Soumaya Hadjy Mamode et Ibrahim, porteurs de deux initiatives citoyennes, s’allient pour organiser une grande maraude à destination des plus démunis le dimanche 7 avril, à Mamoudzou. Une cagnotte est en ligne.
« Dans la nuit, je n’ai pas arrêté de cogiter », relate Soumaya Hadjy Mamode, après être passée le long du stade de Cavani, où plus de 200 personnes dorment dehors, depuis la fin du démantèlement du camp. Voire, selon nos informations, jusqu’à même 300 personnes dans les environs, de façon éparse. « Il pleuvait, ils étaient tous au sol sur des tapis ou des matelas… Je me suis dit que je ne pouvais pas ne pas bouger. » Dès dimanche, la chargée d’évènementiel dans une entreprise du quartier décide d’organiser une grande maraude, action qu’elle n’a encore jamais faite. Elle lance, dans la foulée, une cagnotte en ligne. Objectif : récolter 3.000 euros. Et « pour montrer que c’est possible », elle verse les premiers 100 euros.
Dès lundi, elle est rejointe par Ibrahim, un ami qui a l’habitude des maraudes comme celle qu’il a organisé l’an passé. Ils feront front commun. Lui, pour la logistique. Elle, pour le côté financier.
« Au lieu de diviser nos ressources, on s’est dit pourquoi pas s’allier », explique celle qui a créé et partagé une affiche sur les réseaux sociaux : la grande distribution aura lieu dimanche 7 avril, dans différents quartiers de Mamoudzou. Pour éviter la polémique mais, surtout, aider le plus grand nombre, elle ne se focalisera pas uniquement sur les personnes migrantes, qu’elle ne « peu[t] cependant pas ignorer ». « On ne va pas pouvoir sauver tout le monde. Mais l’objectif est d’aider le plus grand nombre. Tout dépendra de la participation », détaille celle qui dit déjà recevoir des messages de mamans qui veulent préparer des repas.
Une collecte de produits de première nécessité
Ibrahim acquiesce. Lui, a passé environ une heure à discuter avec les personnes près du stade. Il revient avec plusieurs feuilles et une liste d’environ 250 personnes, pour une première estimation de besoins. Une liste qui peut aussi servir « de preuve », ajoute l’initiatrice, pour essayer de convaincre d’éventuels donateurs. Ou des associations, que démarche le jeune homme, pour tenter de « créer une synergie ».
« À nous de démarcher, les épiceries, en parler dans les lycées… », ajoute la jeune femme de 25 ans. Riz, farine, œufs, conserves, eau, tout produit de première nécessité, alimentaire ou non (protections hygiéniques par exemple), peut être récolté directement chez les habitants qui souhaitent donner. Il suffit de se manifester par message ou sur les réseaux sociaux et ainsi recevoir les informations pour pouvoir participer à la distribution. L’argent de la cagnotte, servira, lui, à acheter des kits alimentaires. Ce jeudi, celle-ci affichait 700 euros. Et environ une centaine a pu être récoltée par le biais de dons directs en physique ou par Paylib.
Contact (Paylib) : +262 692 73 10 95
Quelques distributions pour les migrants
Plus ou moins proches du stade de Cavani, ancien lieu de camp, primo arrivants, demandeurs d’asile et réfugiés dorment dehors. En métropole, l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii) verse des allocations aux demandeurs d’asile. À Mayotte, ce système n’est pas applicable. Seule l’association Solidarité Mayotte donne aux demandeurs d’asile des bons d’achat de trente euros, et dix euros par enfant, par mois. Ce mois-ci, à cause des barrages, ils recevront celui de février en plus de mars. Et ceux qui auraient pu obtenir le statut de réfugié il y a six mois, n’y ont plus droit. Aucune aide n’est prévue à Mayotte pour les primo-arrivants, pas encore enregistrés sur les registres de la préfecture pour faire leur demande d’asile.
La Croix Rouge, dans le cadre de ses maraudes du lundi au vendredi, a cependant pu distribuer des « bouteilles d’eau, une collation et du réconfort », informe son directeur du pôle urgence sociale. Des protections hygiéniques également, nous indique Harun, somalien. Des kits d’urgence auraient été distribués par Solidarités International. Et quelques packs d’eau, bouts de pain, de temps à autres par des passants. Selon nos informations, les structures d’hébergement (Acfav, Mlezi Maore, Solidarité Mayotte et Coallia) sont saturées. Les 450 places dont dispose Solidarité Mayotte sont, ce jeudi, toutes occupées, au profit des plus vulnérables (femmes et enfants, personnes malades).
Question hygiène, des toilettes de chantier ont été déposées aux abords du stade, pour le marché de Cavani, à Mamoudzou, dans le cadre de la foire du ramadan. Une cabine fermée à clés en dehors des heures de marché.