Ramadan : Le mois sacré débute au début de la semaine prochaine

Scruté au coucher de soleil lundi prochain, le ciel détient la clé du début du mois sacré de ramadan. L’apparition du croissant de lune décidera si les fidèles entament le jeûne, le lundi 11 ou plutôt le mardi 12 mars. Une date qui sera actée par un communiqué officiel des hautes instances du clergé musulman.

Quatrième parmi les cinq piliers de l’Islam (après la chaada, les cinq prières quotidiennes, l’aumône et avant le pèlerinage à la Mecque pour ceux et celles qui disposent des moyens financiers suffisant pour l’accomplir), le ramadan est attendu dans les prochains jours. L’apparition du croissant de lune déterminera son commencement, le lundi 11 mars ou, et au plus tard, le mardi 12 mars. Cette imprécision est un casse-tête annuel selon l’obédience à laquelle se revendique le croyant, entre les traditionalistes attachés au principe de l’apparition du croissant de lune au 29ème ou 30ème jour du mois en cours et les modernistes (une infime minorité) qui se contentent d’un décompte calendaire. Selon Anouar Chanfi, l’un des conseillers techniques du grand cadi de Mayotte, « cette règle prend sa source dans un hadith du prophète Mahomet, laquelle impose que le démarre le jeûne au lendemain de l’apparition du croissant de lune dans le ciel. Dans le cas contraire, on a l’obligation d’attendre le jour d’après pour considérer que le mois précédent est bien écoulé et qu’il faut entamer le ramadan ».

Dans la plupart des pays musulmans, la tradition veut que l’apparition de la lune soit confirmée par une annonce officielle de la plus haute autorité du clergé. Ainsi dans l’Hexagone, les communautés musulmanes sont informées (dans leur grande majorité) par le recteur de la grande mosquée de Paris, tandis qu’à Mayotte, c’est un communiqué émanant du grand cadi, Mahamoudou Hamada Saanda, qui fait foi. C’est que chaque terre d’Islam a ses particularités propres, ses subtilités dans l’art et la manière d’entrer dans ce mois de jeûne et de piété. Pour le monde arabo-musulman (et asiatique), la préparation démarre en réalité deux mois auparavant, depuis le mois de Miradj, avec l’abstinence de toute nourriture prohibée ou encore de tout comportement susceptible de nuire au bon déroulement du ramadan, tel qu’il est recommandé dans les écritures et les hadiths. Une tenue vestimentaire stricte est de bon augure, de même que le respect absolu des cinq prières quotidiennes. À Mayotte et ses environs, cette règle n’est pas de mise. On continue à faire ripaille jusqu’à la veille du jour J.

Une forte tendance à la dépense

Dans les faits, des 4h45, au moment où le muezzin appelle à la prière du matin, le musulman pratiquant cesse de prendre tout type de repas et de boire du liquide (eau, jus de fruits, café). Il en sera ainsi tout au long de la journée jusqu’à coucher du soleil. À l’appel du muezzin pour la prière de « maharib », il est permis, à cet instant seulement, de rompre le jeûne au moyen d’un petit verre d’eau. Ceux qui sont au logis ont le choix entre entamer le repas (trop copieux fait de mets divers et variés) ou attendre le retour de la mosquée des membres de la famille partis prier. Les repas de rupture de jeûne, « iftar » en arabe ou (par déformation) « foutari » en langue locale, ont pour fondement le partage et la convivialité. Il y a les adeptes des petites quantités répétitives tout au long de la soirée et ceux qui préfèrent un repas copieux consommé en un seul trait.

Pour faciliter la réhydratation du corps, une profusion est assurée en ce qui concerne l’eau et les boissons sucrées. Contrairement aux recommandations coraniques, les croyants ont tendance à se laisser aller à la dépense durant le mois de ramadan. Il est de coutume de satisfaire sa panse avec des denrées de consommation non courante durant les autres mois de l’année. Une attention particulière qui fait le bonheur des plus jeunes membres de la famille. Elle explique très largement la ruée caractéristique sur les produits alimentaires sur les étalages des marchés de quartier et des centres commerciaux. Farine, sucre, huile, viandes et fruits sont quotidiennement pris d’assaut.

« Le matériel l’emporte sur le spirituel »

Les familles les plus prévoyantes choisissent de constituer leurs réserves au cours des deux semaines précédant le début du mois sacré afin de s’assurer de ne rien manquer. Dans la région, celui-ci est malheureusement celui d’un grand paradoxe, une flambée des prix à la consommation, en particulier pour tout ce qui concerne les produits locaux. Les prix unitaires explosent en même temps que les quantités de base se réduisent. « Dans sa grande miséricorde, Allah nous donne une occasion exceptionnelle de racheter par le bien les erreurs que nous commettons durant les jours, les semaines et les mois écoulés. Cette faveur est, hélas, mal comprise par une partie de nos coreligionnaires. Ils estiment que leurs affaires et la vie terrestre passent avant Dieu et la vie dans l’au-delà. Ils n’ont de cesse de multiplier leurs chiffres d’affaires et par la même occasion d’amplifier leurs erreurs sur terre. Le matériel l’emporte définitivement sur le spirituel et un monde efface un autre inexorablement », regrette Abdoulghafour Mohamed Salim.

Le vieux monsieur de 80 ans, un habitant du quartier Boboka à Mamoudzou, prononce ces mots en regardant la rue commerçante très animée et déjà pourvue en denrées alimentaires et épices de toutes sortes.

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