Covid-19 à Mayotte : Pas d’inquiétude mais des questionnements

Situation épidémiologique, reprise des vols commerciaux, ou encore arrivée de la campagne du second tour des élections municipales et de la période des grands mariages : autant de points abordés hier par la directrice de l’ARS, Dominique Voynet. Revue. 

Le nombre de cas positifs de Covid-19 annoncé pour la journée d’hier, de l’aveu même de Dominique Voynet, directrice de l’agence régionale de santé (ARS), rendait finalement peu compte de la situation. En cause : un nombre de tests réalisés la veille assez bas, 72, “le laboratoire privé étant à nouveau en rupture de tests”, a-t-elle expliqué. Une rupture qui n’est pas à imputer au laboratoire en lui-même, mais à la pénurie de matériels du fabricant américain. Une situation pour laquelle Dominique Voynet a déploré qu’il était “épuisant de se battre pour avoir seulement les moyens de la politique qui nous est demandée. Les instances sanitaires nationales sont alertées et nous ont promis leur aide”. 

Quoi qu’il en soit, “nous avons toujours du monde hospitalisé : 38 personnes, dont 12 en réanimation.” Un 29ème décès était d’ailleurs constaté hier matin. Des décès qui concernent toujours “des personnes très âgées. Le dernier avait 85 ans, l’avant-dernier 95.” D’une manière générale, nous sommes donc “toujours dans une phase d’attente et d’observation, on ne peut pas se rassurer. Nous ne sommes pas mal placés, nous ne sommes pas inquiets [car nous avons] le soutien du service de santé des armées, (…) mais rien ne nous incite à relâcher notre vigilance.” 

Surveillance sur d’éventuels clusters 

L’attention de l’ARS se porte en particulier sur d’éventuels clusters, afin de les identifier au plus tôt et de les contenir. La semaine dernière, trois clusters étaient identifiés. Celui de la prison n’a pas eu à connaître de cas grave ou d’hospitalisation ; celui des pompiers de Longoni semble contenu avec toutefois encore “quelques cas actifs” ; et celui du centre de dialyse. Pour ce dernier, le mystère demeure : “le personnel et les locaux ne semblent pas en cause. Nous sommes en train de chercher dans quelles conditions ces personnes, qui sont fragiles, ont pu être contaminées.” 

Second tour des municipales : l’interrogation 

Dans son avis publié le 8 juin, le conseil scientifique appelle à porter une attention toute particulière au second tour des élections municipales à Mayotte et en Guyane (voir article ci-après). En ce sens se tenait mardi une réunion interministérielle réunissant le premier ministre et les ministres de la Santé, des Outre-mer, de l’Intérieur, et des Armées. Une réunion consacrée à la situation de ces deux territoires ultramarins, encore sujets à la circulation du virus. Y a été “confirmée une unanimité en faveur de la tenue” de ce deuxième tour. Selon toutes vraisemblances, les communes devraient être mobilisées “pour que les choses se passent bien”. Parmi les pistes : une campagne qui se tiendra essentiellement en extérieur et “des maires sensibilisés sur cette question. [Nous sommes] en contact régulier avec les DGS des communes et [nous veillons] à ce que les messages soient rappelés régulièrement en ce qui concerne l’organisation des élections elles-mêmes”. 

Autre questionnement : celui du porte-à-porte, base même d’une campagne électorale municipale à Mayotte. “C’est une des occasions de contamination (…). Notre travail est de convaincre que le masque doit être porté, qu’on ne doit pas se serrer la main, et que si on peut avoir un flacon de gel hydroalcoolique dans sa poche, c’est bien”, a expliqué Dominique Voynet, tout en reconnaissant qu’un effort était encore à faire pour sensibiliser au-delà des maires en place. C’est notamment vrai pour les candidats en lice et qui, n’étant pas aux responsabilités, “sont peut-être moins sensibles” à la sensibilisation telle qu’elle est menée actuellement. 

Grands mariages : ne pas se relâcher 

Inquiétude – ou tout au moins vigilance – également sur la période des grands mariages approchant à grands pas. Des rassemblements de centaines de personnes faits de contacts légitimes, mais susceptibles de soutenir une nouvelle propagation du Covid. Face à ce risque, l’ARS se “prépare à édicter des mesures de vigilance”. Autre point religieux, celui des mosquées. L’organisme de santé travaille avec les autorités religieuses, un travail qualifié de “très utile” par Dominique Voynet. Elle a par ailleurs précisé que “les mosquées ont choisi de privilégier les ablutions à domicile et elles s’emploient au respect des gestes barrières à l’intérieur, avec notamment un marqueur matérialisant l’emplacement des tapis de prière”. 

Reprise de l’aérien : le questionnement 

C’est l’annonce que beaucoup attendent à Mayotte : la reprise des vols commerciaux de et vers Mayotte. Si une reprise a été annoncée pour les territoires ultramarins par Annick Girardin dans la deuxième partie du mois de juin, quid des solutions à adopter pour Mayotte ? “Sur les vols, on a toujours une difficulté puisqu’on est toujours en zone orange. Il est tout à fait possible d’imaginer reprendre des vols commerciaux qui amèneraient des personnes à Mayotte, mais dans l’autre sens, le risque est d’importer des cas de Covid-19 en métropole”, a-t-elle confié. Une solution a été envisagée pour y remédier : imposer un test à chaque voyageur au départ du 101ème département. Mais de l’aveu même de la directrice de l’ARS, “c’est impraticable pour nous. Faire 250 tests chaque jour sur des voyageurs et des équipages, c’est une charge très lourde pour nos laboratoires, qui auraient alors à choisir entre tester des cas contacts ou des clusters, ou bien tester des personnes qui vont voyager”. Une piste peu envisageable donc, mais “nous avons fait deux propositions : que les passagers soient testés [en arrivant] à Paris en s’engageant à porter le masque et à s’isoler jusqu’à communication des résultats ; et/ou respecter une quatorzaine en arrivant à Paris”. Sur ce dernier point, une expérimentation est actuellement en cours, mais à l’arrivée dans les territoires ultramarins. Pas de certitude pour l’heure donc, mais “des propositions seront faites au premier ministre avant la fin de la semaine pour arbitrage”. 

Sur le blocage de l’hélicoptère sanitaire par des habitants de Mtsahara 

Mardi, des habitants du village de Mtsahara ont entravé l’atterrissage de l’hélicoptère des secours, venu secourir une personne arrivée en kwassa-kwassa. Un comportement qui s’oppose à toute déontologie médicale, dénoncé par l’ARS sur lequel est revenue Dominique Voynet. “Les arrivées de kwassas sont très inférieures par rapport à avant le confinement. Très peu de ces kwassas transportent des personnes qui ont besoin de soins. Nous avons eu deux situations dans lesquelles les personnes transportées étaient porteuses du Covid-19 et toutes deux sont décédées avant même leur prise en charge : l’une sur la plage, et l’autre en mer.”

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