Xavier Pommereau, psychiatre, ancien chef de pôle CHU de Bordeaux.
Période charnière de la vie pour chaque individu, l’adolescence peut être une étape trouble. Ce mardi 5 et le mercredi 6 avril, la Maison des Ados 976 (MDA) de Mlezi Maoré organise, à la MJC de Combani, un colloque destiné aux professionnels du secteur médico-social et éducatif afin de réfléchir ensemble à l’accompagnement, mais aussi la prise en charge des jeunes en rupture avec leurs parents.
Connue pour sa célèbre crise, l’adolescence demeure un stade de développement difficile à affronter pour les enfants et leurs parents. S’autonomiser demande de pouvoir s’opposer, nouer de nouveaux liens pour enfin prendre son envol et quitter le nid familial. Un processus qui peut mener les jeunes et leurs proches à des ruptures et des impasses. Ce mardi, Moncef Mouhoudoire, directeur de l’association Narike M’sada, Lucie Kiledjian, psychologue clinicienne à la MDA de Mayotte de Mlezi Maoré, et Christelle Bilhou, psychologue clinicienne au service Service d’accompagnement des mineurs en isolement familial (Samif) de Mlezi Maoré, ont ouvert le débat sur la contextualisation des conduites à risque à Mayotte.
Christelle Bilhou (gauche) psychologue clinicienne, service Samif, Mlezi Maore, et Lucie Kiledjian (droite), psychologue clinicienne, MDA de Mayotte, Mlezi Maore.
Dialoguer pour mieux agir
“Cette thématique est à l’origine de très nombreuses questions de la part des professionnels. L’objectif de ce colloque est de réfléchir et travailler ensemble”, explique l’intervenante Lucie Kiledjian. Un sujet important qu’il est essentiel de traiter de manière collective pour faire évoluer les prises en charge et les accompagnements à Mayotte. Absentéisme scolaire, fugue, consommation de substances psychoactives, prises de risque sexuelle, violences… Comment comprendre qu’un adolescent s’expose au danger au point de compromettre son avenir, sa santé et sa place au sein de la famille ? “Nous devons co-construire des solutions adaptées au contexte local”, détaille Lolita Lopez, chef de service à la Maison des ados de Cavani et au Point accueil écoute jeunes d’Acoua (PAEJ).
A Mayotte, un Mahorais sur deux a moins de dix-sept ans, six Mahorais sur dix ont moins de 25 ans, trois sur dix ont moins de dix ans… Additionné à une croissance démographique très forte, les jeunes Mahorais se retrouvent confrontés à de nombreuses difficultés d’accès aux droits, aux soins mais aussi à des lieux d’écoute, d’information et d’expression. Par le biais de ce colloque, les acteurs du secteur tentent aujourd’hui de se fédérer dans l’intérêt de ces jeunes en souffrance. Un moyen peut-être de dessiner un avenir plus serein pour ces adolescents, leurs familles mais également la société dans laquelle ils évoluent marquées par la violence et les inégalités…
Si son grade est celui d’un colonel hors classe, il est le général des soldats du feu mahorais. Olivier Neis fête son premier anniversaire à la tête du SDIS de Mayotte, le service départemental d’incendie et de secours, le 6 avril prochain. L’occasion d’une rencontre aux airs de bilan avec celui qui a déjà passé huit années de sa vie sur l’île au lagon.
Mayotte Hebdo : Vous avez déjà passé de nombreuses années à Mayotte, entre 2008 et 2016. Ce n’est pas banal, pour un métropolitain. C’est le fait de participer à la construction de quelque chose qui vous pousse à rester ?
Olivier Neis : C’est le phénomène du hasard. Je suis censé rester à Mayotte jusqu’en 2012. Sauf qu’en 2012, Mayotte est un jeune département, et la départementalisation ne se passe pas comme ça, il faut l’écrire. Et écrire la départementalisation ne se fait pas en un jour. En tant qu’adjoint, je suis dans la préfiguration du passage de SIS en SDIS, prévu pour 2014-2015. Je me lance dans un truc, je ne vois pas le temps passer. On va écrire, alors que l’on vient juste d’ouvrir des casernes, que rien n’est palpable, la construction de quelque chose. Avec un jeune qui vient m’aider, on va planter les piquets sur les terrains et dessiner les contours du SDIS de Mayotte. Je partais de la caserne de Kawéni en voiture, et je chronométrais pour avoir une répartition judicieuse de l’ensemble des casernes. Quand nous passons en SDIS en juillet 2014, un nouveau directeur arrive, je finis ça et je m’en vais début 2016.
M.H. : L’année dernière, vous revenez à Mayotte en tant que directeur du SDIS, avec une cérémonie d’investiture grandiose, place de la République. Comment s’est passé le retour ?
O.N. : J’arrive ici début mars 2021. J’ai un avantage sur tout le monde : je sais comment il faut faire, donc je leur ai parlé à tous. Le premier jour, je débarque de l’avion, je me change, j’arrive en tenue, et je dis : « Allez, on va saluer l’équipage du VSAV qui faisait les évacuations sanitaires pendant le Covid ». J’ai été à la caserne de Petite Terre, sur le chantier, à l’hôpital, tout ça en trois heures. On barge, je m’arrête à Kawéni pour saluer, je viens au SDIS, et tout l’état-major se réunit dans la salle du Conseil d’administration, et je leur dis : « Parlez-moi, j’écoute ». Et là, j’ai eu tout ce qui n’allait pas.
MH. : Les aînés considéraient les sapeurs-pompiers comme de véritables héros, les fameux « soldats du feu ». Avez-vous l’impression que cette conception de sauveurs a changé aujourd’hui ?
O.N. : C’est un phénomène de société. Je dis toujours qu’il y a 95% de la société qui trouvent que les pompiers sont des héros. Il y a 5% qui ne s’y trouvent pas, c’est sans doute ceux qui n’ont pas eu besoin de pompiers ! Non, c’est l’image d’Épinal : le camion rouge, la grande échelle… Oui, on fait un métier difficile, mais qu’est-ce qu’un héros ? Le sapeur-pompier est toujours le métier qui a la plus grande cote de popularité auprès de la population, que ce soit en France ou ailleurs. Voilà pourquoi : quand vous êtes dans une situation difficile, face à un accident, vous pensez à qui ? Les pompiers sont le premier réflexe, parce qu’ils vont toujours vous répondre.
Nous sommes le dernier maillon de la déstructuration d’une société. En Ukraine, il n’y a plus personne dans les immeubles, mais les pompiers continuent d’éteindre le feu. Pourquoi ? Pour préserver quelque chose, parce que c’est leur job, même s’il pleut des bombes. Et c’est aussi le premier maillon. Sur un accident de la circulation, les sapeurs-pompiers vont arriver en premier, extraire la victime de sa position indélicate, l’amener sur un brancard, et passer de cette zone dite sale à la zone propre, le milieu hospitalier. Ce sont ces deux extrêmes qui font que l’on se sent bien. Ce ne sont pas des anges-gardiens, mais ils sont là s’il se passe quelque chose. Nous sommes des citoyens investis, et notre devoir est de tout tenter pour le retour à une vie normale.
