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Candidat à la présidence du Département, Mansour Kamardine s’est laissé tenter

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Engagé en politique depuis l’âge de 24 ans, Mansour Kamardine a toujours soif d’engagement. Le groupe Les Républicains vient de le désigner chef de file du parti pour briguer la présidence de la prochaine mandature à partir de juin prochain. Le candidat revient pour Flash Infos sur son désir de mener la barque du Département ainsi que sur les projets de développement nécessaires au territoire.

Flash Infos : Actuellement député à l’Assemblée nationale, vous avez fait le choix de vous lancer dans la course aux élections départementales. Qu’est-ce qui vous a poussé à prendre ce virage à 360 degrés ?

Mansour Kamardine : Plusieurs raisons ! Ces derniers temps, j’ai énormément écouté les collègues qui m’ont convaincu qu’une personnalité publique puisse faire l’interface entre la population et l’État et soit capable de fédérer pour construire ce projet de départementalisation. J’ai une expérience sur la gestion des collectivités et des problèmes auxquels nous sommes confrontés. Je veux continuer en ce sens. Si les Mahorais de mon canton et au-delà acceptent de me confier ces responsabilités, je serai prêt à les assumer !

Vous avez raison de lier que je suis député. Je ne peux pas obtenir le poste de président de la collectivité et maintenir celui de parlementaire. Si les élus me choisissent, cela conduira de facto à ma démission. Mais selon moi, je serai plus utile au Département qu’à l’Assemblée nationale. Regardez, Édouard Philippe, l’ancien premier ministre, a fait le choix de revenir à la mairie du Havre… Nous comprenons bien que les enjeux sont davantage au niveau des exécutifs locaux qu’au Parlement.

FI : Avec cette campagne, n’est-ce pas une manière de tester votre popularité en vue de échéances électorales suivantes ?

M. K. : Je n’ai pas d’égo sur ce sujet-là. Ce n’est pas un test en particulier. Je n’ai pas de démonstration à faire : juste des coups à prendre et des missions à assumer ! Je ne personnalise pas les choses et je ne me focalise pas sur ma personne, qui a peu d’intérêt.

FI : Dans le budget actuel du Département, 94 millions d’euros reviennent au service de l’aménagement du territoire. Vous semblez aller dans la même direction en analysant votre projet de contournement du grand Mamoudzou…

M. K. : Dans le contrat de convergence et de transformation, il y a un budget spécifique pour la réalisation du contournement de Mamoudzou qui remonte à une quinzaine d’années. Sauf que comme nous ne sommes jamais sûrs de ce que nous faisons, cela a des conséquences énormes sur notre processus de développement. Autre exemple avec l’hôpital. Sur les 172 millions d’euros de dotation obtenus en 2017, aucun centime n’a été dépensé…

Que nous le voulions ou non, nous ne pourrons jamais nous passer des véhicules à Mayotte. Nous n’avons pas la capacité d’interdire aux fabricants d’en exporter chez nous et aux concessionnaires d’en importer. L’achat d’une voiture est le financement le plus aisé et le plus simple que les Mahorais connaissent. C’est un signe de richesse. L’amélioration du réseau routier est donc indispensable. Sinon, nous provoquons une thrombose qui risque de nous conduire vers des troubles sociaux majeurs.

Donc le contournement, il faudra le faire ! La réalité aujourd’hui est que les études ne sont pas encore parachevées. On nous balance des chiffres astronomiques pour ne pas le réaliser. Je reste persuadé que cette route se fera. Même si d’autres projets concernant la mobilité sont aussi sur la table, comme le téléphérique qui est inscrit dans le schéma d’aménagement régional (SAR), le train bleu ainsi que le transport maritime. Il n’existe pas une seule idée pour le désengorgement. À ce stade, continuons jusqu’au bout les études et voyons ce que cela donnera. Nous n’excluons rien !

Et si pour une raison X ou Y, le contournement n’aboutit pas, il faudra au moins penser à élargir l’axe entre Tsararano et Mamoudzou et celui entre Mamoudzou et Koungou pour répondre à l’urgence et ne pas nous retrouver dans une seringue, histoire de gagner du temps en attendant de dénicher des solutions plus durables. Comme le vieux projet entre Longoni et Chirongui, qui doit aussi être réalisé, pour détourner le trafic des camions qui veulent se rendre dans le Sud.

FI : Sur un autre volet, tout aussi important à Mayotte, le Département a mis les bouchées doubles au sujet de l’aide sociale à l’enfance. Continuerez-vous sur la même lancée ou bien déciderez-vous de prendre une toute autre direction ?

M. K. : L’action sociale est l’une des compétences majeures du Département. Continuer de nous intéresser à l’enfance est une obligation légale. Mais il n’y a pas que l’enfant délinquant à prendre en charge, nous pouvons aller encore plus loin et venir en aide aux Mahorais. Et nous attarder aux 77% de notre population qui vit sous le seuil de pauvreté. Je pense notamment aux retraités qui ne touchent que 200 euros par mois alors qu’ils ont eu une carrière professionnelle entière. À cela, je vais proposer d’examiner la possibilité de leur allouer une indemnité pour les placer au niveau du RSA national. Idem pour nos bacocos, il faudra que nous nous battions au niveau de l’ASPA (allocation de solidarité aux personnes âgées) nationale. Sans oublier de faire en sorte d’obtenir un accord salarial avec les syndicats qui opèrent au Département pour que les agents soient payés à hauteur du SMIC métropolitain, avec de vraies cotisations salariales et patronales. Le fil conducteur est de démontrer que nous pouvons être traités au même pied d’égalité que les autres. Nous nous engagerons sur ce rattrapage social qui est urgentissime.

FI : Toujours sur le thème de l’enfance, vous avez une idée bien précise de ce que vous voulez mettre en place dans le but d’offrir une chance à tous les jeunes.

M. K. : Tout à fait ! Nous devons construire un plan « un jeune, une formation, un diplôme », qui est en lien avec la formation professionnelle, qui dépend du conseil départemental. Mais aussi de développer un programme « un collégien, un lycéen, une tablette numérique ». Non pas pour le plaisir, mais parce que si nous voulons leur donner la chance de réussir, nous devons leur donner les outils d’apprentissage modernes d’aujourd’hui. Les enfants mahorais doivent pouvoir concourir avec les autres enfants de la Nation !

FI : Concernant le problème du foncier en général, vous avez également une ligne directrice. Aussi bien pour les propriétaires que pour les installations illégales.

M. K. : Plus de 90% des constructions privées sont faites sans permis. Conséquence, la propriété des terres n’est pas toujours garantie. D’où la proposition de créer un dispositif « une construction, un titre de propriété, un permis » pour enclencher les régularisations. Cela aura un impact sur le financement des communes puisqu’elles pourront localiser leurs administrés et leur réclamer le paiement de la taxe d’habitation. Et si celle-ci est supprimée l’année prochaine, cela permettra de calculer au plus près l’indemnisation demandée à l’État.

L’autre idée est de reconquérir les espaces fonciers ruraux et urbains perdus, qui appartiennent au Département. C’est une manière, à notre échelle, de lutter dans le même temps contre l’immigration clandestine aux côtés des services étatiques. Et d’envoyer un message clair aux personnes arrivées de pays tiers qui pensent toujours avoir un terrain pour s’installer à leur arrivée. Cette volonté forte se raccroche aussi à notre engagement environnemental qui consiste à replanter 10.000 arbres par an pour reboiser les forêts.

Nous n’avons pas le temps de dormir. Comme l’a dit le président sortant, Soibahadine Ibrahim Ramadani, pas un jour n’est passé pendant six ans sans qu’il ne pense à Mayotte. Nous devons faire de même et trouver des idées novatrices pour redresser la situation. Qui est soit dit en passant bien meilleure en 2021 qu’en 2015.

Une épicerie éco-solidaire itinérante à la rencontre des Mahorais

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L’association Yes We Can Nette lance un projet d’épicerie éco-solidaire itinérante. Connue pour ses actions de lutte contre la prolifération des déchets sur le territoire de Mayotte, Yes We Can Nette souhaite étendre son action et s’adapter à l’enclavement de certains quartiers informels en créant une vente ambulante au service de la population.

Dans la petite rue de Boubouni se trouve le siège de Yes We Can Nette. Épicerie, laverie et centre de collecte de canettes usagées… L’association a différentes casquettes. Lieu bien connu des habitants du quartier, les locaux sont avant tout un lieu de vie et de partage. Aujourd’hui, la structure veut voir plus loin et créer une épicerie éco-solidaire itinérante. « L’objectif c’est de développer un processus qui a fait ses preuves à M’tsapéré et la Vigie. Celui de collecter des canettes en métal et bouteilles à recycler donnant droit à 40 % de réduction sur des produits alimentaires de première nécessité. » Pour assurer son action mobile, l’association prévoit d’acquérir un triporteur électrique solaire qui contiendra les denrées alimentaires et un vélo électrique équipé d’une remorque qui pourra permettre de stocker les canettes usagées.

Les missions de l’épicerie mobile Yes We Can Nette seront assurées par deux volontaires en service civique. Ils stationneront à proximité des écoles afin d’être aisément identifiés. « En fonction des contraintes de capacité et de stockage, la tournée de vente ambulante pourra avoir une amplitude différente suivant les quartiers ». Lors de ces ventes mobiles, l’offre proposée par l’association sera réduite à des produits alimentaires secs ou en conserve. Les bénéficiaires pourront se rendre dans les locaux de l’association à M’tsapéré ou à la Vigie dans le but de pouvoir retrouver la totalité des denrées proposées mais aussi les objets créés à partir de matériaux recyclés par les bénévoles.

Le “compte canette”

Pour bénéficier des réductions appliquées par Yes We Can Nette sur les denrées alimentaires, les nouveaux bénéficiaires devront ouvrir auprès des responsables de l‘association un « compte canette ». Ensuite, les membres de l’association pourront comptabiliser le nombre de canettes vides ramenées passage après passage. Ils pourront ainsi avoir accès à des réductions sur les produits de l’épicerie.

Par son action l’association souhaite « favoriser l’émergence de nouveaux dispositifs innovants, écologiques et solidaires ». Les canettes récoltées sont ensuite collectées par l’organisme Star Mayotte et valorisée par Citeo. En 2020, l’association a récolté 3.4 tonnes de canettes, ce qui représente presque 10% du recyclage de ces produits usagés dans le 101ème département.

Commémoration des déportés de la Seconde guerre mondiale à Pamandzi sous Covid-19

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Le dernier dimanche d’avril est la journée nationale du souvenir de la déportation. Des commémorations sont organisées sur tout le territoire national pour rappeler cette partie sombre de l’histoire de la France pendant la Seconde guerre mondiale. Même si Mayotte n’a pas été touchée, il est important pour les représentants du gouvernement d’honorer la mémoire des déportés, notamment auprès des jeunes. Une cérémonie de commémoration a eu lieu ce dimanche à Pamandzi, mais Covid-19 oblige, le public n’a pas pu y assister.

