informations d’un autre collectif de Labattoir, comme quoi nous aurions incité certains propriétaires à refuser de voir les habitations détruites, ce qui n’est pas vrai”, confirme Mikidache Houmadi, contacté par Flash Infos. “Nous avons longuement échangé et je leur ai surtout expliqué que nous intervenions en tant que médiateurs et accompagnateurs des services de l’État sur ces opérations. Mais en aucun cas nous ne sommes acteurs”, développe le premier adjoint à la mairie de Dzaoudzi. En effet, les terrains concernés n’appartiennent pas à la mairie, même si ses services sont présents aux réunions préparatoires. “Il y a un autre élément que j’ai porté à la connaissance des gens du collectif, c’est le chiffre de 800 personnes à reloger avec ces opérations loi Elan”, chiffre qui a notamment été évoqué pendant l’une de ces réunions, explique-t-il. Dans les deux arrêtés préfectoraux des 3 et 19 février, les enquêtes recensaient à l’époque 258 personnes pour le quartier Cetam, et 285 personnes pour la Vigie. “Nous n’avons pas ces logements en Petite-Terre”, pointe du doigt Mikidache Houmadi. “Chacun doit prendre ses responsabilités, mais nous n’allons pas nous substituer aux obligations de l’État.”
Les menaces fusent
De son côté, le préfet de Mayotte Jean-François Colombet avait bien tenté de convaincre les propriétaires récalcitrants, assurant qu’il “ne manquerait pas de communiquer leurs noms prénoms et adresse à Monsieur le directeur régional des Finances publiques pour qu’il s’intéresse aux revenus qui viennent de ces parcelles.” Une menace à peine dissimulée qui n’aura donc pas porté ses fruits, au grand dam d’une partie de la population. “Nous demandons à la préfecture, aux services de la gendarmerie ou de la police de mener l’enquête pour identifier réellement qui sont ces marchands de sommeil”, réitère Safina Soula Abdallah. Qui n’hésite pas à faire un parallèle avec d’autres événements récents, comme cette manifestation à Tsimkoura contre la présence d’étrangers en situation irrégulière, ou encore cette affiche des habitants de Bouéni, menaçant ces mêmes ESI d’une expulsion, le 9 avril prochain. “La population a pris en main son destin”, avertit-elle.
Protéger les tortues plus que jamais, c’était le mot d’ordre pour les acteurs compétents en la matière. Ils ont redoublé de vigilance pour éviter un scénario catastrophe à l’image du premier confinement. Les résultats sont là, les chiffres parlent d’eux-mêmes, les tortues de l’île ont évité le pire.
Le premier confinement a été particulièrement meurtrier pour les tortues de Mayotte. Les associations et organismes habilités à les protéger n’avaient pas pu mener à bien leur mission, alors il était primordial de ne pas répéter les mêmes erreurs lors du deuxième confinement. “Les deux périodes ne sont pas comparables, nous avons eu plus de flexibilité cette fois-ci, ce qui nous a permis d’optimiser les missions de surveillance”, se réjouit Cléa Arsciaud, animatrice au Réseau d’échouage mahorais de mammifères marins et de tortues marines (REMMAT). Les acteurs locaux sont restés mobilisés, le réseau enregistre 225 actions de surveillance et de suivis des cas de braconnage depuis fin janvier 2021, réparties sur les endroits stratégiques de l’île.
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À titre d’exemple, “l’association les Naturalistes de Mayotte a assuré une présence régulière tous les week-ends, du vendredi au dimanche, sur les différents sites de pontes sensibles du secteur de Saziley”, précise le REMMAT. Même son de cloche depuis le début de l’année pour la police intercommunale de l’environnement du sud de Mayotte (CCSud) qui “a également apporté sa contribution en réalisant près de 7 actions de lutte anti-braconnage de nuit des plages de ponte du sud de l’île”, souligne le réseau. Fortement critiqué par l’ONG Sea Shepherd pour son laxisme, le conseil départemental a lui aussi mis les bouchées doubles pendant ces cinq semaines de confinement. Les gardes “ont effectué 36 actions de surveillance nocturne et diurne à Moya et huit soirées aux Charifou ou Gouéla, ainsi que neuf surveillances diurnes aux Charifou et autant sur le secteur Bouéni. Depuis janvier, les agents ont effectué un total de 95 surveillances nocturnes et 342 inspections diurnes sur les plages de Moya, Charifou et secteur Bouéni”, annonce le REMMAT.
4 braconniers interpellés et condamnés
La gendarmerie maritime n’a pas été en reste et a participé à lutte contre le braconnage en réalisant huit patrouilles de nuit en mer dans le secteur de Saziley et Dapani. “Elle a permis, avec l’association Oulanga Na Nyamba, l’interpellation à terre de deux braconniers sur la plage Aéroport Est Océan,” souligne le REMMAT. Les malfrats avaient en leur possession 20 kilos de viande de tortue. Les sanctions juridiques ne se sont pas faites attendre puisque l’un d’eux a été condamné à “six mois de prison ferme et deux mois de sursis sans mandat de dépôt, avec une peine aménageable. Il devra s’acquitter de 1.000 euros au titre du préjudice moral et de 400 euros de frais de procédure par associations.” Son complice s’en est sorti avec “six mois d’emprisonnement avec mandat de dépôt et au versement de 500 euros par associations et 500 euros pour frais de procédure pour chaque partie civile, soit 1.500 euros.” De son côté, le service départemental de l’Office français de la biodiversité a pu appréhender deux braconniers.
Certaines tortues n’ont pas pu échapper au braconnage, mais nombreuses sont celles qui ont été sauvées, parfois de justesse, à l’exemple d’une tortue verte qui a été retrouvée retournée sur le dos “par des braconniers prévoyant de revenir la chercher plus tard”, affirme le REMMAT. Fort heureusement, l’association des Naturalistes de Mayotte a pu agir à temps. Une chose est sûre, malgré la surveillance intensifiée et régulière, les braconniers n’ont pas l’intention de s’arrêter.
Dans le cadre de la semaine des mathématiques, l’école de Cavani Stade a organisé vendredi matin plusieurs ateliers ludiques pour sensibiliser ses élèves à cette discipline et la remettre au cœur de l’apprentissage. Les enseignants suivent également une formation sur cinq ans pour approfondir leurs connaissances et favoriser l’éclosion d’une culture scientifique. Immersion.
« À ça, j’suis un peu fort ! » Sourire en coin, Fakri laisse filer à tout berzingue sa voiturette en forme d’abeille. Debout, les bras croisés, Mouhamadilhad regarde du coin de l’œil l’élève des CE2 Frangipaniers, concentré sur le parcours de son bolide. « En cours, on travaille souvent le quadrillage. Là, ils appliquent de manière ludique ce qui a été vu », souffle-t-il derrière son masque, avant d’avertir une jeune fille. « Attention, n’oublie pas d’effacer l’ancien programme sinon ça va faire n’importe quoi. »
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De l’autre côté de l’établissement, Oumaycha et Roukia, toutes les deux en classe de CM2 Mars se retrouvent nez à nez avec six de leurs camarades. « Vous avez deux bouteilles vides de trois et cinq litres avec lesquelles vous devez remplir un récipient de quatre litres. Comment vous vous y prenez ? », leur demandent-elles d’une seule et même voix, sous la supervision de Mohamed. Face à cette colle, la bande se gratte la tête devant le défi du vendeur de pétrole.
Un rapport de 21 mesures à appliquer
Non non, ce n’est pas la kermesse de l’école de Cavani Stade, mais une matinée organisée par les enseignants à l’occasion de la semaine des mathématiques, organisée dans une quarantaine d’établissements. Pas moins de huit ateliers se dressent aux quatre coins de la cour de récréation en ce vendredi 26 mars. « On saute et on compte deux par deux. Quand on arrive à dix, on a gagné ! », explique d’un air malicieux, Angelina en CP Orange, au recteur Gilles Halbout, convaincu de devoir « réconcilier les jeunes et les parents avec les maths », grâce à l’application des 21 mesures issues du rapport de Cédric Villani, mathématicien et député de l’Essonne, et Charles Torossian, inspecteur général de l’Éducation nationale, remis en février 2018. « À mon époque, c’était surtout un outil de sélection. Aujourd’hui, c’est vu comme une barrière plutôt qu’un épanouissement… »
Et visiblement, l’opération séduction fonctionne à merveille au vu de l’engouement des enfants ce jour-là. « Nous posons des problèmes, nous essayons de les conceptualiser, de les modéliser et de voir comment à partir d’une question ouverte non travaillée en classe, nous arrivons à développer une stratégie, à retrouver des concepts appris en cours mais aussi à le faire par tâtonnement, comme pour l’exercice du triangle magique », décrypte le responsable de l’académie de Mayotte. Une nouvelle manière de procéder qui semble porter ses fruits. Sans le savoir, les élèves révisent les fondamentaux.
Former tous les enseignants en cinq ans
Cette stratégie nationale consiste également à redonner goût aux mathématiques aux enseignants du 1er degré, qui pour bon nombre d’entre eux, viennent d’une licence littéraire. « Parfois, ils n’ont pas assez de connaissances, voire même des blocages. » Face à ce constat, un plan de formation a été mis en place dans toutes les académies, y compris dans le 101ème département, à travers un travail « en constellation » et un apprentissage « par les pairs et les descendants ». Un objectif à réaliser en cinq ans qui exige « un investissement massif pour assurer les remplacements ».
Actoibi Laza, le directeur de l’école de Cavani Stade, voit en cet événement l’opportunité de « créer un lien entre la pause méridienne et la classe ». Son souhait ? « Que les animateurs de la ville s’en emparent pour qu’ils puissent exploiter ces jeux à des fins pédagogiques, dans une dynamique de continuité. » D’ici là, le rectorat compte à son niveau partager les bonnes pratiques du jour et les répandre dans les autres établissements scolaires de l’île aux parfums. Quoi de mieux pour clôturer cette matinée qu’un exercice de calcul mental grandeur nature pour déterminer celles et ceux qui participeront à la finale départementale au mois de juin !
Alors que la seconde vague s’estompe doucement, la directrice de l’agence régionale de santé aimerait accélérer le rythme de vaccination. Un enjeu de santé publique, avec l’approche du ramadan, et au vu de la situation dégradée à La Réunion.
C’est une première et cela se passera à Mayotte. Samedi 3 avril, les quatre centres de vaccination du 101ème département accueilleront toutes les personnes âgées de plus de 18 ans qui souhaitent se faire vacciner contre le Covid-19, sans critère de profession ou de comorbidité. Une stratégie qui va au devant de celle impulsée au niveau national, toujours ciblée sur les publics prioritaires, par tranches d’âge et facteurs de risques.
