Dès mercredi matin, tout le monde reprendra le chemin du travail à l’intercommunalité de Petite-Terre. La cinquantaine de grévistes qui bat le pavé depuis une semaine a réussi à trouver un terrain d’entente avec les dirigeants de la collectivité locale. Un protocole d’accord a été négocié, ce lundi.
Le temps-fort a été la manifestation encadrée par deux véhicules de gendarmerie qui s’est déroulée dans les rues de Labattoir et Pamandzi dans la matinée du vendredi 21 février. En effet, une quarantaine d’agents de l’intercommunalité de Petite-Terre se sont mis en grève suite à des négociations infructueuses engagées précédemment avec l’institution avec l’aval de son président, Archadi Abassi, absent du territoire. Comme dans d’autres services publics et privés de Mayotte, ce sont les aides exceptionnelles à la suite du passage du cyclone Chido qui sont réclamées, notamment en raison de la mobilisation des agents. Dans le cas présent, le personnel mécontent réclame un coup de pouce de 4.000 euros en guise de compensation pour les efforts déployés au service de la collectivité petite-terrienne. “Sans notre implication, l’électricité n’aurait pu être rétablie dans l’ensemble des foyers de Pamandzi et Labattoir. Le seul effectif de cinq agents d’EDM (Électricité de Mayotte) n’aurait pas suffi pour ça », explique Bacar, au milieu d’un cortège d’une trentaine de manifestants arpentant les rues de Dzaoudzi et Labattoir, vendredi matin. Outre cette aide financière, les agents grévistes réclament également une revalorisation de leur ticket restaurant (actuellement à 8,50 euros pour atteindre onze ou douze euros) et une prise en charge de leur mutuelle à hauteur de 40 euros. « Quitte à ce que notre employeur gèle en contrepartie le financement de notre plan de formation, ce n’est pas grave », explique l’un des manifestants.
En réalité, cette affaire était prévisible pour les élus communautaires de Petite-Terre qui avait essayé d’anticiper les choses avant que le mouvement ne prenne forme. Il en a logiquement été question lors du conseil intercommunal du 29 janvier 2025. Pour Archadi Abassi, il était évident de faire un geste en faveur des agents mobilisés dans le cadre du cyclone Chido, lesquels avait fait abstraction de leurs situations personnelles pour venir en aide à la population de Dzaoudzi-Labattoir et Pamzndzi. « À la base, ma réflexion allait dans le sens de leur accorder une aide de 1.220 euros aux seuls agents qui ont travaillé sachant que les difficultés financières de la CCPT ne nous permettaient pas de faire plus.” Son président insiste sur le fait qu’il a coutume de prendre ses décisions en parfait accord avec ses huit vice-présidents (quatre de la commune de Dzaoudzi-Labattoir et quatre de Pamandzi). C’est à ceux-là qu’il a donné mandat de négocier avec les quatre représentants du personnel à travers un comité de crise mis sur pied au terme d’un premier round de négociations avec le directeur général des services qui n’avait pas abouti. « Autant je salue le soutien sans faille et la pleine implication de mes quatre vice-présidents de Labattoir, autant je déplore la désertion de ceux de Pamandzi, à l’exception d’un seul du quartier Sandravoangue et une autre inactive depuis quelques mois pour des raisons de santé. Les deux autres ont totalement disparu de la scène sans explication aucune”, se désole Archadi Abassi.
Un accord ce lundi
Après d’interminables heures de négociations entre élus et représentants du personnel gréviste, les deux parties seraient parvenues à un accord de principe, ce lundi. D’après le président de la CCPT, un projet de protocole d’accord aurait même été soumis aux élus par les grévistes. Sauf fausse note de dernière minute, il prévoit de le parapher dans la journée de mercredi. « Au final, nous avons convenu de verser 2.500 euros aux quarante agents ayant travaillé après le cyclone Chido et 2.000 euros aux autres. La valeur du ticket restaurant passe de 8,50 euros à 10,50 euros et nous leur accordons également les 40 euros demandés pour la mutuelle », annonce le chef de la collectivité. Les grévistes de la CCPT ont aussi obtenu le paiement de la totalité des jours grevés.
Côté financement pour une intercommunalité aux finances dans le rouge, « les sommes seront puisées dans un fonds de deux millions d’euros (dotation et subvention) attribué à l’intercommunalité au moment de sa création en 2017”, confirme Archadi Abassi. Malgré 440.000 euros de déficit dans l’exercice en cours, la situation est acceptable pour le conseil communautaire qui ne veut pas d’un relèvement des impôts et autres contributions, à un an des élections municipales et communautaires. S’il peut enfin pousser un ouf de soulagement, le président de l’intercommunalité de Petite-Terre s’interroge, à juste titre, sur le désordre ambiant consécutif aux aides accordées sur l’île suite au cyclone Chido. “Comment expliquer une telle disparité entre agents de la fonction publique sur un même territoire, au seul motif que les uns sont au service de l’État et les autres du département ou des communes ? Comment peut-on accorder 3.000 € à certains et seulement 1.200 euros à d’autres alors qu’ils ont tous vécu les mêmes affres et subit les dégâts de même nature ?”
Une question qu’il n’a pas manqué de poser à Manuel Valls, le ministre de l’Outremer, dans un courrier qu’il lui a adressé en fin de semaine dernière après avoir interrogé le payeur municipal sur le cadre légal de référence de cette démarche. Celui-ci lui aurait répondu qu’il se basait sur une directive donnée par François Bayrou, l’actuel chef du gouvernement.
Journaliste politique & économique