La Maison des adolescents de Mlézi Maoré organise un colloque qui a pour thème « Les conduites à risque à l’adolescence », ce mardi et mercredi, à la MJC de Combani. Ce rendez-vous est destiné aux professionnels aux contacts des jeunes. Au programme de ces deux jours : l’intervention de Loik Jousni et Valérie Le Menn, respectivement psychologue et infirmière à la MDA de Brest, des ateliers thématiques sur les sexualités adolescentes, le phénomène de bandes, les conduites à risque en situation de placement et des mineurs non accompagnés, des conférences et des échanges sur les compréhension et la prise en charge des fugues et autres conduites de rupture par Xavier Pommereau, psychiatre et ancien chef de pôle au CHU de Bordeaux, l’accompagnement des familles d’adolescents s’exposant au danger par Sophie Guionnet, psychiatre à la MDA de Mayotte, ou encore l’acte créatif comme support d’expression aux souffrances adolescentes par Anne-Laure Constantini, psychologie, danseuse et chorégraphe, et Batoule Amdjadi, chargée de production pour la compagnie Kazydance.
« Plus que tout autre période de la vie, l’adolescence impose un travail de prise de distance et de détachement d’avec les figures parentales. Se séparer et s’autonomiser demande de pouvoir s’opposer, nouer de nouveaux liens et partir. Ce processus peut également être mis à l’épreuve et pousser des jeunes en souffrance, leurs familles et les professionnels dans des ruptures et des impasses. Absentéisme scolaire, fugue, surconsommation de substances psychoactives, prises de risque sexuelle, attaques au corps, tentatives de suicides, actes antisociaux-violences parfois en bande… Comment comprendre qu’un adolescent s’expose de manière active au danger, au point de compromettre son avenir, sa santé et sa place au sein de la famille ? Les symptômes adolescents peuvent compris comme tant de stratégies de « rompre avec la souffrance » afin de « se sentir exister » (Pommereau, 2002). Ces mises en danger peuvent être aussi comprises comme des tentatives « salutaires » de « provoquer la dynamique familiale » (Le Breton, 2013). S’engagent dès lors des interrogations sur le contexte d’émergence de ces conduites, le sens et la fonction qu’elles peuvent prendre pour les adolescents et leurs familles, la manière dont elles prennent corps sur le territoire mahorais. Nous vous proposons de nous rencontrer pour deux journées d’échanges autour des manifestations de la souffrance adolescente et des réponses que nous pouvons apporter tant dans les champs sanitaires que dans les champs socioéducatives et judiciaires. »
Deux championnats d’académie se déroulent ce mercredi 6 avril, en plus d’une dizaine de rencontres de districts. Le premier est les jeux de l’union nationale du sport scolaire en sandball et athlétisme sur la plage de Tanaraki de 10h à 15h. Quatre équipes mixtes de Tsimkoura, Passamaïnty, Koungou et M’Tsangamouji s’affrontent pour une qualification au championnat de France qui se tiendra à Montargis du 20 au 24 juin. Le second est le championnat d’académie de Hip Hop au pôle culturel de Chirongui de 11h à 15h pour les collèges et les lycées. Une finale académique qui sera un point d’étape avant une saison 2022/2023 orientée vers une qualification au championnat de France organisé à Paris.
À l’heure où les cambriolages battent leur plein à Mayotte sans qu’aucune réponse efficace ne soit donnée, l’audace technologique vole la vedette à l’initiative politique. Mactoo est sans étiquette et son programme entend tenir une promesse : lutter contre les vols et veiller à la sécurité des biens.
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Les gendarmes et les magistrats étaient, ce lundi, à Dzoumogné, au siège du Sidevam, dans le cadre d’une perquisition. Celle-ci a eu lieu à la suite du rapport de la Chambre régionale des comptes qui pointe la mauvaise gestion du syndicat chargé des déchets sur la période 2017-2019.
Le site du Sidevam à Dzoumogné est bien calme, ce lundi midi. Seuls les hommes armés de pistolet indiquent que ce n’est pas un jour habituel pour le syndicat en charge de la collecte des déchets. Venus de Paris, les sept gendarmes et les deux magistrats du Parquet national financier* procèdent à une perquisition en lien avec un rapport de la Chambre régionale des comptes datant de 2020. A l’époque, la Chambre avait pointé plusieurs dysfonctionnements de la part du syndicat. Il citait « l’absence totale de mise en concurrence et de marchés publics pour des volumes d’achats élevés, comme la location de véhicules de collecte ; des recrutements et des compléments de rémunération irréguliers, à des agents comme au directeur de cabinet et au chargé de mission, l’octroi de congés extra légaux au personnel ; l’engagement juridique de dépenses par le président sans engagement comptable ; le défaut de contrôle de la gestion déléguée du centre d’enfouissement et des quais de transfert ».
Les locaux du Sidevam, à Dzoumogné, ont été perquisitionnés une bonne partie de la journée de lundi.
Cette gestion avait provoqué « un déficit budgétaire structurel fin 2019, tant en fonctionnement courant qu’en investissement ». S’ajoutent à cela, des jours de collecte qui n’étaient pas toujours respectés et des gros problèmes pour récupérer les déchets qui ne sont pas ménagers (déchets verts, ferraille, encombrants, équipements électriques et électroniques).
« Ils cherchent des éléments sur les marchés publics, des factures »
Avec les premiers éléments issus de la Chambre, le Parquet national financier a été saisi pour enquêter sur la façon dont le syndicat a été géré de 2017 à 2019. Ce lundi donc, à Dzoumogné, les gendarmes et les deux magistrats récupèrent des mails, des courriers et les comptes de la période concernée pour ensuite les emmener à Paris. « Ils cherchent des éléments sur les marchés publics, des factures », indique Chanoor Cassam, le directeur général des services du Sidevam. Tout étant numérisé par un prestataire, des disques durs externes sont remis aux enquêteurs. Ceux pouvant les renseigner sur l’endroit où sont stockés les documents sont parfois entendus. Le directeur des affaires financières du syndicat passe ainsi de longues heures avec les enquêteurs.
Sur place, le personnel n’est pas inquiet. Peu de salariés de la période visée sont toujours au Sidevam. « C’est la seule question que les gendarmes nous ont posés sur le Sidevam actuel. Ils souhaitaient savoir qui y travaille encore », précise le directeur, avant d’aider à nouveau les gendarmes pour l’accès à des anciens mails.
Les enquêteurs n’excluent pas de rester plusieurs jours en fonction du volume de documents à récupérer.