“Nous souhaitons faire cette grosse opération, car nous sentons une demande pour ouvrir les centres le samedi, pour les gens qui ne peuvent pas se rendre disponibles la semaine”, explique Dominique Voynet, la directrice de l’agence régionale de santé (ARS), qui organisait une conférence de presse ce jeudi. “Nous allons proposer cela pour les plus de 40 ans voire toute personne se présentant et qui a plus de 18 ans”, précise-t-elle. À noter que pour les candidats ayant déjà contracté le coronavirus, un délai de trois mois est préconisé avant l’injection, et une seule piqûre suffit. Par ailleurs, s’il est demandé pour des questions pratiques de se présenter muni de sa carte vitale, “la vaccination n’est en aucun cas réservée aux assurés”. “L’immunité collective ne dépend pas de si la personne a des papiers ou non”, insiste l’ancienne ministre.
Trop peu de candidats à la vaccination
Le but de la manœuvre est clair : écouler les doses de Pfizer/BioNTech, qui reste le seul vaccin utilisé sur l’île. “Nous avons beaucoup de vaccins en stock, et si nous ne les consommons pas, on ne nous en enverra plus”, prévient Dominique Voynet, qui reconnaît un résultat moins satisfaisant qu’espéré, depuis l’arrivée du super-congélateur et le lancement de la campagne le 25 janvier dernier. Et ce, alors même que Mayotte a déjà bénéficié de règles assouplies par rapport aux autres départements français, compte tenu des spécificités locales. Ainsi depuis déjà plusieurs semaines, les plus de 60 ans avec ou sans comorbidité peuvent prétendre à la vaccination, contre 70 ans au niveau national ; et certains professionnels indispensables du fait de l’isolement du territoire, comme les agents de l’aéroport, du port, ou ceux en charge de la gestion de l’eau, ont été intégrés aux populations cibles, dans le cas de Mayotte.
Malgré cela, moins de 10% de la population à vacciner a reçu la première injection. Dans le détail, 13.533 personnes ont reçu la première dose, et 4.234 la seconde. “Il faudrait arriver à 30.000 dans les meilleurs délais.” Une lenteur qui s’explique notamment par les rumeurs qui circulent et que l’ARS tente constamment de démentir. Comme cette idée que le vaccin provoque la maladie. À ce sujet, la directrice de l’autorité sanitaire rappelle que si une suspicion d’incident survient, un dossier de pharmacovigilance est immédiatement transmis. À ce jour, seuls deux cas ont fait l’objet d’un tel rapport. “Le bénéfice est très supérieur au risque”, résume Dominique Voynet.
Atteindre l’immunité collective ?
Or l’enjeu de la vaccination reste de taille à Mayotte, alors que le ramadan approche et que La Réunion connaît une nouvelle flambée épidémique. L’ARS envisage de rapatrier certains patients mahorais, pour libérer des lits sur l’île Bourbon. Un geste de solidarité, alors que de notre côté de l’océan Indien, les remous de la seconde vague continuent à s’estomper. Le taux d’incidence est repassé sous le seuil d’alerte, avec 94,8 cas pour 100.000 habitants, de même que le taux de positivité des tests, avec 7,5%, ce qui confirme cette tendance épidémique favorable (sans cet indicateur, l’analyse pourrait être biaisée, car la baisse du taux d’incidence pourrait aussi simplement s’expliquer par la baisse du nombre de tests effectués). La crise passée, l’ARS va par ailleurs lancer une étude de séroprévalence pour déterminer la progression de l’immunité collective à Mayotte.
De son côté, le centre hospitalier retrouve aussi progressivement son organisation classique. Un tiers des effectifs du service de santé des armées s’est envolé, de même que l’Élément de sécurité civile rapide d’intervention médicale (ESCRIM), qui laisse derrière lui l’hôpital de Pamandzi, partiellement en service. Pour l’instant, seule reste ouverte la permanence de soins au rez-de-chaussée, le temps de finir les travaux et d’inaugurer officiellement l’établissement, entièrement équipé cette fois-ci, au mois de mai.
Alors que les polémiques enflent sur les réseaux sociaux à la suite des images de baignades dans la retenue collinaire de Dzoumogné, Pierre Tremble, le responsable du service santé environnement de l’agence régionale de santé, revient pour Flash Infos sur les dispositifs mis en place pour garantir la qualité de l’eau.
Flash Infos : Une image a circulé ce week-end sur les réseaux sociaux : on y voit des gens se baigner, faire leur lessive, dans la retenue collinaire de Dzoumogné. La photo interroge : comment garantit-on la qualité de cette eau, par quelles étapes passe-t-elle avant d’arriver dans les robinets ?
Pierre Tremble : Effectivement, les retenues collinaires ne sont pas des sites autorisés à la baignade car ces sites ne sont pas aménagés pour cette activité, qui peut donc être dangereuse. De plus, ces retenues étant des captages d’eaux destinées à alimenter les usines de potabilisation, elles doivent être protégées des détériorations éventuelles qui pourraient survenir sur les ouvrages et les équipements, et préservées du déversement d’éventuels produits polluants qui pourraient nuire à la qualité de l’eau.
Les eaux des retenues, dites brutes – c’est-à-dire avant traitement – sont captées puis acheminées via des canalisations et des pompes jusqu’aux usines de traitement, chargées de rendre ces eaux potables. Tout d’abord, l’eau passe par des grilles qui retiennent les gros éléments ou déchets, puis celle-ci passe par un étape de floculation/décantation afin de regrouper les impuretés et les matières en suspension en « paquets » pour les retirer plus facilement. Les eaux sont ensuite filtrées afin de retenir les petits éléments pouvant encore être présents. Enfin, les eaux sont désinfectées par chloration, ce qui permet d’éliminer les bactéries et autres micro-organismes, afin de garantir que l’eau soit potable jusqu’au robinet du consommateur.
Dans le but de garantir la qualité de l’eau, les personnes responsables de la production et de la distribution de l’eau (PRPDE), à savoir le SMEAM et la SMAE à Mayotte, ainsi que le service santé environnement de l’ARS réalisent de nombreux prélèvements d’eau toute au long de l’année, à la ressource, en sortie des usines, sur les réservoirs d’eau mais aussi directement à la sortie du robinet des consommateurs. Ces prélèvements sont transportés et analysés par des laboratoires à Mayotte, à La Réunion et en métropole, afin de s’assurer que les limites de qualité de l’eau respectent la réglementation. En cas d’anomalies, des mesures correctives immédiates sont mises en place (adaptation des traitements) et des contrôles sont effectués afin de s’assurer du retour à la normale de la situation et du respect des limites de qualité d’eau. En cas de doute ou de risques particuliers, la PRPDE et/ou l’ARS peuvent réaliser à tout moment des contrôles et des analyses supplémentaires. C’est notamment ce qui a été mis en place lors des épisodes de coupures d’eau. Ce sont ainsi 750 prélèvements qui ont été réalisés par le service santé environnement de l’ARS en 2020 et près de 26.000 paramètres qui ont été analysés en laboratoires.
FI : Outre les baignades, y a-t-il toujours des risques de contamination des retenues collinaires ? Et si oui, quels sont-ils ?
P. T. : Il peut malheureusement toujours y avoir des risques de contamination de l’eau, que l’origine soit humaine – on parle alors d’origine anthropique – ou bien d’origine naturelle ou environnementale, lorsque les polluants sont d’ores et déjà présents dans le milieu naturel à proximité des captages d’eau. Il existe plusieurs types de contaminations susceptibles de nuire à la qualité de l’eau : risques chimiques, biochimiques ou bactériologiques. Par exemple, des risques de contamination bactériologiques par des écoulements d’eaux usées, de pollution chimique du fait d’un écoulement d’hydrocarbures à proximité du captage d’eau, ou encore des risques biochimiques du fait d’apports en azote ou phosphore susceptibles de favoriser la prolifération de cyanobactéries.
Outre les prélèvements d’eau destinés à être analysés en laboratoire, les équipes des PRPDE et des préleveurs de l’ARS réalisent aussi des mesures « terrains » et des contrôles visuels, olfactifs, voire gustatifs directement auprès des ressources d’eaux brutes et des eaux traitées.
FI : Avant cela, il y a eu une alerte à Musical plage, qui a été interdite pour cause de contamination. Comment l’ARS s’en est-elle rendue compte ? D’où vient le problème, et comment a-t-il été résolu ?
P. T. : La cellule Eaux de Loisirs de l’ARS Mayotte réalise pour le compte des communes des prélèvements et des analyses de l’eau des sites de baignades déclarés et ce, tous les mois de l’année. L’ARS travaille avec le Laboratoire Vétérinaire et d’Analyses Départemental – LVAD – de Mayotte. Plusieurs paramètres physico-chimiques sont contrôlés ainsi que les paramètres bactériens comme les entérocoques ou escherichia coli.
Dans le cas de Musicale Plage, il a été retrouvé la présence de bactéries à un niveau supérieur aux limites fixées par la réglementation. Nous avons donc demandé à la commune de fermer le site de baignade afin d’éviter tout risque sanitaire pour la population, ce qui a été fait par arrêté municipal. Nous avons procédé à un nouveau contrôle de la qualité de l’eau. L’analyse ayant révélé une qualité d’eau compatible avec la baignade, celle-ci a été de nouveau autorisée. L’origine de la contamination temporaire du site de baignade est probablement en lien avec de fortes pluies les jours précédant le contrôle, qui ont lessivé les sols et entraîné des matières contaminées jusqu’au site de baignade. C’est la raison pour laquelle la baignade est fortement déconseillée pendant au moins trois jours après un épisode de fortes pluies.
Les pollutions des sites de baignades peuvent aussi avoir d’autres origines, comme les déjections d’animaux, les déchets, ou le déversement d’eaux usées à proximité des sites de baignades.
FI : Et là encore, comment fonctionne le travail d’analyse, quelles sont les étapes pour tester l’eau ?
P. T. : Le contrôle sanitaire des eaux de baignade est essentiel, mais il ne peut pas tout voir. Les communes sont compétentes pour procéder régulièrement à des inspections notamment visuelles des sites de baignade. C’est à ce moment-là que peuvent être décelées les sources de pollution comme un déversement d’eaux usées par exemple. Il est du rôle des communes de faire cesser ou de supprimer ces sources de pollution. Les équipes de préleveurs et de techniciens à l’ARS remontent aussi aux communes les informations constatées lors des contrôles des sites de baignades.
Enfin, l’ARS travaille avec les communes sur la réalisation de « profils de vulnérabilité » sur l’ensemble des sites de baignades. Ce document réglementaire, qui doit être mis à jour régulièrement, identifie, analyse et propose des solutions afin d’éviter la dégradation de la qualité de l’eau des sites de baignades. Cette année, l’ARS accompagnera financièrement et techniquement les communes volontaires pour remettre à jour ces profils de vulnérabilité, et permettre que les plages de Mayotte puissent continuer à accueillir les habitants et les touristes dans les meilleures conditions possibles.
