Un impact considérable sur les soins

Des médicaments peuvent de nouveau sortir du port de Longoni, après un accord conclu avec les organisateurs de la grève générale. Mais la situation sanitaire reste préoccupante sur l’île.

L’Agence régionale de santé craint des décès liés à la paralysie du département.  » On ne peut pas avoir une vigilance sentinelle. On n’a pas de visibilité sur la circulation des maladies infectieuses sur l’île », reconnaît le docteur François Chièze, directeur de la veille sécurité sanitaire à l’Agence régionale de santé (ARS ) Océan Indien, alors que la grève générale contre l’insécurité se poursuit, pour la cinquième semaine consécutive.

L’ARS confirme des décès liés à la paralysie de l’île. Douze barrages étaient encore en place ce mercredi, indique la gendarmerie. « Ce serait très aléatoire de donner un chiffre [de décès, NDLR], on n’a que des bribes d’informations […] On a obligatoirement des situations individuelles à risque ». Des pénuries de médicaments ont été observées et des patients peinent à se rendre dans des structures médicales.

Du mieux au centre hospitalier

Dans ce contexte, l’accord conclu « en début de semaine » avec les organisateurs de la grève générale pour « une transmission de stocks de médicaments à partir du port de Longoni » a permis d’alimenter le centre hospitalier de Mayotte (CHM) et le nord de l’île en oxygène, fluides et médicaments diabétiques : « Les indices sont au vert [au CHM]. Ce n’était pas du tout le cas en fin de semaine dernière », reconnaît le docteur Chièze. « On a réapprovisionné, encore faut-il que les patients viennent se faire diagnostiquer », soulignet- il toutefois. La situation est plus préoccupante au centre et au sud du territoire, où moins de médicaments peuvent être acheminés.

Autre élément positif : l’évacuation depuis « quelques jours » des « déchets médicaux liés aux soins à risque infectieux, qui viennent du CHM, de laboratoires privés et de cabinets médicaux. C’est un élément majeur parce que c’était un risque sanitaire important », indique l’ARS.

« Il y a des endroits où l’accès au soin n’est pas maintenu. Douze cabinets [médicaux] sont ouverts » sur une vingtaine, poursuit le docteur Chièze. Par ailleurs, des infirmières libérales et des kinésithérapeutes ne peuvent plus exercer leur profession. « Le passage des barrages dépend de la profession », affirme-t-il.

Au CHM, « l’activité a fortement diminué du fait du manque de patients et du manque de soignants […] On a une inquiétude à la sortie de crise. Il va y avoir un afflux de patients ». Le risque d’aggravation de maladies chroniques durant la grève est pris au sérieux. Par ailleurs, il y avait des cas de « bronchiolite en quantité avant [la grève générale]. Elle n’a pas disparu du jour au lendemain […] Même chose pour la coqueluche », note le docteur Chièze. Il souligne que l’accumulation des déchets dans les rues de Mayotte – le ramassage des ordures étant à l’arrêt – « présente un risque de diffusion d’infections virales par exemple [ou] de transmission de germes ».

Du côté du syndicat des pharmaciens de Mayotte, on signale « des ruptures sur des produits très importants », comme des anticancéreux et quelques antidiabétiques. Avec les barrages, « on est bien loin des onze livraisons hebdomadaires.

Les camions circulent quand ils peuvent circuler. On a régulièrement des ruptures d’insuline. Sur le lait infantile, beaucoup de pharmacies sont en rupture. On est en rupture de la pilule contraceptive la plus utilisée sur l’île », qui peut être donnée à des personnes en surpoids ou diabétiques. « On va avoir un boom des natalités ».

Jean-Marc Roussin, le président du syndicat des médecins de Mayotte reconnaît « qu’on n’a plus les moyens logistiques de fonctionner […] Des médecins ne peuvent pas franchir les barrages […] Il y a déjà des problèmes majeurs de santé à l’état normal. Ça ne fait qu’amplifier les problèmes. » Lui-même a fermé son cabinet médical lundi.

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