Le syndicat des Jeunes Agriculteurs de Mayotte tenait un séminaire ce samedi 12 juin au lycée des Lumières de Kawéni. Deux grands thèmes ont été abordés lors de tables rondes : comment installer plus d’agriculteurs de manière pérenne sur l’Île et comment avoir des produits locaux de qualité et à des prix accessibles pour tous. Un constat flagrant en ressort : la filière a besoin de se structurer.
« Depuis des années, on nous répète qu’il faut développer l’installation des jeunes, mais depuis 2014 seulement cinq ont été installés ! Qu’est-ce qui bloque ? », s’écris Hichak, un exploitant agricole de l’île aux parfums. En effet, s’il semble évident pour les acteurs de la filière que l’installation et le suivi post installation soient facilités pour les jeunes agriculteurs qui souhaiteraient démarrer une exploitation sur Mayotte, les moyens ne sont pas mis en place, ni par l’État ni par le Département.
Face à ce constat, les différentes instances du territoire présentes à ce séminaire organisé ce samedi 12 juin par les Jeunes Agriculteurs ont tenté de se défendre. Papa-Maciré Diop, chargé d’opération chez Epfam, a assuré « que les choses commencent à bouger » et que « tout devrait commencer à se débloquer ». Mais les exploitants restent sceptiques, après des années de promesse sans réels changements visibles pour eux. Les structures sont toutefois de plus en plus nombreuses à proposer des formations dans le secteur agricole. Un bac professionnel et même un BTS sont désormais accessibles. Patrick Gauthier, directeur du CFA, a souligné le fait qu’un nouveau Brevet Professionnel exploitation serait disponible. Un diplôme qui se prépare en 11 mois de formation, durant laquelle les jeunes viennent avec leur projet de développement et travaille sur du concret, afin de pouvoir développer leur exploitation au plus vite.
La structuration de la filière comme clé pour l’avenir
« On a le devoir de faire sourire les gens. Je suis installé depuis 23 ans et c’est très dur. Il n’y a pas d’instances publiques, on a un lourd problème foncier et depuis la départementalisation, on nous a fait croire que ce serait plus facile alors que non », constate un exploitant, visiblement ému. Et alors qu’il s’égosille dans le micro, ses yeux brillent et ses paroles transpirent l’amour qu’il porte à son métier. Soumaila Moeve, président des JA de Mayotte, et Michel Dusom, vice-président, hochent la tête, en guise d’acquiessement. Les choses doivent bouger, et vite ! Une structuration du secteur est nécessaire, surtout que les services de restauration scolaires doivent prochainement sortir de terre et que les agriculteurs du 101ème département seront naturellement sollicités pour répondre à ce nouveau besoin en nourriture.
Pour produire une alimentation de qualité en grande quantité, les Jeunes Agriculteurs soutiennent la création de coopératives dans différents secteurs, à l’instar d’Uzuri Wa Diza, présidée par Boinaïdi Abdallah. Une coopérative qui a vu le jour en 2018 et qui regroupe les exploitants de lait de Mayotte. Pendant deux ans, ils ont fait face à de nombreuses difficultés financières, mais ils avaient besoin de se regrouper pour s’en sortir, notamment pour lutter contre la vente informelle. En 2020, les membres de la coopérative ont pu commencer à vendre leurs produits, après avoir fait importer du matériel adapté à leurs nouveaux besoins. La création de coopératives pourrait donc être la solution aux difficultés du secteur agricole sur l’île dans l’optique de structurer la filière : de la production à la commercialisation.
Un groupe de bénévoles s’est rendu avec “Give a smile” dans les hauteurs de Passamaïnty ce dimanche. Objectif, donner quelques vêtements. Et distribuer des sourires.
Niels farfouille dans les sacs Baobab, avant d’extirper un tout petit body blanc et rose. “C’est fille ça !” À côté de l’âge, “3 mois”, une étiquette indique le nom de son ancienne propriétaire. “Oh, ça, c’était à ma petite cousine !”, répond Ali de l’autre côté des paquets. Ce dimanche, un petit groupe d’une dizaine de bénévoles a grimpé les hauteurs de Passamaïnty pour donner des vêtements aux familles les plus démunies. Une action qui a mis du baume au cœur, et pas seulement aux volontaires du dimanche, nostalgiques. À l’origine de cette opération, le collectif “Give a smile”, un groupe non subventionné lancé par Djounaïdi Ali Mouigni, un Mahorais qui travaille dans le social et ancien jeune ambassadeur aux droits de l’enfant (JADE), toujours très impliqué dans cette mission. Sur sa page Facebook, une phrase résume l’ambition de sa petite asso : “un simple geste peut être à l’origine d’un grand sourire”.
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Et des sourires, il y en a eus ce dimanche alors que les participants ont dévoilé aux heureux bénéficiaires le contenu de leurs paquets. “C’est des cadeaux ?”, lance un petit garçon avant de s’enfuir dans le dédale terreux du quartier informel. Peut-être pas par milliers, mais au moins une bonne dizaine de sacs rouges, en effet, remplis de bodys pour bébés, robes, pantalons et masques en tissu. Et même des soins pour la peau, apportés par Lidie, jeune entrepreneure qui a lancé sa marque de cosmétiques naturels L.O.A Cosmétique. “On pense rarement à donner aux femmes de quoi prendre soin d’elles”, explique la bénévole.
Tout le monde peut contribuer
Pour mener à bien cette action, l’équipe s’est déjà rendue sur place quelques semaines auparavant afin de recenser les besoins des familles. “On cible un quartier, on va repérer, on toque à toutes les portes et si les gens ont besoin, on récupère leurs noms, le nombre d’enfants, leurs âges et un numéro de téléphone”, déroule Sailat, en inscrivant dans un petit carnet une nouvelle bénéficiaire arrivée sur ces entrefaites. En tout ce dimanche, une dizaine de foyers ont pu recevoir les précieux habits. De quoi habiller les nouveaux nés… et même ceux en chemin ! “Le zéro mois, c’est à peine porté deux semaines, que ce soit ici ou en métropole, on les aurait donnés”, explique Niels, jeune papa qui a contribué à la collecte.
Tout le monde peut ainsi mettre la main à la pâte, en donnant ou en portant ! Et Djounaïdi, le fondateur, met un point d’honneur à ne pas rentrer dans les carcans associatifs traditionnels. D’où sa volonté de ne pas prendre de subventions ou de dons d’argent. “On leur donne des vêtements et ça répond à un vrai besoin”, explique celui qui veut montrer la possibilité pour tous de contribuer, sans conditions de ressource, d’âge, de profession, d’origine… “Je ne pensais pas à l’importance de distribuer, avant j’avais déjà donné à la Croix rouge des choses comme ça, mais là c’est différent, de faire soi-même la distribution”, souligne Ali. Le sourire jusqu’aux oreilles.
Ce jeudi 10 juin était synonyme de grève nationale pour les psychologues. À Mayotte, qui en comptabilise une trentaine, ils subissent le même sort qu’en métropole. Se sentant dénigrés par le gouvernement après l’annonce de nouvelles réglementations en réponse à la crise sanitaire et presque délaissés sur le plan salarial, les professionnels de la santé mentale ont donné de la voix pour interpeller les habitants et les autorités et dénoncer la précarisation de leur profession.
« Psychologues maltraités, patients en danger », entonne à l’unisson la quinzaine de professionnels, réunie ce jeudi matin au rond-point de la barge. Comme dans le reste de la France, les psychologues de Mayotte expriment en chœur leur colère face à la précarisation de leur métier. « Il y a un projet de remboursement des consultations psychologiques en libéral, ce qui n’est pas inintéressant… Le problème ? C’est la forme que cela va prendre », s’inquiète Faïne, psychologue libérale, venue dès 8h du matin pour partager sa frustration avec quelques-uns de ses collègues de la profession sur le territoire. En effet, les psychologues libéraux considèrent que les nouvelles mesures du gouvernement menacent de plus en plus leurs pratiques.
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Et aux yeux de Faïne, plusieurs réglementations risquent de leur compliquer la tâche. Comme le fait que les consultations soient uniquement possibles sur prescription médicale, ce qui donne davantage de travail aux médecins généralistes… Qui ne savent pas toujours bien orienter les patients lorsqu’il s’agit d’un suivi psychologique. « Certains attendent des mois avant de nous appeler, alors s’ils doivent passer par une tierse personne, ils n’arriveront jamais jusqu’à nous », regrette pour sa part Maureen. Autre crainte pointée du doigt ? Les grilles tarifaires proposées par l’exécutif : 22 euros remboursés pour trente minutes de séance et 30 euros pour une heure. Des tarifs qui ne permettraient pas à ces professionnels de la santé mentale de rentrer dans leurs frais. À ce rythme-là, les conséquences pourraient être terribles ! « Si nous nous alignons sur leurs propositions, nous allons devoir fermer nos cabinets », peste encore la jeune femme.
Des problématiques méconnues du public
Si les psychologues en grève cherchent à attirer l’attention de l’agence régionale de santé, ils souhaitent aussi révéler leur situation au grand public. Sur tous les fronts durant la crise sanitaire, en raison de l’accompagnement de davantage de personnes angoissées qu’à l’accoutumée, ils se sentent littéralement oubliés par les fameuses conclusions du Ségur de la santé présentées par le ministre des Solidarités et de la Santé, Olivier Véran, le 21 juillet 2020, à l’instar des sages-femmes qui ont elles aussi manifesté dans les rues de Mamoudzou le 5 mai dernier.
« Écoutez-nous comme on vous écoute », scandent-ils ce jeudi, comme pour faire bourdonner l’oreille des passants. Armé de tracts, le groupe détaille par écrit les dernières mesures prises par la majorité présidentielle et évoque avec les plus curieux la précarisation grandissante du métier de psychologue libéral. Au détriment d’un renforcement des structures d’accompagnement déjà existantes, comme les centres médico-psychologiques ou les services psychiatriques intra-hospitaliers. Installés ensuite au milieu du rond-point de la barge, ils prennent la direction de la préfecture de Grande-Terre. Sur le chemin, les professionnels de la santé mentale chantent à tue-tête leurs slogans. Une manière de faire réagir les uns et les autres, tel un cri de désespoir tant la population mahoraise ne semble pas prendre conscience de l’importance de leur champ d’actions…
Des problématiques propres à l’île aux parfums
Car oui, si les nouvelles réglementations concernent l’intégralité des psychologues du territoire français, les professionnels de Mayotte défendent aussi leurs propres revendications. « Comme dans tous les domaines de santé ici, il y a un énorme besoin et nous manquons de moyens humains », se désole Faïne. Selon elle, ce vide est en grande partie responsable du turn-over… Pour preuve, peu de spécialistes décident de rester sur place, découragés face au manque à combler. « Quand sur un suivi de deux ans, les patients rencontrent trois ou quatre psys différents, c’est loin d’être optimal », met-elle en lumière.
Les conditions dans lesquelles doivent travailler les psychologues sont donc difficiles à assumer pour eux, aussi bien mentalement que financièrement, mais surtout, elles ont un grand impact sur les patients, dont le suivi perd en qualité. Pour toutes ces raisons, ces professionnel de la santé mentale auraient souhaité être consultés avant l’annonce des mesures qui sont vues comme « un coup de com’ » plutôt qu’une réelle avancée pour leur spécialité. « Je ne m’en sortirai pas », confie, désespérée, une psychologue clinicienne…
L’entrepreneur et agriculteur, qui a notamment lancé le label Greenfish, et porte-parole du MDM, se présente aux côtés de Fahina Ibouroi dans le canton Mamoudzou 2, Cavani-Mtsapéré. Leur programme ambitieux entend repenser la structuration de Mayotte pour développer l’économie et faire rayonner le 101ème département dans la région. Entretien.
Flash Infos : Vous vous présentez pour ces élections sous l’étiquette du parti MDM, parti historique de Mayotte mais qui connaît des dissidences… Dans quelle mouvance vous inscrivez-vous ?
Hakim Nouridine : Je suis le candidat qui a reçu l’investiture, avec l’autorisation d’utiliser le logo pour la campagne. L’éclatement est dans l’air du temps, nous avons le même phénomène chez Les Républicains. C’est le reflet d’une société qui évolue, avec des partis qui ne sont pas toujours en phase avec certaines réalités, et avec une jeunesse qui s’interroge et qui a besoin d’être considérée. Il faut dire aussi qu’il y a parfois une mainmise des partis politiques par des anciens accumulateurs de mandats qui ne veulent pas céder la place… C’est un peu ce qui m’arrive aujourd’hui, j’ai dû me battre pour l’investiture. Celui avec qui je devais travailler, l’un des plus anciens leaders du parti, le sénateur Hassani Abdallah, a préféré soutenir la candidature d’Elyassir Manroufou, qui n’a pas fait le même combat ou qui n’a pas eu le même parcours politique que moi. Je suis dans ce parti depuis quatre générations, avec mon arrière grand-père, mon père, ma mère. J’ai été sur des listes d’élections municipales et j’ai été suppléant aux élections législatives de 2012 avec le candidat MDM. Et j’ai un passé de militant politique très actif, j’ai fait partie des cadres du MDM. Bref, il y a un long combat politique derrière. Même si c’est ma première élection comme candidat !
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FI : Qu’est-ce qui vous a donné envie de vous lancer dans cette campagne des élections départementales ?
H. N. : Les enjeux de Mayotte ! La Mayotte de demain ne peut pas se construire dans la vision actuelle. Les politiques publiques sont complètement en décalage avec les réalités modernes, tant sur le plan environnemental que sur la culture ou sur l’économie. Selon moi, il faut apporter un autre regard. Et ce regard ne peut venir que d’une personne qui a un parcours comme le mien, c’est-à-dire qui est issue du secteur privé, du monde économique, et qui va pouvoir bouleverser ces dogmatismes. La plupart des élus de Mayotte ou des candidats sont issus de l’administration, ce sont des enseignants, des fonctionnaires… Ils ne sont pas en phase avec ces réalités. Mayotte aujourd’hui, c’est 60% de la population qui doit trouver un travail. On ne peut espérer tous les recruter au sein des collectivités locales. Il faut voir plus large, avec une politique mahoraise qui doit être en phase avec la région. Car lorsqu’une sécheresse frappe le sud de Madagascar, c’est aussi Mayotte qui paie les pots cassés. Je pense qu’il faut une maîtrise des ressources naturelles avec des politiques communes, partagées avec la région. Fers de lance de cette politique, le port de Longoni et l’aéroport de Dzaoudzi doivent jouer leur vrai rôle de hub économique régional. Mayotte est européenne, et nous avons ici les moyens d’avoir une politique beaucoup plus osée et dynamique qu’aujourd’hui.