Mis en liquidation en 2014, le syndicat mixte d’investissement pour l’aménagement de Mayotte existe toujours bel et bien. Depuis six ans, il s’acharne à trouver des consensus auprès des 17 communes et du Département pour transférer tous les biens et les terrains à son actif. Pas une mince affaire alors qu’un nouveau président doit être élu ce vendredi pour mener à bien cette mission complexe.
En liquidation par arrêté préfectoral à la suite des délibérations des collectivités membres en octobre 2014, le syndicat mixte d’investissement pour l’aménagement de Mayotte a toujours un genou debout. Ce vendredi après-midi, il doit d’ailleurs élire son nouveau président qui prendra la relève d’Hidaya Mahafidou. Ce jeudi est ainsi l’occasion de dresser le bilan de la dernière mandature.
Six années de dur labeur qui ne permettent toujours pas de faire disparaître définitivement le SMIAM de la sphère politique après sa création en 1979. Une raison simple justifie ce parcours semé d’embûches. « Il faut démystifier cette affaire, une liquidation peut prendre dix ans », prévient Chanoor Cassam, le directeur vacataire. Pour mener à bien cette mission, les deux survivants se basent sur le principe de la territorialisation, à savoir que les communes récupèrent la propriété de l’ensemble des équipements sur leur territoire. Le transfert de patrimoine, comprenant 172 écoles et 60 équipements sportifs, acte ainsi la première tranche en janvier 2019.
Sans unanimité, tout capote
Restent les cas jugés complexes, comme les bâtis sur les propriétés privées, les terrains nus du SMIAM et les autres actifs immobiliers. Une deuxième tranche beaucoup plus délicate à valider. À cause notamment du siège du syndicat. Bâtiment qui abrite celui de la Cadema. « Mamoudzou a décidé de le laisser au Département, mais les élections municipales de juillet dernier ont rebattu toutes les cartes. Certains nouveaux maires, que nous avons appelés vendredi dernier, ont quelques observations sur ce transfert… Or, si nous n’avons pas l’unanimité du comité syndical, tout capote ! » Un autre exemple, avec l’école de Chiconi située face à la pharmacie Souimanga, vient démontrer la complexité de ces négociations. L’établissement scolaire est géré par la commune mais il est situé sur le cadastre de Sada. La solution dans ce cas de figure ? « La transférer à la communauté de communes du Centre-Ouest. » Encore faut-il que les deux maires soient déjà d’accord…
Pour la troisième tranche, qui regroupe les actifs financiers, le conseil départemental souhaite récupérer les actions de la SIM. En ce qui concerne le transfert de la trésorerie, qui s’élève aujourd’hui à 8.5 millions d’euros, Hidaya Mahafidou et Chanoor Cassam proposent « d’indexer les montants aux surfaces privées à régulariser pour indemniser les communes concernées ».
Avec un total de 564 biens et terrains recensés pour une valeur de bâti estimée à 61 millions d’euros et une valeur foncière de l’ordre de 362 millions d’euros, le SMIAM est assis sur une belle mine d’or. Et cette nouvelle élection pourrait donner quelques sueurs froides au nouvel élu. D’autant que ceux qui s’apprêtent à passer la main estiment une fin de liquidation d’ici « un à quatre ans ». Bonne chance !
Si ce plan du gouvernement pour réformer l’hôpital public n’a pas eu le même retentissement médiatique qu’au niveau national, le département et ses soignants ont, eux aussi, bénéficié de ses retombées. De quoi faire un pied de nez à l’idée que l’île aux parfums est toujours sous-dotée.
Ce nom a fait couler beaucoup d’encre de l’autre côté du globe, mais beaucoup moins à Mayotte. Plusieurs explications possibles à cela. L’on pourra citer par exemple le fait que le 101ème département a été moins touché par la première vague de Covid-19 que d’autres régions de France métropolitaine. Ou encore que le centre hospitalier de Mayotte (CHM) est le seul établissement non soumis à la tarification à l’activité, ce mode de financement très critiqué qui a, selon ses détracteurs, plongé l’hôpital public dans une course à la rentabilité perverse, en attribuant la dotation des établissements en fonction des actes réalisés. Sans parler des primes destinées à rendre Mayotte plus attractive pour le personnel soignant.
Quoi qu’il en soit le Ségur de la santé trouve des déclinaisons dans le 101ème département. À l’origine, cette vaste consultation lancée au moment de la première vague en France devait permettre d’apporter des solutions face aux fragilités du système de santé que la crise Covid a fait éclater au grand jour. Conclu en juillet 2020, ce plan du gouvernement s’articule autour de plusieurs volets, de la revalorisation du statut, des conditions de travail et de rémunération des personnels de santé hospitaliers médicaux et paramédicaux, à l’ouverture de nouveaux lits en passant par la formation et le recrutement de 15.000 agents. En tout, le gouvernement a notamment annoncé 19 milliards d’euros d’investissement dans le système de santé pour améliorer la prise en charge des patients et le quotidien des soignants.
Plus 183 euros nets mensuels pour le personnel paramédical
Voilà pour les grandes lignes. Concrètement, à Mayotte, ce sont 2.457 personnels paramédicaux qui ont pu bénéficier d’une revalorisation de salaire de 183 euros nets mensuels, et 118 médecins qui ont obtenu l’indemnité d’engagement de service public exclusif (IESPE) les engageant à rester au moins trois ans à leur poste à l’hôpital, sans consultation privée. Et plus de 200 médecins vont voir leur salaire revalorisé avec la création de deux échelons supplémentaires en fin de carrière. L’attribution des investissements pour les hôpitaux va aussi évoluer, ce qui permettra notamment pour les agences régionales de santé d’instruire et de valider directement les dossiers pour des crédits de moins de 150.000 euros.
60 millions d’euros pour Mayotte
Quant à l’enveloppe de 19 milliards d’euros, Mayotte n’est pas en reste avec 26 millions dédiés au désendettement, et 33 millions pour les investissements. De jolis coups de pouce, alors que le 101ème département a déjà pu bénéficier d’aides de la part de l’État, comme les 176 millions d’euros octroyés pour le deuxième hôpital ou encore les 2,4 millions obtenus en fin d’année dans le cadre du Covid. En clair, “Mayotte a été très bien aidée”, conclut Dominique Voynet, la directrice de l’ARS. De quoi avancer sur les futurs chantiers, comme le deuxième hôpital, le développement de la médecine de ville générale ou spécialisée, la modernisation des protections maternelles et infantiles (PMI), ou encore la formation des infirmiers et sage-femmes sur le territoire… Les idées ne manquent pas !
Le syndicat mixte d’eau et d’assainissement de Mayotte (SMEAM) et la SMAE ont été au cœur de nombreuses polémiques ces derniers mois. La population est montée au créneau à cause des factures anormalement élevées ou des coupures d’eau répétitives. Dernier épisode en date, la coupure de trois jours dans le nord de l’île. Le directeur général des services du SMEAM, Ibrahim Aboubacar, fait le point.
Flash Infos : L’île a été sujette à des coupures d’eau alors que l’on pensait être sorti de la crise. Quelles sont les causes de ces coupures ?
I.A : Il y a deux catégories de coupures d’eau. Celles liées à des travaux d’entretien préventifs. Ces coupures donnent lieu à des communiqués de la part du délégataire (SMAE), 48h avant les travaux. Ce sont des travaux d’entretien programmés qui ont généralement lieu entre 9h et 14h, des horaires qui n’ont pas d’impacts importants sur les usagers. Il y a ensuite les coupures exceptionnelles comme celle dans le secteur du nord qui a duré du vendredi 19 mars au lundi 22. Ce sont des coupures qui sont dues à des accidents ou des pannes d’exploitation sur le réseau. L’intervention et la réparation relèvent du ressort de la SMAE. Lors de cet épisode précis, il y a eu des événements successifs pendant ce laps de temps. Des casses sur les réseaux ont été constatés, et il y a eu en même temps des problèmes de pannes sur le dispositif de pompage qui envoie l’eau de Dzoumogné vers Handrema. C’est la succession de tous ces problèmes et le temps pour les réparer qui ont mis le réseau hors contrôle pendant trois jours.
FI : S’agit-il de casses volontaires ?
I. A. : Je n’ai pas encore le rapport d’incidence précis de l’exploitant sur ce point-là. Il doit nous le fournir pour déterminer l’origine exacte de ces casses.
FI : Les usagers se plaignent de n’avoir eu aucune communication de votre part ou de la SMAE…
I. A. : Nous n’avons pas communiqué parce que nous n’avions pas d’éléments pour le faire. C’est l’exploitant qui doit communiquer. Or, sur l’incident du dernier week-end, il nous a indiqué qu’il ne pouvait donner aucune information parce qu’il n’avait pas de visibilité sur la situation.
FI : Pour quelles raisons l’eau est-elle trouble lorsqu’elle revient ?
I. A. : Lorsqu’il y a des coupures, le réseau n’est pas sous pression, il se vide et comme les canalisations ne sont pas étanches, il y a un certain nombre de matières qui entrent dedans. Quand l’eau revient, le réseau est à nouveau sous pression et ces matières sont chassées. L’eau retrouve sa qualité normale, mais il y a tout de même quelques matières qui restent et coulent dans les robinets. C’est pour cela qu’il faut bouillir l’eau avant de l’utiliser dans les premières heures.
FI : Un autre sujet inquiète la population. Des usagers reçoivent des factures de plusieurs milliers d’euros et ne comprennent pas la cause. Avez-vous étudié la question ?
I. A. : Nous avons eu des réunions avec les associations des usagers, nous avons discuté avec le délégataire pour identifier le problème. Plusieurs raisons pourraient expliquer ce phénomène : l’erreur humaine, et dans ce cas le délégataire corrige la facture dans la foulée si c’est identifié. Ensuite, pendant la crise sanitaire, à partir d’avril jusqu’en octobre 2020, le rythme des relevés des compteurs n’a pas été régulier, ce qui a donné lieu à des montant de factures inexactes. Nous avons demandé au délégataire de procéder à une rectification à chaque fois que cela est identifié. Il y a peut-être aussi une autre raison évoquée par les usagers qui pourrait être liée à des dysfonctionnements de compteurs quand il y a les coupures d’eau. Les compteurs tournent de manière anormale après que l’eau soit rétablie, mais c’est un phénomène beaucoup plus difficile à identifier pour nous, parce qu’il est aléatoire et compliqué à démontrer. Les usagers qui se trouvent dans cette situation doivent nous envoyer leurs factures pour qu’elles soient examinées au cas par cas. Nous rectifions tous les problèmes à condition que l’usager arrive à démontrer qu’il n’y a pas eu de fuite dans son réseau de distribution dans la maison. Mais effectivement, ces factures anormalement élevées sont suffisamment nombreuses pour que nous pensions qu’il y a quelque chose qui s’est véritablement passé. Nous avons donc demandé des investigations supplémentaires. Pour l’instant, nous n’avons pas encore les résultats.
