Si des disparités demeurent entre les communes, la tendance progresse très nettement ces dernières semaines, d’après les dernières données de Santé publique France. Des chiffres dopés par la levée des motifs impérieux pour les personnes vaccinées ou le passe sanitaire, mais aussi par l’adaptation du maillage territorial. En effet, depuis l’ouverture du premier centre à M’Gombani, les lieux de vaccination se sont multipliés avec pour objectif de toucher au maximum les populations les plus éloignées.
“Ouverture d’un centre à l’école Koropa 2”, “nouvelle carte des centres de vaccination”, “centres fixes”, “équipes mobiles”… Au rythme des bulletins et des communiqués de l’agence régionale de santé de Mayotte, il devient parfois difficile d’y voir clair dans l’évolution de la campagne et de la stratégie vaccinales. Le dernier point de situation – données arrêtées au 16 août – envoyé vendredi par Santé publique France en lien avec l’autorité sanitaire vient toutefois jeter une lumière nouvelle sur la tendance des six dernières semaines, jugée “très dynamique, avec un taux de premières doses en forte augmentation”.
“La campagne prend une tournure extrêmement différente de ce qu’on a vécu jusqu’à présent, les gens arrivent de façon massive dans les centres”, souligne Maxime Jean, infectiologue et chef de service adjoint à la veille sanitaire à l’ARS. Mieux encore : “dans chaque centre, nous faisons deux premières doses pour une deuxième dose. Ce sont des gens qui arrivent dans le système de vaccination alors qu’ils en étaient jusqu’alors éloignés”, se réjouit le pilote de l’opération. Par conséquent, la tendance actuelle pourrait bien se poursuivre ou du moins se confirmer dans les chiffres des deuxièmes doses d’ici quatre semaines.
+70% d’injections à Koungou en deux semaines
Au premier abord, le pourcentage de vaccinés par rapport à la population totale – estimée à 279.471 personnes – semble pourtant patiner à 19,4%. Mais à y regarder de plus près, ramené à la population-cible, à savoir les plus de 12 ans, ce taux avoisine déjà les 30%. Plus intéressante encore, l’évolution du rythme de vaccination. Boosté sûrement en partie par la levée des motifs impérieux pour les voyageurs présentant un schéma vaccinal complet, et la mise en application du passe sanitaire depuis le 9 août, celui-là est monté en flèche, particulièrement sur les dernières semaines. Et la multiplication des points de vaccination y est sans doute un peu pour quelque chose. “L’ouverture des cinq sites de vaccination au CHM et dans les CMR en semaine 31, ainsi que l’ouverture d’un centre supplémentaire fixe à Koungou semaine 32 explique en partie l’augmentation importante du nombre d’injections entre les semaines 30 et 32 (+70%)”, précise le tableau de bord.
Centres fixes dans les grands bassins de population
C’est donc en partie grâce au maillage évolutif du territoire que l’agence régionale de santé parvient à attirer les plus récalcitrants. Dans cette couverture territoriale, il y a d’abord les centres fixes qui “sont amenés à proposer une offre de vaccination pérenne à l’endroit où le bassin de population est le plus important”, c’est-à-dire à Mamoudzou, explique Maxime Jean. C’est ainsi que le premier centre avait vu le jour à la MJC de M’Gombani. Bien sûr, toute cette logistique doit se faire en lien étroit avec les municipalités, ce qui explique pourquoi il a dû être déplacé pendant les vacances au collège de M’Gombani, par exemple. Par ailleurs, compte tenu de la forte affluence les mardi et mercredi, l’ARS a fait le choix de mettre en place un centre à Tsoundzou “qui va être amené à se pérenniser pour proposer la vaccination à tous les habitants du sud du Grand Mamoudzou”, déroule le responsable.
Enfin, au vu de sa couverture vaccinale très inférieure au reste de l’île – 19,69% de premières doses, 8% de deuxième dose – un focus particulier a été mis sur la commune de Koungou, l’une des plus peuplées de l’île. Comme le précise le rapport de Santé publique France, l’analyse commune par commune, reste toutefois à prendre avec des pincettes car elle porte sur le lieu de vaccination, et non sur le lieu de résidence des personnes vaccinées. Ainsi, les populations de Koungou ont pu, par exemple, aller se faire vacciner à Mamoudzou. “Ces données constituent davantage un indicateur, une aide à la décision et non pas quelque chose de figé et de scientifique. Cela nous permet de réadapter l’offre à la hausse dans les zones où la vaccination semble plus faible”, explique Maxime Jean.
Du centre éphémère à l’équipe mobile
C’est d’ailleurs tout l’intérêt des centres dits “éphémères”, dans le jargon de l’ARS. Ces centres sont ouverts une semaine dans chaque commune de l’île tous les 28 jours. “Ainsi, le jour de notre retour, nous pouvons assurer la deuxième injection”, développe l’infectiologue. Problème, certaines communes couvrent des territoires très étendus, et les habitants peuvent avoir des difficultés à se rendre dans les centres le jour J. “En travaillant avec les municipalités, nous nous sommes rendus compte qu’en restant au même endroit tous les 28 jours, il y avait des personnes que nous n’arrivions pas à atteindre”, retrace-t-il. D’où l’évolution vers des équipes mobiles, qui peuvent être amenées à vacciner les populations dans des écoles, bibliothèques, ou autres locaux mis à disposition par les municipalités.
Enfin, en plus de cet arsenal dont dispose l’ARS, le CHM propose lui aussi des centres dans ses CMR à Dzoumogné, Kahani, et Mramadoudou. À leur tour, le SDIS de Mayotte et le secteur libéral avec les trois maisons de santé pluridisciplinaire (Le Lagon, Jardin Créole et Hauts-Vallons) et la pharmacie des Hauts-Vallons ont pu rejoindre la course au gré de l’évolution réglementaire et de l’adoucissement des modalités de conservation – désormais, les flacons décongelés peuvent être utilisés dans les 30 jours suivant leur sortie du super congélateur, contre 5 jours en début d’année. Au total, ce sont ainsi pas moins de 18 lieux identifiés où les habitants de Mayotte peuvent désormais recevoir leur injection.
Romain Guille est un journaliste avec plus de 10 ans d'expérience dans le domaine, ayant travaillé pour plusieurs publications en France métropolitaine et à Mayotte comme L'Observateur, Mayotte Hebdo et Flash Infos, où il a acquis une expertise dans la production de contenu engageant et informatif pour une variété de publics.