Fondée en 1921 en Californie, l’association Soroptimist a fait ses débuts à Mayotte en 1990. Depuis 30 ans, des centaines de femmes se sont engagées dans la cause féminine sur le territoire à travers divers actions qui ont marqué la société, et ont fait évoluer le statut de la femme sur ce bout de France partagé entre tradition et modernité.
Plongées dans leurs albums photos, Sophia Hafidhou et Sanya Youssouf, se remémorent leurs 30 dernières années passées au sein de l’association Soroptimist. Nostalgiques d’un temps où leur engagement se caractérisait par plusieurs actions pour valoriser les femmes mahoraises. La plus emblématique est celle appelée « Excellence féminine » qui vise à récompenser les meilleures élèves filles ayant obtenu leur diplôme de baccalauréat avec mention. « Au début, nous récompensions toutes celles qui avaient une mention sans aucune différence, parce qu’il n’y avait pas assez de filles à cette époque. Maintenant, nous nous cantonnons qu’à celles qui ont la mention très bien parce qu’il y a de plus en plus de filles. En 2019, elles étaient 30, contre 10 chez les garçons », raconte Sophia Hafidhou, la présidente de Soroptimist Mayotte.
Éducation, politique, entrepreneuriat, égalité entre les deux sexes… Témoins de l’évolution de la place des femmes mahoraises dans notre société, les membres de l’association ont d’ailleurs longtemps contribué à promouvoir les femmes dans tous les domaines. Soroptimist Mayotte est à l’origine de nombreux projets qui ont été perpétués dans le temps à l’exemple des foires artisanales, ou de l’entrepreneuriat au féminin en 2005. Mais la présidente de l’association est particulièrement fière d’une initiative qui n’existe plus de nos jours.
Entre 2004 et 2007, en collaboration avec le vice-rectorat et le conseil général, ils avaient mis en place Mayotte fleurie. “Nous travaillions avec les écoles pour initier les enfants à la propreté et les inciter à s’approprier leur environnement. C’était un concours où chaque école voulait être la plus propre et la plus jolie. Par la suite, le conseil général a voulu prendre la main sur l’évènement et ça n’a pas tenu”, regrette avec amertume Sophia Hafidhou. Soroptimist Mayotte s’est également engagée dans les actions caritatives, notamment en 2014, lorsque le village d’Acoua a été frappé par les inondations ou encore en construisant une maison à une mère et ses neuf enfants en situation de précarité.
Des femmes mieux considérées mais pas assez visibles
La présidente de l’association et la secrétaire générale, Sanya Youssouf, sont toutes les deux très engagées dans la cause féminine : elles se sont battues pour que les voix des femmes comptent au même titre que celles des hommes. “Nous avons contribué à l’alphabétisation des filles. Dans les années 90, elles étaient scolarisées, mais pas longtemps parce qu’il fallait les marier. Certaines s’arrêtaient en sixième, d’autres en troisième… Très peu allaient jusqu’au bac, encore moins au-delà”, se souvient Sophia Hafidhou. Aujourd’hui, le problème ne se pose plus ou très peu, et les femmes occupent des postes à haute responsabilité. Chose qui était quasiment impossible il y a encore 30 ans à Mayotte selon les représentantes de Soroptimist.
Si le chemin parcouru a été long, celui qui reste à faire l’est tout autant. “Les femmes qui osent faire bouger les choses manquent de reconnaissance et de visibilité. Il faut valoriser davantage leurs projets”, insite Sanya Yossouf. Et Sophia Hafidhou d’ajouter : “Nous avons besoin de plus de femmes décideurs. Ce sont elles qui poussent les hommes à être des leaders et elles restent derrière. Les femmes sont partout, mais nous ne les voyons pas assez, alors il est temps qu’elles soient également au devant de la scène.”
Un besoin urgent de recruter de nouvelles adhérentes
Très active pendant longtemps, l’association perd depuis quelque temps un peu de son aura en raison de l’absence de nouvelles adhérentes. “Nous avions l’habitude d’être à peu près 60, aujourd’hui nous ne sommes que 11. Et en dessous de 10, l’association est automatiquement dissoute”, s’inquiète Sanya Youssouf, la secrétaire générale. La peur de disparaître est une chose, mais ce manque de moyens humains ralentit considérablement le travail des membres. “À 11, nous ne pouvons pas mener des projets de grandes envergures car cela demande beaucoup d’investissement. Nous avons besoin de la jeune génération, les filles ne doivent pas avoir peur de s’engager”, soutient Sanya Youssouf.
Au début des années 2000, Soroptimist Mayotte était encore à la tête de nombreux grands projets. Un dynamisme visiblement à bout de souffle puisque l’association ne se limite plus qu’à des micros actions. La célébration des 30 ans est l’occasion idoine pour elle de réaffirmer son engagement pour que les femmes mahoraises aient toutes leur place dans la société.
Pour devenir membre de Soroptimist Mayotte, veuillez contacter les membres au 06.39.20.43.70.