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Intersyndicale des taxis de Mayotte : « le Département prend le travail des chauffeurs de taxis »

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Lassitude, incompréhension, colère… C’est dans cet état d’esprit que se trouvent les chauffeurs de taxis de Mayotte. Révoltés par un plan de transports interurbains lancé par le conseil départemental, les conducteurs demandent des explications. Le projet du Département est estimé à 100 millions d’euros et les chauffeurs de taxis redoutent leur mise à l’écart. Les syndicats des taxis se sont rassemblés ce jeudi matin pour crier leur désarroi, espérant être entendus par les élus. Abalkini Chanfi, correspondant de l’intersyndicale, nous explique les raisons de leur colère.

Flash Infos : Quel était l’objet de la réunion avec tous les syndicats de taxis ?

Abalkini Chanfi : La réunion fait suite à l’offre de marché du conseil départemental lancé en juillet dernier, s’agissant du projet de transports interurbains de Mayotte. Tous ceux qui veulent répondre d’ici le 20 septembre peuvent le faire, mais le problème c’est qu’il y a un seul lot à 100 millions d’euros sur dix ans. L’intersyndicale estime que personne à Mayotte n’est capable de répondre à ce marché, pas même ceux qui sont très bien fournis. Il faut être un très gros transporteur, comme la RATP, pour pouvoir y répondre.

FI : En quoi consiste ce plan de transports interurbains ?

A. C. : C’est un plan avec beaucoup d’incohérences car « interurbain » signifie que les bus transportent d’une ville à une autre et pas seulement à Mamoudzou. Or, nous n’avons pas de routes pour cela. Le Département veut rajouter au moins 50 bus, et avec la taille du marché, je pense qu’il y aura au moins 100 bus. Comment 100 bus peuvent rouler à Mayotte ? Nous n’avons pas les infrastructures nécessaires pour les accueillir. Et je vous le dis, si nous rajoutons ces bus à Mayotte en l’état actuel, nous tuerons les taxis ! Aujourd’hui, les chauffeurs de taxis ont du mal à vivre de leur travail parce qu’il y a de plus en plus de bouchons, tout est plus cher, ils ne survivront pas à ça… De plus, ils veulent une mise en service pour septembre 2022. Même si vous avez les capacités de répondre au marché, les délais pour faire venir des bus à Mayotte sont trop courts. En un an, ce n’est pas possible.

FI : Avez-vous entamé des discussions avec les élus du conseil départemental ?

A. C. : Il y a un mois, le président du Département avait promis qu’il allait suspendre le marché. Ce n’est toujours pas le cas à l’heure où nous nous parlons alors que l’appel d’offre se termine dans trois jours. Pour nous, c’est encore un discours « bla bla ». L’intersyndicale des taxis est extrêmement révoltée car la mission des transports publics est assurée par les taxis depuis une cinquantaine d’années et aujourd’hui, ils se sentent écartés. Il y a un an, le Département a décidé d’aider les chauffeurs à moderniser leurs véhicules à hauteur de 10.000 euros par artisan. Sauf qu’un an plus tard, ils lancent leur plan de transports interurbains. Comment peuvent-ils demander aux artisans d’investir dans des véhicules plus modernes et ensuite mettre en place des bus ? Le Département prend le travail des chauffeurs de taxis parce que si ces bus arrivent, nous n’aurons plus de place sur le marché. À Mayotte, il y a 600 licences : au moins 5.000 personnes vivent de cette économie.

FI : Selon vous, quelle serait la solution pour satisfaire tout le monde ?

A. C. : Nous souhaitons voir le président du Département et le 3ème vice-président en charge des transports pour discuter et voir de quelle manière les taxis peuvent s’intégrer dans ce marché. La collectivité doit pouvoir nous répondre sur les questions d’avenir de notre métier. Ce lundi 20 septembre, de 10h à 12h, nous allons faire un défilé pacifique avec nos voitures à Mamoudzou. Nous ne bloquerons pas la route, cela ne sert plus à rien. Nous allons faire une opération escargot en passant devant les principales institutions – la Cadema, la préfecture, le conseil départemental, les banques – pour faire réagir !

Naissance/mortalité à Mayotte : l’année 2020, une exception à la règle

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2020 se démarque par une baisse sensible des naissances. Un indicateur à prendre avec des pincettes puisque 2021 pourrait coïncider avec le franchissement de la barre symbolique des 10.000 nouveaux-nés dans le 101ème département. En parallèle, la surmortalité, liée à la pandémie de Covid-19 et à l’épidémie de dengue, explose sur ces deux dernières années. Décryptage avec Bertrand Aumand, le chef du service régional de l’institut national de la statistique et des études économiques (Insee).

Plus grande maternité de France, Mayotte scrute toujours attentivement la publication des chiffres de l’institut national de la statistique et des études économiques (Insee) pour connaître l’évolution des naissances d’une année à l’autre. Idem pour la mortalité. Quoi qu’on en dise, un lien de cause à effet existe bel et bien avec la pandémie de Covid-19 par rapport à ces deux indicateurs. Éléments de réponse.

9.180. C’est le nombre de naissances en 2020. Soit 580 bébés de moins par rapport à 2019 (-6%). Si ce chiffre est le plus faible depuis 2015 (9.000), le taux de fécondite, lui, reste élevé à Mayotte – 4.2 enfants par femme – en comparaison aux autres départements d’Outre-mer (3.6 en Guyane par exemple) et à la métropole (1.8). Ce recul général « concerne davantage » les femmes de l’Union des Comores : 6.300 naissances en 2020, contre 6.810 un an plus tôt (-8%). Toutefois, il faut noter que, comme depuis 2016, trois nouveaux-nés sur quatre proviennent d’une mère de nationalité étrangère (69% de comoriennes et 5% de malgaches).

56. C’est en pourcentage la part des bébés nés en 2020 qui ont au moins un parent français. C’est autant qu’en 2019 et en 2018 (55%), un peu inférieur qu’en 2016 et 2017 (58%) et surtout qu’en 2014 (72%). « Depuis 2015, nous sommes au moins à 40% de père et mère étrangère », rappelle par ailleurs le chef du service régional de l’Insee. Cette inversion notable se justifie notamment par l’explosion d’une immigration massive venue des îles voisines.

415. C’est le nombre d’enfants nés de mères mineures en 2020, contre 430 en 2019 et 470 en 2018. « Le côté positif est que nous avons une tendance à la baisse, cela représente – seulement – 4.5% des naissances sur l’année 2020 (2% à La Réunion, 4.8% en Guyane et 0.4% en métropole, ndlr) », insiste le représentant de l’Insee. Parmi ces mamans âgées de moins de 18 ans, 94% d’entre elles ont accouché dans une maternité.

236. C’est le nombre de mères domiciliées à Mayotte qui ont accouché hors du département (à La Réunion et en métropole). À l’inverse, en 2019, on en comptabilisait 300. Elles ont 32 ans en moyenne et sont de nationalité française pour 86% d’entre elles. Cette « baisse marquée » s’explique par les difficultés de déplacements en raison de la fermeture des frontières durant la crise sanitaire.

6.550. C’est le nombre de naissances au cours des sept premiers mois de 2021, soit 550 de plus que sur la même période de 2020 (+9.1%). « Il n’y a qu’en janvier que les chiffres sont inférieurs puisqu’ils ont été conçus en avril 2020, au début d’un confinement qui a pu décourager les couples de procréer et les inciter à reporter de plusieurs mois leurs projets de parentalité », relativise Bertrand Aumand. Cette tendance « très forte » pourrait bien faire franchir la barre symbolique des 10.000 bébés d’ici la fin de l’année.

970. C’est le nombre de personnes domiciliées à Mayotte qui sont décédées. Une hausse de 25% par rapport à 2019, contre 9% en métropole. Cette surmortalité, visible principalement entre février et mai ainsi qu’en décembre, touche davantage les 75 ans ou plus (+37%). « Le graphique sert à démontrer qu’en fonction du département d’Outre-mer, l’impact n’a pas été à la même période de l’année », souligne le chef du service régional de l’Insee, qui met cette explosion sur le compte du Covid-19 et de la dengue, sans toutefois faire la distinction. « L’agence régionale de santé a des informations sur la cause de mortalité que nous n’avons pas. Nous sommes uniquement destinataires des bulletins de décès. »

610. C’est le nombre de décès recensés de janvier à juin 2021. Une augmentation spectaculaire de l’ordre de 53% par rapport à la même période de 2019, qui frappe essentiellement les personnes âgées (+91% parmi les 75-84 ans au premier semestre, en lien avec la dernière vague épidémique), mais pas que (+65% parmi les 50-64 ans). Autre indicateur : les hommes sont plus touchés que les femmes (+134% contre +61%). « Nous avons une aggravation de la surmortalité en 2021 », conclut Bertrand Aumand.

Journées européennes du patrimoine : 40 événements à Mayotte pour une 38ème édition encore sous la menace Covid

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Pendant trois jours, la population aura l’occasion de découvrir les richesses du territoire à travers les nombreuses activités proposées par les collectivités et les associations. Seule contrainte : la présentation du passe sanitaire. Tour d’horizon avec Arnauld Martin, conseiller pour les musées et le patrimoine immatériel à la direction des affaires culturelles

Ateliers de maquillage, exposition artisanale, sortie découverte à l’îlot M’Bouzi ou encore balades contées aux cascades de Barakani… Pour la 38ème édition des Journées européennes du patrimoine, les richesses de l’île aux parfums seront une fois encore à l’honneur tout le week-end. Au total, plus de 40 événements figurent au programme, répartis sur quelque dix communes : Mamoudzou, Ouangani, Chirongui, Chiconi, M’Tsangamouji, Tsingoni, Pamandzi, Dzaoudzi, Acoua ou encore M’Tsamboro accueilleront ainsi les amateurs de culture locale. “Nous sommes presque au même niveau que l’année dernière, avec des villes qui ne participaient pas parfois depuis quelques années et qui sont revenues, comme M’Tsamboro”, se réjouit Arnauld Martin, le conseiller pour les musées et le patrimoine immatériel à la direction des affaires culturelles (DAC).

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En pleine période de crise sanitaire, cette nouvelle édition doit aussi signer un “retour à la vie normale” pour la culture, ou du moins “lui redonner une place dans un monde où elle a été un peu oubliée ces deux dernières années”, souligne le pilote des JEP à Mayotte. Covid-19 oblige, en plus de l’habituelle rengaine des gestes barrières, le passe sanitaire sera exigé pour tous les publics âgés de 18 ans et plus. Une contrainte qui risque de peser sur la fréquentation, sur un territoire où 30% de la population est vaccinée… “Habituellement, nous sommes à environ 9.000 visiteurs les bonnes années, là nous serons peut-être autour de 3.000. Même si nous pouvons toujours espérer plus !” sourit-il. Avant d’ajouter : “Nous ne sommes pas à la recherche du chiffre, l’idée reste de sensibiliser le public.

Patrimoine et environnement à l’honneur

Et surtout, tous les publics, à en croire le thème choisi pour cette 38ème édition : “Le Patrimoine pour tous”. “L’occasion de mettre en valeur la diversité de notre patrimoine, qu’il soit matériel ou immatériel, traditionnel ou plus inattendu”, abonde la ministre de la Culture, Roselyne Bachelot dans son édito. Et à Mayotte, cela passera notamment par les propositions de nouveaux participants, “qui profitent de ces journées pour parler de leurs activités« , explique Arnaud Martin. L’association Yes We Cannette organisera ainsi un atelier maquillage avec des matériaux naturels et de création d’objets artisanaux à partir de déchets recyclés. “C’est cohérent avec la notion de patrimoine, car en milieu insulaire, avant l’arrivée de la société de consommation de masse, les matériaux étaient réutilisés, détournés pour un autre usage. Cela fait partie de l’héritage, donc c’est une initiative intéressante, qui fait le lien entre problématiques patrimoniales et environnementales”, analyse le conseiller de la DAC.