Et cela concerne aussi la jeunesse. Elle doit être formée pour pouvoir affronter les défis en matière de création d’emploi et de lutte contre la pauvreté dans la région. Cette jeunesse doit comprendre qu’elle hérite de cette culture française et européenne mais qu’elle a aussi une culture régionale. Pas que mahoraise. Nos jeunes doivent être en mesure d’aller travailler au Mozambique, à Madagascar, aux Seychelles et aussi en Europe, qui fait face au vieillissement de sa population. Ce sont tous ces défis qui m’ont poussé à me porter candidat, avec le parcours personnel atypique qui est le mien.
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FI : Justement, qu’est-ce qui, dans votre parcours, vous donne les clés pour relever ces défis ?
H. N. : D’abord, je tiens à rappeler que mon grand-père paternel était l’un des co-fondateurs de la première coopérative agricole mahoraise, c’était un combattant qui a beaucoup œuvré pour la qualité de la vanille, pour améliorer le café, l’ylang-ylang. Et c’est un personnage qui a compté dans l’histoire du combat de Mayotte française. C’est donc un héritage politique et économique très important. Sans compter cette culture commerciale, issue de ma famille paternelle, des marchands d’épices venus de Madagascar. En tant que fils de gendarme, j’ai aussi été élevé dans la discipline du travail et le respect des valeurs. Pour moi, l’élu de demain doit être celui qui respecte l’héritage mais qui a aussi cet amour pour la terre et de ce qui a fait de l’économie de Mayotte une économie florissante. Je suis moi-même agriculteur, il ne faut pas l’oublier ! J’ai fondé le label Greenfish, le premier label agroalimentaire dans l’océan Indien, et je porte ainsi les valeurs françaises et mahoraises dans le monde. J’ai participé à deux salons de l’agriculture à Paris pour promouvoir les produits mahorais mais aussi ceux de Madagascar car j’y travaille dans le cadre de la coopération décentralisée, justement avec le soutien de l’Europe qui participe activement au développement de l’agroalimentaire malgache.
FI : Vous avez aussi une autre casquette, dans le domaine du transport.
H. N. : Tout à fait, je suis issu de l’industrie automobile, mon premier métier. J’ai travaillé avec le groupe Nel pour mettre en place la licence Ford. Nous nous sommes battus pour créer la concession et développer les premiers contrats d’objectif pour que la marque soit ancrée à Mayotte. C’était un grand défi, car il s’agissait du premier constructeur étranger à s’installer ici. Mon combat a aussi concerné le développement du transport à Mayotte avec l’installation du constructeur allemand Mercedes via son département bus. C’est donc ce regard d’industriel qui me permet aujourd’hui d’intégrer dans ma vision politique une vraie organisation des modèles économiques et de structuration des filières. Deux impondérables pour le développement de Mayotte, croyez-moi ! Cette mise en place des chaînes de valeur, c’est ce que j’ai vécu dans l’automobile et c’est ce qui doit se faire dans les autres filières. Prenez le développement de l’agroalimentaire en Afrique : c’est ce qui marche ailleurs et cela peut marcher à Mayotte.
FI : Par où comptez-vous commencer cette structuration économique ?
H. N. : Cela ne peut se faire qu’en ayant un regard sur la maîtrise des ressources. Et quand je dis ressources, je pense aussi à la jeunesse, qui doit être formée, aux femmes à qui l’on doit libérer du temps pour qu’elles puissent travailler. Il faut organiser la garde d’enfants et le périscolaire dans le département, c’est indispensable. Et il faut s’occuper des jeunes, je le répète, pour qu’ils puissent être mieux formés, mais avoir aussi des diplômes qui leur permettent d’aller au-delà de Mayotte. On peut envisager des formations complétées par des modules à l’étranger, dans la région ou ailleurs, pour qu’ils intègrent les réalités du numérique, de la mondialisation, des marchés, de la concurrence, sans oublier la maîtrise des langues étrangères.
Au niveau des ressources naturelles, il y a aussi bien sûr la problématique de l’eau. À mon sens, cela nous ramène à la politique environnementale de l’habitat : par exemple, comment faire pour utiliser ces eaux de pluie ? Peut-être devrions-nous redéfinir le logement type mahorais et le logement social pour en faire un logement écologique. Il ne faut pas oublier que Mayotte doit construire 500 logements par an. Nous n’avons pas de carrière ici, allons-nous devoir détériorer l’environnement pour atteindre cet objectif ? Il faut se projeter vers des solutions plus écologiques.
FI : Que proposez-vous pour faire évoluer ce logement type mahorais ?
H. N. : Pour moi, cela passe par le choix des matériaux. Le bois, le bambou, la brique de terre… Il est important que nous fassions aujourd’hui des choix stratégiques. Un modèle économique ne peut pas se construire sans choisir l’énergie c’est pour cette raison que la maîtrise des ressources est une clé du développement du territoire.
FI : Vous le disiez, il faut construire 500 logements par an à Mayotte, sans compter les autres constructions. Or, le foncier est rare. On sait que certains terrains du conseil départemental sont souvent indisponibles car occupés par des habitats informels. Quelle doit être la politique du Département à ce sujet, selon vous ?
H. N. : Il faut s’appuyer sur l’existant. Beaucoup de logements mahorais se sont construits à la hâte, sans permis de construire, au-delà du respect des règles d’urbanisme. Le plus urgent, et le plus simple, serait d’accompagner ces familles pour pouvoir reconstruire ces logements dans de meilleures conditions et intégrer dans ces constructions des logements sociaux. Cela peut se faire en appui des collectivités locales. De cette manière, nous gérons le problème du foncier tout en adoptant un urbanisme plus cohérent. Quitte à même dégager de l’espace pour les parkings ! C’est un autre sujet clé, nous ne pouvons pas développer ce canton sans stationnement. Très rapidement, il va falloir en venir aux immeubles parkings dans les prochaines années, et pas dans dix ans de préférence. Par ailleurs, je pense que ces constructions se doivent d’intégrer la problématique de l’insécurité dès leurs prémices. Les politiques publiques d’aménagement ne s’en saisissent pas assez à mon sens. C’est indispensable, quand on construit des écoles, des lycées, des logements ou encore des zones d’activité, de montrer ce que l’on apporte comme garanties. Regardez le Mozambique et son projet gazier, rattrapé par l’insécurité ! Je suis opérateur économique à Madagascar et dans les accords cadre il n’y a rien sur ce sujet. Or, c’est un vrai problème à Mayotte. Nous ne pouvons pas être attractifs, développer le territoire sans offrir de sécurité. Dans mon programme, je m’engage à avoir des spécialistes pour accompagner les porteurs de projet sur cette question. Par exemple, un chef d’entreprise qui souhaite construire une usine de poissons à Doujani : ce quartier connaît beaucoup de délinquance, nous pouvons donc imaginer apporter, en plus de financement, des conseils, de l’éclairage public, une meilleure accessibilité… Je pense qu’il faut imaginer la sécurité avant de mettre en place les investissements. On le voit, sans cela, dès que l’on construit des gymnases, des MJC, les collectivités sont très vite rattrapées par cette réalité.
FI : Vous parlez de définir le modèle économique du territoire, d’accompagner la structuration des filières, de faire du port et de l’aéroport des hubs pour la région. Quel regard portez-vous sur le projet de compagnie aérienne Zéna, qui espérait obtenir le soutien du conseil départemental ? Est-ce un projet que vous soutiendrez si vous êtes élu ?
H. N. : Ce projet-là reflète les attentes de la jeunesse mahoraise. Je l’encourage, bien sûr. Mon seul regret : qu’il n’y en ait pas d’autres. C’est dommage tant pour les transports que pour les autres secteurs. Je ne peux pas accepter qu’au XXIe siècle, nous ayons un seul projet de compagnie aérienne. Cela fait dix ans que Mayotte est département, nous sommes de plus en plus amenés à voyager. Je soutiendrai ce projet mais je ne pense pas que la concurrence se limite à une compagnie. Nous avons tellement espéré d’Ewa… Est-ce que cette nouvelle compagnie ne risque pas d’être rattrapée par la triste réalité de la rentabilité ? Il faut qu’il y ait plus de projets, et que nous les accompagnons au niveau du Département. Je me suis retrouvé seul concessionnaire pendant 11 ans et je n’étais pas accompagné. Je suis sûr que bien d’autres projets comme celui-là prennent la poussière, faute de soutien. Cela montre le désengagement des élus.
FI : Vous vous présentez sur le canton Mamoudzou 2 Cavani-Mtsapéré : une zone qui ne connaît que trop bien les problématiques d’engorgement de la commune chef-lieu. Que proposez-vous pour la mobilité des Mahoraises et des Mahorais ?
H. N. : En tant que constructeur et ayant aussi une vraie fibre écologique, je suis favorable à tout projet pour désengorger les routes de Mayotte… à condition de ne pas défigurer l’environnement ! Je crois beaucoup dans le projet de ligne maritime et ayant participé au concours innovation de l’ADIM l’année dernière, je sais que les idées ne manquent pas pour encourager les nouvelles mobilités. Mais encore une fois, il faut voir cela de façon globale. Je pense qu’il faut faire en sorte que tout le personnel du Département qui travaille à Mamoudzou n’ait pas besoin de venir sur place. Il faut aussi encourager rapidement le transport collectif et cela peut se faire très facilement, par exemple en permettant aux transporteurs scolaires qui n’exploitent pas les bus toute la journée, de récupérer ces employés. On peut aussi imaginer une solution de ramassage via les comités d’entreprise. Je pense que les ménages mahorais peuvent y être sensibles, dans la mesure où une voiture représente quand même 500 ou 600 euros de crédit par mois…
FI : Quid du Caribus, qui peine à se mettre en route ?
H. N. : Le bus de demain, ce n’est pas le Caribus. Ne vous méprenez pas, je suis pour ce projet ! Mais le Caribus est malheureusement déjà dépassé. On n’a pas réfléchi à l’énergie, et le gasoil cela ne peut pas être l’énergie de demain. Il faut aussi prendre en compte le confort, le gabarit… Nous sommes sur un territoire étroit, je suis constructeur, je sais que des solutions existent, et sont adaptées au territoire, à condition de réorganiser la filière correctement.
FI : Si vous êtes élu, comptez-vous briguer le poste de président du conseil départemental ?
H. N. : Avec un programme aussi osé, je ne peux que dire “oui”. Je ne vois pas comment cette politique de rupture peut se mettre en place sans le soutien de la majorité. Je pense avoir fait mes preuves, et je me battrai en tout cas pour que ce projet-là, qui va au-delà d’un projet cantonal, c’est un projet territorial, soit porté par une très grande majorité. Nous avons travaillé sur dix mesures chocs avec un programme axé autour de trois points : l’attractivité, la maîtrise des ressources et Mayotte comme hub de la région (port et aéroport). Ces mesures chocs sont destinées à la jeunesse. Je pense par exemple au festival international food & fun en Islande, auquel je voudrais faire participer les jeunes du lycée de Kawéni, pour qu’ils soient confrontés à la réalité et aux enjeux de ce métier. Nous pouvons aussi négocier une coopération régionale avec les Seychelles, nous l’avions fait par le passé, le gouvernement seychellois était favorable à l’idée d’accueillir dix jeunes mahorais. En échange, les Seychelles pourraient profiter de la francophonie, et Mayotte pourrait ainsi assumer ce rôle dans la région. Parmi les mesures phares, je voudrais aussi mentionner l’ouverture dès 2022 de la maison de Mayotte à Bruxelles, pour que les entrepreneurs aient un interlocuteur en Europe et ne se retrouvent pas frappés de plein fouet par les réglementations européennes. Je vous parlais de rupture : je pense qu’il est temps de se remettre en question aujourd’hui et de comprendre comment le monde tourne aujourd’hui. Car il ne tourne pas à la vitesse de Mayotte.
Structurer la chaîne : démonstration des hauteurs de Cavani au rond-point Baobab
Au milieu du chemin terreux, deux jambes dépassent du bas de caisse d’un van. Les outils du mécano, une batterie et des boulons jonchent le sol à côté des tâches d’huile tandis que deux jeunes observent la scène avec attention. C’est déjà le deuxième garagiste du genre, croisé en moins de dix minutes dans ce quartier sur les hauteurs de Cavani. “Ça, c’est le garage mahorais classique. Il n’y a aucune structure, mais cela répond à une demande”, analyse Hakim Nouridine, venu à la rencontre des habitants ce mercredi. “Dans ces activités informelles, vous allez parfois retrouver des jeunes avec un CAP ou un bac pro mécanique. Mais il n’y a pas de place pour eux dans les entreprises, alors ils viennent là”. Hochements de tête des principaux concernés, des élèves du lycée Bamana. “C’est le reflet d’un développement économique à deux vitesses. Ils viennent du lycée des Lumières et quand ils rentrent chez eux, ici, ils n’ont pas l’eau, pas l’électricité”, déplore encore le candidat du canton Mamoudzou 2. Selon lui, le développement économique à Cavani-Mtsapéré ne peut se résumer à la zone Baobab. “Il faut définir une politique économique avec des filières et des chaînes de valeur complètes : c’est la même chose avec les pêcheurs de Mtsapéré, il ne suffit pas de remplacer leurs barques pour les rendre conformes aux normes européennes, il faut aussi construire un hangar à proximité pour qu’ils puissent entretenir leur outil de travail, etc.” Et il faut agir vite, selon lui, car “nous avons toute une batterie de normes européennes qui sont en train de se mettre en place”. Pas question pour autant de laisser l’économie informelle se faire happer par ce rouleau compresseur. “Les femmes qui vendent en bord de route, par exemple : ce sont de vraies commerçantes, avec un talent pour la négociation, et nous pourrions nous appuyer sur le réseau des Douka bé pour les intégrer et créer de l’emploi”, déroule-t-il.