8h30 précise, le son qui sort de la trompette résonne sur la place de la mairie à Pamandzi. Il marque le début de la cérémonie de commémoration en hommage aux déportés de la Seconde guerre mondiale. En temps normal, le lieu aurait été rempli d’élèves, d’anciens combattants, de différents élus, ou encore d’historiens. Mais le contexte sanitaire ne permet toujours pas l’organisation de cérémonie en présence de public. Alors celle-ci a lieu avec un nombre restreint de personnes. La directrice de cabinet du préfet de Mayotte et le maire de Pamandzi sont les principaux acteurs, entourés de quelques adjoints.

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« Dans l’avenir, il est important que l’on puisse associer plus de personnes et notamment la jeune génération… Demain, elle doit pouvoir expliquer tout cela, mais il faut qu’elle ait été informée, formée et qu’on lui ait donné tous les éléments de compréhension », déclare Laurence Carval, la directrice de cabinet du préfet. Conscient de ce travail de préservation de mémoire, la commune de Pamandzi dit mettre en œuvre des actions pour instruire les plus jeunes. « On fait des animations, notamment au niveau de la bibliothèque qui était fermée depuis quatre-cinq ans et que j’ai rouvert. C’est un lieu de lecture qui permet aussi de réfléchir sur ce qu’il s’est passé. C’est d’autant plus important dans ce contexte de violence commis par des jeunes contre des jeunes. On est là pour les accompagner à ne pas faire ce genre de massacre », affirme Madi Souf, le première magistrat de la commune.

 

Mayotte épargnée, mais Mayotte solidaire

 

Selon les historiens, Mayotte n’a pas été touchée par cette période sombre de l’histoire, mais il est nécessaire de la rappeler. « C’est l’ensemble de la communauté nationale qui se recueille, qu’elle ait été atteinte dans sa chaire ou pas. Que l’on soit à Mayotte ou ailleurs, je pense qu’il est important que tout le monde puisse avoir cette vision de ce que peut donner une société dont les règles qui prévalent à son fonctionnement sont ceux d’une catégorisation des personnes et d’une non reconnaissance du statut d’être humain à une personne », souligne Laurence Carval.

Maintenir cette commémoration à Mayotte est un moyen de montrer notre solidarité au peuple massacré pendant la Seconde guerre mondiale. Elle change également les habitudes des Mahorais. « À chaque fois, on nous indexe d’être une société orale. Il faudrait donc garder au moins ces souvenirs qui nous restent. Un jour comme aujourd’hui sert à rappeler aux jeunes qu’il y a eu des horreurs pendant la deuxième guerre mondiale », selon Madi Souf. C’est donc ensemble, de manière solennelle, que la directrice de cabinet du préfet et le maire de Pamandzi ont déposé la gerbe sur le symbole patriotique de place de la mairie qui rend hommage aux enfants morts pour la France.

Gronde dans le nord : pour le comité, “sans les barrages, le silence serait resté total”

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Les uns lèvent les barrages, les autres les banderoles. Deux semaines après la mort de Miki, le comité inter-villageois né à M’tsamboro a enfin obtenu des solutions pour garantir une meilleure sécurité des élèves. Mais c’est au tour du collège de M’tsamboro de réclamer sa part…

Il aura fallu deux morts, deux semaines de silence, une semaine de troncs d’arbres débités au milieu de la route. Après la mort de Miki à la sortie du lycée du Nord, le 9 avril, les habitants ont enfin obtenu mercredi matin une réunion avec le triumvirat des institutions : recteur, préfet, procureur. Plus ou moins en même temps, le ministre des Outre-mer Sébastien Lecornu sortait à son tour de sa torpeur par le biais d’un courrier adressé aux maires dans lequel il qualifie les deux meurtres d’ “inacceptables” et annonce une “mission pour la jeunesse”. Le ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, avait quant à lui attendu la mort de Momix, élève au lycée Younoussa Bamana, pour réagir par voie de communiqué…

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Bref, il n’en fallait pas plus, ou moins, c’est selon, pour que les habitants montent au créneau. “Nous, nous n’étions pas partis pour barrer la route, mais qu’il n’y avait pas un mot du préfet, ni du ministre des Outre-mer, ni du ministre de l’Intérieur… C’est un silence total qui nous a choqués, et c’est par rapport à ce mépris que nous avons barré les routes”, dénonce Ahmed Zafera, le porte-parole du comité inter-villageois qui s’est constitué à la mort de Miki. “Sans les barrages, le silence serait resté total”, abonde celui qui est lui-même parent d’élève et qui connaissait le lycéen tué, via l’association les Abeilles, son club de foot.

La réunion, qui a duré trois heures trente – “et on a poussé le préfet à rester”, sourit le natif de M’tsamboro – a visiblement permis d’arrondir les angles. Finis les barrages dans le nord, au moins, tant que la feuille de route semble respectée. Un point étape doit s’en assurer à la mi-juin. Les solutions posées sur la table fourmillent d’idées, du micro au macro, de la sécurisation du parking du lycée de M’tsangadoua, à la lutte contre l’immigration clandestine.

 

Des solutions concrètes pour le lycée du Nord

 

Surtout, l’échange a d’ores et déjà posé des bases concrètes. “Les élèves ont une phobie scolaire. Depuis aujourd’hui, la cellule psychologique est digne de ce nom, puisque nous allons avoir une psychologue jusqu’aux prochaines vacances”, explique Ahmed Zafera. Concernant la clôture du parking, le comité a obtenu du conseil départemental, propriétaire du terrain, un engagement à cofinancer les travaux avec le rectorat. “Nous allons aussi faire en sorte que les professionnels de la restauration intègrent le parking et demander au proviseur de modifier le règlement intérieur pour que les élèves ne puissent pas sortir avant la fin des cours”, développe-t-il. Ont aussi été évoqués la vidéo-protection, l’augmentation des effectifs de sécurité, la sensibilisation des élèves au smartphone avec, “dès la semaine prochaine, une expérimentation au lycée du nord et au lycée Bamana”… et même une plaque commémorative en hommage à Miki.

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À une autre échelle, la réunion a aussi permis d’aborder la surpopulation du lycée avec les constructions d’un lycée à M’tsangamouji et d’un collège à Bandraboua. Ou encore, la création d’une “classe relais”, pour les élèves les plus difficiles et qui ont déjà fait l’objet d’une expulsion de leur établissement d’origine. Enfin, “au sujet de l’immigration clandestine, le préfet nous a indiqué s’être rendu en métropole pour discuter de l’hélicoptère qui surveille la côte. Il avait aussi parlé de déchoir de leur nationalité les parents d’enfants délinquants, et il en est à 100 titres déchus”, retranscrit le porte-parole du comité.

 

Le collège de M’tsamboro réclame son dû

 

De quoi étouffer les départs de feu dans le nord ? Pas tous, apparemment. Car du côté du collège de M’tsamboro, c’est au tour du personnel éducatif et des parents d’élèves de voir rouge. En cause : un manque de surveillants, à en croire plusieurs membres du collectif mobilisés. Depuis lundi, l’établissement s’est donc recouvert de banderoles, “Stop aux violences” et “+ de surveillants”. “Le mouvement a débuté avec les parents qui ont bloqué le collège lundi, et nous nous sommes joints à eux”, retrace Léa Hugon, représentante des personnels au CA et élue paritaire pour la CGT Educ’action.

D’après l’enseignante, le collège manque d’AED (assistants d’éducation) pour encadrer ses quelque 1.700 élèves. “En métropole, on est à un personnel encadrant pour 89 élèves, et à Mayotte, c’est un pour 179. À M’Tsamboro, nous sommes à un pour 207 !”, souffle-t-elle. Un problème qui aurait déjà été remonté à plusieurs reprises, sans obtenir de solution. Et l’agression fatale de Miki a donc naturellement jeté de l’huile sur le feu. “Il y a eu un meurtre juste à côté, de quelqu’un du village, et nous n’avons pas de vraie cellule psychologique. En réalité, on partage notre psychologue avec la cité du Nord. Donc, en gros, on déshabille Pierre pour habiller Paul !

 

L’ultimatum passe mal auprès du recteur

 

Le collectif demande donc un renfort immédiat des effectifs de la vie scolaire, le temps de recruter au moins 8 AED en équivalent temps plein à la rentrée prochaine, l’intervention de psychologues dans toutes les classes, et la présence d’une cellule psychologique et de soutien pour les élèves et les enseignants. Et après officiellement deux jours de mobilisation, les grévistes retournent en classe avec un ultimatum : “si nous n’avons pas l’engagement écrit et signé de Monsieur le Recteur concernant nos revendications au plus tard vendredi 30 avril, alors le mouvement reprendra dès lundi 17 mai”, écrivent-ils.

Mais le responsable de l’académie ne l’entend pas de cette oreille. “M’tsamboro c’est un des établissements les mieux dotés de l’île ! Il est REP + ! Moi je compte 22 personnes pour la vie scolaire. Et nous venons de faire des travaux pour améliorer le cadre de vie et la sécurisation”, s’insurge Gilles Halbout, qui ne comprend pas la revendication de huit AED. “Nous répartissons les moyens en fonction des besoins. Là, il y a un collectif qui joue de manière indécente sur les peurs des élèves, l’émoi et la tristesse des parents pour demander n’importe quoi. J’ai bien lu leur demande, nous allons l’évaluer avec la principale car c’est elle qui connaît les besoins. Et si il y a besoin de renforts, nous en donnerons”, lâche finalement le recteur. Décidément appelé sur tous les fronts.

Désormais au complet, la direction du CHM se concentre sur les urgences

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Cela faisait dix ans que le centre hospitalier de Mayotte n’avait pas un comité de direction complet. Alors la directrice, Catherine Barbezieux, a voulu marquer le coup en invitant la presse à assister à leur séance de travail. L’occasion d’évoquer les dossiers brûlants et les am-bitions de l’hôpital.

C’est un travail de longue haleine qui se finalise enfin au centre hospitalier de Mayotte. Les postes de directions n’étaient pas au complet depuis plus de dix ans. Quelques recrutements plus tard, plus aucun n’est vacant. Les nouveaux profils sont « très diversifiés » fait savoir la directrice du centre hospitalier de Mayotte, Catherine Barbezieux, et tous sont prêts à mettre la main à la patte. En effet, de nombreux dossiers méritent une attention particulière. La dernière réunion du comité de direction a été l’occasion de rappeler les objectifs de chacun et les ambitions de l’hôpital.

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L’hospitalisation à domicile

 

La crise sanitaire a apporté son lot de malheur, mais elle a aussi permis au CHM de dépasser ses limites. Ce qui fût le cas avec l’hospitalisation à domicile, qui a vu le jour lorsque les bâtiments de l’hôpital de Mamoudzou débordaient de malades atteints par le Covid-19. L’étape sui-vante? Continuer sur cette lancée et pérenniser ce service. « L’idée est de prendre en charge le maximum de patients, notamment ceux en réhabilitation, en obstétrique, et enfin les pathologies psychiatriques », explique Matthieu, directeur adjoint chargé des ressources humaines et de la formation. Une demande a été faite auprès de l’agence régionale de santé pour avoir les autorisations et pouvoir augmenter les capacités de l’hospitalisation à domicile. Pendant la crise sanitaire, 60 patients étaient hospitalisés chez eux, la direction de l’hôpital espère désormais atteindre 100 à 120 personnes.