FI : Est-ce que l’usager doit payer la facture avant de faire la réclamation ?
I. A. : Normalement oui, c’est la procédure ! Mais lorsque l’on a une facture de plusieurs milliers d’euros qui dépassent ses capacités, comment la payer ? Donc il faut faire immédiatement la réclamation. À savoir que lorsque le délégataire constate une consommation anormalement élevée, quelle que soit la raison, il doit informer immédiatement le client. De manière préventive, ce que nous pouvons conseiller aux usagers c’est de lire régulièrement leurs compteurs, par exemple une fois par semaine, pour s’assurer qu’il ne déraille pas.
Ce jeudi 25 mars se déroulait le comité de pilotage sur le suivi de la mise en œuvre de la convention entre le Département et l’État relative aux concours de l’État en faveur de l’aide sociale à l’enfance. Sur ce volet, l’exécutif de la collectivité a réalisé un effort considérable depuis 2017. Seul hic, les dépenses budgétaires explosent au vu du nombre d’enfants pris en charge.
Depuis 2016, le Département mène une politique dédiée en termes d’aide sociale à l’enfance. Matérialisée l’année suivante par la signature d’une convention avec l’État, qui octroie à la collectivité une compensation annuelle de 9.594.939 euros dès 2018. Une soupape financière conséquente devenue bien trop maigre au fil des ans, en raison notamment de l’ouverture de deux maisons d’enfants à caractère social (40 places) et de 15 lieux de vie d’accueil (132 places). Et du doublement du nombre de familles d’accueil sur la période (203 contre 92). « Fatalement, le budget a augmenté, du simple au triple », signale Abdou-Lihariti Antoissi, le directeur de la protection de l’enfance au conseil départemental.
Or, et c’est là que le bât blesse, si les capacités d’accueil s’élèvent à 826 en 2021, le nombre d’enfants placés est également en très nette augmentation avec pas moins de 909 jeunes. « Nous avons beau créer beaucoup de places, 550 pour être exact, mais nous avons toujours un delta négatif », souffle-t-il face à ce ratio. Et si le procureur de la République souligne le chemin parcouru – « vous êtes partis de rien et en dix ans, vous avez un organigramme et un ordre de marche » -, Yann Le Bris pointe du doigt les « difficultés structurelles ». À l’instar du manque d’assistants socio-éducatifs. « Quand un enfant est confié, l’objectif de la justice est qu’il ne soit pas confié ad vitam eternam. Or, en [leur] absence, le lien entre les familles d’accueil et les familles biologiques ne se fait plus. Il y a une rupture complète. » Idem pour les rapports demandés par les juges des enfants à la date d’échéance de la mesure.
Pas assez d’éducateurs formés sur le territoire
Sur ce point, Abdou-Lihariti Antoissi rappelle tout de même que le nombre d’éducateurs est passé de 22 à 38. « Dès qu’ils se présentent, ils sont embauchés de suite, à condition qu’ils soient diplômés. Nous voulons bien en recruter davantage, malheureusement, il existe un déficit [en termes de demandes] sur le marché », annonce-t-il pour défendre sa position. Conséquence : « Un éducateur doit suivre entre 25 et 30 enfants, au-delà c’est du bricolage… Chez nous, la moyenne est de 50. En sachant que plus de 200 enfants n’ont pas de référent au service placement ! »
Concernant la cellule de recueil des informations préoccupantes, le directeur de la protection de l’enfance reconnaît quelques couacs, malgré encore une fois l’augmentation des effectifs au cours des cinq dernières années. « Nous avons conscience que ce n’est pas suffisant. Les partenaires qui saisissent la CRIP n’ont pas toujours de retour, mais cela ne veut pas dire que le boulot n’est pas fait. » Alors pour y remédier, il compte lancer un appel à projets « mineurs non accompagnés » et confier aux associations l’évaluation de la minorité, de l’isolement et du danger ainsi que la mise à l’abri de 21 jours maximum.
Révision du budget alloué par la convention
Face à tous ces dysfonctionnements, Abdou-Lihariti Antoissi plaide pour une renégociation du montant alloué à Mayotte à l’occasion du renouvellement de la convention avec l’État l’an prochain. Avec un budget prévisionnel de l’ordre de 48 millions d’euros pour l’année en cours, l’aide sociale à l’enfance doit déjà trouver de nouvelles sources de financement, comme la contractualisation, pour rentrer dans les clous. « L’enveloppe s’épuise : avec le solde restant de 15 millions d’euros, nous sommes à 24 millions d’euros. Et ce sera pire en 2022 car nous n’aurons plus rien dans les caisses », interpelle le directeur. Sans compter la prochaine prise en charge des femmes enceintes et des mères d’enfants de moins trois ans isolées.
Alors pour y arriver, l’heure est au consensus entre le Département et l’État. « Il faut qu’ils se mettent d’accord sur une clé de répartition. Si nous voulons faire de la qualité en respectant les textes, cela coûte cher. » Mais indépendamment de l’aspect financier, deux problématiques majeures restent à régler selon la collectivité. La porosité des frontières en amont : « 80% des enfants suivis sont liés à l’immigration. » Le désengorgement du territoire, en aval, au nom de la solidarité nationale. « Nous devons stopper l’hémorragie pour continuer à exercer cette mission avec fierté », insiste Issa Issa Abdou, le vice-président en charge de l’action sociale, qui se projette déjà sur la prochaine mandature en bon candidat aux élections départementales du mois de juin.
Depuis le 15 mars, le 101ème département sort progressivement de ses cinq semaines de confinement. Si les taux de positivité et d’incidence retrouvent des standards nationaux, la tension en réanimation reste encore élevée. Malgré tout, le centre hospitalier de Mayotte reprend petit à petit ses activités. Dans les prochains jours, les services des urgences et de médecine doivent reléguer le Covid au second plan et retrouver un semblant de normalité. Entretien avec Christophe Caralp, chef du pôle Ursec et directeur médical de crise depuis le 28 février.
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Flash Infos : Les cinq semaines de confinement semblent porter leurs fruits si l’on regarde les chiffres du Covid, avec des taux d’incidence et de positivité de respectivement 110.6 et 8% au 23 mars 2021. Ces baisses drastiques se ressentent-elles également au sein du centre hospitalier de Mayotte, en l’occurrence aux urgences et en médecine, des services fortement mobilisés en plein cœur de la crise ?
Christophe Caralp : Depuis la levée du confinement, nous avons une reprise modérée de nos activités ! L’an dernier, nous avions attendu trois semaines pour retrouver les maladies infectieuses, les accidents vasculaires cérébraux et les traumas. Aujourd’hui, l’impact du virus sur le Samu et les urgences est faible. D’où notre intention de fermer dès lundi prochain la filière consacrée au Covid-19.
Idem en médecine. L’unité A4 mise à disposition pour accueillir des patients positifs va rendre ses lits à la chirurgie orthopédique. Tandis que les unités A1 et A3 vont retrouver leur configuration classique, à savoir la médecine classique. À partir du début de semaine prochaine, il n’y aura plus que dix lits dédiés au Covid. Actuellement, nous avons une vingtaine de malades Covid en médecine, dont un seul a une forme respiratoire avec un besoin d’oxygène. Les autres en sont sevrés : il faut simplement s’occuper d’eux, le temps que leurs pathologies se stabilisent.
FI : Par contre, en réanimation, cela semble plus compliqué d’envisager un retour normal à court terme étant donné que la durée moyenne de séjour d’un Covid est beaucoup plus longue (21 jours)…
C. C. : À ce jour [mercredi 24 mars au soir], sur les 19 patients en réanimation, 14 sont des Covid. Pour un tiers d’entre eux, ils sont entre 7 et 15 jours d’hospitalisation, contre plus de trois semaines pour deux tiers. Mais la situation s’améliore également du point de vue de nos capacités. Nous avons donc lancé un plan de normalisation capacitaire qui consiste à fermer progressivement les lits temporaires ouverts pour revenir petit à petit aux 16 lits classiques du service.
La salle de réveil opératoire n’accueille plus aucun patient Covid depuis 12 jours maintenant. Tandis que le service de santé des armées vient de diviser son nombre de lits. Et un tiers du personnel quitte Mayotte dans 24 heures. Les autres effectifs restent jusqu’au 4 avril. À l’heure actuelle, trois patients utilisent leurs cinq lits restants. Ils n’ont pas eu de nouvelles entrées depuis six jours.
Nous nous donnons 15 jours, période à l’issue de laquelle nous espérons lever le plan blanc. Mais, je le dis et le répète, la réanimation reste encore sous tension… Nous ne sommes pas encore sortis d’affaire ! Par contre, si les habitants continuent d’appliquer scrupuleusement les gestes barrières, nous pourrons retrouver une activité globalement normale.
FI : Avec la réouverture des écoles et l’approche du ramadan, ne craignez-vous pas un rebond de l’épidémie alors que tous les renforts envoyés à Mayotte plient progressivement bagages ?
C. C. : Concernant les renforts, je rappelle que le service de santé des armées devait, à l’origine, ne rester que six semaines. Grâce aux négociations du CHM et de l’ARS, nous avons réussi à grapiller quelques jours supplémentaires. Sans eux, cela aurait été compliqué ! Tandis que l’ESCRIM (élément de sécurité civile rapide d’intervention médicalisée) a passé le relais lundi matin aux équipes de l’hôpital de Petite-Terre. La permanence de soins située au rez-de-chaussé fonctionne normalement. Et la maternité devrait migrer de Dzaoudzi d’ici peu. Par contre, l’étage est encore travaux le temps de lever la fin des réserves dans le but d’ouvrir pour la 2ème ou 3ème semaine d’avril les six lits de soins de suite et de réadaptation. Pour la réserve sanitaire, les rotations devraient s’arrêter très prochainement au vu de l’amélioration ici et des besoins dans certains autres territoires.
Pour ce qui est d’un éventuel rebond, nous considérons qu’il faut deux cycles d’incubation pour pouvoir analyser les conséquences de la levée du confinement, c’est-à-dire deux fois dix jours. Nous pourrons donc voir ses effets d’ici la fin de la semaine. Aujourd’hui, c’est un optimisme modéré qui m’habite ! Deux éléments me poussent toutefois à garder confiance en l’avenir : l’immunité collectivité de la population (19.224 cas ont été confirmés depuis le début de l’épidémie) et surtout la vaccination. J’encourage d’ailleurs le maximum d’habitants à se faire vacciner pour éviter une nouvelle vague à la sortie du ramadan…
Le mouvement Le Temps d’Agir, présidé par Soula Saïd Souffou, vient de publier un plan de la santé des Mahorais. Il regroupe 50 propositions visant à développer le système de santé à Mayotte. L’installation d’un centre hospitalier universitaire semble être l’une des principales solutions.