La danse plutôt que les pierres

Autre initiative notable : une journée consacrée aux musiques et danses traditionnelles samedi et organisée par Talmalandi, une association de Miréréni, qui présentera pour l’occasion l’aboutissement de son travail avec les enfants du quartier. “C’est une action à signaler car le contexte dans le coin n’invite pas forcément à l’optimisme, et malgré tout, il y a des associations, qui plus est avec des jeunes, qui essaient de donner un peu d’espoir et une autre vision du territoire”, salue Arnauld Martin, en référence aux heurts qui émaillent les relations entre les deux villages de la commune de Tsingoni depuis plus d’une semaine.

Une journée pour les scolaires

Enfin, grâce à “Levez les yeux”, un dispositif commun entre les ministères de la Culture et de l’Éducation nationale, les scolaires pourront eux aussi profiter de ces journées du patrimoine, et ce, dès vendredi. Parmi les ateliers au programme : un jeu de piste à Barakani, la découverte des bangas à Tsimkoura, et même la visite d’un chantier de fouille archéologique, celle-ci exclusivement réservée aux élèves… De quoi élargir la cible des visiteurs et remplir l’objectif affiché par le thème de cette édition. Une initiative qui prend de plus “un sens particulier à Mayotte ”, soulève le conservateur du patrimoine. “Pour les scolaires, c’est une occasion de découvrir vraiment une partie de leurs racines et de prendre conscience de la richesse de leur héritage culturel.” Sortez vos agendas !

Pour découvrir le programme complet et s’inscrire aux événements, connectez-vous sur https://openagenda.com/jep-2021-mayotte.

Colocs ! : “Passer du tabou à libération de la parole en 13 minutes, c’est assez dingue”

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Diffusée depuis le 6 septembre sur Mayotte La 1ère, la série Colocs ! alimente des débats parfois houleux sur les réseaux sociaux, après seulement deux épisodes. En début de parcours, la réalisatrice Jacqueline Djoumoi-Guez analyse pour Flash Infos ces réactions à fleur de peau.

Flash Infos : Deux semaines après le lancement de la série Colocs, quelles sont vos premières impressions sur l’accueil des spectateurs ?

Jacqueline Djoumoi-Guez : Quand je l’ai écrite sur papier et proposée à France Télévisions, on brossait le tableau depuis Paris sans peser à quel point cela pouvait être très clivant. Pour autant, les réactions sont attendues. Déjà, dans les commentaires, 90% sont des hommes, qui réagissent de manière très virulente. On se dit qu’on a peut-être touché quelque chose de pas totalement faux… Je ne les ai jamais vus s’exciter à ce point pour une série brésilienne ou américaine ! C’est quand même étrange de voir à quel point on est capable d’accepter ce qui vient d’ailleurs et très peu ce qui vient de l’intérieur. Surtout quand cela parle de nous, à une époque où la jeunesse a un besoin criant de représentation, pour avoir des modèles de référence et une pensée différente sur laquelle se construire et grandir. Ces critiques arrivent par milliers sur les réseaux sociaux, sur Facebook, sur Twitter… Sur Twitter, ils ont fait des spaces, des espaces de conversation pour discuter de la série. Le lendemain du premier épisode, ils étaient 300 personnes ! C’est un événement qui n’a jamais eu lieu à Mayotte. Dimanche dernier, un autre space a réuni la communauté comorienne cette fois, qui vit les mêmes problématiques que la jeunesse mahoraise. Et maintenant, rendez-vous est pris toutes les semaines pour aller débattre après chaque diffusion…

FI : Avez-vous participé à ces échanges ? Quelles critiques ressortent le plus souvent, ou vous ont le plus marquée ?

J. D.-G. : Oui, le premier space, je me suis connectée à partir de la troisième heure, car quelqu’un m’avait avertie. Je me suis proposée de répondre à leurs questions. Il y a eu des réactions, notamment sur le rôle de la femme voilée. On l’a taxée de trop caricaturale, car elle défend la tradition, elle veut faire son manzaraka, du coup elle serait dans une forme d’obscurantisme. Je leur ai dit d’y regarder à deux fois. Ce personnage est sûrement celui avec la plus grande ouverture d’esprit : elle ne remet pas en question sa foi, elle est en paix avec cette question personnelle. Donc, elle fait sa prière, mais elle sort avec ses copines, qui sont toutes différentes. L’une porte une des mini-jupes, mais elle ne la juge pas. Elle veut faire son manzaraka, comme une autre voudrait le mariage romantique, robe blanche, Versailles ! Elle n’est pas caricaturale, au contraire.

Dans le collimateur des commentateurs, il y a aussi le personnage principal, Raïssa. Ils m’accusent d’avoir mis dans la bouche de ce personnage des paroles très dures vis-à-vis de sa mère, alors qu’en réalité, ce n’est pas à elle qu’elle parle : ce sont ses pensées, d’où le cadrage et la colorimétrie, qui changent pour montrer ses frustrations intérieures. Pour moi, ce personnage, un peu schizophrène, qui donne le change face à la société, à ce qu’attend sa famille, c’est l’archétype de la femme mahoraise d’aujourd’hui. Celle qui essaie de conjuguer la liberté acquise en métropole et la fille qu’on attend, qui fait ce qu’on lui dit et ne crée pas de problème.

FI : Sur les réseaux sociaux, une partie des spectateurs ont aussi le sentiment que la série bafoue la culture et les valeurs mahoraises…

J. D.-G. : Dans les milliers de commentaires, on m’a reproché de participer à ce que la jeunesse mahoraise se dévergonde. C’est une critique que je prends très mal, car elle insulte ma cible, mon public, essentiellement féminin, en induisant qu’elles ne sont pas capables de penser par elles-mêmes et de prendre de la distance par rapport aux images qu’elles voient. C’est une façon de continuer à infantiliser la femme, de continuer à juger que les jeunes femmes doivent être sous la protection et l’accompagnement d’un tuteur. Et ce que je réponds à cela, c’est aussi que les gens n’ont pas attendu Colocs ! pour faire ce qu’ils avaient à faire. Là, dehors, il y a tout un monde que les gens ici n’ont pas envie de voir… L’autre critique qui me chamboule, c’est de dire : si on permet aux femmes de quitter le foyer familial, elles vont tomber enceintes. Je n’ai jamais vu d’appartement mettre une femme enceinte… Encore une fois, on omet 50% du problème ! Ceux qui formulent cette idée ne se rendent pas compte qu’ils oublient de s’intégrer à l’équation : on fait encore peser la responsabilité sur la fille, alors que le garçon n’a rien fait, ce n’est pas de sa faute. Enfin, le dernier sujet qui m’embête, c’est de résumer la liberté de la femme mahoraise à porter des mini-jupes et aller en boîte. Non ! Le problème est bien plus profond que ça, il s’agit d’égalité, de place de la femme dans la société mahoraise. Une société qui se prétend matriarcale, alors que nous savons très bien que c’est une légende urbaine.

FI : Malgré ces critiques qui fusent de toutes parts, vous avez aussi reçu beaucoup de compliments ! Quels impacts positifs retenez-vous de la diffusion de cette série ?

J. D.-G. : C’est sûr ! Pour la première fois sur ce territoire, on a une série intelligente et intellectuelle qui aborde des thématiques de société compliquées, et dans laquelle toute une génération se reconnaît. Tous les jours depuis le 3 septembre, je reçois des dizaines de messages, partout où je mets les pieds, des gens m’arrêtent, me remercient, m’embrassent… Ils se sentent représentés, pour la première fois. Cette jeune génération, quand elle revient à Mayotte, se sent très isolée, elle a le sentiment que c’est elle le problème, alors que c’est au moule de changer. Résultat, même entres jeunes, ils n’en parlent pas ! Le tabou reste. Il y a quelques jours au marché, une fille m’a arrêtée en pleurant, en m’expliquant qu’elle était en dépression depuis trois ans car sa mère la faisait se sentir responsable. Elle m’a dit “quand j’ai vu votre série, j’ai compris que tout ça, c’était du flan !”. C’est juste la façon de faire de l’ancienne génération, qui passe par du chantage affectif car elle n’a pas appris d’autre modèle. Les gens sur les réseaux sociaux ont beau nier l’existence de la jeune génération, elle est là, elle occupe des postes à responsabilité, donc il faudra bien composer avec. Soit on essaie d’avoir un dialogue au sein des familles, au sein des fratries, pour vivre des relations sincères, soit on continue à ce jeu-là… Mais la jeune génération gagnera, c’est mathématique.

FI : Vous aviez salué lors de l’avant-première le courage de vos quatre actrices, qui se mettaient au devant de la scène sur un sujet aussi clivant et sensible. Après ces deux premiers épisodes, comment les actrices vivent leur quotidien, est-ce, en effet, difficile.

J. D.-G. : On les arrête pas mal dans la rue, pour leur parler de leur personnage. Mais cela reste relativement calme. Après, nous n’en sommes qu’au deuxième épisode ! Il y en a 14 ! Et je peux vous assurer qu’il y a matière à débat. Le pilote n’est pas celui qui invite le plus à la polémique, d’ailleurs. Donc j’invite les gens à se tenir prêts à débattre intelligemment, argument contre argument. L’idée c’est ça : pouvoir débattre. Chaque épisode ne dure que 13 minutes, et les discussions s’étalent sur des jours et des jours.

FI : Mission accomplie, alors.

J. D.-G. : Ce qui est extraordinaire, c’est qu’on est passé d’un sujet dont on ne parle jamais à un sujet dont tout le monde parle. C’est un sacré tour de force ! Réussir à passer du tabou à libération de la parole en seulement 13 minutes, c’est assez dingue. Certes, le dialogue est encore virulent, il n’est pas encore qualitatif. Mais c’est la première fois qu’on parle, donc on n’a pas les mots. Au fur et à mesure, avec le temps et les générations à venir, on trouvera de meilleurs mots pour pouvoir dire les choses sans violence, sans colère. Et dans l’écoute !

1.2 million d’euros pour structurer le territoire et les clubs et relancer la pratique sportive

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Le domaine du sport n’a pas été épargné par les conséquences de la crise sanitaire. En France, 30% des licenciés n’ont pas renouvelé leur inscription, un réel manque à gagner pour les clubs et les associations sportives. C’est pour cette raison que le gouvernement, dans son plan de relance, a injecté 122 millions d’euros dans le secteur du sport. À Mayotte cela se caractérise particulièrement par la création d’emplois et la modernisation des équipements sportifs.

« C’est trop bon de faire du sport ! » Voici le slogan du plan de relance consacré au sport. Par ces quelques mots, le gouvernement veut mettre ou remettre le sport au centre des activités favorites des Français, et notamment des moins de 18 ans. Et pour cela il n’hésite pas à mettre la main à la poche, avec une enveloppe de 122 millions d’euros consacrés au plan de relance au niveau national. Le budget exact alloué à Mayotte s’élève à plus d’1.2 million euros. Les 300 clubs de l’île peuvent en bénéficier sous différentes formes en montant un dossier. Le « fonds territorial de solidarité » a déjà permis d’aider des associations en difficultés à hauteur de 247.000 euros.

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Le plan de relance du sport sur l’île aux parfums est géré par la délégation régionale académique à la jeunesse, à l’engagement et aux sports (DRAJES), le rectorat et le comité régional olympique et sportif (CROS) de Mayotte. Il est évident que les priorités du territoire ne sont pas celles des autres régions de France. Le domaine du sport peine encore à se développer dans le 101ème département, alors ce coup de pouce est comme un renouveau pour les professionnels et les amateurs. Le dispositif prévoit toute une panoplie de mesures pour redynamiser la pratique sportive.

