Une délégation des syndicats composée de Sud Santé Sociaux, de Sud Éducation, de Sud PTT, et du secrétariat national de Solidaires s’est rendue à Mayotte jusqu’au 2 mars pour constater les conséquences de Chido. Dans un communiqué intitulé “N’oublions pas Mayotte”, elle fait un point sur la situation post-cyclone et notamment le retard en matière d’égalité sociale.
“Deux mois et demi après le passage du cyclone Chido qui a soufflé avec des rafales à plus de 220 km/h pendant 45 minutes, les dégâts causés sont toujours très visibles. 90 % du bâti a été détruit ou endommagé, les maisons sont encore sans toits ou simplement bâchées, des ruines partout, des constructions en cours arrêtées, des tôles arrachées et des montagnes de déchets à ciel ouvert. Les collines auparavant couvertes de végétation tropicale sont comme rasées, malgré déjà une repousse, les arbres sont tombés ou étêtés. La sécurité civile a contribué au déblaiement, mais se voit aujourd’hui rapatriée sur l’île de La Réunion qui a subi le cyclone Garance, au grand désespoir des Mahorais·es.
La population est en grande souffrance et précarité et doit faire à un ensemble de soucis quotidiens. Les conséquences du cyclone sont encore actuellement : de l’eau au robinet uniquement un jour sur trois et pas toujours potable, et l’accès à l’eau en bouteille difficile (arrivée par à-coups dans les magasins, rationnements, et prix exorbitants), impossibilité d’avoir des fruits et légumes frais (plus d’agriculture maraîchère) ou d’avoir certains produits, blocage de marchandises au port. Avec nos camarades de Solidaires Mayotte, nous avons pu visiter des collèges, des lycées, des dispensaires, des hôpitaux, des bureaux de Poste. Nous avons pu constater que les services publics sont très dégradés : pas ou peu de transports publics (les bouchons sont récurrents, et s’ajoutent à l’insécurité sur la route du fait de pillages ponctuels à des barrages improvisés). Les lycées, collèges, écoles ont réouverts, mais les cours se tiennent par intermittence faute de salles ou d’enseignant-es. Les hôpitaux et dispensaires sont débordés, car certains sont fermés faute de personnel, et de même pour les établissements postaux. La situation a tenu, et ne tient encore que grâce aux salarié-es, aux agent-es resté-es sur place ou en état de travailler. Les salarié-es, les agent-es des services publics sont retournés travailler rapidement, en ne comptant pas leurs heures week-end compris, et en faisant passer très souvent leurs missions au détriment de leur situation personnelle. La très grande majorité est épuisée et au bord du burn-out.
“Mayotte doit cesser d’être un département d’“exception””
Mais tous les problèmes sur Mayotte ne datent pas de Chido. Les rationnements d’accès à l’eau potable, les services publics débordés ou sous équipés, et une grande précarité étaient déjà le lot quotidien. La départementalisation de Mayotte date d’avril 2011. Elle a suscité beaucoup d’espoirs, mais aussi beaucoup de déceptions. Il est temps que Mayotte cesse d’être un département « d’exception » : ni le droit du travail, ni les droits sociaux, ni la liberté de circulation ne sont les mêmes que dans les autres départements français. Par exemple, le Smic n’est toujours pas au même niveau, ni les prestations sociales ou encore le minimum vieillesse. Les instances dans les entreprises ou dans les administrations ne fonctionnent pas ou peu.
Le cyclone Chido (Chido veut dire « miroir ») n’a fait qu’éclairer l’abandon de Mayotte par les gouvernements successifs. Nous savons que la situation est complexe, mais l’argument de l’immigration pour ne pas mettre en place un plan d’urgence d’investissements sur Mayotte, dans les services publics, dans l’économie, n’est pas entendable. Il laisse perdurer une situation de mainmise post-coloniale, sans tenir compte des besoins de la population (70 % en dessous du seuil de pauvreté). La multiplication des catastrophes climatiques est une réalité qui a touché dramatiquement Mayotte, mais aussi il y a quelques jours La Réunion, et nous exprimons également notre soutien à toute la population réunionnaise, qui voit également ses services publics de plus en plus sacrifiés. La bifurcation écologique doit être mise en place avec des mesures d’urgence dès maintenant pour espérer éviter de voir ces catastrophes écologiques se multiplier et s’intensifier.
Un plan d’urgence pour Mayotte et l’égalité des droits, c’est la véritable priorité pour donner les moyens aux Mahorais et Mahoraises de pouvoir vivre et non survivre !”
Solidaires
Mayotte Hebdo vise à contribuer au développement harmonieux de Mayotte en informant la population et en créant du lien social. Mayotte Hebdo valorise les acteurs locaux et les initiatives positives dans les domaines culturel, sportif, social et économique et donne la parole à toutes les sensibilités, permettant à chacun de s'exprimer et d'enrichir la compréhension collective. Cette philosophie constitue la raison d'être de Mayotte Hebdo.