L’Institut nationale de la statistique et des études économiques et la préfecture de Mayotte se sont associés pour dresser un panorama économique et social de la situation des femmes sur l’île aux parfums. Réalisée par Sébastien Merceron, cette étude a été dévoilée ce mardi 5 juillet 2022 à la Case Rocher en Petite-Terre et sa synthèse est en ligne sur le site de l’INSEE.
L’étude menée par Sébastien Merceron de l’institut national de la statistique et des études économiques, en collaboration avec la préfecture de Mayotte, a été dévoilée ce mercredi 5 juin à la Case Rocher. Extrêmement longue et détaillée (l’étude complète fait 48 pages), ce panorama de la situation des femmes de l’île au lagon a été présentée au public présent pendant près de quatre heures. Une synthèse, disponible sur le site de l’INSEE, a néanmoins été réalisée et dévoile les grandes conclusions de l’étude : les femmes sont plus nombreuses à Mayotte que les hommes et ont un accès plus faible à l’emploi, en particulier pour celles nées au Comores. Elles ont un taux de fécondité nettement supérieur à celui de la métropole et sont aussi bien plus souvent victimes de violences. Par ailleurs, elles souffrent souvent d’obésité faute d’une alimentation saine et d’une activité physique régulière. En revanche, beaucoup pratiquent des danses traditionnelles comme le debaa ou les mbiwis et seules 50% d’entre elles affirment manquer de temps libre contre 70% en métropole.
L’emploi des femmes progresse, mais reste en retrait
Bien que la scolarisation des femmes à Mayotte ait eu du retard par rapport à celui des hommes, les jeunes mahoraises sont désormais souvent davantage diplômées que leurs homologues masculins. Sept femmes sur dix âgées d’entre 20 et 29 ans possèdent en effet un diplôme qualifiant contre six hommes sur dix dans la même tranche d’âge. En revanche, seules deux sur dix résidant à Mayotte mais nées à l’étranger sont diplômées et un tiers d’entre elles n’ont jamais été scolarisées. Cet écart avec les natives de Mayotte est valable dans tous les domaines. Ainsi, si les femmes font désormais davantage d’études que les garçons, le pourcentage des décrochages scolaires est nettement plus élevé chez les enfants nés à l’étranger. Ce fait explique que, malgré la meilleure scolarisation et réussite scolaire des femmes nées sur le département, au final 44% de celles âgées de 15 à 29 ans qui vivent sur l’île n’ont ni emploi ni formation soit dix points de plus que parmi les jeunes hommes.
L’emploi au féminin est d’ailleurs encore rare à Mayotte. En 2019, seules 27% des femmes résidant à Mayotte et en âge de travailler disposaient d’un emploi. Même si leur taux d’emploi a nettement progressé depuis 2009, il reste plus de deux fois plus faible que celui des femmes résidant dans l’Hexagone. La problématique de la garde des enfants est l’un des grands freins à l’emploi sur l’île dans un contexte de forte fécondité. À diplôme égal, les Mahoraises sont nettement moins souvent en emploi que les Mahorais et leurs emplois sont moins diversifiés (un sur deux est occupé dans la fonction publique). En outre, elles restent minoritaires dans les emplois de cadre, même si elles y accèdent plus souvent qu’avant. Toutefois près d’une entreprise individuelle sur deux est créée par une femme à Mayotte, ce qui témoigne de leur forte participation aux emplois non salarié.
Un grand nombre de mères isolées aux conditions de vie précaires
Si la vie de couple démarre tôt pour les femmes à Mayotte, les séparations interviennent également tôt et, dès 35 ans, elles sont de moins en moins souvent en couple. Du fait de ces séparations et de la forte fécondité, 23% des femmes âgées de 20 à 54 ans vivent seules avec leur(s) enfant(s), un taux deux fois plus élevé qu’en métropole. Ainsi, ces mères isolées sont souvent confrontées à une grande précarité et la quasi-totalité d’entre elles vivent sous le seuil de pauvreté national dans des conditions d’habitat difficiles. Avec 4.6 enfants par femme, le taux de fécondité à Mayotte est le plus élevé de France. Confronté à de nombreuses maternités, à une alimentation souvent peu équilibrée et à un manque d’activité physique, elles souffrent davantage de limitations fonctionnelles et de maladies chroniques. Plus d’un tiers d’entre elles sont notamment en situation d’obésité. La moitié renoncent à se soigner faute d’argent ou d’une offre médicale suffisante.
Les femmes mahoraises davantage victimes de violences que les métropolitaines
Les femmes vivant sur l’île au lagon sont également plus souvent victimes de violences. En 2020, 9% des adultes indiquent avoir subi des violences sexuelles ou physiques au cours des deux dernières années, soit deux fois plus qu’en France métropolitaine. En particulier, 5% d’entre elles déclarent avoir subi des violences sexuelles, principalement par des hommes extérieurs au ménage, soit quatre fois plus que dans l’Hexagone. 5% d’entre elles précisent avoir subi des violences physiques par leur entourage essentiellement familial.
Pour en savoir plus : https://www.insee.fr/fr/statistiques/6472945?sommaire=6472966&q=femmes+mayotte