L’entrepreneur, qui s’est lancé pour ces élections départementales sous l’étiquette MDM, met en avant sa vision globale pour le développement de Mayotte, qui prend en compte l’amont comme l’aval. “Tout ce qui se passe ici a des impacts écologiques, environnementaux sur la zone en contrebas, nous ne pouvons pas l’ignorer si nous souhaitons vraiment développer le territoire”, insiste-t-il, en s’arrêtant à côté des déchets qui pourrissent sous les bananiers. Une logique que le candidat entend bien appliquer à tous les aspects de la vie mahoraise : structuration des filières, débouchés pour les jeunes, sauvegarde de l’environnement… “Ramasser c’est bien, mais sans sensibilisation, c’est de l’argent jeté par les fenêtres !”, résume-t-il.
Invité dans l’émission « Bonjour Chez Vous ! » de la chaîne Public Sénat ce mercredi 9 juin, le ministre des Outre-mer, Sébastien Lecornu est revenu sur les dernières mesures sanitaires pour voyager dans et depuis les territoires ultramarins et a également donné quelques indications complémentaires sur le projet de loi Mayotte.
Ce mercredi matin, Sébastien Lecornu, le ministre des Outre-mer, est intervenu dans l’émission « Bonjour Chez Vous ! » de la chaîne Public Sénat. Il a dans un premier temps brassé largement la situation épidémique « inégale » depuis le début de la crise sanitaire dans les territoires concernées. « C’est toujours un peu désagréable pour nos concitoyens ultramarins de voir que dans l’Hexagone parfois nous déconfinons pendant que nous prenons des mesures de restriction [chez eux] et vice-versa », a-t-il introduit. La raison de ces deux poids deux mesures ? La circulation plus ou moins rapide au cours des derniers mois des variants brésilien et sud-africain, qui peuvent rapidement provoquer des tensions hospitalières.
D’où la mise en place d’une procédure progressive des levées des motifs impérieux. Une décision pas du tout au goût du député LR Mansour Kamardine comme l’a rappelé Patrick Roger, journaliste politique au Monde. En effet, le parlementaire a accusé Sébastien Lecornu « de tenir les Mahorais comme des chiens en laisse et de les enfermer en cage ». Réponse de l’intéressé ? « J’ai de l’amitié pour [lui], mais il y a des mots qu’il ne faut pas employer. Je sais que nous sommes en campagne électorale et qu’il faut dire des choses fortes pour se faire entendre. C’est sûrement cela… À l’inverse, nous dirions aussi que nous ne protégeons pas les Mahoraises et les Mahorais », a-t-il rétorqué. Et de pointer du doigt celles et ceux qui tiennent ou ont tenu un double discours concernant l’envoi tardif des vaccins d’un côté et l’absence d’appel à la vaccination de l’autre. Idem au sujet de l’instauration et du maintien des mesures de restriction. « Je pense qu’il ne faut pas faire de politique avec cette crise sanitaire », a martelé le ministre des Outre-mer, avant de rappeler les heures sombres de Mayotte en tout début d’année.
Un retard que « j’ai du mal à accepter »
Car c’est bien là le problème, à Mayotte comme dans les autres territoires ultramarins : la campagne de vaccination n’avance guère assez vite au goût du gouvernement. Pour Sébastien Lecornu, le remède magique pour entrevoir un retour normal de toutes les libertés de circulation reste « le vaccin ». « Il y a les bras pour piquer, parce que le personnel soignant est complètement engagé. Pardon d’être très direct, mais ce qui manque [aujourd’hui] ce sont les bras à piquer ! Nous avons un retard que j’ai du mal à accepter : quand nous voyons les pays du monde dans lesquels les gens n’ont pas la chance d’accéder à un système de soins ou à des stocks de vaccin et que nous, nous pouvons le faire, je me dis qu’il y a quelque chose de dommage », a-t-il rappelé. Et le 101ème département ne déroge pas à cette pique. Entre le 25 janvier et le 8 juin, l’agence régionale de santé a comptabilisé 52.308 injections et 19.487 personnes vaccinées. Des chiffres trop peu élevés alors que la campagne est ouverte aux plus de 16 ans depuis le mois de mai…
Alors pour inciter les habitants à passer à l’acte, l’exécutif joue la carte de la carotte. Entre Mayotte, La Réunion et la métropole, les voyageurs vaccinés (schéma vaccinal complet) sont notamment dispensés d’auto-isolement et de motifs impérieux depuis le 9 juin. Mais pas de tests PCR ou antigéniques car « la géographie des territoires d’Outre-mer les met au contact de pays dans la zone qui peuvent toujours nous exposer aux variants ». « C’est notre capacité à détecter si les gens sont malades ou pas et à séquencer ensuite les tests positifs », a précisé Sébastien Lecornu, qui table, grâce à cela, sur une reprise de l’activité touristique.
Un retour devant les acteurs mahorais
Autre sujet évoqué ? La loi Mayotte, annoncée par le ministre des Outre-mer lui-même à l’occasion des dix ans de la départementalisation. Après un mois de consultations publiques, les différentes propositions de la population se trouvent sur le bureau du locataire de la rue Oudinot. « L’idée est de retourner devant les acteurs mahorais pour faire un premier retour, d’essayer de tracer l’architecture d’un projet de loi et de le co-construire », a-t-il détaillé. Mais cette prochaine venue est également une manière pour lui d’adresser un tacle à ses détracteurs. En ligne de mire : le Rassemblement national. « Souvent, Madame Le Pen prend en otage Mayotte sur Twitter, à la fois en se servant de ce qu’il se passe à Mayotte pour [mettre en garde] les Français de l’Hexagone et en même temps, en faisant croire aux Mahoraises et Mahorais qu’elle les protège. Evidemment, c’est absolument faux ! Je préfère une méthode beaucoup plus pragmatique, et très respectueuse, dans laquelle nous réaffirmons que Mayotte c’est la France, que nous sommes fiers qu’elle soit française. Donc là aussi, pas d’ambiguïté sur ce point. » Selon des sources concordantes, Sébastien Lecornu devrait poser pied sur l’île aux parfums les 6 et 7 juillet prochains. Quelques jours seulement après la tenue des élections départementales. Coïncidence politique ? Pas sûr puisqu’il compte présenter l’élaboration du projet de loi d’ici à septembre.
La scénographe Clara Walter en compagnie du jeune danseur Lilcé
La compagnie Kazyadance de Petite-Terre organise une semaine de spectacles dès samedi et jusqu’au 19 juin. Ces derniers porteront principalement autour de la danse contemporaine, mais pas uniquement. Théâtre, musique et marionnettes seront également au rendez-vous afin d’offrir à la population mahoraise une semaine de magie en présence d’artistes africains, métropolitains et, bien sûr, mahorais !
« Il ne s’agit pas d’un festival, mais plutôt d’un moment d’échanges entre artistes », prévient d’entrée de jeu Djodjo Kazadi, le directeur artistique de la compagnie Kazyadance, basée au lieu-dit Le Royaume des Fleurs, en face du restaurant Le Faré en Petite-Terre. En effet, la plupart des spectacles qui seront présentés au cours de la semaine du 12 au 19 juin 2021 seront des restitutions d’ateliers effectués avec de jeunes danseurs locaux. Il s’agit du travail réalisé dans le cadre d’un projet porté par la compagnie depuis plusieurs années, qui s’intitule « le laboratoire artistique ». La première session a été portée par le danseur mahorais Jeff Ridjali il y a trois ans. Depuis, la compagnie invite régulièrement des danseurs venus de l’extérieur afin d’ouvrir de nouvelles perspectives aux jeunes danseurs. Se concentrant d’abord sur la région océan Indien, Djodjo Kazadi n’a pas hésité ensuite à faire venir des danseurs contemporains africains, profitant du dispositif « Africa 2020 » lancé par Emmanuel Macron pour mettre en valeur les artistes de ce continent en France.
Androa Mindré Kolo (à g.), performer et plasticien de RDC, est l’un des 4 artistes africains invités par le directeur artistique Djodjo Kazadi (à d.).
Covid oblige, le dispositif « Africa 2020 » ne porte plus très bien son nom puisqu’il a été reporté jusqu’à la fin de l’année 2021. Il a toutefois finalement pu voir le jour et c’est tout ce qui compte. Combinant habilement ce dispositif et le projet du « laboratoire artistique », la compagnie Kazyadance a invité successivement quatre artistes africains pour travailler avec ses jeunes danseurs. Tous revenus à Mayotte à l’occasion de Trépidanses, ils vont montrer au public un aperçu du travail réalisé sur l’île aux parfums. Les jeunes danseurs mahorais seront bien évidemment les « stars » de ces restitutions d’ateliers, traduisant à travers leur corps l’univers de ces chorégraphes et/ou plasticiens.
Un melting-pot d’arts, d’univers et de cultures
La grande ambition de la compagnie Kazyandance est de susciter des vocations artistiques chez « la jeunesse abandonnée » de Mayotte. C’est la raison pour laquelle elle travaille principalement dans le quartier défavorisé de La Vigie en Petite-Terre. Elle souhaite offrir des perspectives aux jeunes qui en manquent cruellement à l’heure actuelle sur l’île. Constatant chez eux une forte appétence pour la danse en général, elle leur propose de canaliser leur talent, voire même de le professionnaliser via les fameux ateliers du « laboratoire artistique ». « Il fallait dans un premier temps que ces jeunes connaissent leurs racines. C’est pourquoi la première session a été réalisée par Jeff Ridjali », précise Djodjo Kazadi. Ont ensuite été invités des danseurs venus de Madagascar, de La Réunion, des Comores et dernièrement d’Afrique. Androa Mindre Kolo de la République Démocratique du Congo, Gervais Tomadiatunga du Congo Brazzaville, Idio Chichava du Mozambique et Nadège Amétogbé du Togo donneront ainsi un aperçu de leur univers via les jeunes danseurs locaux au cours de Trépidanses.
Ce n’est cependant là que l’un des aspects de l’événement. Ce dernier est en effet d’une richesse artistique extrême puisque d’autres spectacles viendront se greffer à ce socle. Ainsi, la scénographe métropolitaine Clara Walter a également été invitée pour coordonner l’événement. Un ballet de performance autour de sa scénographie traversera aussi les différents espaces scéniques du Royaume des Fleurs. Par ailleurs, les musiciens mahorais Bodo et Baco se livreront à des concerts avec leurs guests et la compagnie Stratagème donnera un spectacle de marionnettes.
Bref, il y en aura véritablement pour tous les goûts et tous les âges au cours de cette semaine de folie artistique qui commence dès samedi ! Sans être un « festival professionnel » au sens propre du terme, ce sera néanmoins un festival de disciplines artistiques et de cultures différentes avec l’expression corporelle pour fil rouge. Lilcé, jeune danseur mahorais formé par Kazyadance nous donnera le mot de la fin : « La rencontre avec Djodjo m’a ouvert les yeux sur ce que j’étais capable de réaliser au travers de la danse. Il m’a montré que je pouvais en faire mon métier alors que jusqu’à présent il ne s’agissait que d’une passion dont j’ignorais pouvoir vivre un jour. À présent, je souhaite devenir professeur de danse. » Espérons que tous les autres jeunes danseurs de Mayotte suivent un chemin aussi prometteur !
Depuis une semaine, EDM réalise un essai bio-liquide sur l’un de ses moteurs. Moins polluant, l’huile de colza pourrait dans un avenir proche remplacer de manière pérenne le gasoil pour la production de l’électricité sur l’île aux parfums. Immersion dans la centrale des Badamiers.
Casque blanc vissé sur le crâne et bouchons dans les oreilles, Anrifou Attoumani dandine sa tête au bruit fracassant des moteurs de la centrale des Badamiers mise en service en 1987. Après un rapide tour du voisinnage pour présenter un container isotank et les réservoirs de stockage, le chef de section maintenance pénètre dans la chambre forte d’EDM sur Petite-Terre, surveillée scrupuleusement depuis la salle de commande où un agent suit le niveau de consommation et celui des cuves. En plein cœur de ce réacteur électrique, un grand panneau d’affichage indique fièrement « Essai bio-liquide sur l’un des moteurs de l’Électricité de Mayotte ». L’essence même de cette visite privilégiée.
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Il faut dire que le projet ne date pas d’hier. À peine en poste, le directeur général Claude Hartmann propose de ancer ce pari fou, sur un territoire qui se repose à 95% sur les énergies fossiles. Nous y voilà ! Depuis le mercredi 2 juin et pour une durée d’un mois, le groupe G6, un 6R32 du constructeur Wärtsilä pour les spécialistes, tourne à l’huile de colza. « Le moteur gasoil a basculé sans tousser », ironise le responsable. « En neuf mois, nous sommes passés d’une idée à une réalisation. C’est une première dans l’océan Indien. »
264 tonnes acheminées
Le choix du colza est, quant à lui, tout sauf anodin. Il respecte la norme européenne EN 14214 et la directive européenne RED II. « Le bio répond à ces deux critères », assure Echat Nourdine, la cheffe du projet, entre deux diapositives. Et surtout, la plante à fleurs jaunes a « un cycle de culture d’un an » et ne nécessite pas de « labour pour favoriser la bioversité ». Après le pressage et le conditionnement en métropole, il a fallu acheminer les 264 tonnes d’esters méthyliques d’huiles végétales, soit l’équivalent de 307 mètres cubes, jusqu’à Mayotte pour mener à bien cette expérience… Pour cela, EDM a pu compter sur son fidèle partenaire, à savoir Total qui a géré l’approvisionnement et la logistique.