Création d’emplois

Beaucoup de clubs de l’île existent grâce à l’engagement des bénévoles. Or, pour développer le sport à Mayotte, il faut plus de moyens humains et des éducateurs rémunérés. C’est en ce sens qu’une partie du budget du plan de relance est destiné à favoriser l’emploi dans le sport. « Il ne s’agit pas uniquement de créer des emplois, mais c’est aussi s’assurer que nous aurons des formateurs bien formés », précise Gilles Halbout, le recteur de Mayotte. Pour la seule année 2021, 40 nouveaux emplois aidés ont été crées, un chiffre amené à augmenter dans un avenir proche. En collaboration avec la DRAJES, le CROS forme des jeunes dans les métiers du sport. « Nous avons une formation appelée BPJEPS, nous avons déjà toute une promotion, mais nous voulons augmenter la cadence car il y a de la demande », indique Mohamed Tostao Ahmada, vice-président du CROS chargé de la professionnalisation. 138.000 euros ont déjà été accordés et ont permis la formation des jeunes.

50 euros pour le Pass’Sport

Relancer l’activité physique et remettre sur les rails la vie des clubs, ce sont les deux objectifs aussi du Pass’Sport. Depuis la fin du mois de juillet, certaines familles reçoivent un chèque d’une valeur de 50 euros par enfant afin de les inciter à inscrire leur progéniture dans les clubs sportifs. Les familles éligibles sont celles bénéficiant de l’allocation scolaire, vivant dans les quartiers prioritaires, ou celles recevant l’allocation pour enfant handicapé. Seuls les jeunes âgés de 6 à 17 ans révolus peuvent en bénéficier, cela représente 25.000 jeunes mahorais. Le Pass’Sport est également un coup de pouce pour les clubs. À Mayotte, beaucoup ne font pas payer l’entrée, alors ce dispositif est « un peu comme une compensation ». « Le club peut utiliser l’argent pour acheter des équipements et mieux se structurer », explique Madeleine Delaperrière, la directrice de la DRAJES. Il est encore trop tôt pour connaître l’impact de ces chèques sur la santé financière des clubs sportifs, mais le vice-président du CROS, Mohamed Tostao Ahmada se montre d’ores et déjà serein. « Il y aura un impact ! Beaucoup de parents viennent déjà s’informer pour inscrire leurs enfants. »

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La natation, une priorité

Avec une ministre des sports, nageuse et championne olympique, la natation ne pouvait être en reste. « Le savoir nager est une priorité gouvernementale. C’est propre aux écoles et notre objectif est que tous les élèves aient une initiation à la natation cette année », annonce Gilles Halbout. Mais comment y parvenir si les piscines publiques se comptent sur les doigts d’une main sur l’île ? Face à ce manque, le recteur rappelle la construction par le conseil départemental d’un bassin olympique sur Kawéni. À cela, s’ajouteront 12 bases nautiques dans les différentes communes de Mayotte. « Il n’y aura pas de piscine, mais il s’agit de petites constructions avec des points d’eau qui permettront de déployer des activités nautiques sur le lagon », poursuit le responsable de l’académie. Des bases nautiques financées par l’Éducation nationale via des « crédits d’investissement ». Les noyades étant fréquentes à Mayotte, au même titre qu’ailleurs en France, les sports nautiques et particulièrement la natation, sont plus qu’une nécessité pour les enfants, mais également les adultes.

Frais de bouche, voyages, rémunérations… Le cabinet du ministère des Outre-mer épinglé par la Cour des comptes

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Dans un référé publié le 14 septembre, la juridiction passe au crible les dépenses de cabinet des deux derniers ministres de la rue Oudinot, Annick Girardin et Sébastien Lecornu. Certaines maladresses doivent être corrigées pour des questions d’économies mais aussi d’exemplarité.

À près de 4.500 euros l’heure à bord de l’avion du gouvernement, on comprend un peu mieux pourquoi Sébastien Lecornu et Gérald Darmanin ont fait le trajet jusqu’à Mayotte par le vol commercial Air Austral, le 28 août dernier. Dans une publication du 14 septembre, la Cour des comptes, qui a décortiqué les dépenses de cabinet des ministres des Outre-mer, entre 2017 et 2020, constate “des risques particuliers en termes d’image, d’économie et d’exemplarité”. Au total, rien que pour le volet aérien, 1.7 million d’euros ont été dépensés pour les 61 voyages officiels des deux ministres successifs (Annick Girardin puis Sébastien Lecornu), auxquels s’ajoutent 120.000 euros pour quatre voyages spéciaux à bord de l’escadron de transport, d’entraînement et de calibration (ETEC) de l’armée de l’air. Or, deux de ces voyages auraient pu être effectués avec des compagnies aériennes classiques, note le rapport.

“Début de remise en ordre”

Bien sûr, “cette fréquence et ce niveau de dépenses sont une spécificité du ministère des Outre-mer, dont le champ couvre 12 territoires dispersés sur le globe”, concèdent les magistrats. Mais ces frais aériens ne sont pas les seuls sur lesquels le cabinet pourrait réduire la voilure. Primes de fin d’année qui ne disent pas leur nom, amendes pour des infractions de circulation commises par les chauffeurs du cabinet, ou encore la mauvaise comptabilité pour les frais de bouche de la “popote” – la cantine des conseillers -, sont passés au crible dans ce rapport de sept pages adressé à l’actuel locataire de la rue Oudinot. Et si la Cour observe “une meilleure prise en compte de ces risques” et “un début de remise en ordre” depuis le changement de ministre en juillet 2020, les efforts de maîtrise accrue doivent être poursuivis, “à l’exemple des pratiques observées par la présidence de la République”.

La carte bleue passe de main en main

Outre le niveau des dépenses, qui reste relativement “limité”, pour la plupart des postes observés, ce sont surtout leur nature qui sont susceptibles de porter préjudice au ministère. Exemple avec les délégations de signatures “peu encadrées” ayant conduit à la “confusion des responsabilités et la dilution des contrôles”. Sur la base d’un échantillon d’une centaine de dépenses, le Cour a ainsi relevé quelques irrégularités, dont des amendes des chauffeurs du cabinet. Même manque de suivi pour les frais de bouche, qui ont représentés 15.800 euros par mois en moyenne pour une équipe de 10 puis 15 conseillers entre 2017 et 2020 : “la possibilité de se restaurer sur place, en principe réservée aux seuls membres du cabinet (…) a été fortement élargie à d’autres personnels du ministère, malgré le coût de revient élevé par repas”, avertit la Cour.

L’administration centrale, ce parent pauvre

La juridiction financière mentionne aussi les effectifs du cabinet du ministre, au nombre de 56 agents, qui représentent “quasiment la moitié de l’effectif de la direction générale des Outre-mer”. L’administration centrale compte, elle, 137 agents. De quoi “affaiblir la capacité de cette direction” à l’heure où elle doit piloter plusieurs plans stratégiques, comme le Plan logement Outre-mer, le Plan de relance Outre-mer, le Livre bleu Outre-mer. Un déséquilibre déjà pointé du doigt par un référé en 2016, mais qui n’a pas donné de suite, déplore la Cour. À noter qu’Emmanuel Macron avait fait de la rigidité de la haute administration un cheval de bataille lors de sa campagne en 2017, le président souhaitant accroître la marge de manœuvre des cabinets face aux hauts fonctionnaires, souvent accusés de ralentir la mise en place des réformes.

Autre inégalité de traitement : les rémunérations. Passées de 2.99 millions d’euros à 3.76 millions d’euros en l’espace de quatre ans, celles-ci se révèlent assez disparates et dépendent « davantage des profils des personnes, de leur affectation précédente, de leur statut, que de l’importance des fonctions qu’ils exercent au sein du cabinet”, signalent aussi les sages. Par ailleurs, une indemnité de sujétion particulière (ISP) exceptionnelle est versée systématiquement aux fonctionnaires du bureau du cabinet. Une “prime de fin d’année” déguisée dont leurs collègues de la direction générale ne bénéficient pas. Par ailleurs, certaines déclarations d’intérêts et de patrimoine à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) manquent à l’appel… quand des doubles destinés directement au supérieur hiérarchique prennent tout bonnement la poussière, “non ouverts et sans avoir été consultés”, dans un coffre du cabinet. Oubli volontaire ou simple maladresse ? Reste que le risque de conflit d’intérêts existe bel et bien. Pour conclure ce référé, la Cour des comptes formule donc cinq recommandations, de la meilleure répartition des crédits à la détermination objective des rémunérations en passant par un référentiel commun rassemblant les normes relatives aux dépenses du cabinet. Espérons que ces bons conseils ne finissent pas leur course au fond du tiroir…

CDG/CNFPT : une convention de trois ans pour améliorer la qualité du service public à Mayotte

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Ce mercredi 15 septembre, le centre de gestion et le centre national de la fonction publique territoriale ont formalisé leur partenariat vieux de 15 ans par la signature d’une convention. Basée sur six axes prioritaires, elle a pour but de fixer des orientations communes et de mettre en place des indicateurs partagés pour évaluer efficacement la qualité de cette coopération au cours des trois prochaines années.

Avec près de 9.000 agents, les collectivités locales ont fort à faire en matière de formation. Depuis 2005, le centre de gestion et le centre national de la fonction publique territoriale œuvrent pour la construction des parcours professionnels et accompagnent les différents projets structurants dans leurs domaines respectifs.

Une coopération de longue date renforcée par la loi du 6 août 2019, relative à la transformation de la fonction publique, et formalisée ce mercredi 15 septembre par la signature d’une convention pour une durée de trois ans. « Une collaboration certes obligatoire, mais surtout voulue et désirée pour mettre en place des actions territoriales locales et ciblées », affirme Ambdilwahedou Soumaïla, le maire de Mamoudzou et le délégué du centre national de la fonction publique territoriale. Une appréciation du goût de son voisin, Youssouf Ambdi, le premier magistrat de Ouangani et le président du centre de gestion de Mayotte. « Aujourd’hui, c’est en toute cohérence que nos deux établissements unissent leurs forces afin d’être lisibles au sein de nos instances délibérantes, mais aussi auprès des différents partenaires institutionnels auxquels nous devons rendre compte de nos actions. »

Six axes prioritaires de travail

Marqué d’une pierre blanche, ce partenariat s’identifie autour de six axes prioritaires : l’organisation et la préparation des concours et examens professionnels ; le développement et la connaissance de l’emploi et des métiers territoriaux ; leur promotion sur le site Emploi territorial et dans le cadre des salons de l’emploi ; l’apprentissage ; l’appui aux collectivités et aux agents en matière d’évolution professionnelle et de reclassement ; le maintien des actions de mutualisation et de rapprochement en faveur des événements à forts enjeux. Illustration sur ce dernier point avec les rencontres interrégionales des DRH des collectivités de Mayotte et de La Réunion prévues les 28 et 29 octobre prochains sur l’île voisine.

Pour résumer, le CDG et le CNFPT travaillent de concert pour l’intégration des fonctionnaires territoriaux et à leur montée en compétences grâce à une offre de formation qui « répond aux grands enjeux et défis de notre département », précise Ambdilwahedou Soumaïla. Et qui se matérialise par un chiffre clé : 5.632 stagiaires accueillis en 2019 dans les 1.652 journées de formation organisées. Au fil des ans, « nous avons mis l’accent sur les compétences métiers des agents du secteur administratif, technique, social et de la sécurité ». Preuve en est avec la formation de plus 200 policiers municipaux, dont une bonne partie au port d’armes.