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Hôpital Martial Henry, source de désaccord

 

Le nouveau site hospitalier Martial Henry en Petite-Terre est source de conflits qui n’en finissent pas entre les syndicats et la direction de l’hôpital. Des « déclarations fantaisistes et récentes », lance Catherine Barbezieux sans citer de nom. En effet, certains agents hospitaliers et syndicats avaient campé devant la nouvelle infrastructure de Pamandzi dimanche dernier pour dénoncer le non transfert des lits de médecine de l’hôpital de Dzaoudzi. Mais selon la directrice, « il n’a jamais été question de lits de médecine sur ce site ». L’établissement en question correspond exactement à ce qui avait été élaboré en 2012 au début du projet. Aucune modification n’est possible puisqu’il est en grande partie financé par des fonds européens et dans ces conditions les contrôles sont plus stricts. « Nous sommes contrôlés tous les trois mois. S’il y a la moindre modification par rapport au projet initial, nous avons des pénalités financières, donc nous ne pouvons pas nous permettre de nous amuser à changer l’orientation en cours de route, parce que cela serait très pénalisant financièrement », assure Catherine Barbezieux pour sa défense. Que les organisations syndicales se rassurent : la dizaine de lits en médecine de l’hôpital de Dzaoudzi ne seront pas perdus, puis-qu’ils seront transférés sur le site de Mamoudzou.

Les syndicats réclament également la création d’une structure pour la balnéothérapie. Cette de-mande ne date pas d’hier, pourtant elle ne figure pas non plus dans les plans du nouvel hôpital. Cependant, la direction n’ignore pas son importance et est ouverte aux discussions. « La balnéothérapie fait l’objet d’une étude par le cabinet depuis deux ans pour entrer dans la structure », annonce la directrice de l’hôpital. Mais le dossier est pour l’instant en suspend car la priorité est l’ouverture rapide du site Martial Henry. Or, ce nouveau service risquerait de la retarder.

 

Objectif nouvel hôpital dans dix ans

 

Les murs des différents sites hospitaliers de l’île ne sont pas indéfiniment extensibles. La nécessité d’avoir un deuxième hôpital émerge depuis quelques années et les choses devraient prendre une nouvelle tournure. « L’objectif est d’aller vite. Il faut vraiment que nous déterminions le périmètre de ce qu’il va avoir dans les deux hôpitaux et faire en sorte de desserrer l’étau dans les dix ans intermédiaires », indique la directrice de l’hôpital. La crise sanitaire a plus que jamais mis en évidence les points faibles du CHM. En ligne de mire : les lits de réanimation qui ne sont pas suffisants. Pour l’heure les options pour ce deuxième hôpital ne sont pas choisies. Alors tout est fait pour désengorger les structures déjà existantes. À cela s’ajoute la volonté d’avoir un HéliSmur, comprenez un hélicoptère qui vole 24h/24. Celui que détient le CHM est déjà aux normes, mais l’héliport nécessite un changement. « Nous allons déplacer cette surface pour en avoir une qui permettra à l’hélicoptère de voler H24, même la nuit », se réjouit la directrice du CHM. Autant de projets qui prennent du temps à se réaliser, mais qui devraient s’accélérer grâce aux nouvelles recrues du comité de direction de l’hôpital. Du moins, nous l’espérons…

Abolition de l’esclavage : les 4ème de K2 dans la peau d’historiens

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En marge de la commémoration de l’abolition de l’esclavage le 27 avril prochain, tous les élèves de quatrième du collège K2 se sensibilisent à cette thématique avec l’appui des archives départementales de Mayotte. L’occasion de traiter la partie historique mais aussi de réaliser un travail de mémoire local, avec l’enregistrement d’un podcast par les collégiens.

« Est-ce que vous avez déjà entendu parler de l’esclavagisme dans votre entourage ? » Timidement, quelques mains se lèvent dans le CDI du collège K2. À quelques jours de la commémoration de l’abolition de l’esclavage, la question suscite le débat dans l’établissement scolaire puisque tous les élèves de quatrième sont sollicités sur la question. L’idée : relater l’histoire bien sûr, mais aussi et surtout réaliser un travail de mémoire, propre au 101ème département.

Quoi de mieux alors que de se plonger dans des documents originaux, du XVIème siècle pour certains, comme des tableaux d’artistes ou des témoignages oraux, pour retracer tout le chemin parcouru ? « Pour qu’il y ait une meilleure résonance, les archives départementales sont un précieux allié. Elles permettent aux élèves de se mettre dans la peau de l’historien », se réjouit Loetizia Fayolle, inspectrice pédagogique régionale en histoire-géographie, qui voit dans ce projet une manière de « s’approprier » le sujet, inscrit dans les programmes scolaires depuis la loi Taubira du 21 mai 2001, et de « dégager les principaux acteurs ».

« Il faut réveiller tout ça »

Mais ce n’est pas tout. Cette heure de sensibilisation permet aussi d’éveiller les esprits sur trois thématiques précises : la traite négrière, l’abolition de l’esclavage et la société esclavagiste à Mayotte. « Ils [en] connaissent quelques bribes, il faut juste réveiller tout ça », sourit Issa De Nguizijou des archives départementales. « Il suffit de lancer un mot pour créer l’engouement. » Le but de la manœuvre ? Donner des éclairages pour appréhender ce phénomène auquel le territoire n’a pas échappé et le recontextualiser dans le temps et dans l’espace pour en comprendre les enjeux d’hier et d’aujourd’hui.

Et les collégiens se prêtent au jeu. Tout comme les enseignants. « Demain [ce vendredi 23 avril], chacun des groupes va exposer ce qu’il a appris et retenu », se languit d’avance Sophie Moreau, professeur d’histoire-géographie. Avant de procéder à un enregistrement audio avec leurs impressions, disponible par la suite en podcast. « Cet exercice leur plaît beaucoup car il vient en complément de ce que nous avons étudié en début d’année », ajoute-t-elle, impatiente de découvrir le résultat final.

En attendant, celle qui enseigne depuis 2013 à K2 se satisfait des premiers retours. Notamment dans sa classe de petits lecteurs et scripteurs. « J’ai été agréablement surprise car quand nous avons fait le travail de restitution, ils étaient fascinés, surtout lorsqu’ils ont dû expliquer des termes intraduisibles en shimaoré ! » Mieux encore, selon elle, cela leur permet de déconstruire la culture mahoraise et d’assimiler l’impact des Arabes et de la religion. « Ils n’en avaient pas forcément conscience », décrit-elle. Pas de doute, le devoir de mémoire va s’imprégner dans toutes les têtes.

Une pétition pour sauver les salles de sports à Mayotte

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Face à la situation et au silence des structures du gouvernement, les six salles de sports de Mayotte ont lancé une pétition en ligne sur change.org à destination du délégué du gouvernement, Jean-François Colombet, pour tenter de faire entendre notre voix.

Fermées administrativement depuis le début du second confinement, les infrastructures n’ont pas pu rouvrir. « Nous sommes à ce jour sans nouvelle de la préfecture, lorsque nous arrivons à avoir quelqu’un, nous sommes automatiquement renvoyés dans nos cordes sans réponse », tempètent-ils.
« Par cette pétition, nous ne voulons pas oublier la situation sanitaire, loin de là. D’ailleurs, notre métier est avant tout de prendre soin du corps et donc de la santé de nos adhérents, nous y attachons une importance capitale. En ce sens, nous nous sommes tout de suite adaptés à la situation pour ne pas participer à la propagation du virus : appareils distants les uns des autres, parcours à sens unique, jauge maximale d’accueil du public, nettoyage des machines avant et après chaque utilisation. Tout est réuni pour assurer cette sécurité sanitaire, tout en permettant l’exercice d’une activité physique. »

Et alors que les taux d’incidence et de positivité ne cessent de baisser depuis le 15 mars, les responsables des salles de sports s’interrogent… « Pourquoi sommes-nous ignorés dans nos requêtes. Nos adhérents ont parfois un besoin vital de pratiquer une activité physique ! Nous participons à l’activité de l’île, au même titre qu’un commerce ou qu’un restaurant. Alors nous nous en remettons à vous chers amateurs, adhérents ou simples citoyens supporters : aidez-nous, partagez cette pétition et signez-là si vous aussi vous souhaitez pouvoir nous retrouver rapidement dans nos salles ! »

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Les habitants du lotissement Sim de Kwalé montent au créneau

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La résidence SIM de Kwalé n’offre aucun dispositif de sécurité.

Suite aux violences survenues à Koungou fin février dernier, les habitants du lotissement Sim de Kwalé sont sur leurs gardes. En effet, le programme de décasage initié par la préfecture prévoit de raser les habitations situées juste en face de la résidence dans le but d’y construire un lycée. Les habitants craignent donc le même genre de débordements que ceux de Koungou et exigent une sécurisation des lieux.

« Notre résidence n’est pas du tout sécurisée. Le portail automatique, en panne depuis deux ans, reste constamment grand ouvert et la SIM n’est jamais venue le réparer », se plaignent d’une seule et même voix les habitants du lotissement de Kwalé. Comme la plupart des résidences SIM, cette dernière ne possède pas particulièrement de dispositif de sécurité mis à part l’unique élément cité, qui plus est vaguement dissuasif. Résultat des courses : on y pénètre comme dans un moulin ! « Des jeunes avec des bandes de chiens entrent régulièrement dans la résidence, les vols de scooters sont nombreux et nous ne pouvons rien laisser sur les varangues ! », pointent-ils du doigt.

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Un noyau dur de résidents a décidé de se mobiliser pour alerter les autorités sur les manquements de la SIM en terme de sécurité.

Ces problèmes de sécurité sont communs à quasi l’ensemble des lotissements SIM de l’île. Olivier, nouvel arrivant à Kwalé, habitait encore récemment celui de Tsoundzou 2 où la situation devenait intenable… « Tous les habitants des bangas passent par [là] pour se rendre chez eux. Au moins une fois par semaine, les vitres d’une voiture sont cassées. Si nous avons le malheur de laisser un téléphone dans sa voiture, il est volé en deux minutes. Les cambriolages « à la perche » sont monnaie courante, il faut donc tout éloigner des fenêtres », raconte-il, d’un ton agacé. Sans compter les enfants manipulés par des bandes d’adultes pour passer à travers les barreaux des maisons afin « d’aller chercher l’argent ». En bref, les lotissements SIM en général sont la cible de nombreux vols. « Les délinquants connaissent le montant des loyers, ils se disent donc que ce sont des « habitations de riches » et nous prennent régulièrement pour cible », déroule toujours Olivier.