La santé, un sujet encore épineux à Mayotte. Nombreux sont ceux qui pointent du doigt le fonctionnement du centre hospitalier de Mayotte, dénoncent le désert médical de l’île ou encore ré-clament la formation de médecins mahorais. Le comité de réflexion du mouvement Le Temps d’Agir s’est penché sur toutes ces questions et 50 propositions découlent du travail fait pendant des mois. Le membres du parti ont fait une série de consultations auprès des organisations syndicales, des professionnels de santé qui travaillent au CHM et dans le privé. Ils ont également interrogé des patients et d’autres qui ont pu bénéficier de l’évacuation sanitaire. “De façon unanime, la population dit que le système actuel doit évoluer. L’essentiel des personnes pensent que nous devons avoir un nouvel hôpital mais aussi un centre hospitalier universitaire”, annonce Soula Saïd Souffou, président du mouvement.
Le potentiel centre hospitalier universitaire de Mayotte paraît d’ailleurs comme la principale solution pour mettre un terme à tous les dysfonctionnements du système de santé mahorais. Et le candidat déchu à la mairie de Sada balaye d’un revers de la main tous les avis qui s’y opposent. “Nous avons entendu les critiques contre le CHU au motif que beaucoup de départements d’Outre-mer n’en ont pas, mais devons-nous nous enorgueillir ? C’est un échec pour la République. Il existe des départements qui ont à peu près la même population que Mayotte et qui sont dotés de CHU. Alors pourquoi il n’y en aurait pas chez nous ?”, s’étonne l’ancien DGS de la mairie d’Acoua. Selon lui, la pérennisation des évacuations sanitaires n’a que trop duré. Elles devraient être l’exception et non la règle. Mais Soula Saïd Souffou est réaliste et sait que cet hôpital ne pourra être créer du jour au lendemain. Il propose alors de mettre en place un calendrier sur le long terme. “La programmation du CHU doit se faire dès maintenant pour que nous sachions dans combien d’années il sera effectif. L’échéance devrait être de dix à quinze ans, au plus tard vingt ans.”
Former des médecins mahorais, une urgence
Le président du mouvement Le Temps d’Agir propose ce laps de temps pour une raison très simple. Des professionnels de santé mahorais devraient exercer dans ce futur CHU de Mayotte et la formation d’un médecin dure environ dix ans. Et selon lui, l’agence régionale de santé doit mettre en place une stratégie efficace. “Chaque département négocie avec les facultés de médecine pour qu’il y ait un quota d’étudiants qui passent en deuxième année. L’ARS n’a négocié avec aucune université, cela n’est pas normal”, s’indigne-t-il. Et si cela ne fonctionne pas, une autre solution serait également envisageable. “Les étudiants peuvent aller se former dans d’autres pays européens comme la Roumanie qui n’a pas ce problème de numerus clausus. Et les études que nous faisons dans ces pays sont reconnues par la France.”
Mais avant de pouvoir être soigné par ces futurs médecins mahorais, il faudra faire preuve de patience et gérer un autre problème plus urgent, le fameux désert médical. Malgré les salaires souvent très élevés des médecins qui s’installent à Mayotte, l’île peine à en recruter et à les faire rester. Le remède de ce problème se trouve peut-être en dehors de la France. “Pourquoi nous n’allons pas chercher des médecins dans d’autres pays européens comme en Suisse, en Belgique, en Roumanie ? Ces pays forment les médecins dans les normes internationales et européennes. Nous pouvons aussi aller recruter dans les pays voisins de la région, comme à Madagascar ou à Maurice où leurs médecins vont se former en Europe”, propose Soula Saïd Souffou. Encore faudrait-il qu’ils acceptent de venir à Mayotte…
“Il n’y a pas de volonté de développer la santé à Mayotte”
Le mouvement Le Temps d’Agir a pris le temps d’élaborer un plan détaillé pour améliorer le système de santé de Mayotte, une tâche qu’aurait dû effectuer l’ARS du territoire. “L’ARS existe de-puis trois ans, à Mayotte elle est de plein exercice depuis plus d’un an, alors pourquoi elle n’a pas fait de plan de santé ? Et le Covid-19 n’est pas une excuse, parce que cela n’empêche pas de réfléchir. Il n’y a juste pas de volonté de développer la santé à Mayotte”, accuse le président du groupe. Preuve en est, l’île fait toujours partie du plan régional de santé de l’Océan indien, partagé avec La Réunion.
Ou encore le silence radio de la part de l’ARS et de la préfecture à la réception du plan provenant du mouvement. “Nous avons envoyé ce document au président de la République et au gouverne-ment, le ministère des Outre-mer nous a remercié de la réflexion que nous avons menée, alors qu’ici, ni le préfet ni la directrice de l’ARS n’ont eu cette courtoisie”, raconte Soula Saïd Souffou. À cela s’ajoute le fonctionnement de l’agence régionale de santé qui n’aurait pas utiliser la totalité du budget qui lui est alloué. “Il y a un excédent de six millions d’euros. Une institution du service public n’a pas à faire d’excédent, elle doit utiliser tout l’argent à sa disposition en investissant”, rappelle le président du mouvement. Malgré son coup de gueule, Soula Saïd Souffou espère tout de même avoir un retour des autorités compétentes pour commencer le début d’un travail laborieux mais vital à Mayotte.
Il a passé six ans au rectorat de Mayotte pour structurer son service de maîtrise d’ouvrage. Le directeur du pôle immobilier et logistique, Blaise Tricon, s’envolera au mois de mai pour le Nord, où il prendra ses nouvelles fonctions au conseil départemental. Il revient pour Flash Infos sur son bilan à la tête de ce service clé pour le 101ème département, confronté à une démographie galopante et qui manque encore de quelque 800 classes pour accueillir tous les élèves.
Flash Infos : Vous partez après six ans passés à organiser le service maîtrise d’ouvrage du rectorat. Quel était l’état du parc immobilier et de ce pôle à votre arrivée ?
Blaise Tricon : C’était une division assez embryonnaire. Pour vous donner une idée, à l’époque, nous étions cinq et nous sommes passés à 16 personnes dans le service. Cette situation d’origine était aussi liée au fait que la Direction de l’environnement, de l’aménagement et du logement pilotait les opérations de construction pour le compte du rectorat. Depuis, la Deal s’est focalisée sur le premier degré, et de notre côté, nous avons renforcé les équipes en interne pour les collèges et les lycées. En parallèle, nous avons mis en place de nouveaux outils. Quant au parc immobilier en lui-même, il s’est rajeuni, dans la mesure où nous avons livré quatre collèges et un lycée, pour un total de 32 établissements. Et nous avons aussi rénové pas mal de structures de type béton, très caractéristiques du courant des années 2000, comme le collège de Dembéni et de Passamaïnty. En 2015, certains de ces établissements étaient dans un assez mauvais état…
FI : Vous parlez de nouveaux outils. Justement, qu’avez-vous mis en place d’un point de vue technique et humain pour professionnaliser le service immobilier du rectorat ?
B. T. : Vous touchez du doigt le cœur de ma fonction ! En tant que directeur de pôle, la première étape a été de bien distinguer deux entités : d’un côté, celle de la maintenance, de la gestion du patrimoine, sorte de S.A.V. où vous êtes la tête dans le guidon, pour réparer, pour répondre à la demande constante ; de l’autre, celle du pilotage des projets de constructions et de réhabilitations, qui a une vision stratégique et qui met en œuvre le plan d’investissements de 334 millions d’euros sur la période 2019-2022. Ce qui n’enlève en rien à l’utilité et la complexité de la première, entendons-nous bien : nous avons quand même à gérer les huit plus gros collèges de France, entre autres. J’ai donc recruté deux adjoints pour ces deux départements, ce qui déjà est une organisation en soi. Après il a fallu faire un diagnostic de notre patrimoine, ne serait-ce qu’en termes de surface. Cela peut sembler trivial, mais quand je suis arrivé, nous étions tellement dans l’urgence de répondre aux besoins du territoire que nous n’avions pas pris le temps de nourrir notre connaissance, tant sur les aspects quantitatif que qualitatif. Depuis, nous avons mis en place un réseau de maintenance avec les 32 gestionnaires d’établissements et nous avons fait un groupement de commandes ce qui nous a permis de passer un marché à bons de commande, sur lequel nous avions beaucoup communiqué il y a deux ou trois ans. L’idée était de permettre à des entreprises de toutes tailles de travailler avec nous. Aujourd’hui, nous avons des partenaires dans la durée, qui peuvent répondre de manière rapide à nos besoins. Nous avons externalisé beaucoup de compétences sur des acteurs économiques du territoire, dans une logique de développement du tissu économique local. Rien que pour cette partie patrimoine, nous parlons d’environ 9 à 10 millions d’euros par an de commande publique, ce n’est pas négligeable !
FI : Qu’en est-il du deuxième département, axé sur les constructions et la stratégie, comment s’est-il développé ?
B. T. : Nous avons une philosophie, valable pour les deux services, mais qui s’applique d’autant plus pour ce deuxième département. Pour les projets immobiliers du rectorat, nous avons deux piliers. Celui de la qualité environnementale, avec cette notion de frugalité, c’est-à-dire viser à être économe aussi bien dans les matériaux choisis que dans l’énergie, et dans la technicité des bâtiments, où nous favorisons le rôle de l’usager plutôt que des systèmes automatisés. Le deuxième pilier, c’est la co-construction des projets, qui vise à associer le plus possible les parties prenantes, que ce soient les enseignants, la communauté éducative mais aussi les élèves, les riverains… ce que nous appelons la maîtrise d’usage. Je pense par exemple aux équipements sportifs, la salle polyvalente du lycée Mamoudzou Nord, ce genre d’espaces qui peuvent être ouverts en dehors du temps scolaire.
FI : Par rapport au tissu économique local : depuis six ans, avez-vous vu changer le paysage des entreprises présentes à Mayotte et cela a-t-il facilité le développement des projets en vous évitant d’avoir à recourir à des entreprises métropolitaines, éloignées du terrain ?
