Lors de sa traditionnelle audioconférence de presse au sujet de l’épidémie de coronavirus, la directrice de l’Agence régionale de santé est revenue sur les différentes mesures prises par son institution au cours des derniers jours comme le renforcement d’équipes mobiles et un dépistage en passe de devenir plus massif. Et a livré quelques informations au premier rang desquelles le décès du grand mufti des Comores suite à la contraction du Covid-19, venant confirmer la présence du coronavirus dans l’archipel.
Ce jeudi, 233 cas de coronavirus étaient identifiés à Mayotte. Soit 12 de plus que la veille. Enfin pas tout à fait, comme tient à le rappeler la directrice de l’ARS, déterminée à être le plus claire possible sur les chiffres livrés par son institution. “Nous avons en fait un seul cas qui est rapporté à la journée du 15 avril, les autres ayant été un renouvellement de tests un peu douteux qui ont été refaits et imputés aux journées du 12, 13 et 14”, détaille ainsi Dominique Voynet qui voit dans ce double test “la première manifestation de l’arrivée de deux biologistes supplémentaires de la réserve sanitaire à Mayotte qui ont pu rattraper le retard sur les tests suspects”. Quatre personnes sont toujours en réanimation, dont l’une dans un état critique quant 94 autres personnes contaminées sont officiellement guéries. “Ce n’est pas encore la moitié mais quand même, nous sommes à 41%”, se satisfait à ce titre l’ancienne ministre.
Laquelle satisfaction ne dure pas longtemps dans le discours de la directrice de l’ARS qui, même si rien n’indique pour l’heure qu’une montée en flèche des contaminations est nécessairement à prévoir, a plusieurs sujets d’inquiétude. D’abord, le nombre de femmes enceintes touchées par le virus, au nombre de 10. Situation face à laquelle “nous avons mis en place une filière dédiée à l’hôpital tant qu’elles ont de la fièvre et qui poursuivront à être suivies de très près par nos équipes une fois rentrées à leur domicile”, explique Dominique Voynet qui trouve dans ce suivi l’occasion d’expliquer qu’une équipe “solide et nombreuse” a été monté ces derniers jours pour opérer une plus grande attention auprès des cas confirmés et cas contact. Au sein de cette équipe mobile, cinq médecins et des infirmiers dont des personnes parlant shimaoré.
Le CHM au centre des inquiétudes
Autre sujet d’inquiétude, le CHM. Non pas pour sa réponse médicale, mais pour la présence en son sein de nombreux cas de de contamination. “On a un gros problème au CHM. J’ai rencontré cette semaine Catherine Barbezieux pour attirer son attention et alerter ses équipes sur la question de l’hygiène hospitalière et là encore, nous allons mettre en place deux équipes mobiles qui vont faire le tour des services et faire de la formation aux agents pour leur réexpliquer comment bien utiliser les équipements de protection et surtout comment bien les enlever, car c’est souvent à ce moment-là que l’on se contamine”, explique à ce titre la directrice de l’ARS. Côté CHM, on s’organise pour une reprise du suivi des patients chroniques, car “on s’est rendu compte que beaucoup d’entre eux n’osaient pas se déplacer dans les centres par crainte du Covid”, assure Dominique Voynet, pas peu fière d’expliquer que face à ce constat, “nous mettons en place une ébauche d’hospitalisation à domicile. Dans cette période de crise, on arrive à faire en quelques jours ce qui n’a pas réussi à être fait pendant des années”.
Encore un motif de satisfaction rattrapé par “notre inquiétude quant aux nombres des décès à domicile et quant aux conditions de ces décès”, dévoile docteur Voynet. “Nous sommes en train de procéder à une analyse complète des décès qui sont survenus à domicile depuis le début de la crise Covid pour essayer d’expliquer chacun des décès inattendus. Il s’agit de savoir exactement quelle est la cause du décès car on se rend compte que beaucoup de situations méritent d’être investiguées sérieusement, notamment pour écarter le doute du Covid”, explique encore la directrice, assurant que les résultats seront rendus publics.
Transparence aussi, sur la situation au RSMA : “nous avons considéré que les personnes qui ont voyagé autour de la personne dépistée positive, même si elle a voyagé avec un masque, devaient être considérées comme des cas contacts à risque moyen. Nous savons qui ils sont et ils ont été placés ensemble au RSMA, ils sont isolés et suivis par les infirmières. Cela dit, nous savons maintenant qu’il y a du Covid aux Comores (voir encadré) et nous allons donc, à partir de lundi, dépister toutes les personnes qui sont au RSMA, dont les infirmières“, indique Dominique Voynet. La personne dépistée a quant à elle fait son entrée à l’internat de Tsararano, mué en centre de confinement, au même titre que deux autres patients.
Vers un déconfinement ?
De manière générale, deux clusters de contamination, Bandrélé et le CHM – “où on a un vrai problème”-, sont encore vif et sous surveillance, tandis que la propagation du virus au sein des agents de la police aux frontières et du commissariat de Mamoudzou semble s’endiguer. Si un “gros travail de formation” sera opéré au centre hospitalier pour atteindre ce résultat, les équipes de l’ARS s’attellent encore à déterminer l’ensemble des cas contacts des patients de Bandrélé.
Possible, alors, d’imaginer que Mayotte puisse peu à peu sortir du confinement en même temps que la métropole avec une réouverture des écoles le 11 mai ? “Est-ce que l’on pourra à ce moment confirmer une décrue, est-ce que l’on sera toujours à un niveau élevé de contamination voire à un niveau épidémique, à ce stade je ne le sais pas et ne peut donc pas confirmer que le confinement sera levé progressivement sur le territoire à partir de cette date”, répond la directrice de l’ARS, renvoyant au recteur le soin de se positionner au sujet des écoles “car il y a des problèmes énormes à régler, ne serait-ce que le transport scolaire la cantine, l’équipement des élèves…”. Difficile donc, de se calquer sur le modèle métropolitain, même si l’Agence de santé souhaite se préparer au déconfinement grâce à des tests à grande échelle (voir encadré). Comme de se fier aux experts “qui font de la littérature derrière leur téléphone” au sujet de Mayotte. C’est peu dire que Dominique Voynet n’a pas mâché ses mots à l’encontre des rédacteurs de l’avis du comité scientifique qui s’est penché sur les Outre-mer. “Personne ne m’a appelé, on a juste eu un mail d’un type qui nous a demandé de lui expliquer ce que l’on dit déjà dans nos rapports quotidiens. C’est un avis très général qui ne se repose pas sur grand-chose, et pour preuve, il annonce un pic épidémique dans plusieurs territoires qui sont aujourd’hui à un plateau”, tance l’ancienne ministre. Mais que les mahorais soient rassurés, Dominique Voynet assure que c’est bien elle qui murmure directement à l’oreille de la ministre des Outre-mer, laquelle y serait très attentive.
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