Violences faites aux femmes : comment s’en sortir ?

La psychologue mahoraise Rozette Yssouf a publié au mois de décembre dernier aux éditions Edilivre un ouvrage sur la problématique des violences conjugales. Intitulé « Femmes victimes de violences conjugales : quel cadre thérapeutique pour favoriser le processus de résilience ? », ce recueil s’interroge entre autres sur les différents moyens que possèdent les femmes pour sortir du cercle vicieux de cette violence et reconstruire leur vie.

Comment se servir d’un vécu difficile pour en faire une force ? C’est la question que se pose la psychologue Rozette Yssouf dans son ouvrage «Femmes victimes de violences conjugales : quel cadre thérapeutique pour favoriser le processus de résilience». En effet la résilience, terme propre à la psychologie, consiste justement à sublimer les traumatismes du passé pour reconstruire sa vie sur de nouvelles bases, plus saines. Le recueil est en réalité issu du mémoire de M2 en psychologie que Rozette Yssouf a soutenu à La Réunion en 2011. Pour ses recherches, elle s’est basée sur les témoignages de femmes victimes de violences conjugales venues trouver refuge au sein de l’association «Femmes Solid’Air», dont les principales missions sont l’accueil, l’écoute et l’accompagnement des femmes victimes de ces violences. Ces dernières peuvent être de type physique, psychologique, verbal ou économique.

«Certaines femmes que j’ai interrogées ont perdu jusqu’à 60 ans de leur vie aux côtés d’un mari qui les maltraitait», précise Rozette Yssouf. Le but principal de l’association «Femmes Solid’Air» est de reconstruire les liens sociaux et familiaux des victimes afin qu’elles puissent reprendre le cours normal de leur vie. En effet, la violence conjugale va presque toujours de pair avec un isolement social orchestré par l’époux. «Il est très difficile pour une femme de se sortir de ce genre de situation car la plupart d’entre elles croient que leur mari les aime malgré leur comportement violent», explique la psychologue. «Pour qu’elles réalisent qu’il ne s’agit pas d’amour, il leur faut un déclic qui peut parfois venir d’une personne extérieure au couple ou parfois d’une peur que le mari ne s’en prenne aux enfants», indique-t-elle.

 

Se défaire du «mythe du prince charmant»

 

S’il peut paraître insensé au commun des mortels que certaines femmes restent aux côtés de maris violents pendant parfois plusieurs dizaines d’années, Rozette Yssouf éclaire sur ce comportement au sein de son ouvrage. «Les femmes victimes de violences conjugales sont souvent en situation de carence affective ou en proie à un complexe abandonnique. Leur point commun, c’est la mauvaise estime qu’elles ont d’elles-mêmes», affirme la psychologue qui explique le mécanisme de domination mis en place par les maris violents. «Au départ, ils se comportent comme des princes charmants, séduisent ces femmes et lorsque les premières violences surviennent, ils expliquent qu’il ne s’agit que «d’un accident». Les femmes les croient et le cercle vicieux «lune de miel/violences» recommence éternellement», affirme Rozette Yssouf qui recommande aux femmes de «partir dès les premiers signes de violences car elles ne s’arrêteront jamais».

Si la chercheuse reconnaît que certains hommes sont également victimes de violences conjugales, elle assure néanmoins que ce type de situation concerne en très grande majorité des femmes. Pourquoi ? Car elles seraient victimes du «mythe du prince charmant» que la société leur a mis dans la tête dès leur plus tendre enfance. Les femmes tombent en effet plus facilement amoureuses que les hommes, car on leur a affirmé depuis toujours que c’était la clé d’une vie de femme réussie. Résultat des courses, elles se laissent beaucoup plus facilement dominer et agresser en imaginant qu’elles font cela «par amour».

 

Quid de Mayotte ?

 

Le livre de Rozette Yssouf traite des violences conjugales en général, mais que pense-t-elle de ce qui se passe sur son île d’origine ? «La situation inégalitaire entre les hommes et les femmes est déjà très présente en métropole et à La Réunion, mais à Mayotte elle est encore plus flagrante», précise la chercheuse qui explique que sur l’île aux parfums, les hommes n’ont que très peu de respect pour les femmes et «se croient tout permis». La faute à une éducation très patriarcale menée par les pères mais également par les mères qui ont tendance à protéger leurs époux… «Les femmes victimes de violences conjugales sont très peu soutenues à Mayotte car la société est dans le déni de ce qui se passe», déplore Rozette Yssouf qui compte continuer son combat en sortant d’autres bouquins sur le thème des inégalités entre les hommes et les femmes dans la société.

Originaire de Mayotte, la Docteure en psychologie clinique, Rozette Yssouf, vit et travaille actuellement en Bretagne.

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