En ce contexte sanitaire « incertain », « nous devons rêver Mayotte dynamique et attractive. Nous devons rêver Mayotte tournée vers l’avenir », insiste le maire de la ville chef-lieu. En ayant toujours en tête un seul et même objectif : « améliorer la qualité du service public local », conclut Youssouf Ambdi. Reste maintenant à définir un cadre commun pour développer des actions spécifiques et dessiner le territoire de demain.

Violences à Miréréni/Combani : l’enseignement pris en étau

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Depuis plus d’une semaine, les violences entre Miréréni et Combani se retrouvent dans les établissements scolaires. Les personnels éducatifs du collège de Mroualé, dans la commune de Tsingoni, décident donc d’afficher des banderoles de contestation et de ralentir la progression pédagogique pour alerter et faire réagir les autorités locales. Une démarche qui ne passe pas auprès du recteur, Gilles Halbout.

« Notre but est d’alerter et de faire réagir les autorités. L’école est un droit pour tous, peu importe d’où l’on vient. » Au bout du combiné, Céline* ne sait plus sur quel pied danser pour voir revenir « les 10 ou 15 élèves absents dans chaque classe depuis huit jours ». L’enseignante au collège de Mroualé dans la commune de Tsingoni prépare une action coup de poing, avec « le soutien de la moitié du personnel éducatif », à partir de ce mercredi 15 septembre. Au programme : l’affichage de banderoles devant l’établissement scolaire et le ralentissement de la progression pédagogique.

Si Gilles Halbout comprend « l’émotion » et exprime sa « solidarité », le recteur ne cautionne absolument pas la démarche. « Nous n’allons pas pénaliser les élèves des voisins au prétexte que d’autres l’ont été… Ce n’est pas entendable ! C’est le jeu malsain de la revanche et de la punition collective. » En d’autres termes, le responsable de l’académie craint que ce procédé ne rajoute de l’huile sur le feu. « L’appliquer va simplement attiser les rivalités entre les uns et les autres. » À savoir celles qui gangrènent Miréréni et Combani depuis un an maintenant.

Un barrage aux lourdes conséquences

Une tension palpable matérialisée par l’installation d’un check-point filtrant entre les deux villages. Un choix qui s’explique pour une raison simple selon Fatima Ali, une habitante de Combani. « Le barrage tenu par les mamans est une manière d’exprimer leur ras-le-bol pour que les politiques prennent un engagement définitif. Plusieurs médiations entre adultes ont été tentées par le passé, mais aucune n’a fonctionné… » Et tant que la solution miracle n’aura pas été trouvée, pas question de lâcher du lest ! « Nous ne pouvons pas faire comme si de rien n’était. Nous voulons un calendrier d’actions. » Premier élément de réponse avec la mise en œuvre par le préfet de la loi Élan pour la destruction de quartiers informels. Reste encore à la maire de déposer un dossier pour identifier les parcelles concernées.

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Sauf que l’accord des opérations de démolition n’empêche pas les répercussions éducatives de cette frontière imaginaire. « Aucun élève n’a été contraint de rebrousser chemin », assure Fatima Ali. Balivernes pour Céline, qui ne manque pas d’exemples pour contredire cette affirmation. « Ceux à la limite de Miréréni et de Combani mais aussi ceux de Tsingoni ne peuvent pas se rendre dans leurs établissements scolaires. Ce n’est pas la peur qui les empêche, mais les refus intempestifs. » Pis encore : « Deux collègues ont été caillassés parce qu’ils viennent de Vahibé. D’autres qui habitent près de cette zone de guerre sont choqués car ils ne peuvent pas rentrer chez eux tranquillement. »

« Scandaleux ! »

Dans ces conditions, le recteur demande que « les parents irresponsables se prennent en main ». « Tout ce qui empêche les enfants d’aller à l’école est scandaleux ! », persiste et signe Gilles Halbout, agacé par ces blocages incessants aux quatre coins de l’île, à l’instar de celui d’Handréma la semaine dernière. Ainsi, le responsable de l’académie promet « des moyens supplémentaires, quoi qu’il en coûte, pour rattraper le retard accumulé. » En attendant un éventuel retour au calme, les écoliers de Miréréni peuvent déjà bénéficier d’une cellule psychologique depuis vendredi dernier « pour les aider à avancer ». Au vu de leurs dessins (des maisons en feu et des gamins en sang), le mal semble bel et bien profond… « C’est perturbant, vraiment ! », admet-t-il la gorge nouée. Pour ne pas arriver à un tel point de non-retour, les enseignants du collège de Mroualé comptent bien aller au bout de leur initiative, voire même durcir le mouvement en cas de statu quo. « Nous essayons juste de protéger les enfants et d’assurer l’éducation pour tous. »

* le prénom a été modifié

Vaccination obligatoire des soignants à Mayotte : face aux réticences, le CHM joue les prolongations

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Au niveau national, l’obligation de se faire vacciner contre le Covid-19 entre en vigueur ce mercredi 15 septembre. Alors que 88% des personnels ont reçu au moins une dose en France, à Mayotte comme ailleurs, des doutes subsistent dans les rangs de certains professionnels.

C’est le jour J. À partir de ce mercredi 15 septembre, les soignants doivent se plier à l’obligation vaccinale, sauf contre-indication médicale. Plus précisément, comme le dispose la loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise, les personnels des secteurs sanitaire et médico-social peuvent continuer à exercer leurs activités professionnelles s’ils justifient de l’administration d’au moins une dose pour les vaccins à double-injection, sous réserve d’un test négatif toutes les 72h jusqu’à disposer d’un schéma vaccinal complet, dont la date butoire a été fixée au 15 octobre. D’après le dernier bulletin de Santé Publique France, 88% des personnels soignants salariés en établissements de santé faisaient partie de ce premier cas de figure, en date du 7 septembre.

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Problème : à Mayotte, la part des soignants non-vaccinés pourrait bien être un peu plus élevée. “Au CHM, il y a encore quelques réticences, je pense qu’on doit avoir peut-être 30% qui ne sont pas vaccinés”, chiffre à la louche Abdoul-Wassion Arkaddine, représentant syndical Force Ouvrière au centre hospitalier. Contacté, l’hôpital n’a pas de données à communiquer à l’heure où nous écrivons ces lignes. “Ce sont des informations médicales auxquelles nous n’avons pas accès, néanmoins toute personne vaccinée doit faire remonter son certificat au niveau de la médecine du travail, nous en saurons plus à ce moment-là”, nous explique-t-on.

Passe sanitaire ou salaire ?

Selon la loi, les professionnels qui ne pourront pas présenter de preuve vaccinale seront suspendus, sans salaire. “La suspension dure tant que l’agent ne remplit pas les conditions nécessaires à l’exercice de son activité”, précise le ministère des Solidarités et de la Santé. Mais, pédagogie oblige, la règle semble avoir été légèrement adoucie pour les soignants de l’île aux parfums. Ainsi, dès ce mercredi, seront en réalité contrôlés les passes sanitaires, avec les trois options habituelles : soit la vaccination, soit un test antigénique ou PCR de moins de 72h, soit un certificat de rétablissement. Sans l’une de ces trois conditions, le salarié pourra se voir proposer de prendre des congés, ou bien, s’il n’en dispose plus, une suspension de salaire risquera de s’appliquer.

Un dispositif qui fait déjà grincer quelques dents, malgré le laps de temps accordé. “Dès le départ, nous tenions à ce que le vaccin ne soit pas imposé aux personnels à Mayotte, c’est pourquoi nous avons proposé à la direction lors d’une réunion du CHSCT (comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail), un protocole de mise en œuvre du passe sanitaire”, retrace Mouayad Madjidi, le délégué syndical SUD Santé Sociaux au CHM. “Or, ce protocole prévoyait un temps de pédagogie et d’organisation, à savoir deux semaines pour essayer la méthodologie à mettre en place, chose que nous n’avons pas pu faire aujourd’hui”, regrette le syndicaliste. Son organisation avait également demandé le recrutement d’aide-soignants supplémentaires pour contrôler les passes à l’entrée et ne pas “puiser sur des effectifs insuffisants”. Enfin, un suivi des personnes vaccinées devait être assuré par la médecine du travail. “Ceux qui se sont fait vacciner sont ceux qui voulaient voyager. Mais il y a une majorité pour qui ce n’est pas le cas : et ils ne veulent pas recevoir le vaccin, car ils ne connaissent pas leur état de santé.

“J’ai trouvé que c’était du chantage”

Or, dans les couloirs, le bouche-à-oreille va bon train pour rapporter les histoires des collègues ayant développé des effets secondaires après l’injection. “J’ai des témoignages qui font état d’effets récurrents et invalidants pour aller travailler, il y en a qui ont des problèmes musculaires et se fatiguent très vite… Et on ne peut pas les relater car il ne faut surtout pas dire que c’est lié au vaccin !”, s’inquiète ainsi une soignante, qui préfère garder l’anonymat.

Elle n’a pas encore reçu sa première dose. Mais plutôt par conviction que par crainte de symptômes indésirables, insiste-t-elle. “J’étais partie pour me faire vacciner. Mais le jour où le président a déclaré que c’était obligatoire, j’ai trouvé que c’était du chantage. Quand on était positif au Covid, on nous obligeait à aller travailler, parfois avec un seul masque pour toute la journée et maintenant qu’on a des vaccins en grande quantité, c’est obligatoire ?”, s’agace-t-elle. Ce mercredi, pour rejoindre son poste, l’infirmière ira faire un test antigénique. Même si elle sait que la porte se refermera inexorablement. “Personnellement, je suis prête à rester cinq mois sans salaire s’il le faut. Mais si je me retrouve toute seule, je vais devoir jeter les armes. Sans qu’on sache après vers qui se tourner en cas de souci. C’est dommage d’en arriver là”, soupire-t-elle.

“On est très divisés sur le vaccin. Mais si ça peut sauver la vie d’une personne ?”

Il n’a pas pu souffler sur ses cinquante bougies. Frappé par le Covid-19 en début d’année, à la veille de son anniversaire, Abdoul-Wassion Arkaddine tente aujourd’hui de sensibiliser les personnes autour de lui à la vaccination. “Je suis passé à un stade très très complexe dans mon existence, et je me rappellerai de mes cinquante ans pendant plusieurs années”, souffle ce régulateur au bloc opératoire qui a été hospitalisé pendant dix jours en février. “À côté de moi, il y avait ce monsieur qui était allongé sur le ventre, de la même manière que moi. Le temps qu’on m’amène au scanner et de revenir, il était décédé. Cette image m’a choqué”, se remémore-il, encore glacé par ce souvenir. Toujours marqué par les séquelles de cette infection, le soignant n’a pas attendu le 15 septembre pour se faire vacciner. “J’y suis allé dès que j’ai pu, de mon propre chef. Et avant cela, j’ai conseillé à mes parents qui sont âgés de le faire : je leur ai dit ‘‘moi là où je suis passé, c’était pas évident à mon âge, alors imaginez, vous !’’. Maintenant dès que j’ai la possibilité autour de moi, je conseille aux gens, j’ai même accompagné quelqu’un qui avait la phobie, pour qu’elle accepte”, déroule Abdoul-Wassion Arkaddine. Alors que l’obligation vaccinale doit entrer en vigueur pour les soignants, le syndicaliste déplore le climat de doute qui règne encore dans les services. La faute, selon lui, des réseaux sociaux, des vidéos qui circulent et “de toutes ces histoires que les gens ont pris pour argent comptant”. “Les scientifiques expliquent en se basant sur les chiffres, sur des études. Mais le citoyen lambda lui, quand il va expliquer que untel habitait là et qu’il est décédé après son injection, les gens ont plus peur”, analyse-t-il. Signe que ces clivages persistent bel et bien, le débat s’est invité jusque dans les réunions du CHSCT. “Dans les commissions, on est très divisés sur le vaccin. Moi je dis à mes camarades, si vous ne voulez pas vous faire vacciner, ne faites pas de la propagande dans les médias, c’est criminel ! Si ça peut sauver la vie d’une personne ? Même si une personne vaccinée attrape la maladie: si ce n’est pas la forme la plus virulente, c’est tant mieux”, conclut-il.

