Claude Amiot a effectué une mission de bénévolat à Mayotte suite au cyclone Chido du 4 au 18 février. Il s’agissait de son premier séjour sur l’archipel. L’ancien directeur de l’assistance sociale de la Croix-Rouge dans l’Aube de 61 ans nous livre son expérience de retour en métropole. Interview.
Flash Infos : Comment apprenez-vous la nouvelle du cyclone et comment vous mobilisez-vous?
Claude Amiot : On apprend les nouvelles par les informations. La Croix-Rouge nous fait parvenir un mail pour avoir des bénévoles en partance pour Mayotte. Je souhaitais donc ajouter ma pierre à l’édifice. J’ai postulé. Dès fin janvier, j’ai été contacté pour une mission de deux semaines, du 4 février au 18 février.
F.I : Quelles ont été vos missions sur le territoire de Mayotte ?
C.A : On travaillait de 4 h du matin jusqu’à 14 h à 15 h, tous les jours. Nous avions un rôle différent en fonction des jours. La première mission consistait à trier ce qu’on recevait au port de Longoni sur palettes et à les envoyer dans des villages. Ensuite, distribuer la nourriture par sacs. La seconde concernait la mission Wash, c’est-à-dire transformer l’eau de la rivière en eau potable et aller remplir les citernes dans les bidonvilles, pour que les habitants puissent avoir de quoi boire et se laver. La troisième mission consistait à fournir des tentes et des bâches pour permettre aux personnes en habitat précaire d’être un peu mieux logées. Enfin la dernière mission avait pour but de rétablir les liens familiaux. Nous allions dans les bidonvilles avec un routeur et un téléphone portable pour que les habitants puissent contacter leurs proches. Il y avait aussi cette mission de liens sociaux, d’essayer au mieux de leur apporter un réconfort.
F.I : Quelle action vous a le plus touchée ?
C.A : La situation des enfants m’a grandement touchée. En tant qu’humaniste, on n’a jamais une carapace par rapport à ce qui nous arrive, mais j’ai été touché par la résilience des enfants. Ils gardaient le sourire malgré la faim et la soif. D’autres arrivaient à l’hôpital avec des plaies. Il y avait des enfants résilients qui ne pleuraient pas. Ils m’ont tous énormément émus par leur courage.
F.I : De votre point de vue, quel autre engagement reste-t-il à remplir à Mayotte ?
C.A : Je suis rentré avec le goût d’une mission inachevée. On a des valeurs, mais on travaille aussi avec les outils que l’on nous donne. La Croix-Rouge a apporté ce qu’elle pouvait. Mais ce qu’il reste à faire doit se décider au niveau de l’État. J’ai le sentiment que l’Etat avait abandonné Mayotte bien avant le cyclone. Les conflits qu’il y a présents entre migrants comoriens et Mahorais. À notre niveau, avec l’association nous avons pu faire quelque chose, mais que se passera-t-il après ? On a essayé de transmettre un maximum de ressources avec le Département de Mayotte et la Croix-Rouge de Mayotte. Je les salue, car ils ont eux aussi connu le cyclone, bénévoles et salariés de la Croix-Rouge qui tous les jours, n’hésitent pas à aller aider ses habitants en tant qu’humains. C’est magnifique ce qu’ils font.
F.I : Avez-vous travaillé en collaboration lors de vos missions ?
C.A : Oui, nous avons beaucoup travaillé avec les pompiers, la protection civile et puis la Croix-Rouge. Chacun avait sa mission, on se retrouvait souvent au port pour faire les palettes et la distribution.
F.I : Avez-vous identifié une urgence nécessitant une attention particulière ?
C.A : Je suis allé à Mayotte aider l’humain sans a priori. Je crois que la faim, la soif et le cyclone ont donné cette impression d’inégalité. Les politiques sont venus à Mayotte pour parler d’immigration et attiser la haine que les gens ont à l’heure actuelle. Quand les gens ont soif, il y a énormément de conflits. À la Croix-Rouge, nos voitures ont été caillassées, car on n’avait plus rien à donner à manger. J’ai peur qu’à l’heure actuelle, l’île entre en conflit civil, en oubliant qu’un humain reste un humain. Je ne vis pas à Mayotte et je ne connais pas les problèmes politiques mais j’ai peur que les politiques français ne se soient pas déplacés par esprit de bienveillance.
Journaliste, aussi passionné par les paysages de Mayotte que par sa culture. J’ai toujours une musique de rap en tête.