*Le Parquet national financier n’a pas pu être joint, ce lundi.
Malgré la réouverture des frontières malgaches, les liaisons aériennes reprennent au coup par coup.
Fortement dépendante de ses liaisons avec Madagascar, la compagnie aérienne Ewa Air ronge son frein depuis plus d’un an. Le directeur général, Ayub Ingar, espère une réouverture progressive et définitive des frontières en avril dans l’espoir de relancer son activité, qui tourne au ralenti depuis de longs mois. Entretien.
Flash Infos : Le ciel malgache devait réouvrir le 5 mars dernier. Pour autant, les liaisons entre Mayotte et Nosy-Bé, Majunga, Diego et Antananarivo n’ont toujours pas repris. Quelles explications avez-vous reçu de la part des autorités ?
Ayub Ingar : Le 5 mars dernier, le gouvernement malgache avait simplement dit, sans donner beaucoup plus de précisions, qu’il allait rouvrir les frontières sous certaines conditions. Cela a été le cas pour Antananarivo et Tamatave. Malheureusement, Mayotte n’était pas concernée… Il s’agissait de vols en provenance de La Réunion et de Paris. Toute les demandes que j’ai adressées sont restées sans réponse ! Après le remaniement ministériel (officialisé le 16 mars), il a été question d’inclure le 101ème département. Maintenant, il faut attendre que les aéroports soient remis aux normes pour accueillir les voyageurs.
Ewa Air desserre trois provinces, Nosy-Bé, Diego Suarez et Majunga, mais ces destinations sont pour l’heure toujours fermées. Pourtant, une compagnie italienne est autorisée à se rendre à Nosy-Bé une fois par semaine depuis le mois d’avril.
FI : Qu’en est-il de votre demande pour effectuer plusieurs vols commerciaux en avril, via un importateur privé ?
A.I. : Nous avons fait la demande pour transporter du fret ! Hier [ce dimanche 3 avril], nous avons réalisé le premier vol en provenance d’Antananarivo. Deux autres vols sont par ailleurs prévus cette semaine : mercredi et jeudi. Cela permet effectivement de mettre du beurre dans les épinards, de faire tourner les avions et de faire travailler le personnel navigant de la compagnie. Mais nous attendons toujours le feu vert et une date définitive pour y voir plus clair…
FI : Depuis la nouvelle fermeture des frontières malgaches en janvier 2021, qu’avez-vous mis en place pour garder la tête hors de l’eau ?
A.I. : Nous avons développé plusieurs activités annexes, comme la supervision des avions d’Air Austral. Nous avons aussi procédé à quelques vols spéciaux, notamment six évacuations sanitaires sur La Réunion, mais aussi à l’acheminement de matériel médical de La Réunion à Moroni pour le compte de la plateforme d’intervention régionale de l’océan Indien. C’est un peu maigre, vous vous en doutez ! Même si nous faisons deux à trois aller-retours hebdomadaires sur Moroni depuis juillet dernier, nous n’avons réalisé que 14% de notre programme initial en 2021 !
FI : Entre temps, vous avez lancé votre offre low-cost vers La Réunion. Quel premier bilan pouvez-vous dresser ?
A.I. : Il est encore trop tôt pour tirer les premières conclusions, l’exercice s’est terminé le 31 mars. Une chose est sure, nous ne sommes pas mécontents de cette nouvelles destination, cela va dans le sens de nos prévisions.
FI : Quid des voyageurs qui avaient réservé des billets chez vous et qui sont restés sur le carreau ?
A.I. : Nous avons proposé des remboursements ou des avoirs pour permettre à nos clients de s’orienter vers d’autres destinations. Si les frontières réouvrent demain, nous aurons une très forte demande car bon nombre de Mahorais ont des attaches à Madagascar. Certains d’entre eux n’ont pas pu voir leurs familles depuis bientôt deux ans… Dès la fin du Ramadan, nous risquons d’être sous pression pour répondre aux desideratas des voyageurs qui veulent se rendre sur place !
Au lycée de Dembéni, lundi 4 avril, les secondes en filière baccalauréat professionnel métiers de la mode et des vêtements ont participé à un atelier de cartographie expérimentale. Une intervention atypique animée par Florence Troin et Philippe Rekacewicz, chercheurs, géographes et cartographes.
“Nous travaillons sur un projet de cartographie sensible et émotionnelle”, explique Philippe Rekacewicz, géographe, cartographe et chercheur à l’université d’Helsinki. Tout autour du globe, celui-ci anime des ateliers qui ont pour objectif de réintégrer l’humain dans les cartes, comme ce lundi, dans les établissements de Kawéni et Dembéni. “À Mayotte, nous avons l’exemple de l’immigration. Mais si l’on s’arrête aux informations factuelles que l’on retrouve habituellement sur une carte, on ne dit rien de la tragédie humaine et du vécu de ceux qui effectuent cette traversée”, détaille l’universitaire.
Des CP aux doctorants, la méthode est la même, projeter sur une carte quelque chose qui parle de soi. “Les élèves peuvent cartographier leurs vies, leurs rêves. Ils indiquent un lieu, un itinéraire, choisissent des symboles, des couleurs et des échelles qui font ressortir ce qui comptent pour eux et ainsi voir l’espace sous un angle différent”, continue Philippe Rekacewicz. Une démarche qui demande de la réflexion, de l’abstraction et beaucoup d’imagination.
Les petites mains au travail
Pour Amina, Anfia et Anfouzati, toutes les trois en seconde, cet exercice offre la possibilité de voyager. “On m’a demandé de cartographier mon vœu le plus cher. Ce que je souhaite c’est d’aller à Tahiti, voir leur culture, leurs danses, leurs maisons, leurs fleurs”, s’extasie Amina, le sourire aux lèvres et la tête dans les nuages. Pour sa camarade Anfia, le paradis a un visage très différent. “J’ai collé des cartes des Etats-Unis et de Dubaï car ce sont des endroits où j’aimerais aller, car jusqu’à présent, je n’ai visité que les Comores, Mayotte et la métropole”, affirme la jeune fille. Très concentrée, la classe prend des chemins très différents et couche sur papier leurs plans d’avenir.
“Ce que j’aime avec ces interventions, ce sont les résultats des élèves. Qu’il y ait un effet de groupe et des cartes similaires ou des résultats très hétéroclites, nous voyons beaucoup de productions touchantes”, témoigne Florence Troin, géographe, cartographe et chercheuse pour le CNRS à l’université de Tours. Spécialisée en cartographie des récits, l’intervenante s’émerveille devant les histoires racontées par les élèves au travers de leurs créations. “On déconstruit totalement les standards de la sémiologie graphique pour s’approprier notre carte”, explique-t-elle.
Une démarche éminemment humaine qui donne aux nouvelles générations la chance de réfléchir aux hommes qui se cachent derrière ces vastes territoires couchés sur papier.