Du positif et du négatif
À ce jour, les premiers résultats s’avèrent d’ores et déjà concluants. « Nous allons effectuer un prélèvement d’huile pour analyser la dégradation des pièces et les traces d’étain », précise Echat Nourdine, au moment de montrer à l’assemblée des flacons jaunâtres. Point positif ? Le gain en émissions de dioxyde de carbone. De quoi envoyer aux oubliettes les quelque 150.000 tonnes de CO2 rejetées dans l’atmosphère annuellement. « Le bio-liquide n’émet quasiment pas de gaz à effet de serre », se réjouit Claude Hartmann. Aspect négatif ? Le plus faible pouvoir calorifique inférieur (PCI) du bio-liquide représente une augmentation de la matière première de l’ordre de 13%. « Il faut 216 grammes de gasoil pour produire un kilowattheure, contre 245 grammes d’huile de colza », détaille la cheffe de projet. Sans compter le prix d’achat qui s’avère un peu plus élevé sur le papier. Toutefois, une nuance reste à préciser : « En nous basant sur les textes, nous ne paierons plus de taxe carbone. »
Objectif 100% d’ici 2028
Reste à transformer l’essai dans l’espoir de décarboniser totalement l’électricité du 101ème département. Inscrite dans le projet de plan pluriannuel de l’énergie 2019-2023 et 2024-2028, la conversion à 100% à l’huile de colza des deux centrales pourrait devenir réalité à court terme : 2023 pour les Badamiers et 2025 pour Longoni, en raison des coûts (nouvelles infrastructures stockages et pipelines principalement). « Ce serait une bonne nouvelle pour Mayotte, cela voudrait dire que ça bouge », se prend à rêver Claude Hartmann. Seul bémol : ce n’est pas EDM mais l’État qui a la main sur ce type de décision. « La question de ce changement pérenne va être administrative et non pas technique. » Peu importe, en bon chef de centrale des Badamiers, Houmadi Ousseni Ali s’y voit déjà et envisage l’avenir d’un bon œil. « Nous nous préparons », admet-il, en ne lâchant pas des yeux les écrans de contrôle. De bonne augure pour la suite alors que EDM recense une croissance annuelle de consommation de 3%.
La Chambre de commerce et d’industrie accuse le patron de Kwezi et un prestataire, usager du port de plaisance, de diffamation pour des propos tenus en décembre 2017 et février 2018. L’établissement qui gère le port de plaisance demande 10.001 euros pour son préjudice moral. Le tribunal doit rendre sa décision mercredi prochain.
On pourrait croire que l’eau a coulé sous les ponts, surtout depuis que la Chambre de commerce et d’industrie de Mayotte a remporté, en bonne et due forme, le marché pour la gestion du port de plaisance de Mamoudzou, en février dernier. Que nenni ! Ce mercredi s’ouvrait au tribunal correctionnel le procès en diffamation qui oppose la CCI, partie civile dans le dossier, à Patrick Millan, directeur de Kwezi FM et Patrick Varela, usager du port – qui détient aujourd’hui le catamaran Éole 1er. La pomme de la discorde ? Des faits de diffamation, datant de décembre 2017 et février 2018.
À l’époque, Patrick Varela, qui offrait déjà des prestations sur le lagon via ses quatre bateaux, s’était rendu à deux reprises sur le plateau de Kwezi FM pour dénoncer une situation jugée “inacceptable”. Tarifs “illégaux” et exorbitants, pas d’investissement dans l’infrastructure, apparemment vétuste, absence de sanitaires corrects, voire même menaces contre les usagers… Pire, la CCI, gestionnaire du port depuis sa création en 1995, ne disposait en réalité plus de contrat : sa DSP (délégation de service public), ayant pris fin en 2011, faisait l’objet chaque année de petits avenants d’un an – huit, tout de même ! – dans l’attente d’un nouvel appel d’offres. Bref, la tempête faisait rage, et ce, jusque dans les studios de Kwezi. Problème pour Patrick Millan : diffusées en direct, ces émissions “Temps de parole” ont par la suite été mises en ligne, et c’est notamment pour cette raison que le patron de la chaîne est poursuivi dans cette affaire.
“Personne ne viendra m’attaquer”
Parmi les 15 passages balancés sur la toile et qui ont fait l’objet d’une poursuite, l’on retrouve ainsi pêle-mêle : “on ne peut pas laisser des gens comme ça, ce sont des voyous”, “c’est avenant, sur avenant, c’est un délit de favoritisme entre le conseil départemental et la CCI”, “pour moi, ce n’est pas nous les voleurs, les 690.000 euros en trois ans, on ne sait pas où ils sont passés”, “ils rackettent et menacent les gens”, ou encore, “on peut venir m’attaquer, mais personne ne viendra m’attaquer, vous le savez…”
Manque de pot, la CCI a bien décidé d’engager des poursuites, qui ont donc abouti ce mercredi à une audience en correctionnelle. Maître Benoît Derieux, conseil de l’établissement délégataire, a rassemblé six imputations distinctes, pouvant relever de la diffamation : le délit de favoritisme ; les infractions supposées ; l’absence de prestation en échange du paiement des redevances ; la mise en danger de la vie d’autrui par l’état du ponton ; le “racket”, des plaisanciers ; et la “gestion erratique” du personnel. Et la Chambre d’argumenter, comme elle l’avait d’ailleurs déjà fait par le passé, que les avenants successifs ne permettaient pas des investissements d’envergure, ou encore qu’une poignée de prestataires refusaient de payer la redevance. “Si le fait de venir demander à M. Varela de payer sa redevance s’apparente à du racket, Monsieur a un problème de vocabulaire”, raille l’avocat, qui demande 10.000 euros au capitaine d’Eole 1er et un euro symbolique ainsi que la suppression des vidéos en ce qui concerne Patrick Millan.
Des tarifs “entachés d’illégalité”
À charge désormais pour l’intéressé d’apporter les preuves de ce qu’il a avancé… Une mission ardue, qui plus est quand les accusations formulées sont parfois graves. Mais le prévenu n’en démord pas : “Je n’ai aucune animosité contre la CCI, mais quand je vois des gens qui sont malhonnêtes…”, commence à se défendre le chef d’entreprise, les bras tannés par des années de soleil et d’écume. “C’est inadmissible, c’est un comportement de voyou, je ne sais même pas si voyou est le bon terme, mais c’est inacceptable”, réitère-t-il à la barre. “Mais est-ce qu’il y a eu une condamnation pénale, par exemple pour le délit de favoritisme, le détournement de fonds, la mise en danger de la vie d’autrui ?…”, l’interroge le président. Il aura fallu une courte suspension d’audience pour s’en assurer : un employé du port a en effet écopé de 5.000 euros d’amende pour abus de confiance… au préjudice de la CCI. “Cela ne rend pas la CCI auteure ou complice de ces faits-là”, balaie Maître Derieux.
Top départ
Maître Nadjim Ahamada pour la défense de Patrick Millan aura bien tenté de plaider la prescription, et Maître Yanis Souhaïli, le conseil de Patrick Varela, son rôle de lanceur d’alerte… Difficile de prouver chacune des six imputations proférées. Et ce, malgré une note de l’avocat de la CCI lui-même reconnaissant des tarifs “entachés d’illégalité”, différentes attestations des plaisanciers, ou encore les huit années qu’il aura fallu au conseil départemental pour renouveler l’appel d’offres. “Vous avez compris, quelle est la limite entre la liberté d’expression et la diffamation ?”, a demandé un assesseur au prévenu. “Si, j’ai compris qu’en gros, il faut se taire”, lâche Patrick Varela avec amertume. L’affaire est mise en délibéré et le verdict doit être rendu mercredi prochain. En attendant, le prestataire ne cache pas ses velléités de départ. “Je quitte Mayotte parce qu’on m’a écrasé, on m’a affaibli.” Hissez la grand-voile ! Heureusement que le capitaine n’a vendu que trois de ses quatre bateaux…
Abdullah Mikidadi est un candidat qui n’a pas froid aux yeux. Il se présente dans le canton de M’tsamboro dans le seul objectif d’être le nouveau président du Département. Candidat sans étiquette, il s’inscrit dans la mouvance « Mouvement pour le développement du canton de M’tsamboro » avec son binôme Antufiya Hamidi. Il promet notamment d’attribuer à Mayotte toutes ses compétences régionales pour un réel développement économique.
Flash Infos : Pour quelles raisons vous présentez-vous à ces élections cantonales ?
Abdullah Mikidadi : Ce n’est pas la première fois que je me présente à des élections locales. Je me suis présenté aux municipales de 2008 et de 2014. Cette fois-ci, je suis candidat aux cantonales car j’ai l’intention d’aller plus loin et de briguer la présidence de la prochaine mandature du conseil départemental. J’estime que Mayotte traverse une crise institutionnelle. L’île n’a pas pu avoir toutes ses compétences, une partie a été confisquée par l’État. Mayotte est un DROM (département et région d’Outre-mer) mais en réalité il manque le R. Il faut que nous ayons deux chambres : une départementale et une régionale. Le conseil départemental a une compétence sociale. La région a une compétence de développement économique. Ce que nous n’avons pas ! Donc il faut commencer par là. Il faut que l’État nous rende les compétences qu’il nous a confisquées. Et tout transfert de compétences est accompagné par les moyens, c’est la loi. Il faut simplement faire appliquer les lois et c’est le rôle des élus, notamment du président du Département, de sonner l’alarme.
FI : Estimez-vous donc que si cela n’a pas été fait c’est par manque de volonté politique ?
A. M. : Par manque de volonté politique oui, et surtout pas manque de courage des élus locaux ! Si nous ne réclamons pas notre dû, quelqu’un qui n’a pas l’habitude de payer ses dettes ne le fera pas. Nous avons absolument besoin de cette compétence régionale pour le développement de Mayotte. Je vous donne un exemple : aujourd’hui, nous sommes en train de créer le « Grand Paris ». Est-ce que ce Grand Paris est porté par un Département en particulier ? Non ! C’est la région Île-de-France qui le développe. C’est la même chose pour Mayotte, il faut que nous nous dotions de la région pour développer l’économie de Mayotte. Il faut mettre les choses dans l’ordre.
FI : Comment pouvez-vous nous garantir que vous allez mettre les choses dans l’ordre si vous êtes élus ?
A. M. : Une fois élu, je remettrai en cause le GIP et dirai à l’État que nous voulons être une région à part entière. Au moment de la départementalisation, ils ont fait une expérience à Mayotte sur l’assemblée unique. Ils ont mis une assemblée à compétences régionales et départementales. Force est de constater que cela n’a pas fonctionné. Au lieu de rectifier le tir, on nous le laisse. Il faut absolument enlever cette assemblée unique et faire comme dans les autres territoires. C’est ce que je vais demander en premier lieu. Puisque cela fonctionne ailleurs, cela fonctionnera chez nous. Aujourd’hui, nous nous trouvons avec une préfecture qui est la plus puissante de France. C’est une réalité et cela ne doit plus durer.
FI : Dans votre profession de foi, vous parlez de Mayotte dans sa globalité mais jamais de votre canton alors que pour siéger au Département, il faut d’abord être élu dans son canton. Est-ce réellement une bonne stratégie ?
A.M : Pour quelqu’un qui aspire à être président du Département, j’étais obligé d’aller dans ce sens-là. Je ne veux pas botter en touche mon canton, mais il y a tellement à faire au niveau départemental ! Lorsque les choses seront en règle au niveau du territoire, à ce moment-là tous les projets découleront dans tous les cantons. Concernant mon canton, il est la porte d’entrée pour l’Afrique et l’Arabie. Un port maritime est donc indispensable à M’tsamboro. Je vais dans le sens du désenclavement pour développer le tourisme, et le port de M’tsamboro est essentiel pour cela. Nous ne sommes qu’à 70 kilomètres d’Anjouan : en deux heures de temps, nous pouvons y passer le week-end. Dar Es Salam est à 400 kilomètres, en cinq heures, nous y sommes en bateau. Nous avons donc besoin d’un port. De manière générale, le Nord doit être développé parce qu’il est complètement oublié. Vous avez vu le plan de relance ? Il n’y a aucun projet pour cette partie de l’île alors que le développement doit être équilibré partout.
FI : Vous briguez déjà la présidence du Département, n’êtes-vous pas en train de mettre la charrue avant les bœufs ?
A. M. : Non, parce que depuis Monsieur Bamana, la présidence s’est toujours jouée à la roulette russe… Certains se sont retrouvés « président » sans l’avoir demandé. Cela été le cas de Said Omar Oili, qui voulait juste être vice-président. Vous avez vu les conséquences…. Quand vous n’avez pas préparé les orientations du pays et que vous n’avez pas eu le temps d’établir un vrai cabinet digne de ce nom qui va vous accompagner pour atteindre vos objectifs, rien ne va ! Cela a été la même chose pour Monsieur Douchna et Monsieur Zaïdani. Pour ce dernier son poste s’est carrément joué dans la cuisine de la maman de Roukia Lahadji. Je vous assure, je connais bien le dossier. Donc si le destin de notre île se joue comme cela, ne vous étonnez pas après du résultat. Il faut donc se préparer en avance et mettre des orientations pour être à la hauteur de cette tâche et de ce grand défi qui nous attend. On ne s’y prépare pas au dernier moment.
FI : Êtes-vous sûr que les alliances politiques vous permettront d’accéder à la présidence du Département ?
A. M. : J’en appelle à la responsabilité de chacun. Aujourd’hui, Mayotte est à genou. La population va donner une mandature de six ans pour avoir une équipe compétente, capable de relever le défi. Il faut que les futurs élus comprennent cela et ne votent pas par copinage. Nous ne pouvons pas mettre n’importe qui à la présidence et passer encore six ans à se demander s’il y a un pilote dans l’avion. Nous voulons faire une rupture avec le passé. La prochaine mandature doit être une nouvelle ère pour Mayotte !
FI : Vous évoquez également la création d’un nouvel aéroport en Grande-Terre. Le foncier étant un problème sur le territoire, où le placerez-vous ?