B. T. : En réalité, déjà en 2015, il y avait quand même de l’ingénierie à Mayotte. Nous n’avons jamais été confronté à une situation où nous ne pouvions faire appel qu’à des entreprises de métropole. Néanmoins, petit à petit, le paysage a un peu évolué à différents niveaux. Nous avons des architectes qui se sont installés, qui ont ouvert des agences. Il faut dire aussi que nous avons lancé des projets avec comme condition pour les prestataires de s’installer à Mayotte, ce que certains ont fait, par exemple pour le lycée du bâtiment ou celui de Chirongui. Tout cela est venu souffler un vent nouveau, et a été bénéfique même pour les architectes déjà présents sur le territoire, qui ont été poussés à innover. Bien sûr, cela n’empêche pas que le tissu économique mahorais conserve certains monopoles, duopole ou triopole indéboulonnables. Mais j’ai bon espoir que cela évolue aussi, car nous lançons des marchés globaux de performance qui pourront peut-être inciter des entreprises de La Réunion ou de métropole à apporter une offre de concurrence. D’autant que la commande publique va exploser avec le plan de convergence à 1,8 milliard d’euros.
D’ailleurs, pour le département constructions, nous avons fait appel à trois sociétés qui viennent compléter les effectifs et prêter main forte aux responsables de projets du rectorat : Algoé, Setech et le réseau Scet qui est partenaire de la Sim. Ces trois groupes nationaux viennent renforcer notre ingénierie, notamment sur un métier qui n’existait pas à Mayotte, celui du management de projet et du pilotage d’opérations. C’est un plus pour l’avenir.
FI : Grâce à cette nouvelle organisation, les projets du rectorat avancent. Mais au vu de l’évolution démographique, comment gagnez-vous du temps en attendant les livraisons ? Et surtout, comment vous adaptez-vous compte tenu des projections qui peuvent se révéler caduques le moment venu ?
B. T. : C’est vraiment notre combat, si j’ose dire. Accompagner la démographie de sorte que les conditions d’enseignement restent correctes. Sur les prévisions, toutefois, il est rare qu’elles soient totalement fausses. Mais il est vrai qu’un établissement prend environ cinq ans à sortir de terre. Difficile de faire plus court ! Avec des projections sur les évolutions d’effectifs à un ou deux ans, nous arrivons à anticiper grâce à une stratégie toute simple, qui consiste à créer des extensions. Nous avons mis en place un système sur la base de préfabriqués de type Algeco. Il s’agit d’une salle que l’on peut reproduire assez facilement. Vous pouvez en voir au lycée Bamana, ou encore à Iloni devant le stade. Ces salles sont assez qualitatives, avec une bonne température, une bonne acoustique, de quoi répondre aux exigences pédagogiques. J’ai justement fait un bilan : depuis 2019, nous avons livré 111 salles préfabriquées dans les lycées et 79 dans les collèges.
FI : Pour conclure sur votre bilan, après six années à la tête de ce service, quelle est votre plus grande fierté ?
B. T. : Le lycée du bâtiment ! Nous avons réussi à cristalliser dans un projet toutes les préoccupations précédemment évoquées : le développement durable, la frugalité, la co-construction… Par exemple, l’association des élèves du lycée de Dzoumogné dans les filières du bâtiment a participé activement à la conception de ce lycée. Ils ont aussi participé à la mise en place du faré qui sert de démonstrateur pour ce projet. Il est lui-même construit à partir de matériaux de récupération, issus de la mairie de Sada. Avec ce projet – et je tiens d’ailleurs à rendre hommage au travail précieux de l’agence d’architectes Encore heureux – nous avons posé ensemble les bases de ce que sera la construction de Mayotte demain.
FI : Déçu de ne pas pouvoir le voir en vrai ?
B. T. : C’est rare de voir un projet de A à Z ! J’ai la chance de pouvoir quitter mon poste l’esprit serein, en laissant derrière moi une équipe motivée et compétente, qui continuera sur cette lancée.
Être diagnostiqué avec un cancer à Mayotte rime souvent avec un départ pour la métropole ou La Réunion. Toutefois, le service d’oncologie devient de plus en plus performant sur l’île aux parfums. Feika* a donc pu faire une partie de son suivi ici, au CHM. Elle nous raconte son expérience.
« J’ai été diagnostiquée en 2017 et je suis partie en métropole pour l’opération. Les infirmières en oncologie du CHM m’avaient conseillé de tout commencer là-bas et ensuite de venir suivre ici le protocole de soin. » Diagnostiquée avec un cancer du sein, Feika n’a pas pu se faire opérer sur Mayotte. Cette année-là, le CHM ne comptait pas encore d’oncologue dans ses rangs. Elle a donc rejoint l’Hexagone, toutefois, il lui tenait à cœur de rentrer sur son île où elle habite « depuis plus de trente ans ».
« Si j’avais pu me faire soigner entièrement à Mayotte, je serais restée ici », assure Feika. Selon elle, le service ne fait que s’améliorer à l’hôpital de Mamoudzou. « L’équipe est super, je fais mon suivi là-bas, je suis toujours très bien reçue et il y a un médecin maintenant ! » C’est le docteur Oddou dont parle Feika, la première médecin spécialisée dans l’oncologie du CHM, arrivée en 2019. Une première étape pour un meilleur suivi des soins et l’ombre d’un développement encore plus grand du service.
Manque de moyens sur l’île
Pour Feika, ce sont les accompagnements pour les malades qui manquent le plus à Mayotte. « On perd ses cheveux, et ça, pour une femme, c’est très dur. » Elle raconte que pendant les traitements, pour que les patients gardent le moral, l’hôpital en métropole leur offrait des bons pour des soins, des esthéticiens venaient sur place. « Il s’appelait Guillaume, notre esthéticien, et ça nous faisait du bien, on se sent bien quand on sort de chez le coiffeur ou de l’institut et c’est dommage qu’il n’y ait pas encore ça à Mayotte. »
L’autre manque qu’elle déplore est celui de la prévention. « Quand je suis tombée malade, je ne savais pas du tout à quoi m’attendre. » Elle remarque toutefois que les associations se mobilisent de plus en plus pour la sensibilisation au cancer, « ainsi que l’ARS et la Sécurité Sociale ». Même si elle regrette que le tabou ne se lève pas plus rapidement.
Garder le moral pour s’en sortir
Pour elle, le plus important pendant la maladie était de garder le moral. Elle s’estime heureuse d’avoir pu être soignée en métropole, entourée de sa famille. « Là-bas, des associations, des groupes de musiciens et d’anciennes malades vviennent vous voir pendant le traitement pour chanter, pour nous soutenir, et ça c’est très agréable », confie Feika. Elle aimerait que ce genre d’initiative puisse être pris à Mayotte. Et si elle n’a pas personnellement ressenti le besoin d’avoir un suivi psychologique, elle pointe du doigt le fait qu’il n’y ait pas de service dédié à l’aide psychologique pour les malades du cancer au CHM.
Si Feika tenait à témoigner aujourd’hui, c’est aussi pour rappeler à quel point il est important de se souvenir que « même si ce n’est pas évident, on peut s’en sortir ». Prochainement, des groupes de parole devraient être mis en place ainsi que des journées “bien-être”, offertes aux malades par le biais de l’association Amalca. Si tous ces projets sont en pause, en raison de la situation sanitaire actuelle, l’ancienne malade espère que de plus en plus de gens se sentiront concernés.
Dans une volonté d’accueillir les Jeux des Îles 2027 et afin d’améliorer les infrastructures des sportifs mahorais, plusieurs grands chantiers poussent comme des champignons dans la ville de Mamoudzou. Petit à petit, les plateaux couverts prennent forme et un gymnase se dessine même à M’gombani. Et si les travaux ont pris un peu de retard à cause de la crise sanitaire, les plannings seront bel et bien respectés.
« Nous avons utilisé un procédé assez novateur avec la toile, qui laisse passer la lumière mais pas la chaleur », souligne Stéphane Aimé, le fondateur de Tand’m architectes, en charge de trois projets sportifs structurants sur la commune de Mamoudzou. Oui, les toits que vous pouvez apercevoir en passant à M’tsapéré ou à Kawéni sont faits de cet élément de textile technique. Un procédé adapté au climat mahorais, qui évitera aux joueurs d’avoir trop chaud, à l’instar du gymnase de Petite-Terre. Et qui est surtout gage d’économie par rapport au béton, un matériau extrêmement coûteux sur l’île aux parfums.
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Commencés en août 2020, les travaux avancent à vitesse grand V, comme le fait remarquer l’architecte. « Nous avons dû faire des plannings décalés pour nous adapter aux prestataires présents sur l’île et aux moyens de stockage, mais le chantier de Kaweni est en train de rattraper celui du Baobab. » Pas installée il y a encore une semaine de cela, la couverture du premier équipement se distingue désormais à plusieurs encablures. Idem à quelques kilomètres de là où la construction du second plateau se passe comme sur des roulettes avec un revêtement déjà lissé et des câbles électriques tirés pour accueillir les lumières. L’installation du portail laisse d’ailleurs présager une ouverture imminente.
Un vrai plus sur le plan sportif
Des infrastructures adaptées aux besoins de l’île. Voilà ce que réclament les sportifs depuis un moment à Mayotte. Basketteurs, handballeurs et volleyeurs doivent se plier continuellement à la météo. Avec en cas de pluie, des matchs ni plus ni moins annulés et reportés ! Et donc des calendriers chamboulés à de nombreuses reprises tout au long de l’année. Alors pour les comités de sports collectifs, ces futures installations sont les bienvenues aussi bien en termes d’organisation que de performance.
Jouer sur ces nouveaux terrains doit de facto apporter moins d’inconvénients aux joueurs. Non seulement, le sol sera entièrement plat, puisque la pluie n’aura plus à être évacuée. Mais en prime, l’espace entre les murs et le toit permettra à l’air de passer et de rafraîchir les terrains. Seule différence entre les deux équipements ? La présence de gradins pour accueillir des spectateurs à Kawéni. Dernier chantier en cours de réalisation dans la ville chef-lieu : celui de Vahibé, qui doit débuter incessamment sous peu.
Le plateau de M’gombani, coeur et âme du quartier
Si les sportifs réalisent avant l’heure la chance de s’entraîner dans les mêmes conditions que les autres athlètes métropolitains, ils ont peur de perdre l’âme chaleureuse de leurs anciens plateaux. Véritables figures de proue ou plutôt poumons de leurs quartiers respectifs. « Ce sera cool, mais ça ne sera pas comme avant », lâche un brin nostalgique l’un des joueurs de TCO, le club de basket de M’gombani. « Déjà, il y aura des horaires, nous ne pourrons plus jouer quand bon nous semble. Et puis, tout le monde ne viendra pas sur le plateau, alors qu’avant nous nous y retrouvions tous. »
Des dizaines de personnes s’y retrouvent quotidiennement pour jouer, échanger, ou encore se balader avec les enfants… Bien plus qu’un simple lieu réservé aux sportifs, il est le point de rendez-vous de tous les habitants, à l’image des jours de match. L’ambiance créant un engouement autour des équipes sportives. À M’gombani, le plateau doit laisser place à un gymnase, un chantier encore plus grand que la couverture d’un plateau. Des changements d’envergure qui risquent bien de leur coûter quelques plumes au passage… “Y a des gens qui n’oseront plus venir c’est sûr, et c’est dommage. Nous avons l’habitude d’avoir beaucoup de public ici”, regrette déjà un handballeur de TCO.