Les chauffeurs de bus de Mayotte reprennent le volant, sous certaines conditions

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Depuis lundi, les conducteurs de bus refusent de se mettre derrière leurs volants tant qu’ils n’ont pas la garantie d’être en sécurité. Au terme de nouvelles négociations acharnées, la sortie de crise est envisagée, mais sous certaines conditions.

L’heure n’est toujours pas à la rigolade pour les chauffeurs de bus. Après une première réunion ce lundi entre les représentants du personnel, les transporteurs et les élus du Département, bis repetita ce mardi. L’objectif du jour ? Essayer de trouver une sortie de crise pérenne. En vain. Malgré 1h30 de pourparlers, la position des conducteurs reste inchangée, avec le maintien du droit de retrait débuté la veille. Au grand dam de la collectivité qui pensait avoir pourtant trouvé des solutions satisfaisantes pour tous. « Vous ne voulez pas signer, donc vous nous affaiblissez. Nous comprenons votre souffrance, mais nous devons nous appuyer pour aller de l’avant », déclare d’une voix agacée Abdoul Kamardine, conseiller départemental de M’tsamboro. Mais pour les syndicats, il est hors de question d’aller de l’avant sans la certitude d’être en sécurité sur les routes.

Les organisations syndicales regrettent l’absence de l’État autour de la table des négociations ce mardi. Ils souhaitent attendre l’ultime réunion avec la préfecture, prévue ce mercredi, pour prendre une décision définitive. Las d’attendre, les élus du Département décident d’appeler le préfet en direct pour que ce dernier apporte son lot de garanties. Après plus de trois heures de discussion et l’intervention du délégué du gouvernement, les syndicats acceptent finalement de reprendre le travail, à une seule condition : la présence dès l’aube des forces de l’ordre sur les zones sensibles avant le passage des bus. En cas d’absence, les chauffeurs promettent de faire marche arrière…

Comme un air de déjà vu

Commencées ce lundi, les négociations avec les transporteurs et les chauffeurs de bus mettent surtout en lumière une ribambelle d’anciennes mesures. En effet, les élus du Département proposent la mise en place de film anti-caillassage sur les vitres, d’un dispositif de géolocalisation et de caméras de vidéoprotection dans tous les véhicules. Mais aussi le déploiement de 30 médiateurs dans les zones dites à risques, la reprise des parents relais, la révision de plan de transport pour que les élèves de Koungou ne passent pas par Majicavo, une patrouille de sécurité avant chaque mise en service des transports scolaires, matin et soir, ou encore les fouilles systématiques dans les sacs des élèves par les policiers et les gendarmes.

Des mesures déjà inscrites pour la plupart dans le protocole de sortie de crise de novembre 2020. Que la présidente de l’union départementale de la confédération syndicale des familles (UDCSF) n’hésite pas à rappeler. « Tout ce que vous proposez a déjà été dit précédemment et il n’y a pas eu d’engagement. Nous voulons vous faire confiance, mais vous devez mettre en place ces mesures », insiste-t-elle, appuyée par les chauffeurs de bus. Et si certaines d’entre elles sont déjà appliquées, leur efficacité laisse encore à désirer, comme en témoigne Yasmina Mabouroukou, membre du conseil syndical UI-CFDT. « Les bus caillassés vendredi étaient équipés de film anti-caillassage et pourtant, les vitres se sont brisées. » En réalité, les vitres brisées sont celles qui n’ont pas été filmées puisqu’il est interdit de recouvrir l’ensemble des vitres, pour des raisons de sécurité !

« Ce n’est pas la meilleure des solutions, mais nous n’avons pas mieux », prévient le représentant du groupe Matis. Suffisant pour convaincre le 1er vice-président du Département, Salime Mdéré, qui annonce la mise en place « immédiate » de cette mesure urgentissime. Alors que les autres « prendront plus de temps ». Un choix stratégique refusé par la présidente de l’UDCSF et les syndicats qui exigent de la « présence humaine » dans les véhicules pour que les chauffeurs et les élèves affichent davantage de sérénité.

« Trop d’engagements ont été pris »

Les représentants des parents d’élèves, les transporteurs et les conducteurs ont tous l’impression de revivre la même situation. En novembre 2020, les chauffeurs avaient entamé une grève illimitée à la suite d’agressions répétées. La grève de trois jours avait fini par trouver une issue favorable, cosignée par le Département, la préfecture, le rectorat, les transporteurs et les syndicats. Si les professionnels pensaient avoir trouvé des solutions sur le long terme, force est de constater que la situation s’est dégradée quelques mois plus tard… Conséquence : élèves et chauffeurs se sentent de moins en moins en sécurité ! « Le problème c’est que chacun travaille dans son coin et il n’y a pas de suivi », dénonce Anli Djoumoi Siaka, secrétaire général FO Transport logistique UNCP Mayotte.

Les nouveaux élus l’admettent, tout n’a pas pu être mis en place, car « trop d’engagements ont été pris », selon Abdoul Kamardine, le conseiller départemental de M’tsamboro. Pour le groupe Matis, le problème réside ailleurs. « Nous essayons de mettre des gilets par balle à nos enfants et aux chauffeurs alors que nous devrions retirer l’arme aux agresseurs », estime amèrement le représentant de l’entreprise. Et si finalement c’était cela la vraie solution ?

Violences à Miréréni-Combani : « Nous nous demandons si nous vivons en France ou en Afghanistan »

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Depuis un an, les habitants de Miréréni et de Combani ne dorment plus sur leurs deux oreilles et se renvoient constamment la balle face aux actes de violence qui gangrènent les deux villages. Malgré plusieurs tentatives d’apaisement, les pouvoirs publics semblent totalement dépassés par les événements. Au point que la population demande la démission du maire de Tsingoni, Mohamed Bacar.

C’est un énième cri de désespoir que pousse Anziza. « Ce qu’il se passe entre Miréréni et Combani n’est pas un simple fait de délinquance comme on pourrait l’entendre ici et là. » Depuis plus d’un an maintenant, pas un jour ne passe, ou presque, sans que les deux villages ne défraient la chronique. Et que les annonces institutionnelles se multiplient. Mise en place d’un couvre-feu pour interdire la circulation des mineurs la nuit, organisation d’un tournoi de football entre les jeunes pour atténuer les tensions, rencontres d’apaisement et de médiation chez le doyen Rama, à la Maison France Service (pas plus tard que vendredi), à la MJC de Miréréni ou encore à l’école primaire… En vain ! Aucune proposition concrète n’apporte de solutions durables face aux barrages intempestifs et aux actes de violence devenus monnaie courante.

Interrogé sur cette situation inqualifiable, le maire de Tsingoni, Mohamed Bacar, adresse un simple copier-coller de son message posté sur les réseaux sociaux dimanche matin. « La municipalité que je conduis a tout fait pour ramener le calme et la raison, mais ces délinquants ont refusé. […] Nous savons que des adultes, d’un côté comme de l’autre, prennent part à ces conflits et [les] considèrent comme des héros. Ces personnes leur apportent assistance et matériel. » Malgré l’instauration, sur ordre du préfet Thierry Suquet, le 6 septembre dernier, d’un dispositif de sécurité avec la gendarmerie nationale qui a pour objectif d’éviter les drames et d’intervenir rapidement en cas de troubles à l’ordre public, les incivilités continuent encore et encore. « Samedi, ils sont allés exprès à Kahani pour cramer les camions d’un entrepreneur du BTP qui vit à Miréréni », témoigne, sidéré, un habitant qui souhaite garder son anonymat pour des raisons évidentes.

« Le mépris institutionnalisé »

Pis encore, pour traverser Combani, il faut tout simplement présenter sa carte d’identité, sous l’œil des forces de l’ordre. Et en cas de refus ? C’est la fouille du véhicule… Pour s’assurer que des élèves ne se cachent pas dans l’habitacle. « Nous nous demandons si nous vivons en France ou en Afghanistan », s’interroge Anziza. Avant de dénoncer « le mépris institutionnalisé qui règne dans cette commune depuis toujours ». À ses yeux, la population de Miréréni se retrouve paralysée et asphyxiée dans l’optique de maintenir un semblant de vie économique de l’autre côté du pont. « J’ai toujours cru que les gendarmes étaient là pour faire régner l’ordre public, la libre circulation des personnes. Est-ce un mauvais rêve ou un cauchemar ? Je travaille, je paie mes impôts locaux et nationaux pour accepter ça ? Je tiens juste à leur rappeler qu’ils citaient nos jeunes en exemple il y a de cela un an. Aujourd’hui, ils les traitent comme des criminels et des assaillants. »

En guise de bonne foi, Mohamed Bacar assure à nouveau avoir transmis en décembre 2020 la liste des fauteurs de troubles, des marchands de sommeil, et autres financeurs de cette délinquance, au procureur de la République, comme il l’avait fait remarquer en avril dernier. Mais visiblement, le tour de force n’a pas eu l’effet escompté. « Des gens payent des sommes considérables pour faire venir des jeunes de l’extérieur de la commune et semer la terreur », se révolte encore le citoyen. Face à ces constats répétés, une pétition circule depuis quelques heures sur la toile pour exiger la démission de la majorité et de l’opposition du conseil municipal. Une revendication appuyée par le Collectif Mayotte en Sousfrance. « Nous ne lâcherons pas, la liberté, la dignité et le respect sont des droits fondamentaux pour tout être humain. Nous vivons dans le pays de la déclaration des droits de l’Homme. Le temps où les Combaniens pouvaient venir foutre le bordel chez nous est révolu », prévient Anziza, prête à défendre l’honneur de son village, « quoi qu’il en coûte ». Pendant ce temps, les représentants de l’État dénoncent. Encore et toujours…

Dix jeunes mahorais s’envolent pour être formés en tant que steward et hôtesse de l’air

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Ils sont dix. Huit filles et deux garçons mahorais sélectionnés par Ewa Air ont l’opportunité de se former en tant que steward et hôtesse de l’air. Une formation totalement prise en charge par la compagnie aérienne et ses partenaires, le conseil départemental, Pôle emploi, LADOM et ACTO. Les stagiaires ont décollé le dimanche 12 septembre pour une formation intensive de deux mois en région parisienne.

Habillés en rouge et noir avec un foulard « ylang-ylang » pour rappeler les couleurs de Mayotte, les stagiaires sélectionnés par Ewa Air, huit filles et deux garçons, ont décollé dimanche dernier pour Paris. Ils sont partis se former en tant que personnel navigant commercial au centre interlines des Guyards, près d’Orly en région parisienne. Si le projet a été rendu possible, c’est notamment grâce à Ewa Air et ses partenaires qui prennent en charge la totalité de la formation, ainsi que les charges annexes telles que l’hébergement ou encore le transport. « Nous voulons que toutes les chances soient de votre côté, que vous n’ayez aucun souci et que vous puissiez vous concentrer sur votre formation », a expliqué Daoud Saindou-Malidé, le sixième vice-président du conseil départemental chargé de la formation professionnelle, de l’éducation et de l’insertion.