A. M. : Deux études ont été réalisées : l’une à Bandrélé, l’autre à Majicavo. Les deux ont été validées à l’époque mais ont ensuite été mises à l’écart. Je ne dis pas qu’il faut fermer l’aéroport de Petite-Terre, au contraire. Il servira pour les vols de moins de trois heures. Mais il faut faire un grand aéroport en Grande-Terre, ce qui permettra d’avoir une synergie entre les deux aéroports. Le nouvel aéroport favorisera la concurrence et d’autres compagnies viendront. À Mayotte, il n’y a pas de tourisme parce que nous n’avons pas réussi le désenclavement. La ligne Mayotte-Paris est trop chère parce qu’il y a les lobbies réunionnais. Les Réunionnais sont conscients des avantages géographiques de Mayotte et de la beauté de notre lagon. Nous pouvons facilement leur faire concurrence sur le domaine du tourisme. Quand le billet Mayotte-Paris sera à 300 euros, nous pourrons enfin parler de tourisme.
Ce mercredi 9 juin à Kwalé avait lieu la finale du concours d’éloquence. Les 18 finalistes se sont réunis tôt le matin pour s’entraîner avant d’entamer la dernière ligne droite. Contrairement à la dernière édition, celle de cette année marque l’entrée en scène des collégiens, invités eux aussi à s’exprimer.
Mercredi, 8h. Les 18 finalistes du concours d’éloquence se retrouvent dans l’amphithéâtre du collège de Kwalé. Scolarisés à Dembéni, Majicavo, Sada, Kahani ou encore Petite-Terre, ils viennent défendre les couleurs de leurs écoles. Position, gestuelle, portée de la voix… Jusqu’à la dernière minute, les élèves passent au crible les ultimes détails avec leurs enseignants, reconvertis en coachs pour l’occasion. Le stress monte d’un cran ! Débarque alors la présentatrice, sûre d’elle et vêtue de bleu, pour lancer officiellement la cérémonie. Plus moyen de faire marche arrière.
Les premiers affrontements commencent avec les collégiens, invités à participer cette année. Sur scène, ils sont deux par thématique. L’un doit défendre le oui, l’autre le non. Les textes sont percutants : les sujets d’actualité, le Covid, l’amour, le monde d’après… Chacun leur tour, ils prennent d’assaut l’espace, sous les yeux fiers de leurs professeurs. Présent pour l’événement, le recteur se montre tout bonnement subjugué par la qualité des pitchs. « Tous les candidats sont impressionnants », déclare Gilles Halbout, entre deux prestations. Puis vient le tour des lycéens. À ce moment-là, ils troquent leur costume d’élèves pour prendre celui de jeunes hommes et de jeunes femmes. L’objectif, coûte que coûte ? Faire passer des messages et convaincre le jury !
Mina Chamouine, alias Black Panther
Les six finalistes du lycée doivent incarner ou définir une personne. Qu’elle soit réelle ou fictive, vivante ou décédée, masculine ou féminine. Certains partent dans l’espace, avec Thomas Pesquet, tandis que d’autres creusent derrière l’image d’intellectuel de Voltaire. Grande gagnante du concours d’éloquence 2021, Mina Chamouine se voit attribuer le personnage de Black Panther, incarné par le prince T’Challa du Wakanda, une nation africaine technologiquement très avancée, et créé par l’univers cinématrographique Marvel. « Ce n’est pas seulement un super héros, c’est un symbole », énonce-t-elle.
Pour obtenir la plus haute marche du podium, pas besoin de parler très fort ou de faire des mises en scène extravagantes. La jeune fille marque notamment les esprits en soulevant l’une de ses caractéristiques, à savoir sa couleur de peau, une grande première pour un super-héro. Et surtout une représentation forte aux yeux des enfants noirs. Selon elle, le réduire à « juste un super-héros » est un manque de respect à l’art et le catalogue à une simple distraction alors qu’il peut être bien plus que cela… Un discours touchant qui fait mouche auprès des membres du jury !
Une réussite à tous les niveaux
Dans la salle, l’ambiance est à la fête. Tour à tour, les amis respectifs des participants font du bruit en guise de soutien à leur camarade. Une fois les prestations terminées, les jeunes tombent sous les louanges du public pour leur implication et le lourd travail fourni dans le but d’arriver à un tel résultat. « Vous pouvez prétendre à des concours d’éloquence au niveau national », leur glisse Alba, journaliste à Mayotte la 1ère et membre du jury. De quoi mettre des sourires sur les visages de ces courageux collégiens et lycéens, qu’ils repartent ou non avec un collier à fleurs, symbole de leur victoire.
C’est un combat que mènent les fervents défenseurs du shimaoré et du kibushi depuis des années. L’enseignement des langues mahoraises à l’école n’est plus qu’un rêve. Le Département, le rectorat, le CUFR et l’association Shimé ont signé une convention régissant les règles à suivre pour que les élèves du premier degré puissent apprendre ces langues régionales dans les établissements scolaires.
Dans la salle DRH du conseil départemental, le recteur annonce la couleur. « Jéjé, wa fétché ! » Des mots shimaoré prononcés ce mardi matin par Gilles Halbout comme pour poser le contexte de sa venue. Réunis autour de la même table, le représentant de l’académie, le président du Département, celui de l’association Shimé et le directeur ad-joint du centre universitaire de formation et de recherche (CUFR) s’apprêtent à signer une convention historique pour l’île. Désormais, le shimaoré et le kibushi, les deux langues régionales du territoire, pourront être enseignées de manière formelle dans les écoles du premier degré de Mayotte.
Une première victoire pour Rastami Spelo, président de l’association Shimé, qui n’a ja-mais cessé de prôner la valorisation de ces deux langues. « J’y ai toujours cru… L’État a mis fin aux inégalités en reconnaissant nos langues régionales. Je vais me battre encore et encore pour l’acceptation du shimaoré et du kibushi à l’école laïque de notre République », prévient-il à l’assemblée et notamment aux autres signataires de la convention. Malgré cette avancée inédite pour l’apprentissage du shimaoré et du kibushi, Rastami Spelo reste sur ses gardes. Selon lui « en France la manière de faire est de discourir, donner tout ce qu’il faut et ne pas faire ». Mais il n’a pas l’intention de baisser les bras après plus de 20 ans de combat.
Son association qui a longtemps été soutenue par la collectivité pourra désormais compter également sur le soutien de l’Éducation nationale. Cette nouvelle étape peut être franchie grâce à la réunion de nouvelles conditions. « On ne peut pas apprendre une langue sans avoir réfléchi à la manière de l’écrire et la parler correctement. C’est désormais possible avec tout le travail qui a été fait par le conseil départemental, les associations et les chercheurs qui ont travaillé à la formalisation de ces langues régionales », décline Gilles Halbout. Cela est également rendu possible depuis la promulgation de la loi du 21 mai 2021 qui reconnaît, protège et promeut les langues régionales.
Formation obligatoire des enseignants
La signature de la convention n’est que le début d’un long processus pour que tous les enfants puissent apprendre le shimaoré et le kibushi à l’école. Avant d’arriver à cette ultime étape, il faut en premier lieu former les enseignants. Parler une langue est une chose, mais maîtriser tous ses rouages et pouvoir la transmettre en est une autre. De plus, un certain nombre d’enseignants de l’île n’en parlent aucune des deux, il est donc primordial de les former. « Il faut qu’on ait des formateurs aguerris et qu’on soit carrés sur les règles grammaticales et orthographiques… Il y a un travail sur le long terme à faire et nous aurons besoin des associations, pour que tous nos enseignants s’acculturent avec ces langues et qu’un très grand nombre d’entre eux puissent les enseigner », explique le recteur de Mayotte.
Et cela passera notamment par le centre universitaire de formation et de recherche de Dembeni qui devra préparer les futurs professeurs des écoles. « Dès l’année prochaine, en septembre, on va réfléchir à l’introduction de modules d’initiation des langues régionales dans nos maquettes à destination des enseignants du premier degré dans un premier temps », annonce Abal Kassim Cheik Ahmed, directeur adjoint de l’établissement. Il faudra donc attendre encore quelques années avant que l’enseignement du shimaoré et du kibushi se fasse à grande échelle. Pour l’heure, l’Éducation nationale mènera des expériences dès la rentrée scolaire de 2021. « Pour amplifier tout cela, il nous faut du matériel pédagogique, des manuels et tout cela va prendre un peu de temps. Notre objectif est de commencer par les petites classes et que l’on puisse continuer dans le second de-gré comme cela se fait dans les autres établissements du territoire national », souhaite Gilles Halbout.
Un travail de longue haleine
Quelques enseignants pratiquent déjà le bilinguisme dans certaines écoles de l’île, mais ces cas sont anecdotiques. Les élèves de Mayotte n’apprendront pas les deux langues régionales du jour au lendemain, car elles manquent encore une certaine structure. La graphie du shimaoré et du kibushi a été adoptée il y a tout juste un an, après de longues années de débat. Mais il ne s’agissait que de la partie émergée de l’iceberg. « Beaucoup rester à faire, il convient notamment de continuer à œuvrer pour [leur] codification en les dotant d’une orthographe et d’une grammaire officielle », précise Soibahadine Ibrahim Ramadani. Et pour y parvenir, lors de la dernière commission permanente du conseil départemental, le président a proposé la création de l’institut des langues et de civilisation de Mayotte. « Il assumera la mission d’académie des langues et fixera ainsi les normes régissant les langues mahoraises », précise le responsable de la collectivité pour encore quelques jours. Gare à ceux qui écorcheront d’une manière ou d’une autre le shimaoré et le kibushi !
L’association Coup de Pouce mène des actions de nettoyage sur l’île depuis six mois. Ce mardi 8 juin et pour la troisième fois, c’est la plage de l’étoile qui a été choisie. Encore une fois, petits et grands se sont réunis pour nettoyer et rendre à leur île sa beauté.
« Je comprends pas pourquoi les gens jettent tout ça », soupire Faidati, du haut de ses 11 ans, en ramassant un pantalon rempli de sable sur la plage de l’étoile. Âgés de 8 à 15 ans, ils sont une vingtaine de jeunes à être venus prêter main forte à l’action de Coup de Pouce. « C’est important pour moi de les éduquer sur les questions environnementales », explique Ziko, l’animateur à l’initiative de ce nettoyage pour le compte de l’association de Kawéni. Si les trois premiers mois ont été consacrés à la prévention dans le but d’aller au devant des habitants, les trois suivants ont permis de passer la seconde. « Il n’en reste plus que trois ! », s’exclame Ziko, visiblement fier d’avoir pu monter une action d’une telle ampleur avec une trentaine de personnes chaque semaine.
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La jeunesse au cœur de l’action
Par groupe de deux, les jeunes attrapent un sac poubelle et commencent le ramassage. Armés de gants, ils récupèrent tout ce qu’ils trouvent sur leur chemin ! Cannettes, sacs de riz, vêtements, pièces de moto… Rien ne leur échappe. Sourire aux lèvres, tous sont ravis de participer à une action mettant en valeur leur île. Inscrits à l’école associative de Coup de Pouce, les enfants et les adolescents du jour vivent cet événement comme une sortie scolaire. « Pendant le goûter, certains d’entre eux jettent encore les emballages… Je leur explique que s’ils font ça, nos actions sont inutiles ! Petit à petit, cela commence à rentrer dans leurs têtes », détaille Ziko en bon pédagogue. Si quelques-uns comprennent le message et font désormais très attention au recyclage, d’autres gardent toutefois leurs mauvaises habitudes.
La sensibilisation avant tout
Mais une autre frustration guette les membres de l’association. En effet, le ramassage des sacs poubelles, offerts par la municipalité, laisse parfois à désirer. Conséquence : les déchets jonchent les bords de la route pendant plusieurs jours… « Dans certains quartiers, comme dans les hauts de Kawéni ou de Majikavo, il n’y a pas de route pour que les camions puissent y accéder. Du coup, les habitants laissent leurs poubelles dehors », constate Ziko. Raison de plus pour avertir la population et lui parler de ces actions écologiques. « Cette après-midi, on va aller faire le tour du quartier, pour expliquer aux gens ce qu’on a fait. » Aux yeux de l’animateur, l’éducation représente un volet tout aussi important que le nettoyage en lui-même. Sans toutefois oublier de remercier ses petits bras pour la mission accomplie. « On a ramassé 11 sachets ! », s’écrient d’une seule et même voix Famidati et Kalatoun, heureuses du travail fourni dans la matinée.
Des actions de nettoyage certes, mais qui mettent du baume au cœur aux participants et aux personnes qui viennent profiter de ces endroits, notamment les plages. Si les déchets continuent de s’accumuler, de plus en plus de jeunes se sentent concernés par les questions environnementales. Une première bataille de gagnée pour l’association Coup de Pouce !
Du haut de ses 45 ans, Fatima Tricoire a un parcours de vie des plus atypiques. À la suite d’une maladie rare et invalidante diagnostiquée à 37 ans, la Mahoraise fonde RNS coaching et vient d’inaugurer la Maison du Second Souffle à Paris pour proposer des ateliers aux plus démunis. Entretien.
Flash Infos : Le week-end dernier, vous avez inauguré la Maison du Second Souffle, qui vient en complément de votre société dénommée RNS Coaching. Quel est le concept de votre projet ?
Fatima Tricoire : Cela fait trois ans que j’ai ouvert mon cabinet à Neuilly-sur-Seine, où j’apporte principalement mon expertise à des cadres supérieurs qui traversent des grands défis, qu’ils soient d’ordre personnel, professionnel ou social. À travers ce public, l’objectif est d’attirer des entreprises pour les sensibiliser sur le handicap invisible. Avec la Maison du Second Souffle, un projet accompagné par le président de l’association des directeurs des organismes de mutualité francophone, Bruno Huss, qui en est aussi le parrain, je fonctionne avec des partenaires pour la subventionner et accueillir d’autres intervenants sans que les bénéficiaires n’aient à payer les ateliers. Cela marche comme du mécénat !
C’est un lieu que je loue une fois par mois pendant deux heures. Aujourd’hui, je cible le 93 car c’est là je réside et surtout là où des branches de la population sont oubliés, ce que l’on appelle les classes d’en bas. À titre d’exemple, lorsque je me rends dans les entreprises, de nombreux salariés m’accostent, notamment les femmes de ménage, pour me dire qu’elles n’osent pas parler de leur malaise. Ce sont ces personnes oubliées à qui s’adresse la Maison du Second Souffle. À termes, l’idée serait de réussir à essaimer ce type de maison un peu partout en France.
