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Le directeur général de Mlezi Maoré, Hugues Makengo, a présenté le bilan 2023 de l'association, ce vendredi. Il est entouré ici du directeur du pôle solidarité, Pablo Lordelot, et le chef de service UHL (Unité Hébergement Logement), Daoud Abdallah.

Lannée 2023 a été compliquée chez Mlezi Maoré. Faute de financements, lassociation qui œuvre dans le social et la santé a dû procéder à une poignée de licenciements et fermer des dispositifs. Ce vendredi 12 juillet, Hugues Makengo, directeur depuis la fin 2022, a insisté sur sa volonté de garder les comptes à l’équilibre tout en améliorant les prestations existantes.

800.000 euros de pertes

« On a eu une crise des financements sévère, parce que nous sommes lun des plus gros », ne cache pas Hugues Makengo, le directeur général de Mlezi Maoré, ce vendredi matin. En plus de la crise de l’eau, l’année 2023 a été compliquée pour les associations qui se sont retrouvées coincées par les négociations tardives entre l’État et le Département de Mayotte, le principal acteur dans le social sur le territoire. La convention signée en décembre 2023, qui a octroyé 50 millions d’euros à la collectivité départementale et 100 millions prévus en 2024, a été une bouffée d’air pour toutes les structures qui travaillent avec elle.

Comme d’autres, la difficulté à récupérer des fonds européens a aussi été préjudiciable à Mlezi, ces dernières années. Pour le premier acteur Mahorais dans le domaine, « ce sont 3,5 millions deuros perdus sur quatre ans », estime le directeur. En effet, les montants initialement fléchés doivent faire l’objet d’un strict contrôle des justificatifs pour débloquer les fonds. « Ces justificatifs, on les a. Cest plus leur interprétation qui pose problème », explique-t-il, citant comme exemple un véhicule qui n’est plus financé parce qu’il est mutualisé avec d’autres services. En tout, 800.000 euros de pertes ont été enregistrés. « On va travailler autrement ces volets financiers », promet-il.

Sept licenciements

Ce trou dans les finances n’a pas été sans conséquence. La Maison de santé mentale de Tsingoni, qui venait à peine de voir le jour, a dû être transformée en CMPP (centre médico-psycho-pédagogique). En effet, L’expérimentation faite avec le Centre hospitalier de Mayotte n’a pas pu continuer et la structure a dû passer de 24 à 7 professionnels de santé. « Cest lAgence régionale de santé qui nous suit désormais, le CMPP répondant à un besoin sur le territoire », indique le directeur de Mlezi Maoré. Du côté des chantiers d’insertion bâtiment et forestier, ils ont été tout simplement arrêtés. En tout, une trentaine de salariés ont vu leurs emplois menacés. « On a pu amortir les perturbations. On a limité les départs à neuf personnes (N.D.L.R. il y a eu sept licenciements et deux démissions). Cest lavantage d’être grand », fait remarquer Hugues Makengo, qui remercie aussi les partenaires sociaux. Autre mesure prise, la mutualisation des sites ou des véhicules, qui ont permis 150.000 euros d’économies. « Ce sont toutes ces mesurettes qui ont permis de limiter la catastrophe. »

Un nombre de bénéficiaires en hausse

Malgré les répercussions sur ses activités, l’association connaît une nouvelle augmentation de son nombre de bénéficiaires en 2023. Il est passé de 7.400 à 9.006 pour 47 établissements ou services. À noter que le pôle jeunesse devance dorénavant celui de handicap. Le temps où Mlezi Maoré grossissait à marches forcées est cependant révolu. Le directeur l’assure, c’est le temps de « la maturité ». En 2023, l’association a tout de même ouvert une plateforme TND (Troubles du neuro-développement) à Doujani avec Autisme Mayotte et l’Apajh (Association pour adultes et jeunes handicapés). Sans rendez-vous, les parents peuvent y amener leurs enfants pour savoir s’ils sont autistes. Toujours sur le même sujet, une deuxième classe élémentaire a été ouverte en Petite-Terre, après M’roalé.

Un effet Wuambushu

Parmi les dispositifs déployés, Mlezi Maoré fait partie des associations qui sont sollicitées pour héberger des Français ou des étrangers en situation régulière. Salama Houmadi en est un exemple. Cette mère de famille comorienne était concernée par le deuxième volet de l’opération Wuambushu, Mayotte place nette. Il y a un mois, elle a dû quitter Mangajou avec ses sept enfants et son mari. Mlezi a réussi à lui trouver un logement à Tsingoni et l’aide dans ses démarches pour trouver une solution pérenne. « Jaimerais bien retourner à Mangajou où mes deux plus jeunes enfants sont inscrits à l’école », espère-t-elle.

Avec sa famille, elle rentre dans les 346 places d’hébergement insertion occupées actuellement. Ce nombre a été largement augmenté avec l’opération Wuambushu, l’an dernier. « On en a 196 de plus au cours de lannée 2023 », comptabilise le directeur du pôle solidarité, Pablo Lordelot, ajoutant que depuis de l’année, Mlezi Maoré a fait « 406 mises à labri » concernant les migrants du stade de Cavani. La problématique reste toutefois de trouver une solution au bout des six mois.« Les sorties sèches, ce nest pas intéressant. Cest revenir au point départ », se défend le directeur.

Sur ce sujet, Mlezi Maoré veut continuer à développer l’inter médiation locative (IML), soit d’aider des locataires aux revenus fragiles à payer leur loyer jusqu’à ce qu’ils puissent le faire entièrement, une initiative qu’elle a développée en majorité à Koungou pour l’instant.

« On souhaite remercier la présidente »

C’est une nouvelle qui a pris de court l’association. Fahoullia Mohamadi, présidente depuis un an, a annoncé sa démission, il y a un mois. Celle qui est déléguée à la recherche et à l’innovation au rectorat de Mayotte s’y est résignée, s’estimant trop souvent écartée de la vie de l’association, alors qu’elle demandait un meilleur accès aux comptes. Hugues Makengo n’a pas souhaité commenter ses relations avec la présidente. « On souhaite remercier la présidente pour tout ce qu’elle a fait pour nous. Elle a pu apporter son regard sur l’inclusion et l’éducation. Nous prenons acte de sa décision », déclare-t-il sobrement. Il a convenu que les statuts de Mlezi Maoré sont « complexes », les décisions revenant souvent au directoire installé à Paris et leur exécution à la direction locale. Un reproche que le prochain rapport de la Chambre régionale des comptes La Réunion-Mayotte a justement adressé à Mlezi Maoré lors de son contrôle en 2023. Pour le cas de la présidence, elle devrait rester vacante au moins jusqu’à la rentrée.