Gilles Halbout a dialogué en anglais avec certaines classes de l’école de M’Gombani.
Cette semaine, la découverte des langues vivantes est vivement encouragée dans les écoles primaires de Mayotte, avec une priorité donnée à l’anglais. Ce lundi matin, le recteur Gilles Halbout s’est rendu à l’école primaire de M’Gombani, à Mamoudzou, pour inaugurer cette semaine consacrée aux langues et observer les projets que les enseignants ont réalisé avec leurs élèves.
« Avec cette semaine des langues vivantes à Mayotte, nous comptons toucher une centaine de classes soit près de 2.500 élèves », a déclaré le recteur Gilles Halbout, ce lundi, avant d’insister sur l’importance de l’enseignement des langues étrangères sur l’île au lagon. Dans le primaire, celles-ci se résument bien souvent à l’anglais, alors que dans le secondaire, l’espagnol et l’arabe sont enseignés en deuxième langue. « Nous aimerions pouvoir enseigner d’autres langues comme le chinois ou le portugais, mais nous nous heurtons à un trop fort turn-over de personnel », explique le recteur. En tout cas, lors de sa visite de l’école de M’Gombani, ce matin-là, il a pu voir les spectacles et chansons en anglais que les enseignants ont préparés au cours de l’année avec leurs élèves.
« Dans notre école, nous avons monté un projet intitulé « voyageons en anglais » pour motiver les élèves à apprendre cette langue et pour développer leur ouverture sur le monde », indique le directeur de l’école. Son étude a donc été également l’occasion pour les enfants de découvrir les pays anglophones et parfaire ainsi leur géographie. D’autres domaines ont aussi été abordés comme le corps humain. Les chansons, un classique en pédagogie pour l’apprentissage des langues vivantes, ont bien évidemment été mises à l’honneur devant le recteur. Ce dernier a même conclu sa visite par un petit dialogue avec les enfants dans la langue de Shakespeare. « Je suis impressionné car maintenant beaucoup d’élèves de primaire se débrouillent bien en anglais, ce qui n’était pas le cas il y a deux ou trois ans », s’enthousiasme Gilles Halbout.
Un travail de fond mis en place par les enseignants
Si cette semaine a pour objet de valoriser l’apprentissage des langues vivantes étrangères, ce dernier a évidemment commencé dès le début de l’année. Dès le CP, les enseignants se doivent d’aborder cette langue via, par exemple, les rituels de début de journée. « Je leur apprends les jours de la semaine, les mois ou comment se présenter. En CP, on commence en douceur car les élèves sont encore petits et certains ont déjà du mal à apprendre le français », nous confie une enseignante de l’école de M’Gombani. Ce dispositif d’apprentissage est censé être mis en place dans toutes les écoles de l’île même si certaines se heurtent parfois au manque de formation des enseignants. Un problème qui devrait se résoudre dans les années à venir.
Quid de l’enseignement du shimaore et du kiboushi ?
« Cette semaine était consacrée à la mise à l’honneur des langues étrangères, mais le développement de l’enseignement des langues régionales suit son cours à Mayotte », confie Gilles Halbout. On se souvient qu’en mai 2021, une convention avait été signée entre le rectorat, l’association Shimé, spécialisée dans l’enseignement du shimaore, et le CUFR (centre universitaire de formation et de recherche). L’éternelle difficulté pour enseigner les langues régionales est leur caractère uniquement oral. « Le conseil départemental travaille à fixer une graphie du shimaore, mais il n’y a pas encore de véritable consensus », continue le représentant de l’Education nationale. Toutefois, le processus suit son cours et le recteur nous confie qu’il y aura sans doute un jour un Capes (Certification d’aptitudes au professorat et à l’éducation secondaire) de shimaore.
Vous avez été victime d’un piratage de votre compte mail ou réseau social, d’une escroquerie à la petite annonce (faux acheteur/faux vendeur), d’une fausse location, d’un chantage en ligne, d’une escroquerie aux sentiments, d’un faux site de vente ? La police nationale de Mayotte informe de l’ouverture depuis le 15 mars de la plateforme THESEE. Ce téléservice permet désormais aux victimes de certaines escroqueries commises sur Internet par un auteur inconnu de signaler aux forces de l’ordre ces faits et de déposer plainte en ligne.
Ce dispositif a pour objectif de simplifier le quotidien des services d’enquêtes, de renforcer l’efficacité des investigations de ce phénomène de masse en centralisant les plaintes et le signalement au niveau national et en analysant et recoupant les informations recueillies, d’offrir aux victimes un nouveau mode de dépôt de plainte sans déplacement dans les services de police.
Pour déposer plainte, rendez-vous sur le site internet service-public.fr, rubrique « arnaque sur Internet ». Cette démarche est évidemment facultative et toutes les victimes peuvent choisir de déposer plainte dans un commissariat si elles le souhaitent.
Les augmentations incessantes du prix du gazole depuis plusieurs mois obligent le syndicat des transitaires de Mayotte à appliquer urgemment une indexation carburant sur toutes ses prestations de transport. L’indice CNR (comité national routier) a bondi de 32.90% de janvier 2021 à février 2022 et la pondération du carburant est fixée pour cette année à 23.5%.
À titre d’exemple, le prix du gazole est passée de 1.15 euro au 1er janvier 2021 à 1.51 euros au 1er avril 2022, soit 31% d’augmentation. Par conséquent, le syndicat des transitaires de Mayotte informe que la surcharge carburant applicable et révisable sera de 7.4% à partir de ce lundi 4 avril.
Conformément à l’article L. 3222-1 du code des transports, « à défaut de stipulations contractuelles identifiant les charges de carburant dans les conditions définies par l’article L. 3222-1, celles-ci sont déterminées, au jour de la commande de transport, par référence au prix du gazole publié par le comité national routier et à la part des charges de carburant dans le prix du transport, telle qu’établie dans les indices synthétiques du comité national routier. Le prix du transport initialement convenu est révisé de plein droit en appliquant aux charges de carburant la variation de l’indice gazole publié par le comité national routier sur la période allant de la date de la commande de l’opération de transport à sa date de réalisation. La facture fait apparaître les charges de carburant supportées par l’entreprise pour la réalisation de l’opération de transport ».
Le taux de passage aux urgences pour des bronchiolites chez les moins de deux ans est en baisse en semaine 12 (39, soit un taux d’activité de 23.1% contre 24.3% en S11 et de 27% en S10) pour la deuxième semaine consécutive, mais reste à un niveau élevé. Le nombre d’hospitalisations secondaires était également en diminution (11 contre 19 en semaine 11, soit un taux d’hospitalisations de 28% en S12). L’épidémie de bronchiolite 2021-2022, en avance d’environ un mois sur la saisonnalité classique à Mayotte, se poursuit donc depuis plusieurs semaines avec une durée de la phase épidémique élevée en comparaison des saisons précédentes. Une baisse importante avait été observée en semaine 3, incitant la levée du plan blanc pour la bronchiolite au CHM. Une nouvelle recrudescence des cas a été observée aux urgences dès la semaine 5, nécessitant la réouverture de l’unité bronchiolite.