FI : Ce projet est intervenu à la suite d’une maladie rare et invalidante que l’on vous a diagnostiqué à 37 ans….
F. T. : Mon arrêt maladie a durée presque 14 mois ! Pendant la convalescence, je me suis retrouvée seule face à mes problèmes, même si heureusement j’étais entourée de mes proches. Mais je n’avais plus du tout de vie sociale ou professionnelle. Je me suis complètement renfermée dans ma maladie et me suis retrouvée en complet décalage avec le monde extérieur que l’on ne comprend plus. Cela a été une épreuve catastrophique… Au cours de ma cours réinsertion professionnelle, j’avais du mal à retrouver ma place, je ne parlais plus le même langage que mes collègues. Il y avait comme une cassure : les ambitions d’antan ne l’étaient plus. Cela a suscité une frustration incroyable, qui a provoqué des rechutes.
Suite à cela, je suis allée voir des psychologues. C’était la descente aux enfers… Jusqu’au jour où j’ai rencontre cette thérapeute qui m’a proposé du coaching et qui m’a rendu mon pouvoir. En d’autres termes, je suis redevenue actrice de ma vie ! J’ai alors décidé de me former et de me certifier dans la santé mentale, physique et sociale. J’ai suivi un parcours à l’institut Curry à Paris qui avait mis en place des ateliers à destination de personnes qui sortaient de la maladie.
Mais le coaching a un prix : il fallait compter 100 euros par semaine pendant trois mois ! Je me suis alors promis que quand je serais plus à l’aise avec RNS Coaching, je souhaitais créer un lieu chaleureux et ludique pour parler de la vulnérabilité et de la résilience. C’est désormais chose faite (rires).
FI : Vous avez quitté Mayotte très jeune, à l’âge de 19 ans pour poursuivre vos études. Or, de nombreux étudiants mahorais subissent une forme de stress et de dépression à ce moment-là et peuvent avoir besoin de coaching en raison de l’éloignement avec leur île natale. Cette Maison du Second Souffle pourrait-elle par exemple en accueillir certains ? Mais aussi s’exporter directement dans le 101ème département ?
F. T. : Complètement ! J’ai souhaité solliciter des partenaires à Mayotte par le passé, mais je ne savais pas à quelles portes toquer. Personne n’a pas pris la mesure de ce que le coaching pouvait apporter aux étudiants… Je suis alors rentrée en contact avec Bruno Huss, qui travaille beaucoup avec la chambre régionale de l’économie sociale et solidaire (Cress) de Mayotte, pour venir en aide aux jeunes, notamment sur Marseille où l’on touche des compatriotes comoriens et mahorais. La Maison est ouverte à tous ! Je peux organiser des ateliers spécifiques, que ce soit pour les Mahorais ou les autres habitants de l’Outre-mer. J’avais eu l’occasion d’être sollicitée par la délégation de Mayotte à Paris pour évoquer RNS Coaching à l’occasion de la journée de la femme, mais une semaine plus tard, on rentrait en plein Covid-19… Cela a mis un petit coup de frein à une éventuelle collaboration.
Mais je me déplacerai volontiers dans le 101ème département. Je suis ouverte à toutes propositions à partir du moment où j’accompagne et aide untel ou untel à aller mieux. Je demande juste que les choses soient bien organisées. Mon frère qui vit toujours sur le territoire m’a dit de rentrer en contact avec différents partenaires sur place, mais je n’ai pas encore eu le temps en raison de l’inauguration. Désormais, j’ai le temps de me consacrer à tous les projets qui pourront m’être proposés. Une femme m’a également appelé pour avoir plus d’informations sur la Maison du Second Souffle qu’elle aimerait mettre en place à Mayotte. Très bien, mais je souhaiterais garder la main, car j’ai tout de même une formation spécifique. Dans tous les cas, j’attends avec impatience de servir mon île !
Vous pouvez contacter Fatima Tricoire par téléphone au 06.09.33.93.11 ou par email contact@rns-coaching.fr ou en vous rendant directement sur son site Internet rns-coaching.fr
Ce mardi 8 juin 2021, le centre national de la recherche scientifique (CNRS) et l’institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer) ont lancé officiellement le programme prioritaire de recherche (PPR) “Océan et climat”, pour financer des projets scientifiques structurants sur l’analyse des zones maritimes. Avec 11km2 de zone économique exclusive, dont 97% relèvent des Outre-mer, la France doit être “moteur de la recherche”.
Bonne nouvelle pour nos coraux ! Ce mardi, la planète bleue était mise à l’honneur à l’occasion de la journée mondiale de l’océan. Une date spéciale qui a signé en France le lancement d’un vaste programme de recherche, annoncé il y a maintenant deux ans par la président de la République Emmanuel Macron. Piloté par le CNRS et l’Ifremer, ce PPR (programme prioritaire de recherche), appelé “Océan et climat”, sera doté d’une enveloppe de 40 millions d’euros. Ces fonds permettront aux deux institutions de financer plusieurs appels à projet dans le domaine de la recherche, sur une période de six ans, entre 2021 et 2027, avec trois axes principaux : la prévision de la réponse de l’océan aux changements climatiques, l’exploitation durable dans une vue de préservation de sa biodiversité, et la réduction de la pollution océanique.
“Il convient de rappeler qu’avec 11 km2, la France constitue le deuxième État en termes de zone économique exclusive (ZEE)”, a rappelé lors d’une conférence de presse le directeur général délégué à la science du CNRS, Alain Schuhl. “Présente dans la plupart des mers du globe, la France doit rester moteur au niveau de la recherche mondiale”, a-t-il poursuivi. Ajoutons à cela que 97% de ces territoires marins relèvent des Outre-mer. Et avec sa ZEE de 74.000 km2, Mayotte, qui offre à la France une voie d’accès stratégique au canal du Mozambique et à l’océan Indien, n’est d’ailleurs pas en reste. Pas étonnant que l’Outre-mer constitue ainsi à lui seul l’une des quatre zones ciblées par ce nouveau PPR, avec l’océan profond, les océans polaires et les écosystèmes côtiers de métropole.
Les sept défis du grand bleu
Objectif pour les équipes scientifiques qui souhaiteraient postuler à ces appels à projet : relever les sept défis élaborés par le conseil scientifique du PPR. Avec, en haut de la pile, une question qui intéresse tout particulièrement les Outre-mer : les impacts des phénomènes extrêmes liés au changement climatique. À Mayotte, la protection du lagon et de sa barrière de corail de 140 km, premier rempart contre d’éventuels cyclones ou tsunamis, découle naturellement de ce premier défi.
Mais ce n’est pas la seule piste de réflexion scientifique qui pourrait bien intéresser notre petit caillou de l’océan Indien. Parmi les autres défis qui trouvent une résonance particulière pour l’île au lagon, l’on notera aussi la nécessité de caractériser l’“exposome” océanique pour protéger les écosystèmes marins, c’est-à-dire l’exposition aux polluants ; le développement des programmes d’observation et de modélisation pour mieux cartographier les océans ; l’amélioration de la protection et de la résilience des milieux marins via notamment les aires marines protégées (AMP) – le parc naturel marin de Mayotte est l’une des plus grandes AMP françaises ; l’exploitation des ressources basée sur la science de la durabilité – et enfin le partage de ces découvertes avec le grand public.
Focus sur les changements d’origine humaine
Un domaine brille par son absence – et c’est bien dommage, alors que des scientifiques se passionnent pour le nouveau volcan sous-marin à une cinquantaine de kilomètres à l’est de Mayotte : la sismologie. “Ce programme se focalisant sur l’anticipation des changements globaux d’origine anthropique impactant les océans, les géosciences relatives à la tectonique ou à la sismologie ne sont pas incluses dans le périmètre de ce programme”, peut-on lire dans la feuille de route du PPR. Enfin, il faut noter que si toutes les équipes de recherche françaises, en métropole comme dans les Outre-mer, peuvent répondre, les projets présentés doivent, compte tenu de l’enveloppe allouée, être structurants. Sorti ce mardi, le premier appel à projet doit rester ouvert jusqu’à la mi-novembre, pour un lancement des financements début 2022. Gageons que les équipes sélectionnées orienteront (parfois) leur microscope en direction de Mayotte !
Fort d’une vingtaine d’années de travail collectif et acharné, l’ancien padza situé sur les hauteurs de Moinatrindri est aujourd’hui un exemple de végétalisation. Une victoire inspirante pour les associations qui se sont réunies ce week-end sur le site pour participer à sa préservation et comprendre les clés de sa réussite.
Au sens propre comme au figuré, l’investissement des habitants de Moinatrindri porte aujourd’hui ses fruits. Pour constater ce succès et le reproduire, un panel d’associations environnementales se sont réunies ce week-end au Parc botanique de Mdoumbajou, situé sur les hauteurs du village. Un lieu autrefois désertique qui constitue désormais un exemple de biodiversité. Co-organisée par la FMAE (fédération mahoraise des associations environnementale), le Parc marin, et l’ACEEM (association culturelle, environnementale et éducative de Moinatrindri), l’événement remplit deux objectifs: « présenter le site et participer à sa préservation« , résume Haoussi Boinahedja, le président de l’ACEEM.
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Aux arbres citoyens
Perché sur sa petite estrade, le gaillard n’a pas besoin de micro pour s’adresser à l’assemblée. « Nous allons nous répartir en plusieurs groupes pour aider à l’entretien des pieds que nous avons déjà plantés. Ensuite, nous organiserons une tournée pour vous présenter le site« , annonce-t-il face à une foule jeune et motivée. Bambous sous le bras et sac d’engrais sur les épaules, les troupes s’élancent. En première ligne : les Ambassadeurs du lagon dispatchés dans les associations dans le cadre de services civiques. À charge pour les membres fondateurs de l’ACEEM de les orienter sur le site. « Nous allons répartir les bambous autour des pieds, puis déverser de l’engrais. À terme, ces espèces produiront du fruit à pain. L’idée, c’est d’être le plus bio possible« , insiste Oihabi Daoulabou, un habitué du site. Des étincelles dans les yeux, l’homme se galvanise face à la mobilisation des bénévoles. « Quand je pense qu’il n’y avait que des padzas ici, je suis fier de voir le chemin parcouru« , reconnaît-il.
« On entend à nouveau le chant des oiseaux »
L’histoire de ce succès commence par une catastrophe : « Il y a environ 20 ans, une tempête a ravagé la forêt. Il ne restait plus qu’une terre glissante sur laquelle aucun arbre ne pouvait pousser. Nous avons dû procéder étape par étape« , rembobine Oihabi. La première de toute : trouver une espèce capable d’encaisser la chaleur caniculaire. « La Daaf a galéré pendant des années sans y arriver« , glisse-t-on du côté des bénévoles de l’ACEEM. Une espèce est finalement sélectionnée grâce aux conseils des experts du lycée agricole de Coconi : l’acacia. Un allié endémique qu’il faut utiliser avec parcimonie… »Les feuilles mortes de l’acacia permettent d’enrichir le sol. Ses racines le maintiennent. Mais il peut aussi être envahissant. Il faut donc trouver un équilibre en ajoutant d’autres espèces tout en supprimant progressivement les arbres qui ne sont plus nécessaires« , résume un ancien de l’ACEEM.
Le sol stabilisé et recouvert de feuilles, la forêt offre désormais un terrain fertile pour la biodiversité. Citrons, mangues, oranges, bananes, noix de coco… les hauteurs de Moinatrindri retrouvent des couleurs. « Nous entendons à nouveau le chant des oiseaux« , se réjouit Oihabi. Lui qui utilisait dans son enfance le sol glissant et farineux comme un toboggan n’a cependant rien oublié de l’effort qu’il a fallu déployer. « Nous nous sommes relayés tous les jours pendant des années pour monter des jerricanes d’eau. Les femmes ont joué un rôle primordial. Tous les week-end, le village se réunissait avec les enfants dans la forêt pour l’entretenir et conclure la matinée par un petit voulé« , se remémore-t-il.
Agir pour la jeunesse
Toujours présentes 20 ans plus tard, les bouénis du village attendent les bénévoles au pied de la colline. « Si on m’avait dit à l’époque que nous en serions à ce stade aujourd’hui, je ne l’aurais pas cru« , s’émeut une mère de famille de 62 ans. Le regard porté sur le bébé qu’elle tient dans ses bras, elle répète inlassablement : « On fait ça pour eux. Pour qu’il puisse profiter d’un tel lieu et en prendre soin à leur tour. »
Possédé par le conseil départemental mais attribué à l’ACEEM, le site offre désormais de belles perspectives. Pour les anciennes du village, la crainte d’un investissement des lieux par des visiteurs non désirés n’est pas à l’ordre du jour. « Nous sommes régulièrement sur le terrain. Des gens ont déjà essayé de poser un matelas pour commencer à s’installer. Nous leur avons dit dès le départ qu’il fallait partir car nous ne pouvons pas risquer de gâcher nos efforts« , expliquent-elles à tour de rôle. Investir le terrain, le préserver, et agir à la racine pour ne pas s’exposer à une situation hors de contrôle, tels sont les principes à priori adoptés par les habitants pour pérenniser leur victoire.
Un exemple pour Mayotte
Au terme d’une matinée bien remplie, chacun repart dans sa commune avec de l’optimisme dans les idées. « Nous venons de Bandrélé. Une partie de la mangrove est en voie de disparition. Ce genre d’initiative nous aide à réfléchir sur les projets à mettre en place pour reboiser à notre tour« , explique-t-on du côté de l’association 976 Sud Prévention. Avant d’ajouter : « Nous travaillons aussi dans la lutte contre la délinquance. Le lien social et la cohésion autour de ce lieu sont un exemple pour nous comme pour le reste de l’île. »
Plus qu’un atout pour le territoire, l’initiative constitue également un espoir dans la préservation du lagon. En permettant à l’eau de pluie de s’infiltrer dans les nappes phréatiques plutôt que de se glisser vers le récif, ce dernier gagne en résilience. « L’envasement provoqué par les coulées de boue perturbe l’équilibre du récif corallien. Celui-ci abrite de nombreuses espèces qui sont également impactées. À terme, ce sont les ressources halieutiques qui sont menacées« , résume le Parc marin par la voix de sa chargée de mission « Mobilisation citoyenne« . Sur les chemins du Parc Botanique comme sur les chemins de la paix sociale, Moinatrindri montre la bonne voie.