 

La SIM dans le collimateur

 

Malgré les nombreux signalements de ces désagréments à la SIM, celle-ci n’a jamais pris la peine de sécuriser ses lotissements. Pas plus à Kwalé qu’ailleurs. « Quand nous les appelons à propos du portail, ils disent toujours qu’ils vont s’en occuper, mais nous ne voyons jamais rien venir ! », s’agace Thierry, un autre habitant du lotissement. Et c’est la même chose pour l’entretien des logements en général. « Ils ont mis un an avant de venir nous installer la clim et la cuisine n’est toujours pas aménagée. Des devis sont faits, mais rien n’avance ! », explique Zora, qui a même cessé de payer son loyer depuis cinq mois tant que les travaux promis ne seront pas commencés. « Je tiendrai mes obligations quand la SIM tiendra les siennes », affirme-t-elle, déterminée. « Oui, oui ! », telle est la réponse phare de la SIM. Mais rien ne suit jamais derrière selon les résidents en colère.

Ce manque d’entretien n’est cependant qu’un détail au regard des problèmes de sécurité. Lors des évènements de Koungou fin février dernier, c’est bien la résidence SIM que les délinquants ont ravagée. Elle était en effet beaucoup plus facile d’accès que la résidence du Hameau du récif à laquelle les voyous avaient pourtant décidé de s’attaquer en premier lieu. Et comme un décasage est prévu sous peu au-dessus du collège de Kwalé, les habitants du lotissement craignent le pire. « En 2016, le préfet Frédéric Veau avait décasé un bidonville de Tsoundzou 1. Lorsque les bulldozers sont arrivés, les délinquants les ont cramés. Il y a eu de nombreux débordements, jusqu’à Kwalé, provoquant la fuite des habitants, apeurés », se souvient Patrick, le plus ancien locataire du lotissement. Ses voisins et lui craignent donc vivre la même histoire avec le futur décasage, prévu cette fois-ci juste en face de leurs logements.

Zora a fait signer une pétition a l’ensemble des habitants pour exiger de la SIM qu’elle répare au moins le portique. « Les forces de police font des rondes et nous rappellent quotidiennement que tant que le portail restera grand ouvert, nous ne serons pas à l’abri d’incidents graves et répétés », peut-on notamment y lire. Une copie de cette pétition a également été adressée au commissariat de police et à la mairie de Mamoudzou afin qu’ils soient informés des manquements de la SIM.

Informatisé, le service de réanimation de Mayotte entre dans une nouvelle ère

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Depuis fin novembre 2020, le service de réanimation est informatisé via le logiciel Grimoires. Un nouvel outil qui centralise toutes les données des patients, qui simplifie la prise en charge et qui apporte un confort supplémentaire aux personnels soignants. Non seulement, cela permet de diviser par dix l’erreur humaine mais aussi d’être un facteur d’attractivité.

« Nous passons d’une caravelle d’Air France des années 80 à un 787 flambant neuf. » De l’aveu de son chef de service, Renaud Blondé, la réanimation rentre dans « le XXIème siècle » en se dotant du logiciel Grimoires. Un outil informatique financé à hauteur de 200.000 euros par l’agence régionale de santé océan Indien et installé le 24 novembre dernier, qui met définitivement fin à l’ère du papier, sur lequel étaient rédigées à la main, quotidiennement, les 400 données les plus importantes de chaque patient. Un moyen aussi de « diviser par dix » l’erreur humaine, qui peut forcément se payer cash. « Nous ne savons pas si cela nous a permis de sauver des vies durant la seconde vague, mais en tout cas, cela a été plus facile à gérer pour les personnels soignants au vu de la charge de travail très élevée », confie-t-il devant son écran, les yeux rivés sur les datas de la quinzaine d’hospitalisés en ce moment.

Car oui, ce qui change avec cette technologie, déployée dans seulement un quart des services de réanimation métropolitains et ultramarins, c’est la capacité d’avoir « une vision globale de tous les malades ». En d’autres termes, de pouvoir suivre en temps réel « tous les paramètres de chaque scope (moniteur de surveillance) ». Et ainsi de connaître l’état de santé des patients qui sont intubés, qui sont sous respirateur, qui ont une machine de dialyse ou d’hémofiltration, qui reçoivent des antibiotiques ou qui ont une assistance circulatoire… « Auparavant, nous étions obligés de faire des aller-retour dans chaque chambre pour avoir cette information. Maintenant, nous pouvons y avoir accès depuis n’importe quel bureau de la réanimation », se réjouit Renaud Blondé, convaincu que cette nouvelle méthode de travail apporte davantage de sérénité. Toutefois, cela ne proscrit en aucun cas la communication entre les médecins et les infirmiers, bien au contraire. « Nous allons toujours transmettre les consignes oralement. L’informatique nous laisse simplement une trace écrite. »

 

Des procédures dégradées en cas de panne

 

« Tout est sécurisé entre la prescription et l’administration », assure Christophe Heuberger, le directeur général de la société Terenui, éditrice du logiciel. Mais est-ce réellement fiable en cas de panne de courant, un phénomène auquel est régulièrement assujetti le 101ème département ? « Nous avons des procédures dégradées », prévient-il. « Imaginez que tout s’éteigne : nous avons des ordinateurs branchés sur des onduleurs, qui ne sont pas reliés au serveur et qui mettent à jour toutes les minutes les 8.000 données. » Il suffit alors d’imprimer une version papier. Dans le but d’éviter d’injecter deux fois un médicament « sensible » en cas de confusion !

Enfin, l’informatisation est également un facteur d’attractivité pour le personnel. Si la réanimation possède une équipe jeune et complète depuis plus de cinq ans, elle n’aurait alors aucun mal à recruter de nouveaux soignants en cas d’ouverture de postes supplémentaires. « Nous pourrions évoquer le confort de ce nouvel outil pour fidéliser quelques infirmières alors que beaucoup ont rendu leur tablier après la première vague. » Pas de doute, le service mahorais joue bel et bien dans la cour des grands, alors même que le logiciel n’est actuellement déployé qu’à 30%. « Nous allons connecter deux nouveaux appareils », s’enthousiasme Renaud Blondé, conscient de cette opportunité pour le territoire.

“Les brochettes sont au feu” : les 11 prévenus d’un réseau de passeurs à l’aéroport de Pamandzi jugés ce mercredi

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Une “machine bien huilée”, selon le procureur. Accusées d’avoir facilité le passage de clandestins directement depuis l’aéroport de Pamandzi, 11 personnes comparaissaient ce mercredi au tribunal correctionnel de Mamoudzou. Parmi eux, deux anciens agents de la police aux frontières…

C’est une affaire qui avait fait grand bruit, jusqu’aux oreilles de la direction de la police aux frontières (PAF) à Paris. Un réseau de passeurs, constitué d’au moins huit personnes à l’époque et surtout deux agents de la PAF, agissant directement aux aubettes de l’aéroport de Pamandzi, avait été révélé en février 2019. L’enquête dévoilait alors les ficelles de ce réseau “parfaitement organisé”, selon les dires du parquet : les deux policiers facilitaient le passage de “clients” moyennant des sommes de plusieurs milliers d’euros, en leur fournissant des papiers d’identité appartenant à une tierce personne, et en fermant les yeux au moment des contrôles. Le but étant de les faire embarquer dans des avions à destination de La Réunion ou la métropole.

Ce mercredi, ce sont finalement 11 prévenus qui étaient jugés par le tribunal correctionnel de Mamoudzou pour des faits de corruption, d’aide à l’entrée, à la circulation ou au séjour irréguliers d’un étranger en france, et d’aide à l’utilisation frauduleuse d’un document d’identité, de voyage ou de séjour par son titulaire. L’infraction courait sur une période de trois ans, de janvier 2016 à février 2019. Ce mercredi, sept d’entre eux étaient présents à la barre. Les passeurs risquaient jusqu’à dix ans d’emprisonnement.

 

Faisceau d’indices à la PAF

 

Quelques temps avant leur interpellation, plusieurs signaux d’alerte avaient déjà commencé à susciter les soupçons des services de la PAF à Paris : à la descente de l’avion, un nombre anormal de passagers se présentaient avec une carte d’identité au nom d’un tiers… laissant imaginer qu’un contrôle peu scrupuleux pouvait être à l’œuvre au départ des passagers, à l’aéroport de Pamandzi. En 2018, premier coup de filet : un voyageur est pris la main dans le sac, son visage ne colle pas avec la photo du document d’identité présenté. Pire, l’un des policiers reconnaît un collègue, qui travaille à l’aéroport. L’enquête permet alors de démontrer que l’agent en question a donné son passeport à une troisième personne qui s’est chargée de le remettre au voyageur clandestin. Les deux prévenus sont condamnés à trois mois de prison avec sursis.

 

Une organisation à trois échelons

 

C’est à ce moment-là que la procédure va prendre une autre tournure”, déroule le président au moment de rappeler les faits. En septembre de la même année, l’agent écroué se présente à la brigade de recherche “en expliquant qu’il souhaite dénoncer l’ensemble du réseau auquel il a lui-même participé”. Les enquêteurs découvrent alors les rouages d’une entreprise rondement menée. Au premier niveau, des “rabatteurs” se chargent de recruter les étrangers en situation irrégulière mais aussi de trouver des “loueurs” de pièces d’identité pour leur faciliter le passage aux frontières. Puis viennent les coordinateurs, chargés de récupérer les informations obtenues par les rabatteurs et de les transmettre aux décisionnaires. À savoir, les deux agents de la PAF, qui, depuis le haut de la pile, donnent le go. Ou non.

 

Lexique garni et chefs de file

 

Le premier, c’est Monsieur B. : “le grand boss” tel qu’il est présenté tout au long de l’audition du dénonciateur. À la barre, ce mercredi, celui qui dépasse d’une tête tous les autres prévenus, cherche toutefois à minimiser son rôle. “C’est eux qui allaient chercher les clients et nous appelaient, nous on ne leur disait pas d’y aller. Même parfois, c’était trop dangereux, on disait “non”, car il y avait trop de risques”, répond à la barre l’homme à l’imposante carrure. “Vous aviez le pouvoir d’annuler”, lui rétorque le juge. Le deuxième agent, Monsieur S., nie lui aussi son rôle de décisionnaire. 37 photos de documents d’identité seront toutefois retrouvées dans son téléphone…“Pour moi c’était quelque chose qui arrivait de manière ponctuelle. Je n’avais pas connaissance de l’organisation, de tout ce monde-là. J’étais pris en étau”, affirme-t-il aujourd’hui.

Pourtant, l’affaire présente toutes les caractéristiques du réseau de passeurs. Pour preuve, ce langage codé utilisé entre les deux têtes présumées de l’organisation. “Voulé”, “poulpe”, “poulet”, ou encore “les brochettes sont au feu”… Un lexique gourmand alimente les nombreux échanges téléphoniques entre les deux agents. Et leurs explications hasardeuses ne satisfont pas vraiment le tribunal. “Moi si je vous envoie “ratatouille”, vous comprenez le message sans que je vous l’explique ?”, cingle le procureur.

 

Une affaire bon marché ?

