Les collèges de Kawéni 1 et Majicavo-Lamir, ainsi que le lycée Bamana sortent vainqueurs d’une compétition de danse hip-hop, ce mercredi, au collège de Majicavo. Les gagnants pourront concourir au championnat de France de l’Union nationale de sport scolaire à Marseille, en mai.
« Ils sont chauds ! », perce au micro Sarah Huguet, référente de danse hip-hop, sous les huées et les applaudissements des élèves autour. « Il me faut une main innocente ! », lance cette organisatrice de l’événement dont la compétition est gérée par l’Union nationale de sport scolaire (UNSS), pour tirer au sort l’ordre de passage des compétiteurs.
Tout y est : un sol encadré de tapis en guise de piste de danse, des crews (équipes) pour les battles (affrontements), des postures et attitudes de défi après quelques premiers passages hésitants, de la danse et surtout des sourires et des accolades. Ce mercredi, l’enceinte du gymnase du collège de Majicavo-Lamir s’est transformée en véritable ring pour laisser s’affronter, en danse, des élèves des quatre coins de Mayotte plus que motivés. Objectif de cette rencontre académique : décrocher sa place pour le championnat de France de danse battle hip-hop de l’UNSS, du 14 au 17 mai. Comme l’an passé, mais cette fois-ci à Marseille.
Une cinquantaine d’élèves de huit établissements différents s’affrontent : les collèges de Ouangani, Kwalé, Kawéni 1, Sada, Pamandzi, Tsingoni, Majicavo, ainsi que le lycée de Bamana. Les élèves de deux autres lycées et du collège de Dembéni devaient également participer à la compétition mais ont préféré ne pas danser, faute d’entraînements à cause des barrages. Qu’importe, ils sont présents dans le public pour applaudir leurs camarades.
« Tout le monde peut laisser parler son imagination »
« Je voudrais montrer à quel point la danse c’est mon point fort », évoque Danielle Soumaya, 13 ans, pendant la pause. « On a travaillé dur, les samedis, les dimanches… », poursuit celle qui se voit déjà devenir danseuse professionnelle. Elle apprend depuis deux ans le hip-hop dans son collège de Majicavo, déjà sélectionné pour concourir à Marseille dans la catégorie section d’excellence. « Je connaissais l’afro puis le hip-hop m’a intrigué. Tout le monde peut laisser parler son imagination, sa danse. On s’en fout du physique, de ce à quoi on ressemble », déroule la jeune fille.
Derrière elle, les équipes s’entraînent, dans la cour, avant leurs prochains passages. « On donne des consignes théoriques mais ce sont les élèves qui pratiquent le battle, car il y a une part énorme d’improvisation », explique Lamine Fournier, professeur d’EPS, qui les encourage. « Si l’élève n’est pas connecté avec l’énergie du public, avec la musicalité, il ne pourra pas faire un bon passage. Même si le professeur lui a appris une chorégraphie. »
« Apprendre le respect de l’autre »
Et justement, les élèves inscrits en début d’année pour la compétition en ont à revendre de l’énergie. Sous des rythmes de pop lock, new school, break danse et de house, diffusés par un autre professeur devenu DJ le temps de la compétition, les danseurs jouent amicalement de leurs corps et de leurs regards avec leurs adversaires et le public, sans connaître à l’avance la musique de leurs quatre passages. Les plus téméraires s’essaient à des pirouettes en l’air et des cascades, sans aucune mauvaise réception au sol. Et surtout, le passage terminé, ils se serrent la main et se félicitent.
« On a la chance d’avoir des rencontres paisibles, bien encadrées. Les élèves sont respectueux », détaille Philippe Versaud, directeur régional de l’UNSS à Mayottte. « Au-delà de la pratique sportive, ça permet d’apprendre le respect de l’autre, que ce soit une jeune fille ou un jeune garçon, d’un village ou d’un autre. » Cela étant, les rencontres ne sont pas ouvertes au public, ni annoncées, justement pour éviter les désagréments. Pour l’un des trois danseurs professionnels, membres du jury, également composé d’autres élèves formés à juger, « B.Boy Sasuké » : « Ces battles de danse montrent qu’on peut s’affronter différemment que de se lancer des cailloux. » C’est d’ailleurs ce à quoi aspire Sarah Huguet qui invite aux micro les jeunes à rejoindre, en-dehors de l’école, comme aux origines de la danse hip-hop, des crews dans la rue, et peut-être, « faire des battles hors établissements ».
Vers 15 heures, le flot ininterrompu des enceintes s’arrête enfin. La compétition terminée, les vainqueurs sont désignés dans une liesse générale : le collège de Kawéni 1 obtient la médaille d’or des collèges ; le collège de Majicavo, sa médaille de section excellence ; et le lycée Bamana sa propre médaille également. « On va partir à Marseille ! », lance, toute en joie, Anissa, 17 ans, élève de terminale de Bamana, dont le lycée doit encore trouver les financements pour le départ, nous apprend l’UNSS.
Les sourires et les larmes s’invitent sur les visages. Mais le boulot n’est pas terminé, les mouvements restent à répéter avant de concourir à Marseille et du contenu à produire pour les élèves métamorphosés en petits reporters lors de cette rencontre.
Les financements assurés pour les collèges
Cette année, la fédération qui compte 8.600 licenciés à Mayotte (47 % de filles), subventionne d’autres sports. Il revient donc aux établissements de s’occuper de la charge financière. C’est chose faite pour les collèges de Majicavo et Kawéni 1. Le conseil départemental de Mayotte, représenté par la cheffe de service jeunesse, Soraya Soibri, lors de cet événement, a déjà versé 100.000 euros pour aider à l’organisation et le transport de tous les jeunes aux rencontres (rencontres de « districts », avant celle académique déroulée ce mercredi). Les prochains budgets doivent être votés en avril, peu avant la compétition à Marseille.