La semaine dernière, le Park Numérique a organisé une formation à la cité des métiers. Le but : former des ambassadeurs pour apporter du savoir à l’acculturation digitale dans le 101ème département, auprès d’un large public de bénéficiaires. Et ainsi faire monter en compétence le territoire dans l’espoir de générer de l’emploi.
« Il y a deux semaines, j’ai garé le bus dans la cour de l’école élémentaire de Majicavo. En deux jours, pas moins de 250 élèves ont été sensibilisés sur la manière dont on peut étudier avec une tablette », glisse d’un air nostalgique Fatima. Avec son bolide, la conseillère numérique à la cité des métiers sillonne les quatre coins de l’île depuis le 5 avril. « Regardez, on a cinq boîtiers 4G sur le côté et une télé interactive au fond », s’empresse de compléter Faira, sa collègue, au moment d’ouvrir les portes du « camion ». Mais encore leur fallait-il un certain bagage technique pour apporter tout leur savoir-faire à l’acculturation digitale. C’est tout l’objet de la formation dispensée à sept personnes la semaine dernière par le Park Numérique, lauréat en fin d’année dernière de l’appel à projets Innovation Mayotte 2020 lancé par le conseil départemental. Qui a dans la foulée créé son entité sur l’île aux parfums.
Son ambition : faire du numérique un levier d’apprentissage et d’insertion professionnelle pour tous les publics dans le 101ème département. Pour cela, il apparaît essentiel d’« avoir des ambassadeurs auprès des bénéficiaires », précise Grégory Guillou, le référent en Martinique, présent sur le territoire durant la session de cinq jours. « On nous a appris à mieux nous connaître et à avoir en tête un programme d’accompagnement », complète Faira, encore agréablement marquée par son coaching en neuro-éducation. Mais pas seulement. « On a approfondi nos connaissances sur la robotique et la programmation. » Essentiel sachant que celles-ci sont imposées par l’Éducation nationale depuis 2016. D’où les récentes interventions dans les établissements scolaires.
Diffuser de l’essaimage
Pour réussir le pari de la lutte contre l’illectronisme, de la continuité pédagogique ou encore de la dématérialisation, le Park Numérique a une approche dite en escalier : sensibilisation, détection, montée en compétences, formation qualifiante, pré-qualifiante et certifiante… « On a noué des partenariats avec Action Logement et Mlézi Maoré et on va intégrer le cluster numérique », confie Pascal Pierre-Louis, le président de la fédération, avant d’annoncer la signature d’une convention avec le Carif-Oref dans le but d’installer une école du numérique, comme c’est déjà le cas dans d’autres territoires métropolitains et ultramarins. « On va diffuser de l’essaimage à partir de 6 ans ! Sans oublier de faire en sorte que les parents ne soient pas trop décrochés. »
Responsable de la cité des métiers à Koungou, Abdou affiche, lui aussi, un large sourire à la sortie de cette formation. Une belle reconversion pour cet ancien militaire. « Le système Félin (fantassin à équipements et liaisons intégrés) m’a poussé vers la numérique », souligne le quadragénaire, passionné par les nouvelles technologies, qui s’attèle désormais à aider ses interlocuteurs à se réorienter et à mettre un pied dans le monde du travail. À l’instar des autres formés, il a bien conscience de la tâche qui l’attend puisque la France recherche pas moins de 100.000 développeurs. « Si on fait bien monter en compétences le territoire, on peut générer de l’emploi et de l’entrepreneuriat sur le marché africain », conclut Grégory Guillou. Et peut-être, par la même occasion, façonner les pépites de demain.
La prochaine rentrée scolaire 2021 sera marquée par l’ouverture d’un établissement hôtelier et de tourisme à Mayotte. Et ce n’est autre que la prestigieuse école Vatel qui accueillera des élèves mahorais. Le projet initié par une jeune mahoraise a pour objectif de donner un coup d’accélérateur au tourisme dans le 101ème département.
Les écoles Vatel sont implantées dans une trentaine de pays dans le monde. On en compte actuellement 55 et Mayotte accueillera la 56ème en septembre 2021. Le groupe Vatel a remporté le prix de « meilleure école hôtelière » lors de la 17ème Worldwide Hospitality Awards. Sa renommée n’est plus à prouver, sa venue dans le 101ème département est donc une chance indéniable pour ses futurs étudiants.
À l’origine de cette idée, Rania Saïd, une ancienne élève mahoraise formée dans une école Vatel à Maurice. Après avoir obtenu son master, la jeune femme a travaillé dans le domaine de l’hôtellerie sur l’île voisine, avant de rentrer à Mayotte il y a trois ans. Elle réalise alors que sur le territoire, « la qualité n’y est pas », en ce qui concerne le tourisme. Rania Saïd veut changer la donne et décide de prendre les choses en mains en s’associant avec son mari. « À Mayotte, nous avons quelques formations au tourisme et à l’hôtellerie, mais les élèves sont formés sur des postes opérationnels. Je pense qu’il faut que nous ayons plus de managers dans le tourisme à Mayotte pour booster le secteur », explique-t-elle.
Ni une ni deux, l’entrepreneure décide d’ouvrir sa propre école sous la franchise Vatel. Un gage de qualité, selon elle. « Nous allons former des cadres et dirigeants du secteur de l’hôtellerie et du tourisme qui pourront travailler partout dans le monde, puisque le diplôme est reconnu dans plusieurs pays. La formation que nous allons proposer aux Mahorais est de qualité et jusqu’à maintenant, il fallait quitter le territoire pour en bénéficier », soutient Rania Saïd. Mieux encore, la porteuse de projet entend bien inverser cette tendance, puisque des personnes qui ne résident pas à Mayotte souhaitent intégrer sa future école.
Beaucoup d’appelés, peu d’élus
Mais attention, les places sont chères. Implanté dans les Hauts-Vallons, l’établissement pourra accueillir deux classes de 15 élèves. Chacun devra donc mériter son entrée. Minimum requis : le baccalauréat. À partir de cette base commune, la sélection se fera alors en plusieurs étapes. « Il y aura des tests d’anglais, de personnalité, ou encore des tests psychotechniques que chaque candidat devra passer. Ceux qui les auront réussis pourront accéder à la phase d’entretien durant laquelle nous pourrons sonder la motivation de la personne. Celui ou celle qui passera toutes ces étapes pourra ensuite être intégré dans l’école », indique Rania Said. S’en suivront ensuite trois ans de formation pour avoir un bachelor ou cinq ans pour obtenir un master.
Tout cela, à condition d’en avoir les moyens, bien sûr ! Car l’inscription dans cette école privée revient à la coquette somme de 7.000 euros. De quoi en faire réfléchir plus d’un… Mais la gérante se veut rassurante : les élèves pourront bénéficier de certaines aides. « En deuxième année, les élèves peuvent postuler dans toutes les écoles Vatel du monde. S’ils partent, le conseil départemental peut prendre en charge l’année scolaire passée à l’étranger. Pour la troisième année, si l’étudiant trouve une entreprise qui accepte de l’embaucher après le diplôme, nous pourrons mettre un dispositif spécial pour qu’il n’ait pas à payer l’école. » L’intérêt est de rendre la formation accessible à un public qui n’aurait pas forcément les moyens de payer l’école.
Une chose est sûre, ceux qui auront la chance d’être formés dans cet établissement bénéficieront d’une immersion totale dans le monde de l’hôtellerie et du tourisme dès la première année. Les stages alternés seront obligatoires pour que les élèves soient prêts à l’embauche dès la sortie d’école. « Le principe de Vatel est d’allier la théorie et la pratique. Il y aura deux semaines de cours et deux semaines de stage pendant six mois. Et ensuite, quatre mois de stage dans un hôtel, pour la première année », précise Rania Saïd. Cette dernière a déjà signé avec des partenaires à Mayotte qui accueilleront les stagiaires. Ils ont tout intérêt à les accepter puisque ces futurs cadres sont probablement l’avenir du développement touristique à Mayotte. « Avec cette école, nous pourrons rehausser le niveau du tourisme chez nous dans cinq à dix ans », espère Rania Saïd. Et c’est bien tout le mal que l’on souhaite à l’île aux parfums.
Les inscriptions se font par mail à admissions@valet.yt ou par téléphone au 06.92.42.49.57
Menée auprès de 6.000 agents, une étude de la Mutuelle des forces de sécurité, (MGP), rappelle les difficultés quotidiennes auxquelles sont confrontés ces fonctionnaires. Plus de 1.100 policiers se sont suicidés ces 25 dernières années, soit 50% de plus que le reste de la population. Le 101ème département a ainsi perdu deux de ses agents, entre 2020 et 2021.
Depuis le 1er janvier 2021, 16 policiers se sont donnés la mort. Parmi eux, un agent du 101ème département, formateur au centre de tir dont le corps sans vie avait été découvert fin janvier par la police aux frontières (PAF), en Petite-Terre. “Il y a eu une enquête mais on ne sait pas vraiment pourquoi il s’est suicidé. Tout le monde pense que c’était lié à sa vie privée, car c’était quelqu’un de bien structuré, de sportif, il ne laissait pas transparaître de faiblesse… Mais on ne sait jamais vraiment”, soupire Bacar Attoumani, secrétaire départemental du syndicat Alliance Police Nationale.
Pour les policiers, il est toujours difficile de faire la part des choses entre vie professionnelle et vie privée. Une réalité qui vient d’être étayée par une étude de la Mutuelle des forces de sécurité (MGP), dont les résultats ont été publiés ce lundi par le site de Franceinfo et le journal Le Monde. La mutuelle, qui a interrogé 6.000 agents entre février et mars 2021 a mis en lumière les difficultés de la profession. Ainsi, un quart des policiers a des pensées suicidaires et 40% d’entre eux sont en détresse psychologique. Soit bien plus que la moyenne nationale, et ce, alors même que les policiers français sont en meilleure santé que l’ensemble de la population. Mais ils souffrent parallèlement d’hypertension et de problèmes de dos à cause de leur équipement, des “conditions d’exercice du travail” qui influent sur leur santé mentale, souligne l’étude. Les jeunes entre 30 et 35 ans sont les plus touchés, et considèrent manquer “de temps pour accomplir leurs tâches et avoir des difficultés à jongler entre vie privée et professionnelle”, rapporte Franceinfo.
La problématique propre à l’institution
Alors que la France compte plus de 150.000 policiers, le panel de 6.246 fonctionnaires qui ont répondu au questionnaire, constitué en majorité d’hommes, de plus de 45 ans, en couple et ayant plus de 20 ans d’ancienneté, donne “une photographie représentative du policier moyen”, juge Le Monde. Si les agents en poste à Mayotte ne figurent pas forcément parmi les personnes interrogées, les syndicats de police locaux que nous avons contactés confirment ces résultats. “Le risque est réel à Mayotte car cette problématique ne concerne pas que la métropole mais bien l’institution”, abonde Bacar Attoumani.
Les difficultés identifiées par l’enquête de la MGP, comme les conditions de travail, les tensions avec la population, les rapports avec les collègues et la hiérarchie qui “aggravent le phénomène” de détresse psychologique, se vérifient en effet sur l’île aux parfums. “On dit souvent que les collègues se suicident à cause de leurs problèmes persos, c’est en tout cas ce qui est déclaré par le ministère ou la hiérarchie directe, mais souvent ces problèmes rencontrés au travail finissent par être ramenés à la maison. C’est très compliqué de faire la part des choses”, confirme Aldric Jamey, délégué départemental d’Alternative Police. Selon le représentant, le manque d’effectifs et de moyens, “peu importe l’endroit”, pèse dans la balance. “Je parle par exemple d’avoir un véhicule ou du matériel adaptés. Des choses toutes simples, comme les problèmes de dos que nous pouvons avoir à cause du ceinturon et du poids de l’arme d’un côté de la hanche”, relève-t-il.
Isolement, manque de suivi psychologique
Autre constat, également partagé par l’étude : la nécessité d’un suivi psychologique, qui manque cruellement, qui plus est à Mayotte. “Nous avons une seule psychologue qui n’est pas là tout le temps, et c’est très difficile d’effectuer le suivi, face à des collègues qui n’osent pas passer le pas, il y a une peur d’exprimer son mal-être”, poursuit Aldric Jamey. Si des dispositifs comme les numéros verts, existent ou ont existé par le passé, leur efficacité semble par ailleurs limitée. “Dès qu’il est possible d’être identifié, cela constitue un frein, et ici les gens se connaissent, c’est petit”, explique Bacar Attoumani, qui souligne aussi le manque d’accompagnement pour les nouvelles recrues, dès lors qu’il s’agit de trouver un logement ou une école pour les enfants. “Il y a une problématique d’isolement, les gens peuvent avoir du mal à s’adapter à Mayotte, ce qui pousse certains collègues au départ.” Sans compter les défis sécuritaires du 101ème département, qui fait face à “une montée de la violence”.
Des effectifs sous pression
Outre ce manque d’accompagnement, des dissensions peuvent naître entre les agents et leur hiérarchie. “Nous avons des situations où le commandement se désolidarise de la base, et commande uniquement avec la politique du chiffre, qui est d’ailleurs toujours présente, quel que soit le service”, rappelle Aldric Jamey. Sans surprise à Mayotte, la lutte contre l’immigration clandestine est particulièrement exposée à cette pression. Avec des effets en cascade pour les autres services. “Quand on demande aux effectifs de la CDI (compagnie départementale d’intervention) de faire de la LIC, ce sont autant de véhicules de police et d’agents réquisitionnés, qui vont être enlevés de Mamoudzou pour aller en Petite-Terre et au centre de rétention administrative (CRA)”, poursuit le syndicaliste.
