Lisser la vague pour éviter le tsunami à Mayotte

Le déconfinement ne sera pas pour aujourd’hui. Vendredi, le préfet Jean-François Colombet annonçait la décision du gouvernement. Mayotte demeure donc confinée malgré un assouplissement pour certains commerces. Un report qui répond aux craintes de l’ARS de voir l’épidémie, déjà en large circulation sur le territoire, grimper en flèche. Objectif : lisser la vague épidémique pour ne pas se retrouver face à un tsunami.

Soulagée la directrice de l’ARS, Dominique Voynet ? Au moins en partie. En repoussant le déconfinement à une date ultérieure, le gouvernement répond à sa crainte : voir l’épidémie de Covid-19, déjà en grande circulation sur le territoire, grimper en flèche en cas de retour à la normale. Vendredi soir en effet, le préfet Jean-François Colombet a confirmé sur l’antenne de nos confrères de Mayotte la 1ère que seuls les petits commerces – hors bars et restaurants – pourraient réouvrir sous réserve de faire respecter les gestes barrières et le port du masque. Un assouplissement qui doit s’accompagner de la mise en place de “brigades avec des services civiques pour proposer du gel hydroalcoolique et des masques aux personnes qui n’en seraient pas équipées”, a promis le haut fonctionnaire. Pas de réouverture des écoles ce jour non plus, mais possiblement le 25 mai si les conditions de sécurité sanitaire le permettent. Rien de moins sûr donc.

Un report du déconfinement à une date encore inconnue destiné à lisser la “vague épidémique”, terme préféré par l’ARS à celui de pic. Dominique Voynet, directrice de l’organisme, l’expliquait vendredi matin, lors de son point presse bi-hebdomadaire : “On reste sur un modèle de vague. On parle de pic par commodité, mais tant qu’on ne l’a pas eu on ne sait pas jusqu’où cela peut monter. (…) Jusqu’à présent, nous avons travaillé sur des modèles mathématiques qui prévoyaient le confinement, avec différents scénarios – très bien ou moyennement respecté –, mais pas sur des modèles prévoyant un déconfinement.” Or, “le modèle du confinement bien respecté correspond à ce qu’on a vu jusqu’à fin avril. (…) Le R0 était alors en dessous de 1. [Mais] depuis le 25 avril, on a une augmentation de nombre de cas et un R0 passé à 1,5. L’épidémie augmente donc à un rythme modéré, mais elle augmente (…) sans que l’on sache si l’accentuation du déconfinement conduira à une explosion du nombre de cas ou à une croissance plus régulière”. Pour rappel, lesdits modèles annoncent un apogée de l’épidémie aux alentours du 21 mai, suivi d’une chute du nombre de cas positifs.

Et de poursuivre, à ce moment où, bien que devinant la décision, elle n’en connaissait pas encore la teneur officielle : “Quelle que soit la décision prise, le déconfinement ne peut pas être rapide et général, il ne peut pas faire l’impasse sur la priorité absolue qu’est le respect des gestes barrières. La distribution de masques à chaque habitant, la volonté d’assurer l’accès à l’eau pour permettre à tout le monde de se laver les mains, et celle de faire respecter les distances physiques, en sont des préalables.” Sur le papier, nous en sommes là : dans l’attente de rentrer dans le vif du sujet.

Un avion sanitaire pour Mayotte

Une attente qui demande de la préparation et de libérer de la place au sein des services du CHM concernés par l’épidémie, médecine et réanimation. C’est la raison des évacuations sanitaires vers le CHU de La Réunion (il y en a eu 47 entre le 3 et le 17 mai, dont six patients touchés par le virus, ndlr). Une nouvelle sur ce point : l’arrivée d’ici quelques jours d’un avion sanitaire qui permettra d’évacuer les patients Covid-19, ceux-ci ne pouvant être pris en charge sur les vols maintenus par Air Austral entre les deux départements. Au moins quatre vols par semaine sont prévus.

Et puis, il faut prévoir des tests, autre point sensible compte tenu des difficultés d’acquisition du moment. “Notre capacité monte petit à petit, mais on reste encore limité”, a regretté la directrice de l’ARS en précisant toutefois : “Nous avons une capacité de 400 tests par jour. [Si nous devions les faire], cela supposerait de faire travailler le laboratoire du CHM 24/24h, ce qui n’a pas encore été nécessaire compte tenu du nombre de prescriptions. Quand nous en aurons besoin et que nous aurons le matériel pour, nous changerons de rythme.”

Arrivée prochaine de l’EMR

Du matériel qui arrivera en partie avec le Service militaire des armées, dont le déploiement n’a pas été sans complication compte tenu de l’espace et des moyens techniques qu’il nécessite. Une partie doit décoller ce soir de Paris pour une arrivée mardi matin à Mayotte. Dans cette première cargaison : 16 militaires en renfort, des lits et du matériel, dont un automate et des consommables pour augmenter la capacité des tests. Deux autres arriveront “dans les15 jours”. Une “garde avancée” qui précèdera le reste du détachement, ses 80 personnes et surtout l’Elément militaire de réanimation (EMR) prévu.

 

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