À la clé, ils peuvent décrocher le certificat de membre d’équipage de cabine, appelé « Cabin Crew Attestation » (CCA). Il permettra aux diplômés d’exercer en tant qu’hôtesse de l’air ou steward dans n’importe quelle compagnie nationale et internationale. Mais pour l’avoir, les dix Mahorais devront se soumettre à deux mois de formation intensive, à l’issue desquels deux examens théoriques et pratiques valideront ou pas l’obtention du diplôme. Il s’agit là d’une « formation de qualité », a rappelé Ayub Ingar, le directeur d’Ewa Air. Et les places sont chers. Au départ, 25 candidats ont postulé, ils ont été soumis à un test de culture générale puis ensuite, à une phase d’entretien. Dix ont réussi à passer cette étape cruciale. « C’est l’entretien qui a été déterminant, car nous avons vu la motivation de ces jeunes… Ceux sélectionnés ont un très bon niveau, mais je ne suis pas étonné, cela prouve qu’à Mayotte il y a de la compétence », a indiqué le directeur de la compagnie aérienne.

Obligation de réussir

Les heureux élus ont écouté attentivement les discours des différents partenaires, et désormais ils savent qu’ils n’ont pas le droit d’échouer. « Il faut que nous ayons 100% de réussite, nous attendons de vous que vous réussissiez », leur a lancé le vice-président du conseil départemental. « Vous avez intérêt à revenir avec le fameux sésame en poche ! », a surenchéri Ayub Ingar. Malgré la pression, les principaux concernés ont commencé cette nouvelle aventure l’esprit serein. « J’estime que j’ai déjà obtenu la formation. J’ai juste hâte de voler de mes propres ailes », a assuré Hafdhoiti, l’une des stagiaires. Cette dernière est partie confiante puisqu’il s’agit pour elle d’un projet de longue date. « Cela fait déjà très longtemps que j’ai envie de faire cette formation. Il y a quatre mois, j’ai demandé des aides à LADOM pour pouvoir financer la formation, mais ça n’a pas abouti », a-t-elle indiqué. Alors lorsqu’Ewa Air a lancé sa campagne de recrutement, la jeune femme de 25 ans a sauté sur l’occasion. Elle n’est pas la seule à être aussi déterminée. L’un de ses camarades, Yacoub, a réalisé un rêve d’enfant. « C’est un métier que j’ai toujours voulu faire depuis que j’ai neuf ans. J’aime le fait de beaucoup voyager, de découvrir de nouvelles personnes, de nouveaux horizons et de nouvelles cultures. Je suis prêt, en réalité je suis prêt depuis très longtemps », a affirmé le jeune homme de 21 ans.

Tous sont particulièrement motivés, car ils savent que le diplôme qu’ils obtiendront leur garantira un emploi au sein d’Ewa Air. Le directeur de la compagnie a promis d’embaucher tous ceux qui réussiront les examens. Une décision qui s’inscrit dans sa politique de recrutement puisque son personnel navigant est 100% mahorais. Mais Ayub Ingar veut aller encore plus loin. « Il y a une multitude de métiers dans l’aérien. À Mayotte, la population est jeune, c’est un bon réservoir, il faut juste qu’ils aient confiance en eux. Nous pouvons former des pilotes, des mécaniciens, etc. Et les filles aussi peuvent faire ces métiers », a-t-il insisté. Mais pour l’heure, Ewa Air et ses partenaires restent concentrés sur ces dix jeunes en formation qui doivent prouver qu’ils sont les meilleurs en relevant le challenge.

Encore caillassés, les chauffeurs de bus de Mayotte exercent à nouveau leur droit de retrait

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Depuis ce lundi 13 septembre 2021, les transporteurs de Mayotte exercent leur droit de retrait pour mise en danger des agents. En cause : les caillassages à répétition des véhicules qui surviennent aussi bien la semaine que les week-ends. Une réunion d’urgence s’est tenue au conseil départemental le jour-même pour tenter de trouver des solutions pérennes à ce problème récurrent.

caillasses-chauffeurs-bus-mayotte-exercent-droit-retraitEn première ligne, les chauffeurs de bus mahorais subissent de plein fouet l’insécurité. “Nous sommes la cible de tous les affrontements. Tout le monde connaît le problème des caillassages à Mayotte et nous payons le prix fort. Je ne sais pas quelle est la solution à ce phénomène, mais pour le bien de tous, il faut que cela cesse”, explique Abdallah* qui n’a pas sa langue dans poche. Dimanche encore, alors qu’il ramène des jeunes footballeurs à leur domicile après un match à M’Tsapéré, ce chauffeur de bus se retrouve une fois de plus victime de caillassages. “Des jeunes ont lancé des pierres et c’est loin d’être la première fois que cela m’arrive”, affirme-t-il, exaspéré par cette situation. En effet, le chauffeur de bus avait déjà subi des faits similaires lors d’échauffourées à Cavani. Malgré un nouveau dépôt de plainte à Sada ce lundi, il redoute de reprendre la route. “Les agressions se multiplient, mais je n’ai pas le choix que d’aller travailler si je veux remplir le frigo”, se désole-t-il.

L’UI CFDT aux côtés des transporteurs

Des faits qui se multiplient ces derniers temps, après une rentrée scolaire relativement calme. Exemple vendredi dernier, lorsque des assaillants prennent en otage quatre bus avec 194 élèves à leur bord. Un événement traumatisant pour les chauffeurs comme pour les écoliers. “Cela fait des mois, voire des années que ça ne va plus« , s’agace Yasmina Mabouroukou, membre du conseil syndical UI CFDT, avant d’ajouter : “Les caillassages portent préjudice à tous les usagers de la route. Cet état de non droit n’est plus possible.” Des incivilités qui ont un coût financier non négligeable pour les entreprises de transports mais aussi un coût psychologique et parfois physique pour les conducteurs et les passagers.

Chaque matin, Abdallah* part travailler la peur au ventre. “On ne se sent plus en sécurité”, tempête le chauffeur de transport scolaire. Un sentiment partagé par la syndicaliste. “Nous sommes tous des parents et aujourd’hui, nous nous demandons si nos enfants vont arriver [vivants] à l’école, c’est insupportable. » L’union départementale des associations familiales alerte également par la voix de son président, Ali Nizary, sur les violences répétitives de ces derniers jours à Mayotte. Dans un courrier adressé aux autorités, il dénonce notamment le “mode opératoire” récurrent employé par “les voyous qui ciblent particulièrement les transports scolaires et les automobilistes”.

Suspension du ramassage ce mardi

Face à ce sentiment général d’insécurité, les transporteurs exercent à nouveau leur droit de retrait depuis ce lundi. Réponse du conseil départemental avec une réunion d’urgence pour apporter des solutions concrètes aux transporteurs. D’un commun accord et au regard de la gravité des violences observées, il a été décidé de suspendre les transports scolaires ce mardi 14 septembre. Des mesures concertées seront annoncées très rapidement après la signature d’un protocole d’accord. Reste à savoir si elles seront à la hauteur des espérances des principaux concernés…

* nom modifié

Université de l’innovation sociale : les CCAS de Mayotte passent en mode startup

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Pendant deux jours, les 17 centres communaux d’action sociale et l’union départementale des CCAS travaillent à imaginer des solutions nouvelles pour améliorer leurs actions en faveur de l’insertion et de la lutte contre la pauvreté. Un pas de plus dans la jeune histoire de ces organismes communaux, devenus des acteurs incontournables sur un territoire en proie à une pauvreté insoutenable.

Bonjour Mme Bareigts ! Merci d’être venue ! Vous avez fait la photo ?” La voix amplifiée de la modératrice qui fait ses derniers tests de micro retentit avec force dans la grande salle prêtée par la mairie de Dzaoudzi-Labattoir. “Teambuilding” oblige, l’ancienne ministre des Outre-mer n’échappe pas à l’incontournable photocall, et son visage flotte au milieu du lagon, à côté de celui de la conseillère départementale Maynoumati Moussa Ahamadi. Comme elles, élus et partenaires prennent tour à tour la pose devant les caméras instantanées, avant de se presser autour de la carte de Mayotte pour y scotcher fièrement leur polaroïd.

Une belle entrée en matière pour cette “Université de l’innovation sociale”, qui ouvrait ses portes ce lundi en Petite-Terre. Pendant deux jours, élus, membres et partenaires des 17 centres communaux d’action sociale (CCAS) et de l’union départementale des CCAS de Mayotte sont amenés à réfléchir à des projets cohérents avec les enjeux locaux, dans le cadre de “Design’Palas”, un programme de “formations-actions” pour professionnaliser les acteurs de l’action sociale. Financé par lunion nationale des CCAS et L’Europe s’engage avec le fonds social européen – pour une enveloppe globale de près d’1.9 million d’euros -, ce projet qui s’étale sur trois ans (2020-2022), fait suite à Pass’Palas, premier dispositif “sur mesure” déployé à Mayotte par l’Unccas en 2017.

Le design thinking appliqué au social

Le mot d’ordre pour ces deux jours intensifs : l’expérimentation. “Il n’y a pas d’innovation sans expérimentation”, a ainsi noté Ericka Bareigts, aujourd’hui maire de la ville de Saint-Denis à La Réunion et vice-présidente de l’Unccas. L’ancienne députée reprenait alors les propos introductifs de l’adjoint au maire de Dzaoudzi-Labattoir en charge de l’administration générale. “Il faut multiplier les audaces intellectuelles et les expérimentations, en acceptant de rechercher les questions, en acceptant aussi de ne pas trouver tout de suite les réponses, enfin en évaluant les réponses, testées sur le terrain”, a expliqué Mikidache Houmadi pour poser les bases de l’état d’esprit à insuffler dans les CCAS. Une méthodologie qui a un nom, d’ailleurs bien connu chez les startupers les plus chevronnés : le design. “Il ne s’agit pas d’un mot pour qualifier un objet, ou quelque chose de moderne, mais c’est la conception ; en shimaoré, on dit ‘‘bango’’, comme la posture qui prend en compte les problématiques, non pas par rapport à nos perceptions, mais par rapport à celles des usagers, et à leur parcours”, a-t-il développé.

La jeune professionnalisation des CCAS

À l’occasion du lancement de cette “université”, l’heure était aussi au bilan pour les jeunes CCAS de Mayotte. “Nous sommes venus en 2009, et quand nous sommes repartis à l’aéroport avec le président Patrick Kanner, nous étions à la fois fiers d’être Français face à ce territoire qui porte les valeurs de la République et moins fiers d’être Français car c’est un territoire qui a été très délaissé. Et nous nous sommes jurés de ne pas lâcher Mayotte”, a rappelé Benoît Calmels, le délégué général de l’Unccas. Depuis ce moment,17 CCAS ont été créés sur l’île aux parfums, un pour chaque commune, avec le soutien de l’union nationale. Un maillage indispensable pour le territoire le plus pauvre de France, où 77% de la population vit sous le seuil de pauvreté contre 14% en métropole, comme l’a souligné la conseillère Maynoumati Moussa Ahamadi.

Toujours à la Une de l’actualité, la question de l’insécurité a aussi naturellement fait irruption dans les discours, Said Salim, le président de l’Unccas rappelant ainsi que “chacun a un rôle à jouer”. “Nous rencontrons beaucoup de difficultés sur le terrain qui nous poussent à nous réinventer […]. Il faut trouver des moyens plus précis pour donner un avenir à ces jeunes-là. L’innovation sociale fait partie de ces moyens.” Place maintenant aux ateliers… pour penser en dehors de la boîte !

Consultation sur l’avenir de l’Europe : les Mahorais appelés à donner leur avis

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830 citoyens français tirés au sort ont été sollicités par le gouvernement pour participer à la première édition de la consultation européenne sur l’avenir de l’Europe. Si les vingt-sept États membres y ont participé de manières différentes, la France a fait le choix de la consultation citoyenne. Les dix-huit régions de la métropole et de l’Outre-mer ont eu trois jours, de vendredi à dimanche, pour émettre leurs idées. Mayotte n’est pas en reste : trente citoyens ont répondu à l’appel ce week-end pour échanger. Et leurs préoccupations reflètent le quotidien des habitants de l’île.

