Docteur en chimie spécialisée dans les molécules bioactives et l’ingénierie des biomolécules, Fahoullia Mohamadi revient pour Flash Infos sur l’importance de la recherche et du développement pour faire face à la crise du Coronavirus. Elle apporte également son expertise scientifique sur la vaccination et l’approche moléculaire, et évoque l’apport de sa profession pour un territoire comme Mayotte.
Chercheuse originaire d’Acoua, Fahoullia Mohamadi suit la propagation du virus sur le territoire d’un regard avisé. Si elle n’est pas spécialisée dans la microbiologie, son parcours pluridisciplinaire lui permet d’apporter quelques éclaircissements sur le Covid -19. “Mon métier consiste à chercher des molécules bioactives dans les tous les organismes, qu’ils soient terrestres ou marins, et d’étudier leur activité”, confie la chimiste. Ainsi, elle explique que pour faire face à cette crise sanitaire sans précédent à l’échelle mondiale, deux approches se confrontent. La première est la vaccination. Elle consiste à injecter le pathogène, c’est-à-dire le virus, mais de manière fortement atténuée. “Il faut qu’il ait les mêmes caractéristiques pour induire une réponse immunitaire, ce sont les fameux anticorps en question.” Pour développer cette démarche entre en jeu la recherche. Le fonds de commerce de Fahoullia Mohamadi. “Elle permet de développer les munitions et les boucliers pour lutter contre cet ennemi invisible”, détaille-t-elle. Si le président de la République, Emmanuel Macron, prévoit des moyens supplémentaires pour accroitre la somme de nos connaissances, cette activité demande du temps ainsi que du matériel coûteux et sophistiqué… “Nous estimons à un an la mise sur le marché d’un vaccin, car il faut s’assurer que le corps ne réagisse pas trop violemment. Ce délai, très optimiste, est incompressible !”
Comment appréhender le sujet, alors que les Français entament leur quatrième semaine de confinement et que le monde économique tourne au ralenti ? Face à cette interrogation, la chercheuse explique que la seule solution fiable à ce jour est l’approche moléculaire, à l’instar de la chloroquine, qui est tombée dans le domaine public et qui déchaîne les passions par le biais du controversé Docteur Raoult. Seul bémol, elle traite ponctuellement le symptôme, mais n’assure pas une immunité. “Elle fonctionne seulement à l’instant T, si nous ne produisons pas assez d’anticorps, nous sommes potentiellement à risque. Donc il est possible de contracter une deuxième fois la maladie.” Pour résumer, “le vaccin est préventif” tandis que “la molécule est curative”.
Faire de Mayotte, une terre de recherche
Toujours est-il que Fahoullia Mohamadi souhaite que le 101ème département apporte sa contribution à l’effort et se saisisse de cette opportunité pour faire parler de lui. Un combat qu’elle défend bec et ongles ! Prenant ainsi exemple sur les difficultés rencontrées pour créer sa société PhytoKeyz sur sa terre natale, dont le travail consiste à valoriser la biomasse de l’île, en d’autres termes les plantes médicinales aromatiques. “Nous avons un beau potentiel, mais il n’est pas exploité localement”, regrette-t-elle. “En revenant à Mayotte, il fallait expliquer l’intérêt de la recherche aux institutions, aux chambres consulaires et au conseil départemental. Mon projet a finalement a été favorablement reçu en 2018 et peut apporter énormément au territoire.” En attendant d’avoir un laboratoire digne de ce nom sur le sol de Mayotte, elle collabore avec celui de chimie des biomolécules et de l’environnement à Perpignan, inscrit au sein du centre national de la recherche scientifique. Son souhait désormais est d’intégrer des étudiants mahorais qui découvrent petit à petit son milieu professionnel. “La prochaine étape est de faire venir des doctorants pour générer de la valeur scientifique sur le territoire.” L’officialisation du rectorat en début d’année et le projet de construction d’une technopole à Dembéni la rendent optimiste. Ne reste plus qu’à bénéficier d’une université de plein exercice pour se voir définitivement allouer des moyens supplémentaires importants. “Même si Mayotte est un microcosme, nous pouvons concevoir de très beaux travaux à notre niveau”, espère Fahoullia Mohamadi. Et pourquoi pas faire du territoire une référence en matière de recherche et de développement…
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