Les données de surveillance virologique montrent un premier pic lors de la dernière semaine de 2021 avec 19 cas de virus respiratoire syncitial confirmés biologiquement. Le nombre de cas de VRS avait par la suite diminué puis réaugmenté dès la semaine 3 pour atteindre un nouveau pic en S10. En semaine 11, le nombre de cas confirmés de VRS a fortement diminué par rapport à la semaine précédente, avec 18 cas contre 33 en S10, nombre bien supérieur aux pics observés les années précédentes. Le nombre de cas de VRS varie peu entre les semaines 11 et 12 avec seulement un cas de plus en S12 soit 19 cas.
Le Ramadan a débuté ce week-end pour une très grande majorité de la population. Cette période spirituelle et de privations permet la purification et la pénitence. Le corps médical et le réseau périnatal de Mayotte recommandent aux femmes enceintes et allaitantes de ne pas pratiquer le jeûne. De même, le Coran le déconseille en cas de risque pour la santé de la mère et/ou de l’enfant.
En effet, dans le cadre d’un jeûne, il y a un risque de déshydratation, de carences alimentaires, d’un accouchement prématuré, d’un retard de croissance pour le fœtus, d’une diminution du liquide amniotique, etc. Pour cela, il est conseillé de s’hydrater, d’adopter un rythme de trois repas, de privilégier certains aliments. Il est important avant d’entamer toute démarche de demander l’avis aux professionnels de santé et de se rapprocher des instances religieuses pour connaître les alternatives au jeûne.
Les très fortes pluies qui se sont abattues sur le sud de l’île, le dimanche 27 mars, pendant près de trois heures, ont provoqué de nombreuses ravines temporaires chargées de terre. À l’instar de celle sur l’une des plages de Saziley qui a déversé dans le lagon des eaux chargées de sédiments arrachés sur les sols en amont, en formant un panache de turbidité qui recouvre tout le platier corallien. « C’est le résultat des défrichements sur la presqu’île de Saziley qui, chaque année, laissent des sols à nu, replantés par la suite par des bananes ou du manioc qui n’offrent pas de protection au sol. Les sols sont lessivés, les platiers coralliens s’envasent. La maltraitance des sols affecte directement la vitalité des récifs coralliens », met en garde l’association des Naturalistes.
Surpopulation, précarité, violence… La récente mutinerie au centre pénitentiaire de Majicavo-Koropa, dimanche 27 mars, a mis en lumière les limites de cette institution qui cristallise les maux du territoire. Malgré l’investissement des acteurs locaux qui mobilisent de belles initiatives, sa situation reflète les stigmates d’une violence désormais généralisée. Le fruit d’une longue série d’échecs politiques et institutionnels qui dépassent les frontières des murs barbelés.
Difficile d’imaginer que ces jeunes hommes sont parmi les plus dangereux du territoire. Dans cette petite salle de cinéma improvisée au sein du centre pénitentiaire de Majicavo, l’ambiance est calme et attentive. En ce 15 mars, une trentaine de détenus sont présents pour visionner le film Tropique de la Violence et débattre avec son réalisateur Manuel Schapira. Le silence est religieux, l’attention imperturbable. Bien rangés en ligne, les détenus ne se dévissent pas de leur chaise en plastique. On se croirait presque dans une salle de classe où la discipline l’emporte sur les bavardages. Barreaux, gardiens, horaires strictes… Quelques détails rappellent vite la réalité derrière les miradors. Certains regards sont durs. Témoins de scènes que les meilleurs cinéastes ne pourraient restituer dans leur intensité. Des corps sont marqués par les cicatrices et les tatouages. De quoi intimider sans passer par la salle de musculation « Les tatouages, c’est pratique. Surtout quand tu n’as pas de bande. J’étais seul et stressé quand je suis arrivé. Alors j’en ai fait un, comme tout le monde », glisse entre deux scènes Spich, un détenu de 21 ans. A l’écran, Bruce et son gang de Kawéni cambriolent une maison. De quoi faire échos à son parcours : « Tu finis toujours par agir ainsi pour survivre. Comment faire si tu n’as aucune aide ? Moi je me suis fait choper cash pour vol. Aujourd’hui, j’assume mes conneries. Quelque part, je me considère aussi comme une victime, mais personne ne comprend cela ».
D’une prison à l’autre
A quelques semaines d’une mutinerie historique, l’objectif de cette séance apparaît comme avant-gardiste : « Appliquer des dispositifs de prévention de la violence est une priorité nationale au regard des faits qui conduisent les individus en prison. Raison pour laquelle nous mettons en place des programmes pour échanger et travailler sur le sujet », résume Philippe Catherine, directeur adjoint du SPIP de Mayotte (Service Pénitentiaire d’Insertion et de Probation de Mayotte). En partenariat avec le pôle culturel de Chirongui qui gère la projection et les débats, l’événement rencontre un intérêt certain auprès du public ciblé. « Sur les deux séances que nous avions prévues dans la journée, une soixantaine d’individus se sont inscrits. Nous avons procédé à une sélection. Quasiment tout le monde a répondu présent et personne ne s’est levé de sa chaise », se réjouit-il. Et pour cause. C’est la première fois depuis le confinement qu’un événement pareil est organisé dans la prison. L’occasion pour certains d’assister pour la première fois de leur vie à une séance de cinéma. Le film terminé, c’est au tour de Manuel Schapira d’être au cœur de l’attention. Mobilisé par la promotion du film dans l’Hexagone, le réalisateur reçoit les félicitations des détenus par téléphone. « C’est réaliste ! Ça décrit vraiment ce par quoi on est passé », lance un spectateur apparemment convaincu. Interrogé sur la différence entre l’enfermement social des jeunes de Kawéni et la prison de Majicavo, un détenu prend la parole. « La prison, ce n’est pas un manque de moyens contrairement à la vie à Kawéni, mais un manque de liberté. » Un sentiment partagé par Spich, à quelques nuances près : « Certains se sont habitués à la vie ici. Pas moi. Je mange mal. J’ai chopé des maladies qui me grattent sur tout le corps. Je n’ai pas de famille, pas d’amis, pas de liberté. Je passe mes journées à ne rien faire. Juste… attendre ».