« En tant que citoyen français, quels changements souhaitez-vous pour l’Europe ? » C’est la question ouverte posée aux 830 Français ayant accepté de participer à la consultation européenne. Réunis au rectorat durant trois jours, les trente participants mahorais ont pu débattre sur les sujets de leur choix mais aussi émettre des suggestions et des critiques. « C’est la première fois que nous faisons exprimer les citoyens sur les questions de l’avenir de l’Europe. Habituellement, ce genre d’exercice est fait par des spécialistes », a souligné Yves-Marie Renaud, le secrétaire général pour les affaires régionales, entouré d’un groupe de trois animateurs professionnels.

consultation-avenir-europe-mahorais-appeles-donner-avisDans les dix-huit régions de France, les citoyens ont donné leur ressenti sur l’Europe de demain ainsi que sur les manques actuels. Retranscrites, toutes les propositions seront par la suite transmises au gouvernement qui, à son tour, les partagera aux instances européennes. « À partir de [celles-ci], ils verront de quelle manière nous pouvons formuler des textes de loi, des normes européennes, qui façonneront l’Europe dans les années à venir », a détaillé le haut fonctionnaire, membre du corps préfectoral. Les sujets évoqués devront également nourrir l’agenda de la présidence française à l’Union européenne. Un mandat qui n’a lieu que tous les quinze ans et qui commencera le 1er janvier prochain pour une durée de six mois.

Les Mahorais partagés entre fierté et l’envie de plus

La question posée aux citoyens a laissé libre court à tout genre de débat. Avant de parler des grandes problématiques européennes, les Mahorais choisis, représentatifs des habitants de l’île, se sont focalisés sur les besoins concrets de Mayotte. « On me dit que nous vivons dans l’Europe mais sans les avantages. Ce serait bien de pouvoir voir les fruits de l’Europe », a déclaré l’un des participants. Si Mayotte est devenue une région ultrapériphérique de l’Union européenne en 2014, les lois européennes seraient trop éloignées de la réalité mahoraise, notamment en matière d’immigration, selon les principaux retours. « Nous le savons, l’Europe est une terre d’asile, mais à Mayotte, nous ne pouvons pas accueillir tout le monde. Ces lois européennes imposent des choses qui limitent les capacités de développement du territoire », a indiqué pour sa part Keisler. Le développement de l’île était de ce fait la principale préoccupation des Mahorais.

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Le sujet est revenu sur toutes les tables de discussions sous différentes formes. « Il y a un manque d’investissement dans les infrastructures, comme les hôpitaux ou les écoles. L’Europe a mal évalué les besoins de Mayotte », a poursuivi le jeune homme. « La loi dit qu’il faut punir les délinquants mineurs, mais chez nous, nous n’avons pas les infrastructures pour cela », déplore une autre citoyenne. Du haut de ses 18 ans, Kaldia a rapidement réalisé qu’être Européen à Mayotte consiste à ne pas avoir les mêmes droits que les autres jeunes des États membres. « À Mayotte, je ne sens pas vraiment la présence de l’Europe parce que j’ai des amis qui sont sans formation, ni travail… Ils ne peuvent pas s’insérer. »

Mais les Mahorais sont également conscients des nombreux avantages que peut apporter l’Union européenne. « Pas mal de choses ont changé à Mayotte depuis que nous sommes dans l’Europe. Le territoire a rapidement évolué », a noté Saoudati, une autre citoyenne. En d’autres termes, le changement de statut du territoire en RUP aurait permis d’accélérer son développement. « Nous pouvons par exemple voir de nombreuses constructions financées par l’Europe. Les entreprises ont aussi des avantages car elles reçoivent de plus en plus d’aides européennes », a constaté Saoudati. Infrastructures, immigration, développement économique… Autant de sujets qui ont été relevés lors des débats. Six Mahorais ont été tirés au sort pour les exposer à Paris lors de la synthèse de l’ensemble des travaux durant la deuxième quinzaine du mois d’octobre.

Les mangroves mahoraises à l’honneur au congrès mondial de la nature de l’UICN

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Du 3 au 11 septembre 2021 avait lieu le congrès mondial de la nature de l’Union internationale pour la conservation de la nature à Marseille. L’occasion pour une délégation de Mahorais de mettre en avant les initiatives locales et de rencontrer leurs homologues venus du monde entier.

Huit jours, plus de 1.000 participants, plus de 1.300 sessions interactives et plus de 160 pays représentés… Voilà ce que promettait l’édition 2021 du congrès mondial de la nature de l’UICN. Un événement destiné à réunir les acteurs environnementaux à l’échelle planétaire afin de définir les priorités et guider les actions de conservation et de développement durable.

Venu tout droit de l’île au parfum, Manrifa Moustoifa Ali est revenu avec enthousiasme sur les découvertes et les rencontres que les membres de l’Union internationale pour la conservation de la nature à Mayotte ont pu faire lors de ce rendez-vous 2021. “Cet événement était très enrichissant, car nous avons vu ce qui se fait ailleurs en matière de protection de l’environnement. En ce qui concerne les tortues par exemple, à la Martinique la sensibilisation passe par le domaine artistique. Cela nous a donné des idées et nous allons réfléchir à mettre en place des ateliers similaires”, s’extasie-t-il.

Mayotte comme modèle

Directeur de l’association mangrove environnement (AME) à Tsimkoura, Boina Said a quant à lui présenté sa structure et son modèle économique innovant au congrès. “Mon objectif est de protéger la mangrove, mais pour ne pas dépendre uniquement de subventions, nous avons décidé de créer une base de kayak qui emmène petits et grands à la découverte des mangroves”, explique-t-il. Un projet qui a fait grande impression et qui montre que l’agrotourisme a toute sa place à Mayotte. Avec une équipe de cinq employés, composée de moniteurs de kayaks et gardiens de la biodiversité, Boina Said espère redonner à la mangrove de son village natal sa vitalité d’antan. “Quand j’étais petit, la mangrove était immense. Puis je suis parti vivre à la Réunion et en métropole… Et lorsque je suis rentré, j’ai été choqué par l’état de la mangrove. J’ai alors décidé d’agir”, confie le directeur. Modeste, le Mahorais confie avoir été étonné que des îles comme la Guadeloupe ou la Martinique ne possèdent pas de structure comme la sienne. “Je suis heureux de voir que nous ne sommes pas les derniers et que mon modèle puisse inspirer d’autres personnes”, affirme-t-il.

Des ambassadeurs du lagon

Formé depuis quelques mois seulement, Toihir Ali-Mari, ambassadeur du lagon pour l’UICN dans la commune de Mangajou, a également pu intervenir lors du congrès mondial de la nature. “Je me sens concerné par tout ce qu’il se passe au niveau du lagon. Dans mon village, nous subissons l’érosion liée notamment à la disparition de la mangrove. À mon échelle, j’ai pu malheureusement voir ce changement”, s’attriste le pêcheur, qui se désole de l’appauvrissement des ressources halieutiques à cause de la disparition de l’habitat des poissons mais aussi d’une pêche moins respectueuse de l’environnement. “Avant, les gens pêchait pour se nourrir et non pas pour devenir riche. Les méthodes de pêche de nos grands-parents n’avaient pas l’impact négatif sur le lagon qu’ont celles qui ont été importées.” Prochainement, Toihir Ali-Mari prendra ses fonctions de médiateurs au sein de sa commune afin de faire de la prévention auprès de la population. Grâce à son nouveau rôle, il espère ainsi participer à la préservation des ressources naturelles de Mangajou et plus largement sur l’ensemble du 101ème département.

Avec son DEUST BTP, le conservatoire national des arts et métiers forme les bâtisseurs de demain à Mayotte

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Ce samedi, le conservatoire national des arts et métiers (CNAM) de Mayotte organisait sa pré-rentrée avec l’ouverture du diplôme d’études universitaires scientifiques et techniques, spécialité conduite de travaux en éco-construction parcours BTP. En alternance, cette formation supérieure a pour objectif de faire émerger en deux ans les futurs bâtisseurs du territoire.

Répondre à une demande économique par une offre de formation supérieure adéquate, c’est désormais une réalité avec le lancement du diplôme d’études universitaires scientifiques et techniques, spécialité conduite de travaux en éco-construction parcours BTP, par le conservatoire national des arts et métiers (CNAM) de Mayotte. Un parcours professionnel qui vise à former « des techniciens supérieurs », « la future élite du territoire », dans le domaine du bâtiment et des travaux publics à Mayotte, où « la réalisation de grandes infrastructures est un enjeu des années à venir », rappelle Daoud Saindou-Malidé, en charge de la formation professionnelle, de l’éducation et de l’insertion au conseil départemental. Exemple avec les chantiers quotidiens qui fleurissent aux quatre coins de l’île ou encore le projet d’accueil des Jeux des îles en 2027.

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D’une durée de deux ans, cette alternance permet « d’être tout de suite dans le métier d’apprentis », se réjouit Philippe Lefèbvre, le délégué académique à la formation initiale et professionnelle. Et surtout d’« éviter une dichotomie » entre les besoins du monde de l’entreprise et les bâtisseurs de demain, insiste Enfanne Haffidhou. Pour le directeur général adjoint du pôle développement économique et attractivité au sein de la collectivité, il apparaît essentiel d’« intégrer » et de « lier structurellement » l’économie et la formation dans le but que le territoire soit « plus opérationnel et réactif ». En clair, l’objectif affiché consiste à ne plus subir l’importation de main d’œuvre formée, en apportant localement les compétences scientifiques, techniques et organisationnelles nécessaires.

Navigation entre trois sites

Et c’est là tout l’enjeu du CNAM, qui a récemment signé une convention de partenariat avec le rectorat pour travailler avec le GRETA-CFA. Ainsi, les 17 étudiants vont naviguer entre le conservatoire national des arts et métiers, le lycée Bamana pour les cours d’informatique et le centre de formation en apprentissage, comme l’explique le responsable de l’académie, Gilles Halbout. Très heureux de cette « collaboration entre de nombreux acteurs ». En attendant que d’autres BTS voient le jour dans l’enceinte du lycée des métiers du bâtiment de Longoni, dont la livraison de la première tranche est prévue en 2024. « Ce n’est que le début ! », promet-il.

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Car l’ouverture de ce DEUST fait avant tout la part belle à la stratégie de formation défendue par la collectivité dans le but d’exploiter tous les secteurs d’activités présents sur l’île. « Le Département a fixé le seuil de 500 apprentis en 2021 : nous l’avons atteint », se félicite Philippe Lefèbvre. « Nous avons noté une progression de 200% en l’espace de quelques années », renchérit même le recteur. Face à cette nouvelle promotion, la directrice du CNAM, Anfufati Bacar, n’a qu’une hâte : entrer dans le vif du sujet pour faire de ses protégés du jour les conducteurs de travaux d’une filière du BTP « porteuse d’emploi ».

À Mayotte, 59% de la population souffre d’illettrisme ou d’analphabétisme

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À l’occasion de la 8ème édition des journées nationales d’action contre l’illettrisme, la plateforme partenariale de lutte contre l’illettrisme – GIP Carif-Oref a organisé un temps d’échange ce jeudi 9 septembre à la cité des métiers de Koungou pour sensibiliser et rassembler les acteurs de la prévention, mais aussi pour mettre en lumière les solutions existantes.

