L’ordre infirmier en mission séduction

Élue présidente du conseil interdépartemental (Réunion-Mayotte) de l’ordre infirmier en décembre 2020, Isabelle Houng On Seing était de passage dans le 101ème département pour rencontrer les institutions, mais aussi les professionnels de santé pour échanger sur les problématiques mahoraises ainsi que sur l’intérêt de l’organisme qui peine à faire son trou sur le territoire.

« Non-inscription au tableau de l’ordre = exercice illégal de la profession. » La phrase affichée sur le vidéoprojecteur peut choquer de l’extérieur. « C’est une mesure administrative simple », lâche Isabelle Houng On Seing, la présidente du conseil interdépartemental (Réunion-Mayotte) de l’ordre infirmier, pour son premier déplacement sur le territoire cette semaine. Un propos largement repris et détaillé par Alain Duval, élu ordinal installé sur l’île Bourbon. « C’est une question de sécurité et c’est de votre responsabilité professionnelle. Personne n’est à l’abri d’une faute… Si vous n’êtes pas dans le cadre, nous ne pourrons rien faire pour vous ! »

Face à une audience composée d’une vingtaine d’infirmiers, principalement des libéraux, la cadre de santé formateur à l’école d’infirmières de Saint-Denis revient sur l’intérêt de connaître le rôle de l’organisme. « Si vous avez un sentiment d’injustice, appuyez-vous sur le code de déontologie. Si c’est le cas, portez plainte et je vous accompagnerai », martèle celle qui a été élue à son poste en décembre 2020. Problème : la communication grésille entre les deux îles… Preuve en est : « En 18 mois, je n’ai reçu qu’un seul signalement chez vous, contre des centaines à La Réunion. » Pourtant, cela peut s’avérer très utile en cas de litige. En témoignent les 50 commissions de conciliation réalisées par Isabelle Houng On Seing depuis sa prise de fonction.

Éviter à tout prix le compérage

Et ce n’est tout. L’ordre infirmier génère par exemple les autorisations de remplacement et vérifie les conditions de compétence, de moralité et d’indépendance professionnelle. « Être infirmier libéral, c’est un métier, pas un business ! Vous vous levez tous les jours à 4h et vous ne comptez pas vos heures. Nous savons à quel point vous êtes dévoués. » C’est aussi là l’idée : éviter le compérage. « Nous sommes tous d’accord pour dire que ce n’est pas du flicage, mais de la promotion. Nous ne pouvons accepter que des gens salissent l’image de cette profession », ajouter Alain Duval.

Au sein de la MJC de Combani ce mercredi après-midi, les partages d’expériences et les revendications fusent dans tous les sens. À l’instar du sentiment d’insécurité chronique et du renouvellement des cartes de séjour, synonyme de rupture de soins. « Ce sont des humains avant tout », fulmine l’un des participant. Selon l’étude unono-wa-mahorais réalisée en 2019, 45% des patients reportent leurs soins faute de droits ouverts… Une réalité de terrain que Isabelle Houng On Seing compte relayer au représentant de la préfecture, rencontré quelques minutes plus tard. Comme elle avait pu le faire la veille auprès du directeur général de l’agence régionale de santé, Olivier Brahic. « Nous rencontrons les institutions pour porter votre voix. »

Multiplier les CPTS

Pour autant, l’ordre profite de cet échange à bâton rompu pour inviter les infirmiers libéraux à s’engager. « Vous devez vous saisir de votre destin et vous investir. Nous sommes reçus par les instances sanitaires, administratives et politiques. » Avant d’ajouter : « Prouvez par les chiffres et vos remontées que des problématiques existent. Pour cela, il faut des témoignages. » En ce sens, les deux bénévoles poussent leurs auditeurs du jour à se regrouper en communautés professionnelles territoriales de santé, « l’avenir de Mayotte », dont la première doit voir prochainement le jour dans le Sud. Un type de structure qui permet de favoriser l’exercice coordonné grâce à la présence de d’autres professionnels de santé, mais aussi pour gagner en crédibilité ! « Ce n’est pas en désertant l’ordre que vous serez entendus. S’il vous plaît, écrivez-nous, je vous assure que nous vous répondrons », conclut Isabelle Houng On Seing.

 

Comment s’inscrire à l’ordre infirmier ?

Rien de plus simple : il suffit de déposer son diplôme d’État, un justificatif de domicile et une pièce d’identité sur son espace personnel. « C’est la condition sine qua none pour s’inscrire au tableau de l’ordre », rappelle Isabelle Houng On Seing, la présidente interdépartementale. Pour pouvoir se lancer dans le libéral, il faut justifier de 2.400 heures de travail à l’hôpital en demandant à sa direction une attestation d’expérience ou un relevé d’heures, avant de l’envoyer à la caisse de sécurité sociale de Mayotte. Attention toutefois, « l’exercice coordonné CHM-libéral n’est pas possible », met-elle en garde.

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