Quand le vernis craque
Inauguré en deux étapes de 2014 à 2015, le centre pénitentiaire de Majicavo semble à première vue plus propre que certains établissements de métropole. Il l’est en tout cas indéniablement en comparaison à l’ancienne maison d’arrêt construite en 1995 sur le même site et entièrement détruite. Selon un rapport du contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) réalisé en 2016. « La destruction de l’ancienne maison d’arrêt, vétuste et exiguë, et la construction du nouveau centre, moderne et fonctionnel, ont indéniablement amélioré et assaini les conditions de détention. » Fini les cellules « suffocantes » sans moustiquaires, repas sans couverts « à même le sol, à quelques centimètres des WC » et salles d’eau « répugnantes » comme relevé par le CGLPL dans un précédent rapport de 2009. Problème, les nouvelles cellules fraîchement construites ont rapidement cédé au même mal que les précédentes, leur surpopulation. Capable de dépasser les 300% de sa capacité dans certains secteurs de l’ancienne prison, elle est aujourd’hui estimée à 156% selon les derniers chiffres fournis par le syndicat Force Ouvrière. « On peut se retrouver jusqu’à quatre ou cinq dans une cellule », déplore Spich. De quoi menacer l’équilibre du bâtiment qui pourrait rapidement ressembler à son prédécesseur. « Sa structure n’est pas faite pour accueillir autant de personnes. Cela génère des dysfonctionnements à plusieurs niveaux. Les systèmes d’évacuation des eaux usées sont saturés. Le personnel doit faire des rotations car l’odeur est insoutenable à certains endroits. Les chasses d’eau sont quotidiennement en panne. Les cuisines aussi. Ça va péter si on continue ainsi », déclarait dans nos colonnes le syndicaliste Salimou Assani, lors de l’émeute du 27 mars.
De la promiscuité naît la violence
Dans cette atmosphère de vase débordant, occuper les esprits et travailler à la réinsertion constituent une priorité. Plus qu’une distraction, l’objectif est d’apaiser les tensions qui peuvent découler de la monotonie. Un impératif justifié par les recommandations du CGLPL en 2016. « Lors de la visite, des tensions étaient perceptibles entre certaines personnes détenues, l’inactivité étant désignée comme un facteur aggravant de ces problèmes », peut-on lire dans le rapport. Malgré les réels progrès du SPIP pour combattre l’apathie, la violence constitue toujours un outil de compensation « Ici c’est dur. Tu ne peux pas rester gentil. Tu dois devenir violent pour te faire respecter », déplore « Africa », un autre détenu de 20 ans. Même constat pour Spitch. « Si tu es faible, tu es mort », résume-t-il. Cible prioritaire de l’ennui, les détenus sans-papiers sont majoritaires. Si certaines activités sont disponibles, plusieurs témoignages décrivent une inactivité particulière en raison de leur situation administrative. « Même si j’ai passé la majorité de ma vie à Mayotte, je n’ai pas de papiers. J’ai demandé à travailler ou suivre des formations mais ça n’a pas abouti », regrette Spich. D’ici quelques mois le jeune sera libérable, mais pas vraiment libre. « Quand j’aurais fini ma peine, ils vont m’expulser aux Comores où je ne connais personne. Dieu seul sait ce que je ferai après. » Comme beaucoup de familles en situation irrégulière, celle du jeune homme demeure intimidée par l’univers carcéral et ses légions d’uniformes. Aucune visite n’est donc envisagée durant toute sa détention.
Des alternatives limitées
Quid des solutions envisageables ? Le 12 mars dernier, Eric Dupond-Moretti annonçait la construction d’une nouvelle prison censée répondre à l’interminable problème de la surpopulation. Un maigre espoir au regard de l’échec rencontré par l’opération semblable conclue en 2015. Selon Marc Duranton, responsable des questions prison pour la Cimade, cette stratégie constitue « un argument générique ». « Face à la surpopulation carcérale, les pouvoirs publics veulent construire de nouveaux établissements pénitentiaires. Dans les faits, ça ne fonctionne pas. Plus on construit, plus la population pénale augmente », observe-t-il. En cause notamment, un manque d’investissement sur les origines structurelles de la délinquance : précarité, isolement et inégalités sociales. Des maux qui touchent particulièrement la jeunesse. « Le problème commence par la prévention et la lutte contre la déscolarisation. On peut également évoquer les MJC qui ne sont pas assez utilisées et les activités sportives qui sont insuffisantes », analyse Adrien*, un travailleur social habitué aux publics sensibles. Autre cause notable de la promiscuité, le manque d’alternatives à la prison dans le contexte mahorais. Impossible d’envisager une détention à domicile sous surveillance électronique pour des individus qui vivent parfois sans électricité. Un centre d’hébergement et de réinsertion sociale existe à Hajangua, mais ses capacités sont limitées : 16 personnes, toutes en situation régulière. Difficile également d’établir un contrôle judiciaire sur un territoire où, malgré le risque de noyade, les frontières demeurent transgressives en quelques coups de rame. Reste la possibilité de répartir les détenus sur le territoire national entre l’Hexagone et La Réunion. Une alternative rare, qui ne peut pas être envisagée comme une solution durable. S’agissant des mineurs, la PJJ (Protection judiciaire de la jeunesse) dispose de deux structures outre les familles d’accueil : un EPE (établissement de placement éducatif) de douze places et un CER (centre éducatif renforcé) de huit places. Curieusement, l’un comme l’autre sont régulièrement en sous-effectif selon plusieurs sources. La raison évoquée concerne des lacunes de l’institution dans le traitement des dossiers en raison d’un « turn-over important et de postes clés dépourvus ou mal pourvus ».
Un avenir en péril ?
Outre les questions propres au déclassement du territoire, la question politique demeure également un enjeu à prendre en compte. Qu’il s’agisse des querelles mahoro-réunionnaises ou des préjugés sur le train de vie des détenus, nombreux sont les témoins qui évoquent des freins regrettables. « On sous-estime la difficulté pour un maire d’accepter une structure censée accueillir ce type de public », glisse un ancien salarié de la PJJ proche de ces questions. Face au culte de la répression et de l’exclusion, les politiques semblent attiser les braises d’une violence qui peinent à être étouffées par le monde carcéral. « Dès que le droit du sol a été modifié à Mayotte, nous sommes passé à quasiment 100% de dossiers de sans-papiers. Plus personne n’était régularisable Comment se projeter ? S’inscrire à la mission locale ? Rentrer dans un dispositif d’insertion ? » déplore-t-il. C’est ainsi que l’engrenage de la violence s’accélère : Isolement social, réduction des perspectives et des moyens de subsistance. Un parcours taillé vers la prison qui devient la soupape percée du département. Loin de tout discours angélique à l’égard d’individus qui ont parfois commis des actes graves, un changement de prise en charge apparaît comme nécessaire pour éviter le type d’épisode récemment vécu. Si pour certains détenus, les conditions de détention semblent plus vivables que leur quotidien à l’extérieur, difficile d’évaluer les conséquences réelles d’une vie derrière les barreaux sans l’avoir vécue. C’est en tout cas le sentiment qui se dégage du rapport du CGLPL qui déplore la « vox populi de l’île » concernant « l’expression politique et médiatique de « prison-hôtel cinq étoiles » ». Au-delà de sa capacité à retenir les individus dangereux, la prison répond à une mission de réinsertion sociale dans un objectif de cohésion. A Mayotte comme ailleurs sur le territoire national, elle ressemble de plus en plus à un centre de rétention administrative (CRA), avec supplément punitif. De quoi laisser dubitatif au regard des échecs déjà constatés au CRA de Pamandzi pour contenir l’immigration irrégulière et la violence censée en découler. Plus qu’un changement de paradigme, les solutions sont également à creuser en termes de prévention de l’exclusion sociale. Sans ces efforts, la nouvelle prison sera condamnée au même sort que les précédentes, crouler sous les délaissés du territoire.