Si les habitués du plateau sont quelque peu déçus de perdre un lieu de vie aussi emblématique, ils comprennent les enjeux sportifs. D’autant plus qu’ils auront la fierté d’être au plus proche du terrain pour accueillir les Jeux des Îles !
Nommée commissaire à la vie des entreprises et au développement productif de Mayotte le 15 mars dernier, Marjorie Paquet suit la mise en œuvre des politiques de l’État en faveur des entreprises ultramarines, notamment celles fragilisées par la crise sanitaire qui vont avoir besoin d’un soutien avant de pouvoir redémarrer une activité pérenne. Pour Flash Infos, l’ancienne directrice de la Dieccte revient sur ses différentes missions.
Flash Infos : Vous avez été nommée commissaire à la vie des entreprises et au développement productif de Mayotte en début de semaine dernière. Quelle est votre fiche de poste ?
Marjorie Paquet : Tout d’abord, il faut savoir que ce poste existe dans chaque territoire ultramarin. À Mayotte, il était vacant depuis le départ de mon prédécesseur en octobre 2020. Le commissaire est placé sous l’autorité du préfet et est positionné auprès du secrétaire général pour les affaires régionales. Je travaille avec les chargés de mission en charge du développement économique et avec les services déconcentrés de l’État dans le but de mobiliser les dispositifs de soutien existants mais aussi de conduire à l’émergence de nouveaux mécanismes tant au niveau local que national, avec par exemple la direction générale des entreprises et la direction générale des outre-mer.
FI : De quelles missions allez-vous vous occuper en priorité ?
M. P. : Disons que j’ai trois missions principales. La première est l’accompagnement des entreprises qui rencontrent des difficultés conjoncturelles et structurelles, en partenariat étroit avec le comité départemental d’examen des problèmes de financement des entreprises. Le CODEFI a été réactivé au tout début de la crise et regroupe la direction régionale des finances publiques (Drfip), la caisse de sécurité sociale de Mayotte (CSSM), l’institution d’émission des départements d’Outre-mer (Iedom), la direction des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Dieccte) et les douanes pour apporter une réponse coordonnée.
La seconde est l’accompagnement des entreprises sur leurs problématiques de financement liées à leurs projets d’investissement. Pour cela, j’ai un rôle de facilitateur auprès des institutions, bancaires notamment.
La troisième est le soutien à la structuration des filières avec le Département et les services déconcentrés de l’État, avec lesquelles j’ai été amenée à travailler lors de mon passage à la tête de la Dieccte. Prenons l’exemple de la filière agricole : la direction de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (Daaf) est l’interlocuteur privilégié, mais le commissaire contribue à ces travaux car il a une connaissance des entreprises concernées.
FI : Avec la crise sanitaire, vous avez un rôle d’autant plus important que certains secteurs d’activités souffrent de fermetures partielles ou complètes depuis plusieurs semaines, voire plusieurs mois.
M. P. : L’objectif avec les partenaires est évidemment d’accompagner les entreprises fragilisées par la crise qui vont avoir besoin d’un soutien avant de pouvoir redémarrer une activité pérenne. Il va falloir créer collectivement des conditions favorables à la reprise économique mais aussi adapter des réponses aux spécificités de chacun pour maintenir l’emploi. Après, certains secteurs ont été moins impactés, à l’image du BTP pour qui les arrêts ont été de courte durée en raison, notamment, de la commande publique. D’autres, comme l’hôtellerie, le tourisme ou encore le commerce, ont rencontré davantage de difficultés. Malgré tout, la dynamique des créations d’entreprise n’a pas fléchi en 2020.
Alors que Mayotte manque toujours cruellement de structures pour assurer l’accompagnement des personnes en situation de handicap, l’ALEFPA, association reconnue d’utilité publique, entend poser ses valises dans le 101ème département. Une convention de partenariat a été signée ce mardi avec le centre hospitalier de Mayotte.
Une signature sobre mais une étape que l’on espère clé pour la prise en charge du handicap sur l’île aux parfums. Ce mardi, le centre hospitalier de Mayotte (CHM) et l’association laïque pour l’éducation, la formation, la prévention et l’autonomie (ALEFPA) ont scellé un partenariat qui doit faciliter l’implantation de cette structure de l’économie sociale et solidaire dans le 101ème département. “Nous attendons avec impatience cette coopération entre le CHM et l’ALEFPA qui va permettre d’améliorer l’offre de soins sur Mayotte”, a salué le Dr Hervé Apere, vice-président de la commission médicale d’établissement (CME) et chef de pôle au service pédiatrie, qui a rappelé “le déficit” que connaît le territoire “par rapport à ce sujet du handicap chez l’enfant et l’adolescent.”
Cette nouvelle convention va permettre aux entités de travailler de concert, à deux niveaux. D’une part, le CHM met à disposition de l’association ses locaux disséminés partout sur le territoire, selon un calendrier et des créneaux à définir, “ce qui nous permettra d’être au plus près des familles”, déroule Aïcha Boukir Haremza, la directrice adjointe de l’association. D’autre part, l’hôpital donne accès aux structures médicales, pour permettre aux équipes de l’association d’être réactives et de proposer des recours pour des patients potentiels. En résumé, “mettre en commun nos forces pour améliorer et développer la prise en charge et les circuits pour ces patients”, a complété la directrice du CHM, Catherine Barbezieux.
Complémentarité des compétences et formations
En effet, les personnes fragilisées par un ou plusieurs handicaps peuvent à tout moment nécessiter des soins. “Le polyhandicap est une source de grandes difficultés, il faut prendre en compte le besoin de proximité des familles, la possibilité d’accéder à un réseau de centres de soins, la formation, les locaux, la prise en charge…”, a confirmé le président de l’association Michel Caron. “Ce qui nécessite la complémentarité des compétences et des talents entre le CHM et l’ALEFPA.” En plus de cette coopération dans la prise en charge, l’ALEFPA va proposer des actions de formation et de sensibilisation pour le personnel hospitalier. Un point non négligeable alors que cette question du handicap reste “assez peu mise en avant” dans les formations médicales.
Un nouveau centre de 57 places
Mais cette coopération constitue surtout un tremplin. Avec plus de 200 établissements dans 19 départements de France métropolitaine et d’Outre-mer, l’association élargit ainsi son palmarès et met un pied de plus dans l’océan Indien. “Il était temps que nous nous engagions à vos côtés pour répondre aux besoins de Mayotte, et nous serons là durablement”, a promis le président. Si dès cette année, une équipe mobile constituée de professionnels (infirmiers, ergothérapeute, psychomotricien, kinésithérapeute, psychologue…) va commencer l’accompagnement et la prise en charge des enfants et parents orientés par la MDPH, l’association entend surtout faire sortir de terre son propre établissement. La première pierre de ce nouveau centre, qui doit accueillir à terme 57 enfants et adolescents polyhandicapés, sera posée à Dembeni au cours du second trimestre de cette année, pour une livraison attendue début 2023, sauf aléas.
Pour Issa Issa Abdou, président du conseil de surveillance du CHM et vice-président du conseil départemental, cette signature s’inscrit pleinement dans “la compétence qui est la première du Département”. “Il y a eu la départementalisation en 2011 et le coup d’après c’était de mettre en place les dispositifs de droit commun, tout particulièrement dans ce champ du médico-social”, a précisé l’élu, qui en a profité pour rappeler les avancées réalisées au cours de cette mandature qui s’achève, comme les trois PMI inaugurées récemment. Avant d’oser un trait d’esprit, non sans un fond de vérité : “Quand je serai réélu, cela sera l’occasion de poursuivre sur cette lancée.” Le changement, c’est maintenant !
Ils représente la deuxième cause de mortalité à travers l’île. Pourtant, du dépistage à la prise en charge, le traitement des cancers à Mayotte présente encore de nombreuses lacunes. Bonne nouvelle toutefois, associations et services médicaux se mobilisent de plus en plus pour pouvoir prévenir et endiguer la maladie.
Dans le monde, un homme sur cinq et une femme sur six développeront un cancer au cours de leur vie, estime Santé Publique France. En France d’ailleurs, le cancer est la première cause de mortalité chez l’homme, la deuxième chez la femme. « On estime que 3.8 millions de personnes vivent en France aujourd’hui avec un diagnostic de cancer », considère à son tour la fondation ARC pour la recherche sur le cancer. Il devient alors urgent, urgent de prévenir, de guérir, de sensibiliser, de soigner. D’autant plus dans le 101ème département, le seul du pays à ne pas être doté de son propre centre de coordination des dépistages des cancers, qui permet notamment de dégager des statistiques précises. Et en la matière, il n’est pas le seul à faire défaut sur le territoire.
À Mayotte, le cancer représente la deuxième cause de mortalité. Pourtant, aujourd’hui encore, « on n’a pas accès à toutes les thérapies localement », introduit le docteur Anne Wanquet, hématologue de formation, amenée à travailler en oncologie depuis son arrivée au CHM. À l’heure actuelle, seule la chimiothérapie peut être prodiguée sur place. Mais la chirurgie et la radiothérapie, souvent indiquées en complément, nécessitent, elles, l’évacuation des patients vers La Réunion ou la métropole. Celles-là même où sont envoyés les prélèvements biologiques, entre autres, permettant de déceler la présence de cellules cancéreuses, faute d’équipements adaptés sur place.
Dépistage tardif, prise en charge tardive
Les lacunes ne se limitent pas à la prise en charge. Elles touchent aussi le dépistage. Si « des projets sont en cours », comme le reconnaît le docteur Wanquet, le seul travail des associations, portées en tête par Rédéca, ne saurait suffire pour s’aligner au niveau métropolitain. En conséquence, l’âge recommandé du premier frottis – examen gynécologique permettant de dépister le cancer du col de l’utérus, le plus répandue chez les femmes mahoraises – a été avancé localement à 20 ans, contre 25 pour l’Hexagone.