 

L’autre zone d’ombre ? Les sommes d’argent empochées par ces passeurs. “Entre 2.500 et 3.000 euros par client”, selon l’un des prévenus entendus ce mercredi. Laquelle somme serait alors divisée, Monsieur S. touchant 2.000 euros, Monsieur B. et le rabatteur les 1.500 restants. Pourtant, alors que le “boss” reconnaît une trentaine de passages ainsi orchestrés, il n’aurait gagné que 5.000 euros en trois ans. Une somme ridicule, au regard des risques encourus, qui plus est avec son uniforme ! “Il a fait le choix de minimiser”, souligne d’ailleurs le procureur, au moment de faire ses réquisitions. Au vu des éléments du dossier, le parquet requiert, pour les 11 prévenus, des peines allant de trois de prison avec sursis et trois ans d’interdiction de territoire français, à, respectivement quatre et trois ans d’emprisonnement avec sursis, pour les deux chefs présumés, plus cinq ans d’inéligibilité et d’interdiction d’exercer une activité en lien avec l’infraction.

Les juges seront plus sévères encore : en plus des réquisitions du procureur, Monsieur B. écope de 30 mois de prison ferme, soit encore 17 à effectuer compte tenu de sa détention provisoire, et 5.000 euros d’amende. Monsieur S., qui a déjà passé 12 mois en détention, repart quant à lui avec une condamnation de 36 mois de prison, dont 16 avec sursis et 7.000 euros d’amende. Tous les prévenus sont condamnés a minima à des peines de prison avec sursis. Les carottes sont cuites !

Innovation : La première couche lavable made in Mayotte

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Depuis le début de l’année 2021, la marque Dounaa propose des couches pour enfants conçues, développées et commercialisées à Mayotte. L’objectif de cette jeune entreprise : répondre aux problématiques environnementales dues à la démographie croissante de l’île.

Mayotte bat tous les records de naissance, près de 10.000 enfants sont nés sur notre territoire en 2020. Cela représente près de 1.446 couches par enfant chaque année. Rapporté au nombre de naissances, nous aurions potentiellement 1.446.000 couches déversées dans la nature chaque année. Nous en retrouvons malheureusement trop souvent sur les plages ou dans la mangrove. Notre souhait est de présenter aux parents qui adhèrent à notre projet une alternative budgétaire et environnementale aux couches jetables.” Les quatre créateurs de Dounaa travaillent depuis la fin d’année dernière sur ce projet de couches réutilisables 100% mahoraises. Deux couturiers assurent la confection des couches réalisées avec des tissus biologiques certifiés Oeko Tex achetés sur le territoire de Mayotte. À terme, celles-ci devraient être fabriquées à partir de tissus recyclés afin de répondre aux exigences environnementales de la marque.

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“Il n’y a pas de ligne d’arrivée”

Soucieux de répondre aux exigences des consommateurs et de leur offrir un produit à la fois efficace, confortable, sain et esthétique, les créateurs des couches Dounaa ont réalisé différentes phases de tests. “Nous avons eu un panel d’une dizaine de testeurs qui ont pu nous faire des retours précis sur des améliorations à apporter. Aujourd’hui, nous proposons cinq gammes de tailles adaptables à toutes les morphologies grâce à un système de boutons pressions et de velcros.” Pour garantir l’absorption, les couches sont composées de plusieurs épaisseurs permettant d’assurer leur imperméabilité. De plus, Dounaa souhaite grâce à ses designs innovants “changer de la monotonie des couches blanches et apporter de l’élégance à bébé”.

 

Des perspectives d’avenir et de développement

La jeune entreprise voit déjà grand et projette de recruter un ou deux couturiers afin d’assurer les futures commandes et ainsi garantir une production locale. Ils espèrent séduire un large public à Mayotte mais aussi dans les territoires voisins. “Nous sommes dans un département et une région géographique où la natalité est très forte. Certains fabricants internationaux investissent notamment en Afrique de l’Est considérant que la simplicité de la couche jetable en fait le produit d’avenir dans la région. Nous posons le postulat inverse et souhaitons avoir l’opportunité de convaincre sans cesse plus de parents que Dounaa est un produit d’avenir.

Coopération : Mayotte fait un pas vers l’Afrique en s’alliant à Djibouti

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Mayotte entretient des relations avec certaines régions de Djibouti depuis maintenant deux ans. Cette alliance s’est concrétisée à travers la signature d’une convention accord-cadre de coopération entre le conseil départemental et les régions de Tadjourah et Ali Sabieh ce 21 avril. Elle marque le début d’une coopération pour développer ces territoires.

C’est la concrétisation de deux ans d’amitié et le début d’une collaboration socio-économique entre Mayotte et Djibouti. Notre île vient de signer deux conventions, l’une avec la région d’Ali Sabieh et l’autre avec celle de Tadjourah toutes deux localisées à Djibouti. Elles permettront aux territoires de mener des actions dans l’objectif de se codévelopper. « Nos actions seront axées sur les échanges de bonnes pratiques dans les domaines sportifs et culturels, l’éducation et la formation professionnelle, les transports maritimes et la gestion des ports, le tourisme, l’eau potable, le reboisement, la santé et l’action sociale, l’amélioration des échanges commerciaux et économiques, l’appui et accompagnement institutionnel », détaille le président du Département, Soibahadine Ibrahim Ramadani.

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Cette liste non exhaustive marque le début des travaux entre les trois régions et chacune d’elles devra mettre la main à la poche. « Au niveau du Département, il y a un budget qui est dégagé tous les ans pour l’action de coopération décentralisée. Ensuite, nous nous sommes battus pour avoir l’autorité de gestion du Feder pour la coopération », indique Mohamed Sidi, sixième vice-président chargé de l’Europe et de la coopération décentralisée.

 

Plus de visibilité dans la région de l’Afrique de l’Est

 

Il va de soit que chaque région a ses propres intérêts dans cet accord-cadre. Mayotte espère faire de Djibouti un allié de taille pour nouer des liens avec les autres pays de l’Afrique de l’Est. « Si nous voulons réellement avoir notre place dans cette région, cela commencera par la collaboration avec Djibouti qui siège dans les grandes organisations africaines. Cette amitié nous facilitera l’intégration dans ces espaces », espère Mohamed Sidi. Et cela pourrait favoriser le rayonnement de l’île dans le canal de Mozambique. C’est du moins ce que souhaite le président du Département. Mieux connaître la région pour mieux s’en inspirer, c’est en somme, ce qui ressort de ces conventions avec Tadjourah et Ali Sabieh.

Chaque territoire devra apporter une plus-value à l’autre. Et si Djibouti excelle dans certains domaines comme le sport, l’art ou encore l’artisanat, Mayotte a également quelques avantages qu’elle pourrait partager avec les deux régions concernées. « Nous sommes en pleine décentralisation ici, eux commencent à peine, nous pouvons donc leur apporter cette expertise. Ils ont aussi des problèmes de déboisement, nous avons vécu ce phénomène avec les padzas et nous pouvons les guider », précise Mohamed Sidi. Si le Département a décidé d’officialiser ses relations avec Djibouti, ce n’est sûrement pas par hasard. La proximité culturelle, religieuse et surtout linguistique a pesé sur la balance. Cette coopération qui est préparée depuis 2019 est planifiée sur deux ans pour l’instant, mais elle pourrait être reconduite tacitement si chaque partie honore ses obligations.

« Il n’y a rien de plus dur que de perdre un enfant », la mère de Momix sort du silence

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Une semaine après l’assassinat de Momix, sa famille a décidé de sortir du silence pour la première fois. La mère et la sœur de l’adolescent nous ont exclusivement ouvert leurs portes pour partager leur peine, leur colère mais surtout leur peur.

Allongée sur son lit, entourée de ses enfants et de quelques voisines, Badirou semble ailleurs. Le regard dans le vide, elle écoute les femmes qui l’entourent et qui essayent de la réconforter. Mais ces dernières savent que leurs mots ne suffiront pas à apaiser le cœur de cette mère qui vient de perdre son fils. « Je suis musulmane et je m’en remets à Dieu, mais ça n’atténue pas ma tristesse. Je pense qu’elle ne partira jamais parce qu’il n’y a rien de plus dur que de perdre enfant », dit-elle d’une voix tremblante. Peu de gens con-naissent la vérité, Badirou n’est pas la mère biologique d’Ambdoullah, dit Momix, mais plutôt sa tante. Originaire d’Anjouan, elle a pris le jeune garçon sous son aile alors qu’il n’avait que deux ans à la suite du décès de sa mère. Pour ne pas séparer Ambdoullah de ses frères et sœurs, elle décide d’emmener toute la fratrie avec elle à Mayotte. Cinq enfants viennent alors s’ajouter à ses neuf enfants biologiques.

Mais la mère de famille dit ne jamais avoir fait de différence entre eux. « Je les ai élevés comme mes propres enfants, j’ai toujours été leur maman », raconte-t-elle. Alors lorsque ce jeudi 15 avril, elle reçoit un coup de fil lui annonçant la mort d’Amboullah, tout s’écroule autour d’elle. La douleur est d’autant plus difficile puisqu’elle ne se trouvait pas sur le territoire à ce moment-là. « J’étais à Anjouan, cela faisait des mois que j’étais coincée là-bas. Quand j’ai appris la nouvelle, j’ai remué ciel et terre pour pouvoir rentrer et grâce à l’aide du maire de Mamoudzou et du préfet, j’ai pu dire adieu à mon fils », indique-t-elle pleine de reconnaissance.

Sous le choc pendant plusieurs jours, Badirou préfère aujourd’hui se remémorer les bons souvenirs comme pour faire taire les rumeurs qui affirment que son fils faisait partie d’une bande de délinquants. Elle se souvient au contraire d’un garçon exemplaire. « Il est allé à l’école coranique, il allait à la mosquée, à la maison c’était un enfant adorable. Je ne sais pas comment il se comportait dehors, mais personne n’est jamais venu se plaindre de mon fils auprès de moi », affirme-t-elle. Et sa grande soeur Sadjida d’ajouter : « L’une de ses professeurs nous a dit que c’était un bon élève, il était gentil, il souriait tout le temps. C’était un enfant joyeux. » Des propos qui interrogent encore plus sur les raisons de ce drame.

« Je me disais que c’était juste une embrouille entre gamins »

Si certains disent que Momix était au mauvais endroit au mauvais moment, selon le témoignage de sa famille, tout porte à croire que l’agression mortelle a été pensée par un groupe de jeunes qui visaient la victime ainsi que son frère jumeau. Tout commence lors-que le grand frère de Momix se dispute avec l’un de leur voisin. Le fils de Badirou aurait mis une tape à l’autre garçon. « Tu vas regretter ce que tu as fait. Si je croise l’un de tes petits frères, je le tue », lui aurait-il répondu, selon les dires de la la mère de famille. Mais personne ne prend cette menace au sérieux. « Je me disais que c’était juste une embrouille entre gamins. Jamais, je n’aurais pensé qu’il l’aurait réellement tué », poursuit Sadjida, la sœur.