Le Parc Marin de Mayotte vient de lancer son cycle de conférences à caractère pédagogique. La première s’est déroulée, ce jeudi 31 mars, à 18h, au restaurant La Croisette, et concernait l’impact du volcan sous-marin de Mayotte sur les écosystèmes profonds. Quatre experts de l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer) et une scientifique du Bureau de recherche géologique et minière (BRGM) de Mayotte se sont succédé pour révéler au public le contenu de leurs dernières recherches.
On se souvient de l’émotion suscitée en 2018 par les nombreux séismes de magnitude dépassant parfois le niveau 5 sur l’échelle de Richter dont a été victime l’île aux parfums. Peu habitués à ce genre de secousses, un mouvement de panique avait saisi les Mahorais et incité les scientifiques à envoyer plusieurs missions en mer pour en comprendre l’origine. C’est alors que les spécialistes avaient découvert qu’un gigantesque volcan sous-marin était né à une cinquantaine de kilomètres des côtes de notre île. Ayant poussé de 800 mètres de hauteur et de 12 km d’envergure en un an, ce géant à la croissance ultrarapide est devenu un objet de curiosité scientifique mondiale. S’il est désormais établi qu’il y a peu de chance de le voir émerger de la mer un jour, l’île au lagon n’est cependant pas exempte de risques de tsunami auquel la préfecture tente de préparer le territoire.
Pour le Parc Marin, en revanche, ce volcan est davantage un objet de curiosité que d’effroi. La structure a accueilli la semaine dernière quatre spécialistes de l’Ifremer pour commencer à étudier l’impact du volcan sous-marin sur les écosystèmes profonds. Souhaitant que la population puisse se tenir au courant des dernières avancées scientifiques en la matière, le Parc les a invités à tenir une première conférence, ce jeudi à la Croisette, même si pour l’instant, les scientifiques n’en sont souvent qu’au stade des hypothèses. Christophe Fontfreyde, le directeur du Parc Marin, déclare que « ce quatrième volcan actif de France est un terrain de jeu exceptionnel dont les scientifiques vont pouvoir tirer un grand nombre d’enseignements sur la biologie ».
Un impact sur la chimie de l’eau et potentiellement sur les espèces marines
Films et maquettes à l’appui, les scientifiques sont dans une démarche résolument pédagogique. Une bonne chose étant donnée la grande curiosité du public pour le phénomène. Plusieurs vidéos sont projetées entre les interventions dont Une mission scientifique à la découverte du volcan sous-marin, réalisé par Pascal Créségut pour l’Ifremer, ainsi que d’autres montrant des habitats explorés autour du volcan réalisées au cours de la mission GeoFLAMME 2021. Marjolaine Matabos et Pierre-Marie Sarradin, deux des experts en biologie des profondeurs commentent les images avant de répondre aux questions du public au cours de la table ronde qui s’ensuit.
Etant donné la richesse des abysses en organismes vivants, les éruptions du volcan auront forcément un impact. Lequel ? La question est encore à l’étude. En effet, seuls les poissons évoluant en haut de la colonne d’eau ont été marqués pour l’instant et aucun changement dans leur comportement n’a été noté. « Ce qui va être véritablement intéressant, c’est de voir l’impact que va avoir le volcan sur les espèces évoluant en eaux profondes comme les poissons coralliens par exemple », déclare un autre expert de l’Ifremer, qui affirme que même si rien n’a encore été démontré, les éruptions sous-marines affecteront forcément la chimie de l’eau et auront un impact sous toutes les espèces évoluant dans les eaux profondes situées autour du volcan.
Les recherches ne font que démarrer et le volcan sous-marin de Mayotte a encore bien des secrets à livrer. Cette conférence avait surtout pour objectif de vulgariser les premières connaissances qu’ont acquises les scientifiques au terme de près de trois ans de recherches et de dissiper les interrogations du public notamment quant à la dangerosité éventuelle de ce volcan. Si les experts se veulent pour le moment rassurants, ils évoquent la tenue d’une prochaine conférence portée plus précisément sur ce sujet. Quant aux questions de connaissances pures, les hypothèses ne pourront être confirmées ou infirmées qu’au cours des prochaines missions scientifiques prévues en mer. Le Marion Dufresne repartira d’ailleurs explorer les eaux profondes autour du volcan du 9 au 22 juillet prochain.
Le régime de sécurité sociale est entièrement composé d’ordonnances en ce qui concerne Mayotte. Ainsi, les Mahorais
n'ont pas accès à toutes les prestations familiales disponibles en France.
Dans un rapport rendu public le 21 mars, le haut conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA) a établi un constat sur la situation des familles, des enfants et des personnes âgées vulnérables dans les départements et régions d’Outre-mer. Si des pistes en vue d’améliorer cette situation ont été proposées, Mayotte accuse encore un sacré retard vis-à-vis des autres territoires français.
Si les territoires ultramarins présentent un certain nombre de réalités communes par rapport à la métropole, plusieurs d’entre eux accusent plus de retard que d’autres, à l’instar de Mayotte, département français depuis seulement 2011, qui connaît un dynamisme démographique exceptionnel. Une situation liée à une fécondité élevée associée à une immigration importante de populations jeunes. Rien de bien nouveau de ce point de vue-là.
Ainsi, dans un rapport rendu public le 21 mars dernier, le haut conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge revient plus en détail sur les politiques familiales menées au cours des dernières décennies. Et à Mayotte, il faut noter qu’une partie des prestations versées en métropole ou dans les autres collectivités d’Outre-mer sont inexistantes (allocation de soutien familial, prestation d’accueil du jeune enfant, allocation journalière de présence parentale, revenu de solidarité Outre-mer) ou sont servies avec des montants inférieurs (minoration drastique des allocations familiales à partir du troisième enfant, complément familial étendu sur le modèle ultramarin d’avant 2019, revenu de solidarité active et prime d’activité à 50%) et des conditions plus restrictives sur l’île aux parfums. « Le système des prestations légales reste aujourd’hui encore en deçà de celui applicable dans l’Hexagone et dans les autres Drom. »
Un calendrier ambitieux de convergence
Ces différences peuvent s’expliquer par la complexité de l’évolution des prestations sociales et familiales dans ce territoire, dont le régime de sécurité sociale est entièrement composé d’ordonnances, avec le risque permanent qu’un arbitrage interministériel décide ne pas étendre le nouveau dispositif pour des raisons diverses et variés (inadaptation au contexte local, trop coûteux, contraire aux objectifs de baisse de la natalité ou d’incitation au travail). Ainsi, le HCFEA recommande de définir « un calendrier précis et ambitieux de convergence » et de faire rentrer Mayotte « dans le droit commun ».
