Une convention inter-hospitalière d’ophtalmologie entre l’hôpital Cochin, à Paris, et le centre hospitalier de Mayotte (CHM) a été signée, ce jeudi 8 juin, à Mamoudzou. Le professeur Antoine Brézin était à Mayotte pour expliquer les détails de cet accord inédit.
« Je donne de mon temps pour venir ici. Car, pour moi, c’est une mission de santé publique », a déclaré le professeur Antoine Brézin au cours de la conférence de presse donnée au centre hospitalier, jeudi soir. Si le manque d’ophtalmologistes est bien un problème national, il l’est d’autant plus à Mayotte où il n’y a aucun spécialiste pour s’occuper des yeux des quelque 310.00 habitants de l’île, selon l’Insee. La signature de cette fédération médicale inter-hospitalière (FMIH) entre l’hôpital Cochin et le CHM devrait ouvrir le bal à d’autres accords entre différents services et hôpitaux français.
Relier les connaissances
L’idée est simple : instaurer de manière permanente un service d’ophtalmologie avec de jeunes docteurs en médecine qui doivent effectuer leur temps d’assistanat. Pour ce faire, le professeur Antoine Brézin a expliqué qu’un système de permutation entre plusieurs internes en ophtalmologie sera mis en place. Un jeune praticien exercera six mois à l’hôpital Cochin, à Paris, puis les six mois suivants au CHM, tout en permutant avec un confrère. « Jusqu’à présent, on avait organisé des missions ponctuelles mais pas de façon continue. Là, ce système permettra d’avoir constamment un praticien sur l’île », a expliqué le professeur.
De plus, cela permettrait de faire venir des praticiens particulièrement compétents sur l’île au vu de la médecine de pointe qui est pratiquée à l’hôpital Cochin – l’un des trois grands centres d’ophtalmologie d’Ile-de-France. Des compétences nécessaires au vu des cas cliniques présents sur l’île. Le professeur a rappelé que les infections et les pathologies des yeux, comme la cataracte, sont nombreuses à Mayotte et souvent à un stade très avancé par manque de traitement. « A Mayotte, on sort les gens de la cécité. C’est totalement différent des cas que nous avons à Paris car nos patients sont à des stades moins avancés », explique-t-il.
Des soignants provenant de tous les horizons
Malgré la pénurie d’ophtalmologistes sur l’ensemble du territoire français, le professeur Antoine Brézin espère bien convaincre quelques jeunes praticiens à participer à ce programme, à Mayotte. Et d’après lui, les candidatures d’ophtalmologistes à Paris ne manquent pas, « je reçois, en continu, des candidatures de jeunes médecins qui veulent travailler dans mon service. C’est à moi de leur proposer une expérience un peu différente… à Mayotte ». Les deux candidats sélectionnés pourront provenir de métropole, de l’Union européenne, mais aussi en dehors.
Jean-Mathieu Defour, directeur général du CHM, a précisé que les financements proviendront de sa structure et de l’Agence régionale de Santé,et que les jeunes médecins recevront, bien évidemment, les aides au logement habituellement octroyées au personnel soignant. En ce qui concerne le matériel médical, il est « satisfaisant » avec des machines et des outils qui ont été achetés récemment. Néanmoins, le professeur Brézin a précisé que l’ophtalmologie est une « discipline très technique » qui nécessite en permanence un matériel de pointe – il faudra donc suivre l’avancée technique et adapter le matériel dans les années à venir.
Le professeur est optimiste car « le premier défi est relevé, il était d’ordre administratif avec l’APHP (Assistance Publique – Hôpitaux de Paris) qui a mis du temps à accepter cet échange ». Mais le prochain défi n’est pas des moindres : attirer de jeunes praticiens à Mayotte – une île à la réputation sulfureuse. En tout cas, Antoine Brézin a promis qu’il y « mettrait tout son cœur ».