À l’occasion de la dixième édition des Journées nationales d’action contre l’illettrisme (JNAI), le Carif Oref a convié le public à une projection du film « Champion », de Mona Achache, ce lundi 11 septembre au cinéma Alpa Joe, à Mamoudzou. Le chanteur Kendji Girac y interprète le rôle de Zack, un jeune homme illettré qui se retrouve en difficulté lorsque son père, seul au courant de son secret et en capacité de l’aider au quotidien, tombe dans le coma après un accident. La séance était suivie d’une table ronde qui a permis de sensibiliser les spectateurs sur la question de l’illettrisme.
« Ce film m’a beaucoup touché, car il m’a rappelé ma propre histoire », confie une des spectatrices à l’issue de la projection de « Champion », ce lundi matin, à l’Alpa Joe. Applaudie pour son courage par la centaine de personnes venues assister à l’événement, cette dernière raconte qu’elle a dû arrêter l’école en CM2 à Madagascar.
L’illettrisme, soit le fait d’avoir été instruit mais de ne pas ou plus savoir lire, écrire et calculer, touche particulièrement Mayotte. Si des chiffres récents et concernant l’ensemble de la population sont compliqués à obtenir, on peut noter qu’en 2018, l’illettrisme touchait plus de sept jeunes sur dix, d’après un rapport de l’Observatoire Régional de la Santé datant de 2019.
« Il faut être attentif dès la maternelle. L’illettrisme crée des difficultés à s’insérer dans la vie professionnelle, mais aussi dans la vie sociale », insiste le directeur du Carif Oref, Youssouf Moussa. « On profite de cette semaine pour sensibiliser sur la question. » C’est dans ce but que plusieurs acteurs œuvrant contre l’illettrisme ont pris la parole lors d’une table ronde à l’issue du film. « À Mayotte, on apprend à lire et à écrire en français, qui n’est pas la langue maternelle. Cela représente une double difficulté », explique Njeri Brandon, directrice du centre de formation Hodina, qui s’adresse aux adultes qui ont du mal à s’insérer socialement et professionnellement. Une difficulté qui se traduit par l’augmentation du nombre d’heures de formation pour les personnes illettrées. « Avant c’était 200 heures, mais c’était insuffisant. On est passé à 400 heures puis 600 heures en 2023 », relate Youssouf Moussa.
Des programmes pour ceux qui ont arrêté les études
Tadjidine Madi Dalger, responsable pédagogique au centre Mahafor, a profité de cette table ronde pour présenter Familire, un programme expérimental lancé dans cinq territoires d’outre-mer par l’Agence nationale contre l’illettrisme. « Ce programme s’adresse aux jeunes parents, qui ont souvent dû arrêter l’école ou les études », précise-t-il. Ainsi, le 4 septembre dernier, plusieurs stagiaires ont pu commencer ce programme à Mayotte afin d’acquérir les savoirs de base. C’est le cas pour Fairouze Houmadi, une jeune maman de 25 ans, qui suit cette formation pour pallier ses difficultés avec la lecture et l’écriture. « Je ne veux plus rester à la maison, je veux pouvoir travailler dans la petite enfance », assure la jeune femme, arrivée des Comores à Mayotte pendant son adolescence.
L’importance de la sensibilisation à l’illettrisme a été rappelée par Daoud Saindou Malide, sxième vice-président du Département chargé de la Formation professionnelle, de l’éducation et de l’insertion : « Quand on est illettré, les perspectives sont difficiles. C’est pourquoi il est important d’informer sur ce sujet ».
Quelques actions de lutte contre l’illettrisme cette semaine
Ce mardi 12 septembre : Une matinée consacrée à l’illettrisme est organisée par la Communauté de communes du Sud de Mayotte et le bus France Services du Sud. Plusieurs dispositifs et outils d’accompagnement seront présentés à la Médiathèque de Bandrélé. Une dictée géante est également organisée au Centre universitaire de formation et de recherche (CUFR) de Mayotte par le département Sciences de l’Éducation. Près de 2.000 étudiants pourront ainsi être sensibilisés à l’illettrisme.
Mercredi 13 septembre : Une rencontre est organisée à l’espace numérique et médiathèque de Chirongui à 13h30 pour sensibiliser les parents des enfants du Programme de réussite éducative de Chirongui au numérique et à la lecture.
Jeudi 14 septembre : A partir de 9h, au centre social Miréréni, à Chirongui, les animateurs conseilleront les familles et l’après-midi, un conteur sera présent. Le but est de donner le goût de la lecture aux usagers.