Tradition : La mosquée de Tsingoni, entre histoire et modernité

Pour mettre à l’honneur ses richesses et les faire découvrir au plus grand nombre, l’Office du tourisme du Centre Ouest organisait un éco-tour le dimanche 22 novembre. Agriculture, tradition, littoral… Toute la semaine, Thomas Lévy vous plonge dans les trésors cachés de cette partie du territoire. Carnet de route d’un habitant séduit.

Cette mosquée surprend déjà, rien qu’à son approche. À côté d’un grand minaret des plus modernes, deux splendides mausolées extérieurs, issus d’un monde disparu, dont les splendeurs trônant à l’entrée imposent silencieusement le respect de l’histoire, comme une éternité restée vivante et palpable. Autour, enterrées sous les herbes, d’autres tombes sous les détritus, une toiture défraîchie. Où de simples parpaings çà et là en guise de murs, montrent le manque de moyens qui ont fait perdre à cette mosquée, la plus ancienne de France et classée au patrimoine de la nation, beaucoup de sa splendeur de jadis…

Mais comme le prônent bien des religions, la mosquée de Tsingoni rayonne plus en son intérieur qu’à l’extérieur ! Une fois parvenus à l’épicentre du mirhab, où prie l’imam face à ses croyants, les murs de corail fondu ont trois mètres d’épaisseur et les poutres qui les soutiennent paraissent démesuréese. Ce sont les commerçants swahilis qui dès le XIIIème siècle, ère de Philippe le Bel et début de la guerre de cent ans en métropole, l’auraient construite. Au XVIème siècle, le sultan Haïssa, fils du sultan Mohamed d’Anjouan, décide d’instaurer un nouveau sultanat à Mayotte dont la capitale sera Tsingoni et refait complètement la mosquée. Si les deux tombes à l’entrée sont celles de sa femme et de sa fille, la sienne, censée siéger face aux « tombes illustres » sur la photographie, aurait disparu. Et ce n’est pas tout : le minbar était à l’origine en bois précieux… Un vestige retrouvé plus tard à plusieurs kilomètres de là, dans la mosquée de Mutsamudu à Anjouan.

 Des découvertes surprenantes… Et à venir !

 Il y a quelques années, Vincent Liétard invite un architecte syrien à Mayotte pour qu’il juge de cet édifice hors du commun. Sa connaissance des mosquées shiraziennes le porte à prédire qu’en grattant les piliers du mihrab, il ne serait pas impossible qu’on y retrouve les textes sculptés par le sultan Haïssa pour l’inauguration de cette mosquée, qu’il avait fait intégralement reconstruire. Bingo ! Un peintre avait dû s’endormir sur son pinceau…

Et combien d’autres inconnues dorment en cette mosquée depuis des siècles, entre ces parpaings et cette histoire toujours vivantes ? Combien de découvertes et de merveilles pourraient se révéler par de simples analyses scientifiques en cette mosquée ? Une fois de plus et dans un domaine très différent de l’agriculture, les perspectives affluent.

Une mosquée ouverte au futur pour ses croyants

Cela fait rêver ! Si cette culture est bel et bien présente, elle n’a pas encore été scientifiquement explorée. La France a marqué son attention et les subsides du loto du patrimoine ont permis d’engager un bureau d’études pour analyser ce qu’il serait possible de concrétiser. À commencer par la toiture… Pour le reste, le primordial est d’ouvrir cet espace unique au plus grand nombre de croyants. Et de développer les salles de prière, car l’histoire, elle, n’a pas attendu et restera de toutes façons. Avec la foi que petit à petit, cette mosquée redevienne ce pourquoi elle fut bâtie jadis.

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