Pourtant, avant son assassinat, Momix était sujet à des agressions venant du même groupe de jeunes qui lui auraient ôté la vie. « Notre voisin l’a frappé une première fois ici à M’tsapere. Ses amis de Doujani et lui l’ont agressé une deuxième fois dans le lycée. Ils lui ont cassé le bras et il a été opéré. Ils ont attendu qu’il soit rétabli pour en finir avec lui », détaille la mère, cette fois-ci en colère. Selon sa sœur, Momix ne se sentait plus en sécurité. Il avait même changé ses habitudes par peur. « Avant, quand ils allaient au lycée, ils passaient par M’tsapere. Après les disputes, mes frères ont décidé de passer par Cavani Sud. Comment les agresseurs ont-ils su qu’ils avaient changé d’itinéraire ? Je suis sûre qu’ils l’ont suivi », persiste Sadjida. Âgée de 18 ans, cette dernière ne souhaite qu’une seule chose : que la justice prenne des sanctions exemplaires. « Ils ont tué mon frère, alors ils méritent la peine maximale. Ils ne doivent pas être jugés comme des enfants, parce que les enfants ne font pas ce qu’ils ont fait », supplie-t-elle à qui veut bien l’écouter.

 

Quand la peine laisse place à le peur

 

Aujourd’hui, la famille de Momix vit constamment dans la peur. Ce même groupe d’individus, accusé par la famille endeuillée, aurait proféré des menaces de mort sur les réseaux sociaux destinées au jumeau de Momix. « Ils ont dit qu’ils ne vont pas s’arrêter et qu’ils sont déterminés à trouver l’autre frère pour en finir avec lui », tremble Badirou. Elle ne comprend pas un tel acharnement et a peur pour la vie de ses enfants ainsi que la sienne. Certains ne vont plus à l’école, d’autres sont constamment surveillés. « J’ai un fils qui étudie au lycée de Kahani et j’ai peur de le laisser partir seul. Mon fils ainé l’accompagne jusqu’à l’arrêt de bus, et à la fin de la journée, il va l’attendre au même en-droit pour le récupérer », raconte la mère. Elle refuse d’envoyer à l’école le petit dernier scolarisé au collège de Doujani.

Quant au jumeau de Momix, il ne sort tout simplement plus de la maison. La famille, qui habite dans une case en tôle dans les hauteurs de M’tsapere, ne trouve plus le sommeil. « Ces délinquants savent où j’habite et j’ai peur qu’ils viennent mettre le feu chez moi. Tous les soirs, nous partons tous dormir chez ma fille aînée. Mais nous ne pouvons pas éternellement vivre comme ça », souligne Badirou. Elle souhaite déménager, partir là où personne ne les connaît. Toute la famille se dit même prête à quitter Mayotte, mais n’en a pas les moyens… Elle lance donc un appel aux autorités compétentes pour les sauver.

Pour des raisons de sécurité, la famille n’a pas souhaité être photographiée.

Impliquer les parents pour ne pas sanctionner les mineurs non accompagnés

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Vendredi dernier, le maire de Mamoudzou, Ambdilwahedou Soulaïmana, a pris un arrêté stipulant que les élèves de primaire et les collégiens de la ville chef-lieu devaient être accompagnés par un parent ou un tuteur légal à son établissement scolaire ou son transport. Si le recteur salue l’idée de sensibiliser la présence d’adultes, il rappelle que l’Éducation nationale ne peut refuser un enfant qui se présente seul.

L’annonce a eu l’effet d’une bombe… Vendredi dernier, la municipalité de Mamoudzou décide de prendre un arrêté inédit en réponse aux récents événements de violence aux abords et sur le trajet des établissements scolaires. Celui-ci stipule que « tout mineur scolarisé à l’école primaire devra être obligatoirement accompagné par un parent, un tuteur légal ou un accompagnant majeur afin d’y être accueilli ». Et vice-versa sur le chemin du retour. Une mesure forte qui s’applique à partir de ce jeudi 22 avril. « C’est une démarche définitive, elle n’a pas lieu d’avoir une date de fin », persiste et signe Ambdilwahedou Soumaïla, le premier magistrat, au vu de la « situation tendue ».

En accord avec le rectorat, le Département et la police nationale, ce dispositif concerne également les collégiens de la ville chef-lieu. Avec en plus, une petite particularité pour ceux qui empruntent les transports scolaires. « Nous demandons aux parents d’apporter leur pierre à l’édifice et de les accompagner sur le trajet domicile-arrêt de bus. Il nous paraît compliqué de les laisser se balader seuls. » Et en cas de manquement à la règle, « ils seront refoulés par un médiateur lors de la montée dans le bus ».

« Nous ne pouvons pas refuser un élève »

Si le recteur, Gilles Halbout, dit se réjouir « d’avoir un élu volontariste, qui pose la question du rôle des parents », il relate quelques fondamentaux de l’Éducation nationale. Notamment par rapport aux sanctions proférées par Ambdilwahedou Soumaïla. « Nous ne pouvons pas refuser un élève qui se présente seul devant son école », insiste le responsable de l’académie de Mayotte. « Ce serait presque dangereux de les renvoyer chez eux. »

Peu importe, l’édile de la commune semble déterminé par rapport à sa ligne de conduite. « L’enfant ne sera pas admis ! [Et] nous saisirons les tribunaux pour manquement à l’autorité parentale », maugrée-t-il, avant de citer l’article 371-1 du code civil pour sa défense. Suffisant pour en faire un geste « naturel » ? Cela risque surtout de rajouter de l’huile sur le feu… « Nous demandons juste que tout le monde s’implique, nous ne voulons pas les contraindre. »

 

Police municipale, vidéoprotection et éclairage public

 

Tout un discours qui s’oriente naturellement vers un chemin plus politisé. « Nous, à la ville, nous avons 66 caméras. Nous allons en financer 120 supplémentaires. Nous avons 36 policiers municipaux, nous allons en recruter huit de plus cette année pour arriver à 70 d’ici la fin de mandature. » Des investissements qui complètent l’ouverture annexe de polices municipales à Passamaïnty et à Kawéni à la rentrée prochaine « pour être au plus proche de la population ». Sans oublier les financements pour l’éclairage public, à savoir dix millions d’euros cette année, auxquelles s’ajoutent 13 autres millions « pour les autres coins ».

De quoi convaincre à demi-mot le recteur, qui rappelle que « les maires ont déjà bien d’autres responsabilités à occuper, comme la construction des écoles mais aussi la gestion du périscolaire et de la restauration ». En d’autres termes, cet arrêté symbolise surtout que les uns et les autres doivent rester à leur place… Mais ce n’est ni plus ni moins le lot d’un département récent, en plein développement, dans lequel chacun doit encore apprendre à délimiter ses compétences.

Permaculture : Les « Banana Circles » et les « oyas », les nouvelles expérimentations du lycée agricole de Coconi

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Dans le cadre d’un projet de coopération régionale, les classes de CAP agricole du lycée de Coconi travaillent cette année sur un projet pilote de permaculture. Au programme, “Banana Circles” mais aussi fabrication et mise place d’”oyas”.

Un “Banana Circle”… Saperlipopette, mais que signifie donc cette expression à dormir debout ? “Le concept fait partie de la permaculture. Nous créons un fossé, en forme de cercle dans lequel seront déposés des déchets verts. Autour de celui-ci, nous plantons différentes espèces vivrières, puis à l’extérieur, des bananiers. Rempli de matières organiques, le fossé au milieu enrichit la terre et garde aussi l’humidité. L’objectif est de regrouper un maximum de plantes dans un espace réduit, en utilisant le moins de ressources possibles”, détaille tel un expert Abdallah Saïd-Massoundi, enseignant en classes de CAP agricole au lycée de Coconi, où ont été créés plusieurs de ces “Banana Circles” . Cette expérimentation s’inscrit dans le projet de coopération entre différents établissements des Comores et de Madagascar qui échangent quotidiennement sur les techniques permacoles adaptées au climat de l’océan Indien.

 

Un oya qu’est-ce que c’est ?

 

Toujours dans le cadre de leur projet de permaculture, les étudiants de l’établissement scolaire se sont aussi inspirés d’une technique venue tout droit de Madagascar : un contenant en terre cuite, au doux nom d’oya. Pour cela, il faut l’enterrer aux pieds des plantations et le remplir d’eau afin qu’il diffuse son contenu dans la terre durant plusieurs jours. “Notre projet consiste à créer des techniques écologiques dans le but de gaspiller moins d’eau. Les oyas permettent d’arroser les plantes tous les deux ou trois jours et évitent que l’eau ne ruisselle. Grâce à ce système, les racines captent seulement ce dont elles ont besoin. Nous espérons aussi qu’avec la captation en profondeur de l’eau par les plantes, les mauvaises herbes présentes en surface se développent plus difficilement”, récite d’une main de maître l’un des élèves en première année de CAP agricole. Au cours de leur formation, les élèves ont pu s’initier à la poterie et réaliser des oyas de différentes tailles et formes. L’objectif ? Expérimenter des techniques et des contenances différentes afin de déterminer lesquelles sont les plus adaptées aux besoins agricoles.

 

L’expérimentation croisée” clé de la permaculture

 

À travers cette coopération, quelles sont les attentes de ce travail en commun ? Réponse avec Cécile Morelli, chargée de mission au sein du lycée de Coconi. “Avec nos partenaires, nous proposons de nouvelles expériences que nous essayons de mettre en œuvre avec nos élèves et l’ensemble de nos équipes sur nos exploitations et dans nos établissements. Ensuite, nous croisons nos résultats de façon à apprendre les uns des autres.

Aujourd’hui, le lycée de Coconi espère pouvoir réaliser un voyage d’échange à Madagascar afin que les élèves de CAP agricole puissent découvrir de nouvelles techniques sur le terrain avec leurs homologues malgaches.

Une marche en mémoire Momix remplie de tristesse et de colère à Mayotte

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Les élèves du lycée Younoussa Bamana ont décidé de rendre un nouvel hommage à leur camarade Momix ce lundi 19 avril. Environ 600 jeunes ont entamé une marche partant de leur établissement scolaire jusqu’au rond-point Zena Mdere. Les lycéens, entendus par le maire de Mamoudzou et leur proviseur, demandent plus de sécurité.

L’émotion ne retombe pas au lycée Younoussa Bamana. L’agression mortelle de Momix, âgé de seulement 17 ans, à Cavani, a été un choc pour tous les élèves. Ses camarades les plus proches ont souhaité lui rendre un nouvel hommage en organisant une marche dans les rues de Mamoudzou. Dès 6h du matin ce lundi, les élèves se sont rassemblés devant l’établissement scolaire. Environ 600 jeunes, selon la police municipale de Mamoudzou, se sont dirigés par la suite vers le rectorat puis la mairie de la commune chef-lieu.

Les lycéens observent alors une minute de silence. Visages fermés, quelques larmes coulent sur les joues de ceux qui connaissaient Momix. Il est plus que jamais présent dans les esprits de ses camarades. « Quand j’ai appris la nouvelle, j’ai beaucoup pleuré, j’étais triste », raconte un ami de la victime. « J’étais tout le temps avec lui, je n’arrive pas à y croire… », marmonne-t-il, visiblement encore sous le choc. Le cortège lit ensuite des versets du Coran en guise d’offrande pour le défunt, puis poursuit son parcours jusqu’au rond-point Zena Mdere.

