C’est un partenariat tripartite (entre le rectorat, l’agence régionale de santé de Mayotte et le parquet de Mamoudzou) qui s’engage dans la lutte contre tous types de violences. À travers un observatoire, ces trois institutions, accompagnées du Département et de la préfecture, souhaitent comprendre le fond du problème en collectant des données.
Pourquoi Mayotte subit une montée des violences ? Qui en sont les auteurs ? Quelles peuvent être les solutions ? Des questions auxquelles l’observatoire des violences à Mayotte va tenter de répondre. Autour de la table : l’agence régionale de santé, le rectorat, le parquet, le Département, l’association des maires et la caisse d’allocations familiales. Chaque institution devra se pencher sur le fond du problème et collecter des données pour “appréhender scientifiquement cette situation préoccupante, aux fins de proposer des solutions de fond et des outils pragmatiques permettant d’agir efficacement sur le phénomène et sur le long terme”. Concrètement, il s’agit de récolter des témoignages, de définir l’origine des violences, d’identifier leurs auteurs, de comprendre leurs motivations, et de sensibiliser la population à ces différentes problématiques. Chaque institution aura un rôle bien précis. Tous les partis devront par la suite mettre leurs travaux en commun.
Le parquet met à disposition ses données
Le tribunal de grande instance de Mamoudzou fait partie des signataires de l’accord portant sur l’observatoire des violences. “La contribution du tribunal est de mettre à disposition des données qui sont fiables de telle sorte à pouvoir analyser l’âge des auteurs, le genre, leurs domiciles, l’endroit où ils sont nés… En bref, des éléments assez riches pour pouvoir analyser ces violences”, indique Virginie Benech, magistrate au TGI de Mamoudzou. Le tribunal possède également des éléments concernant le nombre d’infractions commises sur le territoire et devra les communiquer. Des informations transmises par la gendarmerie et la police. À ce jour, aucune analyse ne permet de tout regrouper. D’où l’importance de cette contribution du monde judiciaire.
Car la répression n’est pas l’unique solution face à la montée de la violence. “Il est souvent reproché au tribunal de ne pas prononcer des peines assez longues et sévères, mais la réponse n’est pas là, en réalité. La solution n’est pas d’enfermer et de jeter la clé du centre pénitentiaire. La question est de savoir comment ces violences sont arrivées à Mayotte afin que nous puissions tous vivre ensemble.” Et l’une des pistes pour y parvenir est de diffuser, partager et comprendre les valeurs de la République.
Le rectorat veut travailler avec les parents
L’Éducation nationale n’est pas en reste : c’est l’une des trois institutions à l’origine de ce projet. Le rectorat de Mayotte s’est déjà penché sur la question des violences sur l’île. “Nous avons un groupe de travail qui agit et étudie les violences scolaires, les violences faites aux élèves, celles faites aux femmes et bien d’autres. Nous avons récolté des témoignages intéressants qui permettent de faire un état des lieux de cette société ainsi que des différentes formes de violences. Nous allons continuer ce travail”, affirme le recteur de Mayotte, Gilles Halbout. Il faudra par la suite enclencher le processus de sensibilisation pour permettre aux jeunes d’apprendre à s’exprimer et à mettre des mots sur leurs ressentis et leur vécu. Une étape clé pour dénoncer les violences. Quant aux parents, pas question de les laisser sur le bas-côté. Le dispositif “école des parents” doit justement les mettre à contribution. “Il y a un travail de prévention à faire avec eux sur les différents types de violences même celles qu’on ne voit pas”, poursuit Gilles Halbout. Un congrès sur la parentalité et la jeunesse devrait prochainement être organisé. Il s’agira d’un moment de recherche et d’échanges entre les différents acteurs actifs sur le terrain. Un point sera fait toutes les 6 à 7 semaines afin qu’il ne finisse pas au fond d’un tiroir dans quelques mois.
Le conseil départemental apporte 360.000 euros
Et le Département aussi va devoir mettre la main à la patte… ou plutôt au portefeuille, avec une jolie somme de 360.000 euros. La collectivité a confié la tâche au conseil de la culture, de l’environnement, et de l’éducation de Mayotte (CCEEM) qui est chargé de collecter des données sur toutes les formes de violences présentes sur l’île. “Ce travail de recherche d’informations et d’analyse est indispensable pour ensuite orienter les politiques publiques et les solutions”, estime Issa Issa Abdou, quatrième vice-président du conseil départemental. Elles devront être concrètes et efficaces pour que les Mahorais voient le résultat sur leur quotidien. “Autrement, nous aurons raté notre coup. Il faut donc que tous les maillons de la chaîne agissent ensemble”, avertit Issa Issa Abdou.
L’ARS de Mayotte pour une approche scientifique
Dernier pilier de cet observatoire : Salim Mouhoutar, le directeur adjoint de l’agence régionale de santé. “La violence conduit toujours à une mauvaise santé qu’il s’agisse de la santé psychique ou physique”, explique celui qui assume le rôle de chargé de mission. L’objectif de l’ARS est de faire valoir la science au sein de ce projet. “L’ARS n’est pas signataire mais sera dans le comité scientifique. Nous allons fournir des données de santé, notamment sur les addictions, les problèmes d’alcoolémie… Nous allons essayer de comprendre le comportement d’une personne dépendante par exemple”, précise Salim Mouhoutar.
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