Depuis le 3 janvier, le centre hospitalier de Mayotte propose à ses agents de Mamoudzou des trajets en bus entre leurs lieux de résidence et la ville chef-lieu. Le manque de places et certains dysfonctionnements ont provoqué un droit de retrait ce mercredi 26 janvier. En réponse, la direction et le prestataire promettent de réévaluer quantitativement et qualitativement ce dispositif.
« Quand j’arrive au CHM, tous mes habits sont trempés tellement je transpire dans le bus », se désole une manipulatrice en électroradiologie, résidente à Kani-Kéli. Des propos rapidement complétés par l’un de ses collègues : « En plus, on est serrés comme des sardines ! » Mis en place au tout début de la crise Covid, en mars 2020, pour assurer le transport des agents vers leur lieu de travail dans le respect des gestes barrières, ce dispositif a été pérennisé, contre la modique somme annuelle d’1.2 million d’euros, par la direction de l’établissement hospitalier le 3 janvier 2022 sur demande des professionnels de santé. « Rentrer en scooter à Bouéni à 19h après une garde de douze heures, c’est impensable », développe un néo-arrivant, ravi de pouvoir se faire raccompagner en toute sécurité.
Seul hic : les trajets entre les lieux de résidence et la ville chef-lieu s’avèrent parfois douloureux, à cause d’un certain nombre de dysfonctionnements (absence de climatisation, fuites d’eau, difficulté d’accès pour les personnes à mobilité réduite, insalubrité récurrente…). « L’autre jour, on est même tombé en panne d’essence à Tsoundzou », sourit jaune l’une des passagères régulières. Raisons qui ont poussé une cinquantaine d’employés à exercer un droit de retrait « pour faire bouger les lignes » ce mercredi 26 janvier. « Les véhicules ne sont pas conformes », répète avec insistance Fatima Abdallah, représentante du personnel à la CFDT. « Ce sont des exigences de base pour bénéficier d’un minimum de confort, pour nous permettre de récupérer une heure de sommeil et pour arriver au boulot en temps et en heure », renchérit Anli Rigotard, le porte-parole de l’intersyndicale.
Période de rodage
Pour désamorcer cette crise, deux réunions se sont tenues dans la matinée entre la direction, le prestataire (Carla Mayotte Transports Baltus) et les différentes organisations syndicales représentées. « La démarche s’est bien déroulée, mais encore une fois, pourquoi en arriver-là alors que tous les courriers et toutes les relances ont été envoyés », s’interroge Anli Rigotard, qui déplore « le manque d’anticipation ». Des promesses notables ont notamment été prises, comme l’augmentation du nombre de sièges (de 22 à 33) dans les bus, pour que ce nouveau marché réponde aux réels besoins des agents. Une première avancée majeure aux yeux du syndicaliste, qui garde en tête l’agression à Majicavo d’une de ses collègues lundi soir, contrainte de rentrer chez elle en voiture faute de place dans l’autocar. « Aujourd’hui, toutes les lignes sont effectivement pleines. Nous sommes en période d’ajustement car nous ne savions pas combien d’agents allaient les utiliser. Nous nous réadaptons », justifie Christophe Blanchard, le directeur par intérim du CHM, qui annonce par ailleurs que des véhicules neufs doivent prochainement arriver sur le territoire.
Les CMR dans la boucle
Reste à réussir à enrôler d’autres antennes du CHM dans la boucle… « Ce service n’est pas assuré pour les centres médicaux de référence », regrette un habitant de Hamjago, venu apporter son soutien durant quelques heures. Une anomalie facilement réparable selon Anli Rigotard : « La plupart de ceux qui travaillent là-bas habitent ces communes, cela ne doit pas être bien compliqué de faire tourner des navettes. » Si aucune date de lancement n’est encore prédéfinie, un prochain comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) pourrait permettre d’apporter quelques éclaircissements sur cette doléance. « Une fois que Mamoudzou sera bien calibrée, nous allons adresser un questionnaire aux agents des CMR pour savoir s’ils en ressentent le besoin », promet Christophe Blanchard, qui rappelle qu’un bus roule déjà en Petite-Terre à la suite de l’ouverture du nouvel hôpital. Suffisant pour éteindre ce début d’incendie ? « Nous n’aimerions pas revenir avec les mêmes points de revendications », met-il toutefois en garde. Avant que sa binôme, Fatima Abdallah ne se montre un peu plus véhémente. « Nous attendons que les nouveaux bus soient opérationnels d’ici vendredi, sinon nous lancerons un préavis de grève. »