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Le président de l’Union des Comores, Azali Assoumani, a été victime d’une attaque au couteau vendredi après-midi.

Ce vendredi après-midi, le président de l’Union des Comores, Azali Assoumani, a été la cible d’une agression au couteau. Placé dans une cellule, le suspect a été retrouvé mort le lendemain matin. Le jeune homme mis en cause était âgé de 24 ans, selon le parquet de Moroni, qui a annoncé l’ouverture d’une enquête, dans le but d’élucider notamment les circonstances de la mort de l’assaillant, lequel n’a pas pu être auditionné, avons-nous appris auprès de la justice. 

L’archipel est en ébullition après l’attaque visant le président de l’Union des Comores. Dans l’après-midi du vendredi 13 septembre, un homme armé d’un couteau de cuisine s’en est pris à Azali Assoumani, le touchant à la tête, à Salimani Itsandra, localité située à quelques kilomètres de Moroni. L’attaque a été commise alors que le président comorien, dont la réélection en janvier est contestée, prenait part aux funérailles d’un proche du mufti de la République, plus grande autorité religieuse du pays. Au cours d’une conférence de presse tenue samedi matin à la présidence, le gouvernement, par la voix du ministre de l’Energie, a assuré que le chef de l’Etat n’a pas été grièvement blessé. « Il se porte bien et il est hors de danger. Le président se trouve chez lui. Et son état ne nécessite pas une évacuation. S’il part à l’étranger, ce sera pour des missions« , a rassuré Aboubacar Said Anli qui, au passage, a salué la bravoure et le courage du civil qui s’est interposé pour sauver Azali Assoumani. 

Sur les réseaux sociaux, cet agent de la Société comorienne des hydrocarbures (SCH), un proche du religieux décédé, a subi plusieurs insultes pour avoir empêché l’agresseur d’atteindre le président de la République, dont la popularité est remise en question par une partie de la population. Les chances de connaître les motivations de l’assaillant s’amenuisent pour ne pas dire qu’elles sont inexistantes. D’après le procureur de la République, Ali Mohamed, qui a animé une conférence de presse samedi 14 septembre depuis son bureau, le jeune homme est décédé durant sa détention. Il s’agit d’un gendarme de 24 ans, originaire de Salimani Itsandra. 

“Cette situation soulève des questions”

Sa hiérarchie lui avait accordé une permission de 24 heures, depuis le 11 septembre, mais il n’a jamais repris du service.  « Une fois maîtrisé par la sécurité du président, il a été remis aux enquêteurs qui ont décidé de le laisser dans une cellule. Le lendemain, ils l’ont retrouvé gisant au sol, son corps inanimé. Un médecin a été appelé et c’est lui qui a constaté le décès« , a raconté le chef du parquet de Moroni, confirmant que l’agresseur n’a pas pu être auditionné. Le magistrat a enfin annoncé l’ouverture de deux enquêtes. Une première pour découvrir les motivations à l’origine de cette agression. La seconde consiste à élucider les circonstances de la mort du gendarme dans sa cellule. Mais en attendant la fin des investigations, des voix commencent à émettre des doutes quant à la version officielle soutenue par la justice.  

Pour une partie de l’opinion, la mort du jeune, moins de 24 heures après son acte, semble suspecte. « Nous condamnons la tentative d’assassinat, qui ne peut en aucun cas être justifiée. Cependant, nous ne pouvons pas ignorer le fait tragique que ce jeune homme âgé de 24 ans est décédé en détention quelques heures après l’incident. Cette situation soulève des questions graves sur le traitement des personnes en détention et l’usage de la force par les autorités« , relève le nouveau parti Ushe, dans un communiqué. Il faut noter que ce n’est pas la première fois qu’un détenu meurt dans des conditions douteuses. En avril 2021, un ancien major de l’armée qui était à la retraite, surnommé Bapale, avait lui aussi rendu l’âme alors qu’il subissait un interrogatoire, dans un camp militaire à Anjouan. On le soupçonnait de faire partie d’un groupe qui voulait déstabiliser le pays. A l’époque, l’actuel directeur de cabinet chargé de la défense, Youssoufa Mohamed Ali, avait nié les accusations de tortures portées contre le régime. Le gouvernement, pour prouver sa sincérité, a dans la foulée promis une enquête. Trois ans plus tard, personne ne sait ce qui est arrivé à Bapale, qui fut garde du corps de l’ex-président Ahmed Abdallah Sambi. 

Plusieurs décès suspects en détention

En mars 2023, un jeune de 24 ans, nommé Aymane Nourdine, est également décédé pendant sa garde à vue. Le parquet avait évoqué un malaise. Pourtant, selon des témoins, son corps présentait des traces de sévices corporels. Mais là encore, il n’y a jamais eu de suite. Ces exemples viennent conforter la thèse que défendent de nombreux Comoriens qui considèrent que les circonstances de la mort du gendarme assaillant ne seront probablement pas connues.  Aucune audition des enquêteurs qui le surveillaient n’a été annoncée par la justice. En conférence de presse samedi, le gouvernement a dénoncé le comportement de certains internautes qui se réjouissent de l’agression visant le chef de l’Etat, dont la réélection en janvier dernier a entraîné des manifestations qui ont fait un mort. 

Depuis juillet, l’ex-putschiste de 65 ans se retrouve au cœur d’une autre polémique après la nomination de son fils aîné comme secrétaire général du gouvernement. Des critiques qui se sont accentuées lorsque le 6 août, un décret est venu élargir les pouvoirs de celui-ci.  Mais en dépit du tollé suscité par cet acte, la récente attaque dont il a été victime, n’a pas réjoui tous ses opposants. « La violence politique n’a pas sa place dans notre société car la violence politique n’est jamais acceptable, y compris les forcings antidémocratiques. L’essence et le but de nos démocraties est que nous puissions exprimer nos opinions, débattre de nos désaccords et les résoudre pacifiquement« , a réagi l’ex-candidat à la présidentielle, Mohamed Daoudou. « Cet acte traduit le climat de terreur, de violence qui a atteint un niveau anormalement élevé, inhabituel et préoccupant aux Comores. Il reflète aussi et surtout la situation du désarroi social et psychologique d’une population laissée en déshérence« , accuse l’opposant et avocat Larifou Said, qui appelle à une prise de conscience collective de la situation politique pour espérer un retour à l’esprit d’apaisement. Désormais, le débat public se penche sur la mort de l’assaillant, inhumé entre 17h et 18h ce samedi, dans sa localité natale. A l’heure où nous écrivons ces lignes, le gouvernement n’avait pas réagi au décès suspect qui serait survenu le vendredi soir, selon nos sources.