Reste une spécificité locale : “les Mahorais, ceux qui sont issus de la culture musulmane peuvent écarter la possibilité du suicide, au regard de leur éducation”, analyse Bacar Attoumani. Ce qui n’a pas empêché le 101ème département de connaître lui aussi deux suicides de policiers en moins d’un an, l’un en avril 2020, agent à la police aux frontières (PAF) et l’autre en janvier 2021, formateur aux techniques et à la sécurité en intervention (FTSI). De son côté, la MGP rappelle que plus de 1.100 policiers se sont suicidés ces 25 dernières années, soit 44 suicides par an en moyenne. C’est 50% de plus que le reste de la population. “Il faudrait qu’il y en ait zéro”, signe Aldric Jamey.
Les embouteillages font pleinement partie de la vie des habitants de Mayotte. Matin, midi ou en fin de journée, ils sont constamment présents dans certaines zones de l’île. Faute d’alternatives pour y échapper, les Mahorais s’y habituent, non sans conséquences sur leur santé mentale. Stress, épuisement émotionnel, fatigue constante… Les embouteillages ont des effets néfastes sur les automobilistes, et, par ricochet, sur toute la société.
Le constat est sans appel. « J’accompagne de plus en plus de patients qui sont victimes de la congestion routière à Mayotte. Cela a un impact sur leur santé mentale et leur vie sociale. » Il y a quelques années, le psychologue et sophro-analyste Fayum Ambdi n’aurait peut-être pas prononcé cette phrase. Aujourd’hui, impossible d’échapper à cette partie de son quotidien : c’est indéniable, Mayotte suffoque sous les embouteillages. Les communes de Mamoudzou, Koungou et Dembéni sont les principales concernées par ce fléau. Omar, habitant de Dzoumogné qui travaille à Kawéni en fait les frais. « Je me souviens qu’en 2017 les bouchons commençaient vers les Hauts-Vallons, aujourd’hui, je tombe dessus depuis Trévani », soupire-t-il. Une situation qui influe sur son organisation puisqu’il est désormais obligé de se réveiller de plus en plus tôt. « Quand j’ai des réunions à 8h ou 9h du matin, je me réveille à 3h30 et je pars de chez moi vers 4h45. Et même ainsi, je n’échappe pas aux embouteillages. Je passe 2h30 pour faire le trajet de chez moi jusqu’à Kaweni », continue-t-il. Seul avantage : Omar est son propre patron et peut aménager son emploi du temps.
Parmi ses camarades d’infortune matinale, les mains cramponnées à leur volant au milieu des files de voitures, rares sont ceux à avoir cette chance. À l’exemple de Nasrine, habitante de Mzouazia qui bosse à M’tsapéré. Sa routine du matin est chronométrée à la minute près. « Je me réveille à 3h, et pars de chez moi au plus tard à 4h15 pour espérer arriver au travail à l’heure à 7h30. Si je perds ne serait-ce que 5 minutes chez moi, je passe beaucoup plus de temps dans les embouteillages », martèle la jeune femme. Chaque matin, Nasrine passe pratiquement 3h sur la route. Difficile d’imaginer plus ? Et pourtant ! Si les embouteillages du matin sont une chose, ceux de la fin de journée se révèlent au moins aussi pénibles. « Je finis à 16h30 et je n’arrive pas chez moi avant 18h. C’est frustrant parce que quand je pars de la maison il fait nuit et quand je rentre il fait nuit », s’agace Nasrine. De son côté, Omar préfère prolonger ses journées de travail afin de ne pas subir les bouchons. « Des fois je finis à 16h ou 17h mais je reste à Kawéni jusqu’à 19h avant de rentrer pour ne pas vivre la même situation du matin. »
« Cette situation me désole, j’ai envie de crier, ça joue sur mon mental. »
Passer des heures et des heures sur la route, coincé dans les embouteillages, joue sur le moral des Mahorais. Ras-le-bol, fatigue, colère, stress, les automobilistes de Mayotte sont sujets à de nombreux maux. « Cette situation me désole, j’ai envie de crier, ça joue sur mon mental », réalise Omar. De quoi irriter particulièrement ce père de famille, qui perd un temps précieux. « Quand je rentre, je m’endors immédiatement. Je n’ai même pas le temps de jouer avec les enfants parce que je sais que je dois me réveiller à 3h du matin. » Christophe, habitant d’Ironi travaillant à Mamoudzou, a parfaitement conscience des conséquences psychologiques que provoquent les embouteillages sur lui. « C’est fatiguant psychologiquement parce qu’on sait que c’est récurrent. On sait que du lundi au vendredi, on va vivre la même chose. » Problème : cette prévisibilité, presque rassurante, a même perdu en précision. « Il y a deux à trois ans, on savait que les bouchons commençaient à une certaine heure, à des endroits précis. Maintenant ,ce n’est plus prévisible, on peut tomber dessus à n’importe quelle heure, n’importe où, c’est encore plus frustrant et je suis donc moins patient », explique-t-il.
La vie sociale n’est pas en reste. La fatigue et le stress cumulés à cause de l’engorgement des routes restreint les envies des automobilistes. « Après le travail, je n’ai pas envie d’aller boire un verre, ni de faire des rencontres ni de voir mes amis. Ma vie sociale est limitée parce qu’une grande partie de mon énergie est prise dans les bouchons », poursuit Christophe. Le week-end reste l’unique moment de répit, mais, trop fatigués, certains préfèrent récupérer les heures de sommeil perdues. Pas de grasse matinée pour Nasrine qui se réveille automatiquement à 3h du matin, réglée comme une horloge. Pour autant, celle-ci s’efforce de mener une vie saine. « En dehors du travail, je n’ai pas de vie sociale. C’est toujours voiture, boulot, dodo. Alors le week-end, même si je suis fatiguée, j’essaye de profiter de mes proches au maximum. » Un équilibre absolument nécessaire pour ne pas sombrer dans la dépression.
La santé mentale de toute la population mahoraise en danger
Car les risques existent. Le psychologue Fayum Ambdi a étudié les conséquences des embouteillages et il en a dégagé plusieurs pistes. Le stress est le premier effet néfaste sur le psychique. « Les personnes qui sont constamment dans les embouteillages stressent quotidiennement. Mentalement, elles sont sous tension et quand elles sortent des bouchons elles doivent avoir envie d’exploser », analyse le professionnel. Et plus la durée du trajet est longue, plus le stress augmente en intensité. Une fois arrivée au travail, la personne qui a subi les embouteillages est « plus susceptible de s’énerver pour la moindre chose », précise le psychologue. Le stress peut engendrer d’autres réactions, notamment physiologiques. Transpiration, tremblements, panique figurent parmi les éléments qui peuvent vous indiquer un état de stress. « J’ai eu des patients qui m’ont expliqué qu’à chaque fois qu’ils entraient dans les embouteillages, ils avaient des crispations et des picotements. Ce sont en réalité des angoisses installées au sein du corps de la personne parce qu’elle n’en peut plus », complète Fayum Ambdi.
À cela s’ajoute le phénomène d’épuisement émotionnel généré par l’épuisement du corps. Arrêter et redémarrer une voiture durant plus de deux heures est éprouvant physiquement, et le manque de sommeil chez les plupart des automobilistes n’arrange pas la situation. « Le corps ne se repose pas assez. Plus la durée du trajet augmente, plus les facteurs de détresse psychologique augmentent, c’est-à-dire, la dépression et l’épuisement. Cela s’accompagne aussi d’une réduction du bien-être mental et physique », éclaire le spécialiste.Les embouteillages ne sont pas à prendre à la légère, parce qu’ils peuvent avoir un impact considérable sur toute la société. « Cette congestion routière peut avoir des conséquences néfastes sur la santé mentale publique de tout le territoire parce que si on n’est pas bien, on n’a pas forcément envie d’aller vers les autres et cela influe sur le bien-être des familles, de la vie sociale, en bref, la santé de la société est impactée », prévient le psychologue.
Des solutions pour effacer ce mal-être existent. Fayum Ambdi préconise de consulter un psychologue qui aidera à trouver des astuces pour atténuer cette situation d’inconfort. On peut aussi faire des exercices de respiration ou écouter de la musique lorsque l’on se trouve piégé dans les bouchons. Il est également recommandé de faire le trajet avec des personnes que l’on apprécie. Mais tout cela n’est qu’un petit pansement sur une grosse plaie. « Tant que les services publics ne remédieront pas à ce fléau, il n’y aura pas de solution optimale et notre société sera de plus en plus malade. Un fléau ne se combat pas tout seul de son côté, mais de manière collective », lance le professionnel. Les prochains élus départementaux n’ont plus d’excuses pour ne pas désengorger les routes de l’île. Il en va du bien-être de toute la société mahoraise.
Ce samedi, la Somapresse a révélé le nom des Sportifs de la Décennie 2010-2019, après deux semaines de vote sur son site internet. Le basketteur Ahmed Saïd Salime alias Henri et la handballeuse Abouchirou Saïd ont été plébiscités dans les deux catégories phares. Jeanine Assani Issouf, Toifilou Maoulida, Sébastien Synave, Sébastien Rière, le Combani Handball, le BC M’tsapéré et le Centre Multisports de M’roalé sont les autres lauréats.
C’était une cérémonie tout-à-fait particulière. D’abord pour son contexte d’organisation, en ces temps de crise sanitaire. La remise des trophées du Sportif de la décennie 2010-2019 s’est déroulée en comité réduit, sans public, mais tout de même en présence des nommés et de leur accompagnant : une première depuis la création de l’événement en 2009.
Le tout dans le respect d’un protocole sanitaire strict mis en place par la Société Mahoraise de Presse, l’organisateur, et Mayotte La 1ère, l’hôte de la cérémonie. « L’espace était divisé en deux, avec les nommés sur la partie basse de la cour extérieur, et les accompagnants sur la partie haute de la cour« , détaille Nassem Zidini, chargé de l’événementiel à la Somapresse. « Avec également des chaises séparées d’1,50 mètres les unes des autres de manière à respecter la distanciation sociale. Ou encore, pour la partie buffet, des assiettes déjà confectionnés pour les invités. » C’était une cérémonie particulière, ensuite, pour la singularité de l’élection.
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En effet, depuis 2009, l’événement le Sportif de l’année récompense les meilleurs sportifs mahorais de l’année civile écoulée. Cette fois-ci, elle mettait en lumière les meilleurs sportifs mahorais de la décennie passée : la décennie 2010-2019. Les 40 nommés se sont mis sur leur 31 et ont majoritairement répondu à l’invitation de la Somapresse.
9 lauréats et 32 nommés médaillés
Ils ont pu, tour à tour, recevoir les médailles ainsi que le trophée créés par 3Découpe, artisan local reconnu sur l’île. Anli Julien le gérant, ayant notamment été retenu pour la Grande exposition du fabriqué en France, en janvier 2020 à l’Élysée. Concernant les lauréats, le Combani Handball Club, huit fois titré lors des dix derniers championnats a été élu Équipe féminine de la décennie, tandis que le Basket Club M’tsapéré, auteur de sextuplé historique en 2014 a été élu Équipe masculine de la décennie.
Sébastien Rière, président du Comité Territorial de Rugby de Mayotte de 2002 à 2020 et vice-président de la Fédération française de rugby en charge de l’Outre-mer au cours du dernier mandat, a été élu Dirigeant de la décennie. Sébastien Synave, entraîneur du Racing Club Mamoudzou est l’Entraineur de la décennie après avoir formé et coaché Jannot Bacar, sélectionné en équipe des Comores pour des championnats du monde, Myriam M’lazahahé, sélectionnée en équipe de France pour des championnats d’Europe, ou encore Hafidhou Attoumani, qualifié pour des finales de championnats de France.
Jeanine Assani Issouf, multiple championne de France et première mahoraise qualifiée et ayant participé à des Jeux Olympiques, a été élue Mahopolitaine de la décennie. Toifilou Maoulida footballeur professionnel de 1997 à 2018, est le Mahopolitain de la décennie. Abouchirou Soultoini, handballeuse tsingonienne, arbitre, entraîneuse, éducatrice sportive, un temps élue chargée des sports dans sa localité, a été élue Sportive de la décennie.
« Encore des réflexions à mener pour améliorer l’événement »
Enfin, Ahmed Saïd Salime, basketteur labattoirien, membre cadre des trois sélections pour les Jeux des îles de l’océan Indien en 2011, 2015 et 2019, pour deux médailles d’argent, a été sacré Sportif de la décennie. La cérémonie diffusée en direct à la télé et sur internet sur Mayotte La 1ère avait débuté avec la remise du prix MDPH Handisport attribué au Centre Multisports de M’roalé, pour toutes ses actions au bénéfice des personnes en situation de handicap.
La Société Mahoraise de Presse poursuit ainsi son travail de valorisation des sportifs mahorais, avec le soutien de partenaires privés, mais également celui de partenaires institutionnels tels que la Jeunesse et sport État (Drajes), le Département de Mayotte ou encore le Comité régional olympique et sportif (Cros) de Mayotte, représenté samedi soir par ses vice-présidents Hakim Ali Abdou et Mohamed Ahmada Tostao, et son président Madi Vita.
« L’événement Le Sportif de l’année est un événement que le CROS Mayotte soutient depuis la première édition en 2009. Un événement qui met en lumière le sport mahorais, les sportifs mahorais, un événement qui valorise et qui récompense tous ces bénévoles, qu’ils soient entraîneurs, dirigeants, athlètes : le mouvement sportif mahorais ne peut que le soutenir« , explique ce dernier. Pour Nassem Zidini, il ne s’agit plus véritablement de se demander si l’événement a un avenir, mais plutôt de se demander comment continuer de l’améliorer.
« Le Sportif de l’année a tellement évolué entre la première édition et cette douzième cérémonie ! Malgré cela, il y a encore des réflexions à mener pour l’améliorer et en faire un événement encore plus plaisant à suivre, notamment pour les internautes et téléspectateurs. Des idées ont déjà émergé de la part des nommés et invités même, samedi soir pendant et après la cérémonie… Nous allons y réfléchir à la Somapresse pour les prochaines éditions. Nous allons y réfléchir à la Somapresse, échanger avec nos partenaires. Nous sommes satisfaits de cette cérémonie et confiants pour la suite.«