Jeunes en situation de handicap : comment s’insérer professionnellement ?

Des chercheurs du centre universitaire de formation et de recherches (CUFR) de Mayotte ont initié le projet MayMobPro (Mayotte mobilité professionnelle) dans l’objectif de traiter le sujet de l’insertion professionnelle et de la construction vocationnelle des jeunes en situation de handicap en lycée professionnel. Lancé en 2020, ce projet d’étude, qui a pour but d’aboutir à des pistes de réflexion, arrive à son terme.

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Pendant deux ans, les élèves du dispositif Ulis ont réalisé un film sur leur parcours de formation et leurs stages.

Selon des études, le choix de carrière et la construction de l’identité professionnelle sont des mécanismes longs, plus prononcés pour les jeunes en situation de handicap. Le projet MayMobPro a vu le jour dans le but d’étudier le comportement de ces jeunes et de comprendre leur projection dans le monde professionnel. Afin de mener ce projet, financé par la Fondation internationale de la recherche appliquée sur le handicap (FIRAH), les adolescents du dispositif Ulis (Unité localisée d’inclusion scolaire) en lycée professionnel ont été suivi lors de leurs stages, de leurs ateliers et de leur formation professionnelle. « On regarde comment ils se construisent », explique Gaëlle Lefer Sauvage, enseignante-chercheuse au CUFR, à l’origine de cette étude.

Une valorisation du travail

La méthode de recherche est particulière, « car nous sommes en même temps sur une méthode expérimentale, où l’on teste une application de vidéo montage et en même temps, sur une méthode très immersive, quasiment anthropologique », ajoute-t-elle. En effet, pour cette étude, des outils numériques ont été utilisés. Ce choix se justifie par le fait que ces outils participent « à une vraie compensation pour des difficultés ou problèmes d’accessibilité à des besoins pour certains enfants », complète la chercheuse.

Après une présentation des outils et un accompagnement à la prise en main, pendant deux ans, des lycéens en situation de handicap se sont donc filmés pendant leur formation professionnelle et pendant leur stage respectif, avec comme ambition la valorisation de leur travail en milieu professionnel. Pour Cendrine Mercier, enseignante-chercheuse au centre de recherche en éducation de Nantes (CREN) et membre de l’équipe sur cette étude, la vidéo permet « d’avoir une trace et de travailler la trace active. C’est une richesse de leur proposer des images d’eux en action, ils vont donc pouvoir travailler sur quelque chose de très mouvant ». Ce travail leur permettra, entre autres, de mieux comprendre les compétences acquises et développées au travers de leurs gestes. Cinq élèves, issus du dispositif Ulis en lycée professionnel, ont donc réalisé chacun un film sur leurs parcours scolaire respectif. Cette approche de vidéo montage a également été ouverte à d’autres élèves et enseignants, un effet boule de neige qui « finalement, créer un engrenage pris au niveau du lycée », remarque la chercheuse du CUFR.

« Trouver un sens commun à l’école et au travail »

Afin de mener à bien cette étude, et en parallèle au travail d’alternance filmique – situation où le réalisateur est aussi acteur, spectateur et monteur critique – des entretiens avec les familles ont également été menées. En complément, des enquêtes ont été menés en février dernier. Le troisième axe de travail, celui guidé par Cendrine Mercier, spécialiste des usages numériques et bien-être des jeunes, est un temps de dialogue entre deux espaces, l’école et la famille. Familles, jeunes, associations (Mlezi et Messo – partenaires de l’étude), tuteurs de stage, un total de 19 personnes, se sont récemment rassemblées pour « trouver un sens commun à l’école et au travail, rassembler les attentes, espoirs et craintes de chacun », note-t-elle.

Présentation des capsules vidéo de chaque élève, ateliers facilitateurs d’échanges sur une base de petits jeux pour lever les différentes barrières – celle de la langue, notamment – ont rythmé l’atelier participatif. « Je pense que les jeunes étaient fiers d’eux et l’enseignant aussi », confie Gaëlle Lefer Sauvage. Cendrine Mercier quant à elle, explique qu’en fin de réunion, « une élève lève la main et lance, « moi je voulais juste dire que je suis contente de savoir que l’on peut travailler tous ensemble ». Finalement, elle a résumé en quelques mots, ce qu’on devrait tous faire depuis longtemps ».

Et la suite de projet d’étude ? « La rédaction de nos recherches, qui donneront lieu à des pistes de réflexions, mais aussi aideront au maximum les équipes à voir les points de difficultés », argumente l’enseignante du CUFR. Tout au long de l’étude et afin de permettre une continuité dans les actions, une personne ressource – par ailleurs enseignant spécialisé – avait été désignée. Cette personne pourra être le relais, porter le projet et continuer les actions menées. « Le participatif, c’est super important, cela montre que l’on n’abandonne jamais personne », concède l’enseignante-chercheuse nantaise. Cette étude permettra dans l’avenir une potentielle ouverture vers d’autres établissements et la formation d’autres enseignants.

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