Alors que les chiffres de l’ARS confirment la propagation active du Covid-19 à Mayotte, la directrice de l’autorité sanitaire Dominique Voynet et le préfet Jean-François Colombet ont annoncé l’instauration d’un nouveau confinement, effectif à partir du vendredi 5 février 18h, et pour au moins trois semaines. Bis repetita, donc, même si cette nouvelle vague semble plus sévère que la première…
La rumeur enflait depuis plusieurs heures. Ce jeudi soir, le préfet de Mayotte Jean-François Colombet a confirmé sur le plateau de Mayotte la 1ère, aux côtés de la directrice de l’agence régionale de santé (ARS) Dominique Voynet, la mise en place d’un confinement généralisé à Mayotte, qui prendra effet vendredi à 18h, et ce, pour une durée de trois semaines. Cette annonce intervient alors que “la situation sanitaire continue de se dégrader, malgré les mesures de fermeture des frontières, de couvre-feu et de confinement localisé prises ces dernières semaines”, précise la préfecture dans un communiqué.
“Le gouvernement m’a autorisé à placer Mayotte en confinement général demain à 18h. Nous partons sur trois semaines, et ce sera au moins trois semaines”, a précisé Jean-François Colombet. Conséquence : le 101ème département retrouve “les contraintes connues il y a un an”, à savoir le travail à domicile dès qu’il est possible, la fermeture des guichets publics, écoles, collèges, lycées et aussi des bars et restaurants, sauf pour de la vente à emporter/livraison. “L’objectif est de réduire tous les facteurs qui peuvent nous donner à nous déplacer, de façon à freiner l’épidémie”, a abondé le délégué au gouvernement. Bien sûr, ceux dont l’activité ne peut se faire à distance pourront aller travailler, à condition d’être muni d’une attestation ou d’un justificatif de l’employeur. C’est le cas des travaux publics, notamment.
Taux d’incidence deux fois supérieur à la métropole
Malgré le couvre-feu mis en place sur tout le territoire depuis deux semaines, et le confinement localisé des communes de Dzaoudzi-Labattoir, Pamandzi et Bouéni, les chiffres communiqués par l’agence régionale de santé ces derniers jours n’ont cessé de se dégrader. Ce jeudi, ce sont 1.232 cas qui étaient recensés par l’ARS sur une semaine, et un taux d’incidence à 440,8, soit plus de deux fois les niveaux constatés en métropole… Quant aux tests, positifs à 17,7%, ils ne contredisent pas franchement cette tendance morose. En clair, près de deux personnes sur dix ont gagné leur septaine après un passage sous le coton-tige !
Des formes graves, même chez les jeunes
“Il y a beaucoup de différences entre la première vague et la seconde vague”, a tenu à souligner la directrice de l’ARS, Dominique Voynet. “Le virus se diffuse partout, pas une seule commune n’est épargnée et nous assistons à des contaminations chez des gens moins âgés avec des formes graves, parfois même chez les jeunes, dont des décès chez des personnes qui avaient à peine 25 ans”, a-t-elle ajouté, insistant sur le fait que ce virus n’était pas “une grippette”. “Nous ferons l’impossible, mais je demande aux Mahorais de s’inquiéter.”
Dans le viseur des autorités, le variant sud-africain, qui explique cette hausse soudaine des cas sur l’île aux parfums, jusqu’alors relativement épargnée par la pandémie. 78 porteurs de cette mutation ont été recensés à Mayotte, et un cas pour le variant britannique. Mais “les délais de séquençage s’élevant à plusieurs jours, le nombre de porteurs de ces variants est en réalité beaucoup plus élevé”, a précisé la préfecture. Le nombre de patients affectés par le Covid-19 admis aux urgences, en médecine et en réanimation progresse à une vitesse inédite. Comme le nombre de clusters.
Tic-tac tic-tac pour les vaccins
D’où l’importance, pour la directrice de l’ARS, d’oser dépasser sa peur de la seringue. “Le vaccin porte ses fruits deux semaines après la piqûre, donc il n’y a pas de temps à perdre”, a-t-elle indiqué, en citant son propre exemple, tout comme ceux du Docteur Martial Henry et du président du conseil départemental, Soibahadine Ibrahim Ramadani. L’ancienne ministre compte beaucoup sur l’arrivée des vaccins AstraZeneca et Moderna à Mayotte, plus simples d’utilisation, et qui devront être livrés avant la deuxième semaine de mars, a-t-elle assuré.
Parmi les autres moyens sur la table, il y a bien sûr la réorganisation au CHM. L’hôpital accélère le rythme des Evasan pour libérer des lits, tandis que le nombre de réservistes doit encore augmenter en cette fin de semaine. Cinq lits supplémentaires seront par ailleurs équipés par les militaires ce week-end, et une autre demande de cinq lits supplémentaires est d’ores-et-déjà sur la table du cabinet du premier ministre, a mentionné Dominique Voynet. Une source du CHM nous précise que les militaires arriveront dimanche pour gérer l’aile de chirurgie ambulatoire dédiée au Covid, qui accueille actuellement 5 patients atteints du virus, placés en réanimation.
Les aides aux entreprises relancées
Repoussée au maximum, cette décision d’un nouveau confinement à Mayotte risque de mettre à mal une économie locale qui avait déjà souffert lors de la première vague. Et tout particulièrement l’économie informelle, qui représente deux tiers des entreprises marchandes dans le département. “Tout le dispositif d’aides est réactivé immédiatement”, a répondu le préfet, interrogé au sujet des mesures de soutien aux entreprises, en assurant défendre un dispositif “le plus adapté possible à la situation singulière de Mayotte”. Seul point positif pour cette nouvelle phase sous cloche, version 2.0 : le maintien des liaisons commerciales aériennes, “vitales” pour l’île, qui compte sur ses 50 tonnes de fret par semaine pour subvenir à ses besoins les plus élémentaires. Message aux voyageurs : le motif impérieux… l’est bel et bien ! S’il restait quelques sceptiques, ce nouveau confinement l’aura au moins prouvé.