Le maire de Mamoudzou, Ambdilwahedou Soumaïla se joint à la manifestation et adresse quelques mots. Mais il est rapidement conspué. Les élèves en colère scandent « Maire, démissionnez ». « Je pense que la foule était agacée parce qu’on s’attendait à ce qu’il propose des solutions, mais il n’a fait que répéter ce qu’il avait déjà dit dans les médias », explique Haddad, l’un des organisateurs du mouvement. Mais le premier magistrat n’en démord pas et essaye d’apaiser les tensions. Certains l’écoutent attentivement, alors que d’autres n’en voient pas l’intérêt. L’édile prononce alors une phrase qui ne passe pas inaperçue auprès des jeunes. « Votre sécurité est la responsabilité de la mairie, du Département, de l’État, mais aussi de vos parents ! » La réponse des élèves ne s’est pas faite attendre puisque tous se mettent à le huer en signe de désaccord. La pression monte d’un cran, Ambdilwahedou Soumaïla est chahuté, avant d’être rapidement “exfiltré”.

« Les paroles, on les a trop entendues, on veut des actes »

Le cortège, qui devait se rendre par la suite à la préfecture, est immédiatement redirigé vers le lycée Younoussa Bamana par les forces de l’ordre pour éviter d’éventuels débordements. Fiers d’avoir marqué le coup, les élèves attendent désormais des réponses de la part des autorités. « Les paroles, on les a trop entendues, on veut des actes, on veut se sentir en sécurité quand on va à l’école ou qu’on en sort » indique une jeune manifestante. Depuis vendredi dernier, certains élèves ont décidé de ne plus se rendre en cours tant que le lycée n’aura pas trouvé des mesures plus fermes pour assurer leur sécurité.

Un choix soutenu par certains parents qui ont voulu manifester avec leurs enfants. « Nous sommes fatigués que nos enfants vivent ce genre de violence. Quand on les envoie au lycée, on a peur, on se demande s’ils rentreront sains et saufs », raconte Raïssa, une mère. Cette dernière aimerait voir la police et la gendarmerie devant l’établissement scolaire dès la première heure de cours jusqu’à la dernière. Une hypothèse difficilement plausible, mais Laurent Prevost, le responsa ble du lycée Younoussa Bamana, est ouvert à toute proposition. Il a d’ailleurs reçu un petit groupe d’élèves pour les rassurer. « Le proviseur nous a beaucoup parlé de l’implication du lycée dans ces affaires. Il maintient le fait que les élèves sont en sécurité devant l’établissement, ce qui est relativement vrai », relate Haddad.

Pendant la manifestation, tout le monde a pu ressentir non seulement la douleur des jeunes mais surtout leur colère. À leur jeune âge, beaucoup ne croient plus en l’efficacité des autorités. « Nous sommes satisfaits de l’ampleur que le mouvement a pris, mais pas du résultat. On sera réellement satisfaits quand on n’aura plus la boule au ventre pour aller à l’école, quand on pourra vivre en paix sur cette île », poursuit ce lycéen qui porte la voix de ses camarades. Son autre regret ? Le silence du délégué du gouvernement. « Le préfet n’a pas pris la parole depuis le début de ces événements, on s’est sentis offensés .» Ironie du sort, la manifestation qui s’était déroulée sans accroche a été entachée vers la fin par des individus qui ont essayé de s’introduire dans le lycée Younoussa Bamana en essayant d’enfoncer l’un des portails. Présente, la police a rapidement réagi. Mais la panique a poussé une grande partie des lycéens à quitter les lieux plus tôt que prévu. Comme par réflexe.

Gestes barrières et Ramadan à Mayotte : une volonté commune de prendre soin des autres

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C’est une “chance”. Contrairement à l’année dernière, où le Ramadan se déroulait en plein confinement, les mosquées de l’île sont cette fois autorisées à rouvrir pour accueillir, sous certaines conditions, les pratiquants durant le mois saint. Car c’est un Ramadan inédit que les croyants de l’île s’apprêtent à vivre. Fin des rassemblements, prières, vaccins, le cadi de Sada rappelle pourquoi les messages de l’islam font particulièrement écho au contexte sanitaire actuel.

Mercredi, 7h30. Dans un établissement scolaire du sud de l’île, les cours ont commencé depuis déjà une demi-heure. Au détour d’un exercice , Romain*, professeur d’histoire-géographie, propose à ses élèves de se désinfecter les mains. Un petit rituel désormais bien rodé. Comme à chaque fois, les adolescents font la moue devant le flacon odorant à la texture visqueuse et collante, avant de tendre leurs mains sous la pompe de gel hydroalcoolique, les paumes tournées vers le ciel. Pourtant ce jour-là, celui qui marque le début du mois saint à Mayotte, deux jeunes filles caquettent, rechignent. “Mais Monsieur, c’est Ramadan, on n’a pas le droit !” Un brin dubitatif, l’enseignant hausse un sourcil. “C’est à cause de l’alcool. Vous savez, c’est pareil avec les parfums…” Pas tout à fait, en réalité.

Dans les faits, les fragrances contenant en grande quantité une substance capable de provoquer l’ivresse sont effectivement proscrites au yeux du Coran. Une exception subsiste : le recours aux solutions alcooliques est permis en cas de nécessité. Et dans le cadre d’une pandémie mondiale, la désinfection en est une. “Le fondement de l’islam, c’est de préserver la vie, la sienne et celle des autres”, rappelle sans détour le cadi de Sada, Abdallah Mohamed, celui-là même qui l’année dernière, avait prêté son visage et sa voix à une campagne de sensibilisation aux respects des gestes barrières lors du premier Ramadan en temps de Covid.

 

Tolérance zéro pour la prière et le foutari

 

L’année dernière, les mosquées étaient fermées pendant le Ramadan car Mayotte était encore confinée à ce moment-là”, se souvient-il. “Cette année, nous avons la chance de pouvoir pratiquer notre religion dans nos lieux de culte. Alors il est capital qu’elle ne devienne pas un facteur de transmission du virus” En ce sens, les pratiquants doivent revoir leurs habitudes au sein des sanctuaires : chacun doit apporter son propre tapis de prière, porter le masque et respecter une distance de deux mètres. En sus, chaque mosquée est soumise à accueillir un nombre limité de personnes. “Si nous avons connaissance d’une mosquée qui ne respecte pas ces mesures, nous la ferons fermer immédiatement !”, promet le dignitaire religieux. “Et ce même si cela concerne ma propre mosquée, c’est non négociable !” De quoi éviter les écueils de l’année passée, où malgré l’interdiction d’accueillir les croyants, certains lieux saints ouvraient discrètement leurs portes quand venait l’heure de la prière.

Preuve que l’exemplarité est cette fois la règle à suivre, les cadis de l’île ont récemment fait fermer la mosquée de M’tsangamouji, voyant que les préconisations sanitaires n’y étaient pas respectées. “Nous demandons à tous d’être attentif à cela et de nous signaler tout problème pour que nous puissions agir et permettre à tous les musulmans de prier sereinement jusqu’à la fin du Ramadan”, prévient Abdallah Mohamed. “Regardez à La Mecque, si quelqu’un ne respecte pas les gestes barrières, il est sanctionné tout de suite !”. Autre alternative, la prière à domicile, qui, aux yeux de Dieu, a la même valeur que celle effectuée dans les lieux de culte.

Mais dans l’intimité des foyers, lorsque résonne la voix du muezzin une fois le soleil couché, sonne aussi la rupture du jeûne. Un moment solennel qui, traditionnellement, se célèbre en famille, entre amis, entre voisins. Qui célèbre la convivialité et le partage. Loin de l’interdiction, encore en vigueur, de se rassembler au-delà de six personnes. “Avec la deuxième vague qu’à connue Mayotte, nous avons tous compris que les conséquences pouvaient être lourdes pour certains”, insiste le cadi. “Alors nous ne pouvons plus célébrer le foutari à 50, 100 ou 150 personnes comme nous avions l’habitude de le faire.” Là encore, aucune concession n’est permise : “Nous invitons tous les musulmans à rompre le jeûne uniquement avec les personnes qui vivent sous le même toit, pas plus. Il ne faut inviter personne, pas même sa propre mère si elle vit ailleurs !” Et la règle reste de mise pour la fête de l’Aïd, l’un des jours les plus importants de l’année à Mayotte. L’un des jours, aussi, où les gens se rassemblent le plus. “Un bon musulman doit prendre soin de soi et des autres, c’est la volonté de Dieu.” Et dans ce contexte si particulier, le soin de soi et des autres passe inévitablement par le respect des gestes barrières. “Un point c’est tout !”, martèle le cadi. La messe est dite.

* Le prénom a été modifié.

 

Jeûne et vaccin

Symboliquement, “le jeûne est aussi une façon de vivre et de comprendre la souffrance de ceux qui n’ont pas de quoi se nourrir tous les jours”, rappelle le cadi de Sada. Mais derrière ce mouvement de compassion et de solidarité, la privation de nourriture vise aussi à purifier le corps en lui permettant de mieux se régénérer. Sans le processus de digestion, les organes qui profitent d’une forme de repos, peuvent éliminer plus efficacement les toxines accumulées tout au long de l’année. Se pose alors la question de l’interférence du vaccin sur le processus, que certains peinent à trancher. Mais là encore, le juge musulman écarte d’un revers de la main tout soupçon d’incompatibilité : “Pendant la journée, nous n’avons pas le droit de donner au corps ce qui peut lui apporter plus de force, donc on peut se faire vacciner sans aucun problème, ça ne rompt pas le jeûne !

 

Les rencontres sportives demeurent malgré les interdits

Afin d’accompagner la purification du corps, et d’éliminer les éventuels excès occasionnés lors du foutari, des tournois sportifs sont organisés quotidiennement à la nuit tombée pendant tout le mois saint. Des rencontres autour d’un ballon chères à la tradition, interdites au vu du contexte sanitaire. Pourtant, dans certains quartiers du chef-lieu notamment, les équipes, ou les pratiquants de mourengué – les combats de boxe traditionnelle – n’hésitent pas à se rassembler en catimini, coûte que coûte. Et sur la question, le cadi de Sada a là aussi un avis bien tranché : “Si l’on tient à faire du sport, on peut le faire chez soi ou aller courir dans son quartier. Il existe bien des façons d’éviter les rassemblements, alors nous devons le faire. Notre religion et notre culture ne doivent pas servir d’excuse pour propager le virus.

Gilles Halbout : « S’il y a une institution qui tient le coup sur l’île, c’est bien le rectorat »

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Marqué par le décès de deux lycéens en à peine une semaine, le rectorat de Mayotte passe pour le bouc émissaire idéal. Face aux demandes sécuritaires de plus en plus insistantes, le responsable de l’académie, Gilles Halbout, défend sa position et appelle à l’union sacrée pour que l’ensemble du personnel éducatif, des jeunes et des parents d’élèves retrouvent un semblant de sérénité. Entretien.

Flash Infos : Depuis les décès de Miki et d’Ambdoullah, le rectorat est la cible de critiques concernant la sécurité de ses élèves. Comment les accueillez-vous en sachant que ces drames n’ont pas eu lieu dans les établissements scolaires ?

