« Des mères qui sont en même temps des adolescentes», à Chirongui ce lieu accueille les mamans mineures

Le lieu de vie et d’accueil de l’association Mlezi Maore à Chirongui a fêté ses deux ans ce mardi. Il héberge des jeunes filles en situation de grossesse précoce qui sont souvent rejetées par leur famille parce qu’elles sont enceintes.

A Chirongui, cette maison bleue typique des habitations mahoraises ne semble pas différente des autres. Pourtant, elle abrite l’un des deux lieux de vie et d’accueil (LVA) de l’association Mlezi Maore. « C’est un espace de vie où habitent des mamans mineures, soit elles y arrivent enceintes ou bien elles viennent avec leurs bébés », présente Djazatti Assani Moussa, coordinatrice des LVA et éducatrice spécialisée. Cet endroit porte bien son nom, de la vie il y en a à foison, en témoignent les pleurs et les rires des bébés qui résonnent dans la salle principale ce mardi, jour du deuxième anniversaire du LVA de Chirongui. Le premier a ouvert à Tsoundzou 2 en 2021. Ce mardi, des travailleurs sociaux, des membres de l’association et les mamans qui y habitent et celles qui y ont vécu se sont réunis pour l’occasion.

Le site de Chirongui accueille quatre jeunes femmes âgées de 14 à 18 ans. Elles y sont souvent hébergées en lien avec une histoire personnelle douloureuse. « La plupart d’entre elles sont mises dehors quand leur famille apprend la grossesse. En même temps, elles sont nombreuses à avoir subi des violences », raconte Stéphanie Pecquenard, la cheffe de service.

« Elles veulent vivre leur adolescence mais il y a leur rôle de parents qui les rappellent »

La mission des travailleurs sociaux est donc de les accompagner à la fois à devenir parent mais également au niveau administratif, une partie d’entre elles étant en situation irrégulière. Elles bénéficient aussi d’une aide au niveau scolaire pour préparer le bac et leur orientation professionnelle.  En parallèle, elles sont accompagnées sur leur « bagage émotionnel. Nous travaillons leur histoire, leur passé et leur futur avec leur enfant, d’où l’importance d’avoir un psychologue », souligne Djazatti Assani Moussa. Malheureusement, le poste de psychologue -qui intervient sur les deux LVA- n’est plus pourvu depuis plusieurs mois, l’association ne parvient pas à en recruter. Le suivi psychologique est néanmoins important pour ces jeunes femmes qui « sont mères mais en même temps des adolescentes. A la fois, elles veulent vivre leur adolescence mais il y a leur rôle de parent qui les rappelle».

« Aujourd’hui, je suis une autre personne »

Des jeunes mères auparavant suivies par le LVA ont témoigné comme Rachida Velosoa qui s’est mise sur son 31 pour l’événement. « Aujourd’hui, je suis une autre personne, quand je suis arrivée ici, j’avais besoin d’aide, je ne me sentais pas bien. J’avais du mal à accepter mon fils. Aujourd’hui, j’ai confiance en moi. La psychologue m’a beaucoup aidée. Je suis très reconnaissante d’avoir pu être accompagnée », évoque la jeune femme avec émotion. Désormais, la jeune fille de 18 ans qui a obtenu son bac vit avec son petit ami et son enfant. Elle entreprend des démarches pour être régularisée avec ce dernier.

A côté d’elle, Antourya, 15 ans,  a rejoint la structure en novembre 2024 avant d’accoucher il y a quelques mois. « Avant de venir ici, je me sentais stressée et isolée. Quand j’étais en sixième, j’ai été abandonnée par ma famille et j’ai subi de la maltraitance », relate l’adolescente qui porte un T-shirt avec l’inscription Strong as a woman.  Aujourd’hui la jeune fille retrouve une famille au sein du lieu de vie. « Ici c’est incroyable, on se fait des amies, on apprend à s’occuper de nos enfants », s’enthousiasme-t-elle. En 2022, près de 500 jeunes filles sont devenues mères avant 18 ans à Mayotte. L’île est le deuxième département français avec le plus de grossesses précoces après la Guyane.

Journaliste à Mayotte Hebdo et à Flash Infos Mayotte depuis juin 2024. Société, éducation et politique sont mes sujets de prédilection. Le reste du temps, j’explore la magnifique nature de Mayotte.

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