En conclusion, l’absence de certaines prestations, les conditions restrictives d’octroi de celles existantes ou leur faible montant font de Mayotte un cas à part où les bénéficiaires sont peu nombreux (22.735), ce qui représente 31.7% de l’ensemble de la population couverte par la caisse d’allocations familiales (88.343). Un chiffre relativement faible qui s’explique en raison de conditions exigibles plus restrictives. En effet, les familles étrangères doivent justifier d’une carte de résident de dix ans. A contrario, dans les autres départements, des cartes de séjour temporaire ou des autorisations provisoires de séjour de plus de trois mois suffisent. Néanmoins, la situation pourrait évoluer puisque l’ordonnance n°2021-1553 du 1er décembre 2021 prévoit un nouveau décret fixant les titres de séjour permettant d’ouvrir droit aux prestations familiales.
La Préfecture, l’Agence régionale desanté de Mayotte, le conseil départemental et la Caisse de sécurité sociale de Mayotte, en collaboration avec l’association Sauv Life, organisaient du 28 mars au 1er avril, pour la première fois sur l’île, une semaine de sensibilisation sur l’arrêt cardio-respiratoire et les gestes qui sauvent.
Lors d’un arrêt cardio-respiratoire (AC), chaque minute passée sans intervention réduit les chances de survie de 10%. À Mayotte, 100% des personnes victimes d’un AC en dehors d’une structure médicale décèdent. Un enjeu de santé publique majeur, mais des gestes simples, que chacun peut réaliser, permettent de sauver des vies.
« En apprenant les bases des premiers secours, les Mahorais seront en capacité d’intervenir auprès d’une personne en situation de difficulté cardio-respiratoire », explique le président de l’association Sauv Life, docteur Lionel Lamhaut. Sa structure a invité cette semaine tous les publics à partir de 10 ans à se former au massage cardiaque.
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« Vous placez vos mains comme-ci »
Vendredi 1er avril, dans les locaux de l’entreprise Électricité de Mayotte, les volontaires viennent apprendre les gestes qui sauvent. « Ça peut nous arriver n’importe où il faut pouvoir agir », affirme Assiati, employée du service public d’électricité. Avec sa collègue Faouzia, la mère de famille très concentrée s’applique à reproduire les mouvements indiqués par la formatrice. « Vous placez vos mains comme-ci », détaille-t-elle en positionnant ses mains sur le sternum du mannequin, « Puis, vous gardez un rythme constant et vous ne vous arrêtez pas de masser jusqu’à l’arrivée des secours », commente Inssa Boueni Safi, infirmière aux urgences depuis cinq ans.
« Et un, et deux, et trois », au son des instructeurs, les élèves du jour réalisent pas à pas leurs premiers gestes de secourisme. « Le message aujourd’hui, c’est que vous ne pouvez pas faire de mal. Le pire, c’est de ne rien faire. C’est la peur de mal faire qui tue », affirme l’urgentiste Lionel Lamhaut. Deuxième cause de mort en France, après le cancer, l’arrêt cardio-respiratoire n’est pas une pathologie à négliger.
ENCADRE Une application qui sauve des vies
L’application Sauv Life doit augmenter les chances de survie d’un arrêt cardiaque. Grâce à cet outil, l’utilisateur est géolocalisé et a accès à une carte des défibrillateurs autour de lui ce qui permet une intervention rapide de citoyens sauveteurs en attendant l’arrivée des services de secours. « Que vous soyez formés ou non, professionnel de santé ou non, vous pouvez aider une victime en téléchargeant cette application gratuite dédiée à une urgence vitale. »
Un dispositif déjà efficace dans les 71 autres départements déjà équipés. « Grâce à l’application et aux gestes qui sauvent, aujourd’hui, c’est un cœur qui repart un jour sur deux », affirme les représentants de Sauv Life. Une lueur d’espoir donc sur un territoire où les arrêts cardiaques surtout chez les plus jeunes font des centaines de victimes chaque année.
Les associations sportives de Mamoudzou ont été invitées à participer au premier forum de l’excellence sportive présidé par le maire de Mamoudzou, Ambdilwahedou Soumaïla, et Toiyifou Ridjali, adjoint à l’excellence sportive et la vie associative. Ces rencontres s’intègrent dans la dynamique de développement de l’excellence sportive déclinée dans le projet de ville Mamoudzou 2030.
Ce premier forum a permis d’échanger sur plusieurs objectifs : rendre accessible l’excellence sportive grâce à la construction de nouveaux équipements sportifs dont des citystades, des plateaux multisports, une école de formation multisports, des bassins mobiles, des bassins aquatiques ; mettre en place le projet « Parcours de l’excellence sportive » afin de promouvoir et accompagner la pratique du sport de haut niveau (la ville propose également une aide à destination des jeunes sélectionnés pour intégrer le programme d’excellence sportive) ; créer une école multisports ouverte aux jeunes à partir de six ans dont une action principale serait l’apprentissage de la natation ; mettre en place plus d’événements sportifs afin d’encourager les rencontres régionales.
En marge de son déplacement à La Réunion, le 6ème vice-président du Département, Daoud Saindou-Malidé a souhaité se rendre dans le quartier de Bras Fusil à Saint-Benoît pour y rencontrer les associations de terrain. La commune est particulièrement touchée par une flambée de violence depuis quelques mois, il paraissait donc important pour l’élu de prendre le pouls sur place.
Les représentants associatifs – tous investis dans le domaine de l’insertion et de l’animation – ont partagé leur constat concernant la présence de mineurs désœuvrés et sans occupation dans le quartier. La présidente de l’association Nouroulmadiniya a alerté sur le cas des jeunes envoyés à La Réunion, hébergés chez des proches et pourtant livrés à eux-mêmes.
L’association AISAJS a quant à elle fait part de ses difficultés à trouver un local et à trouver des interlocuteurs pour présenter ses projets. Le vice-président a écouté avec attention et a souhaité que le contact avec la municipalité soit facilité par l’intermédiaire de la délégation de Mayotte. Cette dernière s’est engagée à revenir rapidement pour recueillir les doléances des habitants et poursuivre le travail social engagé depuis plusieurs mois déjà dans le secteur.