Gilles Halbout : Tout le monde dans cette île a une relation particulière avec l’Éducation nationale. Mais on ne peut pas nous rejeter tous les torts. Nous faisons notre possible pour apporter de nouvelles formations mais aussi pour rénover les bâtiments, alors que ce n’est pas notre rôle. Au bout d’un moment, nous ne pouvons pas tout faire… Nous pointer systématiquement du doigt quand quelque chose ne tourne pas rond ne va pas régler le vrai problème, qui est général au département et qui concerne bien souvent la sécurité publique.

C’est important que les habitants comprennent que nous ne sommes pas toujours les responsables. Lorsque des jeunes rejettent la faute sur un chef d’établissement ou sur un agent de l’équipe mobile de sécurité, c’est dur à entendre ! Si nous voulons que des enseignants s’engagent sur le territoire, il faut protéger les uns et les autres plutôt que d’accabler la communauté éducative, qui est parfois elle-même blessée dans l’exercice de ses fonctions. Il faut raison garder, prendre du recul et de la hauteur. Aller chercher des coupables, c’est injuste, malsain et contre-productif.

FI : Ce week-end, le gouvernement a réagi, par le biais de Jean-Michel Blanquer, le ministre de l’Éducation nationale, qui a partagé son indignation (voir encadré). Quelles réflexions sont actuellement menées à Paris pour apporter une solution pérenne à ces règlements de compte entre bandes rivales ?

G. H. : Nous devons jouer sur tous les tableaux ! Il faut travailler sur l’éducation, le bâti, l’accompagnement, le numérique… Avec le ministre, nous échangeons là-dessus pour apporter des réponses de fond, et non pas seulement des réponses sécuritaires. L’une d’elles passe par le recrutement de 265 nouveaux personnels à la rentrée prochaine. À nous de plus les cibler par rapport aux besoins du territoire.

FI : Vendredi dernier, vous avez rencontré les parents d’élèves en début d’après-midi. Quelles décisions ont découlé de cette entrevue ?

G. H. : Nous organisons une grande journée pédagogique ce mercredi avec des débats, des prises de conscience, des échanges dans l’ensemble des établissements scolaires. Certains proposeront des ateliers, d’autres inviteront les parents et les élus. Il y a de bonnes réactions, mais encore faut-il tout mettre en musique dans la pratique. Tout le monde commence à penser qu’il nous faut un retour global. Nous sommes passés d’une société communautaire à une société « individuelle », dans laquelle la population pense que c’est à l’État de s’occuper de l’éducation des enfants.

Il faut que les mairies prennent leurs responsabilités par rapport au système de garde et de périscolaire. Ce n’est pas normal que certains élèves ne soient pas encore pris en charge entre midi et deux… Il faut que les standards montent d’un cran partout ! De notre côté, nous avons également balayé devant notre porte. Nous savons que nous avons de grosses marges de progression, mais s’il y a une institution qui tient le coup sur l’île, c’est bien le rectorat. C’est une machine énorme qui fonctionne relativement bien. Après, nous comprenons l’attente qui pèse sur nos épaules, mais il faut savoir relativiser et ne pas toujours être dans des réactions de défiance. La plupart des collègues veulent s’impliquer dans le développement de Mayotte.

FI : Que répondre à des élèves et à des parents qui ont peur pour leur sécurité ?

G. H. : Déjà, il faut entendre les messages des élèves, comme ce fut le cas lors des Assises de la sécurité, et tous nous mobiliser. Par exemple, quand il y a un peu de tension, il faut que les parents soient là, regardent, participent, rassurent… Qu’un petit continuum garde un œil sur les enfants. Pour cela, il faut une mobilisation générale. Ce message semble en tout cas être passé ce lundi sur Mamoudzou puisque nous en avons vus plus que d’habitude.

FI : Très bien. Mais quand des parents s’investissent, ils sont sous la menace de contrôles inopinés. Pas plus tard que la semaine dernière, certains d’entre eux, qui accompagnaient les élèves jusqu’aux bus au lycée de Bamana, se sont fait embarquer…

G. H. : Il faut, bien évidemment, que les alentours des écoles soient un lieu sécurisé pour les parents, sinon nous n’allons pas nous en sortir. Si des interpellations s’opèrent… (il se coupe). Nous ne devons pas voir cela !

FI : Dans ces conditions, ne faut-il pas faire pression sur la préfecture pour renforcer la présence des forces de l’ordre aux abords des établissements scolaires ?

G. H. : Nous demandons constamment des renforts aux forces de l’ordre. Mais malgré leur présence, cela reste tendu puisqu’ils sont victimes d’attaques et de caillassages, comme à Kahani. La gendarmerie et la police doivent avoir un rôle dissuasif, or aujourd’hui ce n’est pas le cas. Je ne connais aucun pays où l’on se dit qu’il faut placer un gendarme derrière chaque individu. Sinon, nous serions dans un État policier. Je le dis et le répète, il faut une prise de conscience générale : ne rien lâcher et ne pas baisser la tête.

FI : Depuis quelques jours, le spectre d’un nouveau blocage comme celui vécu en 2018 prend de plus en plus d’ampleur. Cela serait une nouvelle épine dans le pied pour l’Éducation nationale, après les conséquences des deux confinements au cours de la dernière année…

G. H. : Tous les blocages, notamment ceux dans le Nord, nous désespèrent ! Ce sont les élèves qui en pâtissent en premier. Si je savais comment les débloquer, je signerais tout de suite. Certains adultes ne montrent pas le bon exemple aux enfants… Il ne faut pas répondre à la violence par la violence, mais prôner le vivre ensemble. Cela ne renvoie en aucun cas un bon message. Au contraire, cela prive directement l’accès à l’éducation pour une partie de la jeunesse. Nous pouvons nous parler normalement, nous n’avons pas besoin de rajouter des barrages.

 

Jean-Michel Blanquer réagit à l’assassinat de nos deux lycéens

Le ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, a adressé un communiqué le 16 avril pour évoquer la semaine meurtrière vécue par le rectorat du 101ème département. « C’est avec une profonde tristesse que j’ai appris la semaine dernière la mort du jeune Miki, lâchement assassiné devant la cité Nord de Mtsangadoua, son lycée. Ma peine est profonde à l’annonce, quelques jours plus tard, du meurtre d’Ambdoullah, élève du lycée Bamana à Mamoudzou. Ce jeune homme a, lui aussi, perdu la vie après une violente agression dont il a été victime sur la voie publique. Ces deux drames touchent des familles, des proches et les communautés éducative de ces deux établissements. Je tiens à leur adresser aujourd’hui tout mon soutien », a-t-il introduit. Avant de rappeler les valeurs républicaines et et d’apporter son soutien aux personnels du rectorat. « En une semaine, ce sont donc deux jeunes, deux lycéens, deux élèves de l’académie de Mayotte qui ont été tués par d’autres jeunes. Ces actes sont condamnables, il n’est pas tolérable que ces meurtres sur fond de rivalités de territoires perdurent. L’Éducation nationale continuera inlassablement à se mobiliser pour permettre aux jeunes de Mayotte d’apprendre, de se former et de se contruire en tant que citoyens respectueux les uns des autres. En ce moment douloureux, si nous pensons d’abord à celles et ceux qui aimaient Miki et Ambdoullah, je veux aussi rendre hommage et remercier, pour leur engagement, l’ensemble des personnels de l’Éducation nationale qui, chaque jour, malgré les difficultés, mettent toutes leurs compétences et leur cœur au service de la jeunesse de Mayotte. »

À Chirongui, les randocleanners redonnent une seconde jeunesse à la mangrove

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Ce dimanche, l’association Randoclean a rassemblé une centaine de personnes pour une septième activité écocitoyenne, du côté de Chirongui. Au programme : découverte de l’écosystème de la mangrove et ramassage des déchets. Immersion aux côtés de ces bénévoles qui souhaitent préserver la biodiversité de l’île aux parfums.

Dimanche. 8h. C’est parti pour la distribution de sacs et de gants. Les randocleaners sont prêts pour la collecte. Trente minute plus tard, les bénévoles s’élancent dans une chasse aux détritus. Les déchets sont toujours plus nombreux sur le territoire de Mayotte, mais les stars du jour resteront les masques chirurgicaux qui jonchent le sol. Le long de la route qui mène à la mangrove de Chirongui, un camion benne escorte les bénévoles et récupère les sacs de déchets ramassés. “Les déchets recyclables dans les sacs transparents, les déchets ménagers dans les sacs noirs.” Plusieurs associations mahoraises sont venues prêter main forte. Tous les amoureux de la nature et de l’île aux parfums se retrouvent autour d’un objectif commun, la préservation de la biodiversité.

 

Prise de conscience collective

 

De 8h30 à 12h30, les bénévoles travaillent d’arrache pied pour éradiquer les déchets répandus à travers la mangrove. Les pieds dans la vase et le sourire aux lèvres, les randocleaners sillonnent les palétuviers qui n’auront dorénavant plus de secret pour eux grâce à l’intervention pédagogique de Pierrick Besnardeau. En effet, le 101ème département en abrite pas moins de sept espèces différentes. Les membres des associations écologiques de Mayotte rappellent que la mangrove est un écosystème fragile et unique au monde. Ils espèrent que des actions comme celles-ci permettront une prise de conscience collective afin de garantir la préservation de ce patrimoine endémique.
Clap de fin à 13h. La benne remplie de sacs achemine les détritus vers la déchèterie.

Aujourd’hui, le tri des déchets est devenu un problème de société sur l’île aux parfums. Le ramassage des poubelles ne semble pas être la priorité des élus locaux et beaucoup d’habitants n’ont toujours pas d’accès à des conteneurs afin d’y déposer leurs détritus. Souvent jetés dans la nature, les immondices viennent polluer les sols et les eaux du lagon. Conséquences : les initiatives écologiques se multiplient sur le territoire mahorais afin de tenter d’endiguer ce phénomène.

 

Pose de la première pierre de l’office de tourisme de Petite-Terre

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L’ouverture de l’office du tourisme de Petite-Terre est un geste politique, mais aussi une ouverture économique.” Samedi dernier, Saïd Omar Oili, le président de la communauté de communes de Petite-Terre, a posé la première pierre du futur office du tourisme de l’île.

Le conseil départemental, qui cofinance le projet à hauteur de 80%, avec une enveloppe de plus de 350.000 euros, y a été représenté par sa 1ère vice-présidente Fatima Souffou, par ailleurs conseillère départementale de Dzaoudzi. Et de rappeler dans son allocution que depuis 2015, les trois collectivités de Petite-Terre ont été soutenues par le Département à hauteur de plus de 12 millions d’euros.

Conçu en matériaux recyclables et recyclés, le bâtiment pourra accueillir les futurs voyageurs venus découvrir les richesses de la “Pépite de Mayotte”. Les équipes de chantier démarreront dès lundi et prévoient de livrer le nouvel édifice au mois d’octobre 2021.

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Mayotte Hebdo de la semaine

Mayotte Hebdo n°1116

Le journal des jeunes