Avant 2010, le dépistage du cancer du col était réalisé à la seule initiative des professionnels de santé ou résultait de la démarche individuelle des femmes. « Moins de 1.000 frottis étaient réalisés chaque année sur le territoire, soit chez moins de 3% des femmes âgées de 15 à 65 ans », souligne le rapport épidémiologique produit en 2017 par Santé Publique France. « Les diagnostics de cancer du col de l’utérus étaient établis à des stades très avancés, traduisant à la fois un retard important au diagnostic et à la prise en charge. » Et souvent, le stade de la maladie est tel que même en cas d’evasan, l’opération devient veine. « C’est très frappant dans le cas du cancer du col de l’utérus, une pathologie extrêmement révélatrice des inégalités sociales », explique dans les colonnes de Rse Magazine le Docteur Kouchner, gynécologue-obstétricien et cancérologue, ayant travaillé à La Réunion de 2014 à 2017. « Le plus souvent, ces femmes n’ont jamais eu de frottis de leur vie, ni tellement fait usage de préservatifs, et elles ont très peu recours à la vaccination. »
Alors, différents projets sont en cours pour tenter de rattraper le retard de Mayotte, qui dispose toutefois d’une équipe mobile de soins palliatifs et offre la possibilité d’une hospitalisation à domicile, y compris pour les patients qui n’ont pas de papier. Une aubaine, alors que seule 67,6% de la population insulaire était affiliée à la Sécurité Sociale en 2019.
« À terme, le projet serait de développer ici de la médecine nucléaire, puisque c’est un élément important dans la prise en charge diagnostique et dans le suivi des patients. Aujourd’hui on doit evasaner les patients qui ont besoin d’un scanner par exemple. Il y a aussi une intention de développer la radiologie interventionnelle, pour tout ce qui est biopsie notamment. La radiothérapie serait un énorme plus pour les patients ! », projette le Docteur Wanquet. Un défi de taille sur l’île qui représente le plus grand désert médical de France. En 2018, alors que la France hexagonale recensait 437 médecins pour 100.000 habitants, Mayotte, elle, n’en comptait que 94. Soit trois fois moins.
382.000 nouveaux cas de cancer estimés en France en 2018 (204.600 chez l’homme et 177.400 chez la femme).
157.400 décès par cancer estimés survenus en France en 2018 (89.600 hommes et 67.800 femmes).
45.000 décès par cancer liés au tabac.
88% de taux de survie à cinq ans pour les cancers du sein.
En 2018, d’après une étude menée dans 185 pays, « 23,4% des cas de cancer se concentrent dans le continent européen, 48,4% en Asie, 13,2% en Amérique du Nord, 7,8% en Amérique latine, 5,8% en Afrique et 1,4% en Océanie », juge la Fondation ARC pour la recherche sur le cancer.
Jeudi dernier, les délégations aux Outre-mer du Sénat et de l’Assemblée nationale se sont réunies pour échanger sur l’évolution institutionnelle dans les territoires ultramarins, en présence de Stéphane Diémert, président assesseur à la Cour administrative d’appel de Paris, et de Ferdinand Mélin-Soucramanien, professeur de droit public à l’Université Montesquieu-Bordeaux IV. Le sénateur Thani Mohamed Soilihi les a fait réagir sur le statut actuel de Mayotte et sur la manière de réduire les inégalités avec les autres collectivités et la mère patrie.
À l’aune du bilan des dix ans de la départementalisation, les délégations aux Outre-mer du Sénat et de l’Assemblée nationale ont échangé ce jeudi 18 mars sur l’évolution institutionnelle dans les territoires ultramarins. Un rendez-vous qui n’a pas manqué de faire réagir le sénateur Thani Mohamed Soilihi. « La difficulté est due à un déséquilibre commencé à la fin des années 90 entre Mayotte et son voisinnage », a introduit le parlementaire, pour qui l’évolution statutaire du 101ème département est un faux débat dans l’absolu. « Ce n’est pas l’alpha et l’omega. »
Selon lui, « nous nous interdisons d’aller au-delà de ce qu’ont voté les Mahorais en 2009 ». Au vu de ses caractéristiques, Mayotte n’a de département que son nom. Et est plutôt comparée à « la première collectivité unique, qui est censée exercer les compétences dévolues aux régions et départements d’Outre-mer ». Or, le terme de région prête à sourire tant les financements reçus ne sont que de la poudre de perlimpinpin compte tenu des compétences exercées.
Des institutions inadaptées
C’est tout l’objet de la discussion du jour, comme l’a rappelé Ferdinand Mélin-Soucramanien, professeur de droit public à l’Université Montesquieu-Bordeaux IV. À savoir, ne serait-il pas souhaitable d’avoir une cadre plus souple et actualisé que l’actuel pour permettre des évolutions sans nécessairement connaître les tensions de ces dernières années ? « Des institutions inadaptées ne contribuent pas au développement économique et social des territoires », a-t-il insisté. « Je serais tenté de penser que ces débats institutionnels sont indispensables. »
D’où l’idée du toilettage prôné par le sénateur Thani Mohamed Soilihi dans sa proposition de loi ordinaire relative au Département-Région de Mayotte déposée le 21 janvier 2019 au Sénat. « L’un des aspects qui pourrait être intéressant en cas de révision institutionnelle serait la modification des procédures existantes, pas toujours simples à mettre en œuvre, pour faciliter l’adoption de ces adaptations, à identité législative plus ou moins maintenue », a précisé pour sa part Stéphane Diémert, président assesseur à la Cour administrative d’appel de Paris. « Les amendements sénatoriaux examinés en octobre dernier ne contraignent aucune collectivité à changer de statut. »
La crise sanitaire révélateur des inégalités
Le parlementaire a également profité de l’occasion pour évoquer la problématique des inégalités avec les autres collectivités et celles avec la mère patrie. « Comment pourrions-nous faire pour mieux [les] atténuer ? Pourrions-nous aller plus loin et plus rapidement avec des recours juridictionnels et des simplifications ? », a-t-il alors demandé aux deux experts. Des inégalités encore plus mises en exergue aussi bien à Mayotte qu’en Guyane en cette période de crise sanitaire. Et à cet égard, la formule d’Aristote – « la plus grande injustice est de traiter également les choses inégales » – prend ici tout son sens aux yeux de Ferdinand Mélin-Soucramanien.
Tandis que Stéphane Diémert a invité l’élu mahorais à « explorer la voie de la question prioritaire de constitutionnalité » pour savoir si le droit à l’égalité adapté de l’article 73 ou si le droit à un statut particulier de l’article 74 peuvent être invoqués au titre des droits et libertés garantis par la Constitution. Idem devant la convention européenne des droits de l’homme. « Des recours peuvent être engagés en invoquant la méconnaissance du principe d’égalité ou en tout cas d’éventuelles discriminations dans l’exercice des droits devant la Constitution que les traités internationaux garantissent. » Avant de tout simplement placer les décideurs politiques face à leurs responsabilités. « À statut constant, des progrès sérieux peuvent être encore faits, non pas pour la beauté du geste, mais pour faciliter l’exercice des droits fondamentaux des citoyens. » À commencer par l’alignement des droits sociaux, peut-être ?!
Il y a tout juste un mois, le village d’Acoua faisait face à de fortes inondations qui ont tout détruit sur leur passage, laissant les habitants démunis de quasiment tous leurs biens matériels. Un élan de générosité venant de divers donateurs a permis à la mairie et au centre communal d’action sociale d’Acoua de venir en aide aux sinistrés. Autrement, la mission aurait été impossible.
Les riverains d’Acoua fortement touchés par les récentes inondations ont tout perdu, ou presque. La mairie et le centre communal d’action sociale de la ville ont dû agir en urgence pour aider la centaine de personnes dans le besoin. Très vite, les habitants de l’île ont fait preuve de solidarité. “Les aides sont venues de toutes parts. On a reçu des vêtements de particuliers, des denrées alimentaires, ils ont donné ce qu’ils avaient chez eux”, raconte Fatourani Mohamadi, directrice du CCAS d’Acoua. Certaines entreprises de Mayotte ont également fait preuve de générosité en envoyant de l’électroménager absolument nécessaire pour les sinistrés. “On leur a donné des équipements de première nécessité, comme des réfrigérateurs, des congélateurs, des lits et des matelas”, indique Fatourani Mohamadi.
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Selon cette dernière, le CCAS a pour l’instant enregistré 25.000 euros de dons en électroménager venant des entreprises, mais ce chiffre n’est que provisoire puisque les donateurs continuent de se manifester. À cela s’ajoute le soutien de l’association des maires. “Le président avait annoncé une très grosse donation. On n’a pas encore le montant exact mais c’était autour de 20.000 euros”, précise Fatourani Mohamadi. Les associations ne sont pas en reste puisque nombreuses ont prêté main-forte à ceux qui ont subi les dégâts. De son côté, le centre hospitalier de Mayotte a mis en place une cellule psychologique pour que chaque personne en ressentant le besoin, puisse se confier à un professionnel.
“Sans les dons, on n’aurait pas pu autant aider les sinistrés”
La directrice du centre communal d’action sociale de la ville d’Acoua n’a pas les mots pour exprimer sa gratitude. Les donations ont permis aux familles de retrouver un semblant de vie normale. “Je ne remercierai jamais assez les donateurs parce que sans les dons, on n’aurait pas pu autant aider les sinistrés”, admet Fatourani Mohamadi. Selon elle, la solidarité mahoraise a plus que jamais été au rendez-vous. 170 familles ont pu bénéficier de cette générosité, et la distribution des biens électroménagers s’est faite sur critères sociaux. Les personnes sans emploi étaient prioritaires, mais à ce jour “toutes les familles ont au moins eu un bien électroménager”, affirme la directrice du CCAS. La ville s’est basée sur une liste de déclaration de pertes que chaque foyer a dû remplir le jour des inondations. Ceux qui ont constaté les dommages quelques jours plus tard, ont tout de même pu s’inscrire et ont bénéficié de ces dons indispensables. Concernant les denrées alimentaires, les vêtements ou encore les fournitures scolaires, un site a été ouvert pour que chacun puisse se ravitailler.
La directrice du CCAS d’Acoua souligne le comportement des habitants touchés par la catastrophe naturelle. “Ils ont presque tout perdu et pourtant, je n’ai vu aucune larme couler. Ils sont restés dignes.” Se pose désormais la question du relogement de ces personnes puisque selon Fatourani Mohamadi, pratiquement tous ont déjà été frappés par la tempête Hellen en 2014. “Une fois que l’on a géré les urgences, le relogement sera à l’ordre du jour. Pour le moment, c’est en cours de faisabilité”, évoque-t-elle. Le CCAS et la mairie acceptent encore les dons, mais ils lèvent le pied sur les vêtements puisque toutes les familles ont été généreusement servies.
100 plaquettes d’œufs offerts par les Jeunes agriculteurs
L’élan de générosité pour le village d’Acoua est loin de s’arrêter. Dernière preuve en date, l’association Jeunes agriculteurs de Mayotte a offert 100 plaquettes d’œufs au CCAS de la ville. Cette action s’inscrit dans le cadre de leur campagne nationale “Les Agriculteurs ont du cœur”. Les habitants, eux, n’ont qu’un mot à la bouche : marahaba.