Alors que les centres d’hébergement d’urgence mis en place à Mamoudzou pour accueillir des sinistrés du cyclone Chido devaient fermer le 31 décembre, plusieurs ont été vidés avec un jour d’avance. Leurs résidents temporaires, pris au dépourvu, n’ont pour la plupart nulle part où aller.
Alors qu’il avait été annoncé la semaine dernière par le maire de Mamoudzou, Ambdilwahedou Soumaïla, que les sinistrés présents dans les 20 centres d’hébergement de la commune allaient devoir quitter les lieux le 31 décembre, il a déjà été demandé à plusieurs dès ce lundi 30 décembre. C’est le cas à l’école du Manguier, dans le centre-ville du chef-lieu, où Asma* a appris ce lundi matin qu’elle devait plier bagages pour 14h. “On apprend ça soudainement, je ne sais pas où aller avec mes enfants”, déplore celle qui a perdu sa maison et toutes ses affaires avec le passage du cyclone Chido, le 14 décembre. “Où est-ce qu’on peut bien aller ? On a tout perdu, on n’a pas d’argent. On ne peut pas nous laisser sur la route comme des poubelles”, poursuit-elle. Si personne n’est sur place pour nous donner le nombre de personnes hébergées, le linge en train de sécher témoigne de lui-même que de nombreuses familles ont trouvé un abri en ces lieux. “On nous prévient du jour au lendemain. Moi toute seule, je pourrais trouver quelqu’un pour m’héberger. Mais avec mes cinq enfants, je vais devoir me débrouiller toute seule”, regrette une femme qui dort dans la même salle de classe qu’Asma. Cette dernière ne comprend pas qu’on ne leur propose pas d’autre solution en attendant qu’elles puissent trouver une nouvelle case. “Ils disent qu’ils veulent rouvrir les écoles, mais ce sont nos enfants qui vont à l’école. Comment ils vont faire s’ils n’ont nulle part où dormir ?”, questionne-t-elle.
À l’école Kawéni T17, il a également été demandé aux hébergés de quitter l’endroit avec un jour d’avance. “On nous a prévenu hier soir”, explique Ibrahim*, ce lundi matin. En train de faire ses affaires, comme les autres sinistrés, il ne comprend pas la situation : “On ne va pas faire d’histoire, on nous dit de partir, on part. Mais où est-ce qu’on va aller ?” Une question qui revient sans cesse et à laquelle, faute de retour des pouvoirs publics, seuls eux finissent par répondre. “On va retourner dans les bidonvilles”, se résout Ibrahim. Yasmina*, elle, aimerait que sa case en tôle soit reconstruite. “Mais mon mari est allé voir, les morceaux de bois et les tôles de notre maison ont été volés, on ne peut pas la réparer”, raconte-t-elle. “On nous dit d’un coup de rentrer chez nous, mais on n’a plus de chez nous.”
« On voit des gens repartir vers les bangas »
Si, au lycée voisin des Lumières, le délai accordé va être respecté, ses résidents temporaires n’en sont pas moins inquiets. “On va devoir aller dans la forêt ou retourner dans les bidonvilles”, s’inquiète une adolescente. “Mais on a même pas de matelas pour s’allonger sur le sol”, ajoute sa maman. Une situation qui attriste Arnaud, un riverain qui vient prêter main forte au centre d’hébergement et aux 600 personnes qu’il accueille depuis le début de la crise. “Depuis deux ou trois jours, on voit des gens repartir vers les bangas”, constate celui qui se désole de voir le peu d’investissement des pouvoirs publics sur les lieux, à part un agent dont il souligne l’implication. Avec une petite dizaine de bénévoles, ils ont pris sur leurs propres fonds pour apporter des vivres aux sinistrés dans le lycée, avant de finir par se faire épauler par l’association hexagonale Solibad. “Demain, on va être là quand ils devront partir, pour au moins les rassurer si les forces de l’ordre viennent”, assure le bénévole.
Interrogé sur la fin de l’hébergement d’urgence, le maire de Mamoudzou répond que la Ville fait comme les autres communes : “On a ouvert des centres d’hébergement d’urgence pour sauver des vies par rapport au cyclone. Maintenant, on doit refaire les écoles.”
*Les prénoms ont été modifiés.
Pas de date de départ à Majicavo-Lamir
Au collège de Majicavo-Lamir, dans la commune de Koungou, ils sont encore environ 400 à être abrités dans l’enceinte de l’établissement. Pour l’instant, pour le principal, il n’y a pas de date de départ. “Je n’ai pas eu de consignes pour l’instant”, explique Damien Henry, qui est présent aux côtés des sinistrés depuis que les établissements scolaires ont été réquisitionnés, la veille du cyclone. “Si je n’ai pas d’ordre, je ne mets pas les gens dehors.” Parmi les habitants temporaires, personne n’a non plus entendu parler d’une date de départ. Pour l’instant, ils continuent à vivre sur les stocks d’eau, de nourriture et de soins de l’établissement, dans lequel la sécurité civile n’est arrivée qu’il y a deux jours.
Journaliste à Mayotte depuis septembre 2023. Passionnée par les sujets environnementaux et sociétaux. Aime autant raconter Mayotte par écrit et que par vidéo. Quand je ne suis pas en train d’écrire ou de filmer la nature, vous me trouverez dedans.