Par décision de justice, la pharmacie des Badamiers à Labattoir pourrait fermer. Accédant finalement à la requête d’un concurrent au terme d’une bataille judiciaire de près de cinq ans, la cour administrative d’appel de Bordeaux a annulé la création de l’officine des Badamiers. En cause : un déficit de documents liés au code de l’urbanisme.
Voilà près de cinq ans qu’un pharmacien souhaitant s’installer en Petite-Terrer contestait la création de la pharmacie des Badamiers. Il souhaitait en effet également créer son officine à Labattoir, mais le dossier de création de sa concurrente est parvenu plus vite à l’agence régionale de santé de l’océan Indien (ARS-OI). Cette dernière a jugé en 2017 que le dossier était complet et a autorisé la création du commerce des Badamiers, le troisième du genre en Petite-Terre.
C’était sans compter sur la détermination du plaignant. Après trois rejets de sa requête auprès du tribunal administratif de Mayotte, il a eu gain de cause auprès de la deuxième chambre de la cour administrative d’appel de Bordeaux. A l’encontre de l’opinion de l’instance mahoraise, celle de métropole a jugé la requête recevable et a fait annuler la décision de l’ARS-OI d’autoriser la création d’une officine à l’enseigne « pharmacie des Badamiers ». Elle a également fait annuler le rejet du dossier de création de la pharmacie des Orchidées à Labattoir, ainsi que les trois jugements précédents du tribunal administratif de Mayotte.
Un déficit d’autorisation d’urbanisme
La raison principale invoquée pour faire fermer cette pharmacie est le manque de documents administratifs liés au code de l’urbanisme. Mirasse Boussaïdi, la pharmacienne titulaire des Badamiers a en effet transformé un local à usage d’habitation en usage commercial sans avoir fait les demandes d’autorisation nécessaires. « En l’espèce, il est constant que le local en cause était, à la date du 23 mai 2017, destiné à un usage d’habitation, de sorte que la demande de création de pharmacie de Mme B… impliquait à tout le moins une déclaration de travaux en vertu des dispositions précitées du code de l’urbanisme, alors même que ce changement de destination ne se serait pas accompagné de travaux. », peut-on lire dans la décision de justice.
Mirasse Boussaïdi est stupéfaite par cette décision. « La plainte a été jugée trois fois par le tribunal administratif de Mayotte, une fois par cette même cour de Bordeaux, a été envoyée sans succès au Conseil d’Etat à Paris, puis est revenue à Bordeaux. C’est la première fois qu’un tribunal donne raison au plaignant ! » déplore-t-elle. Elle fermera les portes de sa pharmacie ce mardi 19 avril pour organiser une « journée d’information » à destination de sa patientelle. Cependant, elle ne sera forcée de fermer définitivement qu’à partir du moment où l’ordre des pharmaciens annulera sa licence. « Je n’ai aucune information concernant la date de fermeture obligatoire si bien que je suis obligée de travailler avec une épée de Damoclès au-dessus de ma tête », se désole-t-elle.
La pharmacienne des Badamiers souhaite se tourner vers le Conseil d’Etat pour faire revoir la décision de justice de la cour d’appel de Bordeaux. Cependant, les délais de cette démarche étant très longs, elle sera de toute façon obligée de fermer un temps pour rouvrir plus tard en recommençant tout à zéro. « En fermant du jour au lendemain, je vais crouler sous les dettes et serai dans l’impossibilité de payer mon local et mes employés », déclare-t-elle. Sans compter que cela nuira aux patients habitués depuis cinq ans à fréquenter cette pharmacie.
Une nouvelle pharmacie ouvrira-t-elle bientôt ?
Le jeu en valait-il la chandelle pour le pharmacien des Orchidées ? Rien n’est moins sûr. En effet, si la décision de la cour administrative d’appel de Bordeaux fait annuler son rejet de dossier de création d’officine déposé en 2017, elle ne lui assure pas pour autant que son dossier sera automatiquement accepté prochainement. « Eu égard au motif d’annulation, le présent arrêt n’implique pas que le directeur de l’ARS-OI délivre à la société Pharmacie Les Orchidées l’autorisation de création de pharmacie sollicitée, mais seulement qu’il procède à un nouvel examen de sa demande », peut-on lire dans la décision de justice.
En parallèle, l’ARS, dont la décision de justice a remis en cause, a maintenant deux mois pour statuer sur la licence de la pharmacie des Badamiers.