« Je peux mener une conversation en français. » Du haut de ses 20 ans, Taenlim fait la fierté de la plateforme partenariale de lutte contre l’illettrisme et l’analphabétisme, au moment de partager son parcours de vie face à une ribambelle d’institutionnels. Un témoignage d’autant plus symbolique que la maîtrise de la lecture, de l’écriture, du calcul et des compétences fait encore plus défaut à Mayotte qu’ailleurs… « 59% de la population souffre d’illettrisme ou d’analphabétisme, un pourcentage sans équivalent sur le reste du territoire national », précise Jérôme Millet, le secrétaire général de la préfecture. « Nous héritons d’une situation très compliquée, mais les pouvoirs publics et la société mahoraise essaient d’endiguer et de prendre à bras le corps ce sujet. »

Car oui, le 101ème département accumule ce que l’on peut appeler « les freins à l’émancipation », comme le souligne Louhenvelle Leroux Delalande, conseillère municipale à la ville de Koungou et enseignante en section d’enseignement général et professionnel adapté (Segpa) au collège de Majicavo. Ces freins se caractérisent notamment par un seuil de pauvreté de l’ordre de 77% mais aussi et surtout par des conditions de vie dans des habitats informels, dans lesquels « la transmission [des savoirs] dans les familles [y] est compliquée », ajoute le sous-préfet. Deux éléments qui contraignent l’employabilité et de facto le développement économique de l’île aux parfums, caractérisée par sa jeunesse.

« Les jeunes sont la richesse de Mayotte »

Tous les acteurs réunis ce jeudi 9 septembre à la cité des métiers de Koungou sont unanimes sur cette problématique. L’avenir de Mayotte passe par l’intérêt accordé à ces jeunes, qui « sont [notre] richesse pour peu que nous les accompagnons », déroule le 6ème vice-président du conseil départemental, Daoud Saindou-Malidé, en charge de la formation professionnelle, de l’éducation et de l’insertion, qui les invite à oser réaliser leurs rêves et à se rapprocher des structures compétentes pour mener à bien leurs projets. Et cela passe aussi par la formation des parents pour qu’ils puissent suivre correctement la scolarité de leurs progénitures. « Quand ma fille était au CP, elle avait mis en place une stratégie de mémorisation. Il faut faire attention à nos enfants qui peuvent être en situation d’illettrisme tout en étant de très bons lecteurs », met en garde l’élu au détour de cette confidence.

Toutefois des structures existent pour enrayer ce fléau, à l’instar la ligue de l’enseignement qui propose des ateliers de lecture au sein des établissements scolaires et dans les espaces publics et des formations de bénévoles pour encadrer des groupes en difficulté. Ou encore la mission locale qui est en capacité de mieux orienter ses bénéficiaires d’action d’insertion grâce à un outil d’identification des situations d’illettrisme. « C’est un travail de longue haleine qui n’est pas facile et qui ne se repose pas sur une seule entité… Tout le monde doit travailler dans la même direction », martèle Youssouf Moussa, le directeur du groupement d’intérêt public Carif-Oref (centre d’animation des ressources et d’information à la formation – observatoire régional de l’emploi et de la formation). Sachant « l’ampleur de la tâche », la plateforme partenariale de lutte contre l’illettrisme et l’analphabétisme, qui « apporte un concours capital pour les acteurs », selon Hervé Fernandez, le directeur général de l’agence national de lutte contre l’illettrisme, peut compter sur la venue prochaine d’un chargé de mission, soutenu par le ministère du Travail, pour organiser les initiatives et partager les informations.

De bon augure pour Louhenvelle Leroux Delalande, qui souhaite que « la détection de l’illettrisme soit de plus en plus précoce ». Dans le but de permettre à cette frange de la population de vivre pleinement en autonomie. À l’image de Taenlim. « Je ne pouvais pas rester à la maison sans rien faire, il fallait que je construise ma vie. » Une belle victoire qui doit donner envie aux autres de suivre ce chemin du renouveau !

Docteure en pharmacie : le parcours de Limouandjilati Ymamou donne de l’espoir à Mayotte

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À 26 ans, Limouandjilati Ymamou vient d’obtenir son doctorat en pharmacie. Le parcours n’a pas été de tout repos pour cette jeune mahoraise originaire d’Acoua. Livrée à elle-même dans un monde qu’elle ne connaissait pas, la jeune femme a dû faire preuve de détermination pour réussir à gravir les échelons. Elle veut désormais être utile à son île.

« Limou est une personne ambitieuse et très exigeante avec elle même ! » C’est en ces mots qu’Assou Ymamou décrit sa petite sœur Limouandjilati Ymamou. Cette dernière a passé sa soutenance de doctorat en pharmacie et a relevé le défi avec brio. Elle fait la fierté de toute sa famille. « Je suis très heureuse pour mon enfant. Je l’ai laissée partir tôt en métropole pour faire ses études et je suis heureuse qu’elle revienne avec le diplôme qu’elle voulait », ajoute Haffissoi, la maman. Mais le parcours universitaire de sa fille n’a pas été de tout repos.

docteure-pharmacie-parcours-limouandjilati-ymamou-espoir-mayotteÉlève studieuse à la Cité du nord, elle obtient son baccalauréat scientifique avec la mention bien. Elle se sent alors prête à entamer des études de santé pour devenir médecin. Mais une fois arrivée à l’université de Besançon, rien ne se passe comme prévu. « La première année a été très difficile. Je me suis sentie différente, parce que je suis arrivée dans une ville où je ne connaissais personne. Je devais tout faire toute seule et les démarches administratives empêchent de se concentrer pleinement dans les cours », raconte Limouandjilati. Elle doit alors s’habituer à sa nouvelle vie loin de sa famille, et se confronter à la dure réalité des études supérieures. « Il y a un système de sélection et les étudiants font tout pour te déstabiliser. De plus, le travail exigé à la fac n’est pas le même qu’à Mayotte. J’ai donc raté ma première année », continue la jeune diplômée. Déçue, elle songe un instant à abandonner, mais elle se raisonne rapidement et réussit un an plus tard le concours de PACES, exigé pour passer en deuxième année.

Mais patatras. À ce moment-là, l’étudiante qui voulait être médecin se retrouve face à une autre impasse… « Je n’étais pas admissible en médecin, car j’étais loin dans le classement, mais je pouvais aller en pharmacie. » Ne voulant pas perdre une autre année, Limouandjilati décide de se réorienter. Une décision qu’elle ne regrette pas aujourd’hui. « J’ai bien fait de ne pas être allée en médecin, parce que j’avais fait un tour à l’hôpital et je me suis rendue compte que je ne supporte pas le sang », rit-elle aujourd’hui.

« Les étudiants mahorais ont besoin de plus de préparation »

docteure-pharmacie-parcours-limouandjilati-ymamou-espoir-mayotteAprès avoir pris ses repères dans sa nouvelle vie, Limouandjilati se dévoue corps et âme à ses études. Elle valide chaque année et se spécialise en pharmacie d’officine. Elle a deux ans pour passer son doctorat, mais pressée d’en finir, elle décide de le passer en un an. « C’est beaucoup d’heures de travail. En journée, je travaillais à la pharmacie pour me faire de l’expérience et le soir, je me penchais sur ma thèse », se souvient-elle. Acharnée, elle passe sa soutenance, il y a de cela une semaine, et valide son diplôme. Mais elle n’oublie pas les moments de doutes rythmés par ses études. Un phénomène qui touche la plupart des étudiants, notamment ceux en provenance de Mayotte… « Les étudiants mahorais ont besoin de plus de préparation avant d’aller en métropole. Quand on arrive à la fac, c’est très difficile ! Beaucoup ratent leur première année ,mais il ne faut pas voir cela comme un échec. C’est plutôt une année d’adaptation pour voir comment les choses fonctionnent », confie-t-elle comme pour donner un peu d’espoir aux étudiants mahorais. Limouandjilati veut faire de son cas un exemple pour tous ceux qui vivront la même chose qu’elle. Sa réussite, elle la doit à son travail, à sa détermination et à rien d’autre. « Certains pensent que j’ai réussi parce que je viens d‘une grande famille, mais ce n’est pas du tout le cas. Ma mère et mon père n’ont jamais eu l’occasion de faire des études, et je viens d’une famille modeste. Mes parents ne pouvaient même pas me payer la prépa que tous les autres faisaient en première année. Ce sont les bourses qui m’ont maintenue jusqu’au bout », rappelle-t-elle. « Je suis fière d’elle et de toutes mes petites sœurs car elles cassent les préjugés que l’on peut avoir sur les familles nombreuses à Mayotte et sur les ambitions des femmes mahoraises », ajoute sa grande sœur.

Se rendre utile à son île

La docteure en pharmacie pense désormais à la suite. Et son avenir, elle ne le voit nulle part ailleurs qu’à Mayotte. Elle est persuadée qu’elle sera plus utile à sa communauté. « En métropole, il n’y a pas de manque de pharmaciens et en plus, les gens sont déjà habitués aux médicaments. Alors que chez nous, le travail d’un pharmacien est beaucoup plus intense et riche. Les personnes ont grandement besoin qu’on les accompagne dans leurs traitements », explique-t-elle. Limouandjilati a l’ambition d’ouvrir sa propre officine dans son village d’origine à Acoua, mais en attendant elle se fera la main en travaillant avec des collègues dans l’une des pharmacies de l’île.

La céramique et la porcelaine au cœur des créations de Nathalie Kortyewski

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Du 6 au 12 septembre 2021 se tient la huitième édition du forum international des métiers et de l’artisanat de l’océan Indien. Sur la place de la République à Mamoudzou, quarante artisans se réunissent tout au long de la semaine afin de mettre à l’honneur la culture et les savoir-faire mahorais. Découverte de la peinture sur porcelaine et de la céramique avec Dhâme.

Sculptures colorées, décors raffinés ou encore objets divers et variés… Bienvenue au stand de Nathalie Kortyewski. Il y a tout juste quatre mois, l’artiste originaire d’Albi se lance dans le grand bain. Ni une ni deux, elle monte son entreprise et s’inscrit sur le registre des artisans mahorais. Le début d’une nouvelle aventure ! “Au départ, c’est née d’une passion. Je réalisais des œuvres pour des amis et un jour, j’ai décidé de déposer ma marque, c’est ainsi que Dhâme est né.” Un projet dans les cartons depuis plusieurs années alors que la néo-mahoraise se formait à l’art de la céramique et de la peinture sur porcelaine.

On m’appelle l’artiste de la famille”, s’amuse celle qui s’inspire de la beauté de l’île aux parfums. Curieuse du monde qui l’entoure, la céramiste varie à la fois les sujets et les méthodes de création. “Je fais de la céramique, de la peinture sur porcelaine, des sculptures art déco, de la mosaïque. Tout m’inspire.” Une passion dévorante qui l’a amenée à tester diverses disciplines artistiques. Dans son atelier, Nathalie réalise ses propres céramiques, mais achète aussi de la vaisselle en porcelaine qu’elle peint. De quoi offrir un large catalogue de créations.

La fibre créatrice

Croquis, peinture, cuisson, le processus de création de ses œuvres s’avère minutieux et chronophage. Pour une pièce de céramique, de la conception jusqu’à la réalisation finale, deux à trois semaines sont nécessaires. “Les temps de séchage sont très longs, il faut compter plusieurs jours pour les pièces en céramique. Cela me permet de m’adonner à la peinture sur porcelaine« , dévoile-t-elle. Une organisation déjà bien rodée pour la jeune entrepreneure.

Avec Dhâme, un nom venu du Tchad qui signifie “le grenier”, l’artiste entend bien ne pas rester au placard. “C’est la première fois que je participe à une manifestation comme celle-ci. Je m’installe tout doucement et j’espère pouvoir continuer à me faire connaître”, détaille-t-elle. Dans l’atelier qu’elle a installé chez elle en Petite-Terre, elle accueille également les curieux lors de stages de découverte. “J’aimerais partager ma passion, car je pense que le rêve appartient à tout le monde. Le rêve fait vivre, le rêve booste« , déclare-t-elle. Un beau projet qui fleurit au pays de l’ylang-ylang.

Mayotte Hebdo de la semaine

Mayotte Hebdo n°1116

Le journal des jeunes