La tension entre les habitants et l’État n’a cessé de s’accentuer la semaine dernière concernant l’ouvrage qui relie Bandraboua à Mamoudzou. Son état vétuste inquiète les riverains. Vendredi soir, il a même été incendié. Après une période de fermeture temporaire, les engins de moins de 3,5 tonnes peuvent de nouveau l’emprunter, depuis dimanche après-midi.
« Une action criminelle qui entrave la libre circulation de chacun », décrit la préfecture de Mayotte, ce samedi, dans un communiqué. La veille, le pont Bailey, à l’entrée du village de Dzoumougné, a été volontairement incendié, fermé samedi, puis ouvert de nouveau à 1 h, ce dimanche. L’ouvrage construit dans les années 40 est le principal moyen d’accès qui relie la commune de Bandraouba au reste de l’île. Mais sa vétusté et les embouteillages provoqués par la circulation alternée empoisonnent la vie des habitants. Ces derniers l’ont d’ailleurs bien fait sentir aux autorités. D’abord, lundi dernier, des barrages ont été érigés. Plusieurs heures de négociation avec la préfecture de Mayotte n’auront pas réussi à apaiser la situation. « Les services de l’État ne négocient pas sous la pression des barrages et face au refus du dialogue », avait alors fait valoir la même préfecture.
Une réunion, jeudi après-midi, a permis de faire le point sur le projet de déviation annoncé depuis des années. D’un montant de 17 millions d’euros, celui-ci doit permettre de réduire drastiquement le nombre de véhicules sur le pont et dans le centre de Dzoumogné. En effet, le trafic sera déporté en coupant la route avant la station Total pour rejoindre la RN1 plus loin, à la sortie du village, vers Bandraboua. Les travaux comprennent le remplacement du pont Bailey actuel.
Les camions interdits sur l’ouvrage
Toutefois, au vu de l’urgence aux yeux des riverains, la rencontre de jeudi a tourné court. Le lendemain, la tension est montée d’un cran avec l’incendie. « L’État tient à rappeler que de telles actions n’accéléreront pas la mise en place d’un nouveau pont », a fait savoir la préfecture, en ordonnant la fermeture de l’ouvrage, samedi. Ce dimanche, 16h, le pont était de nouveau accessible aux voitures (moins de 3,5 tonnes), mais reste interdit aux camions, qui devront passer par M’Tsangamouji s’ils veulent rejoindre M’Tsamboro ou Bandraboua.
Quant à un pont de secours, « comme cela a été publiquement annoncé, les services de l’État sont en discussion depuis le début de la semaine avec le centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema) pour étudier la venue d’un nouvel ouvrage temporaire en attendant les travaux à venir. Mais ce nouvel ouvrage ne pourra se faire que sous réserve d’aménagements préalables et de délais de routes puis de mises en œuvre », ont prévenu les autorités. En attendant qu’une solution soit trouvée, les planches en bois du vieux pont continueront de trembler autant que les automobilistes à chaque passage.
Les parlementaires montent au créneau
Mansour Kamardine et Estelle Youssouffa, les députés mahorais nouvellement réélu et élue en juin, ont aussi fait entendre leurs voix sur ce sujet. Le premier a rappelé que la déviation est programmée depuis novembre 2020 et que les travaux auraient dû commencer cette année, pour une mise en service en février 2023. Sa benjamine a choisi de s’adresser au Cerema pour qu’une solution puisse intervenir rapidement. « Le caractère d’urgence a donc pris un autre relief [après l’incendie] et je compte sur votre équipe pour accélérer et mettre en œuvre une solution qui rétablisse la situation dans les semaines à venir. La population ne saura légitimement accepter plus de délai sur un problème vieux de plusieurs décennies et pour lequel le projet de réparation et de contournement acté en 2015 puis en 2021 n’a toujours pas vu le jour », a-t-elle donné comme avertissement.