Une affaire de voiture qui embarrasse à la mairie de Dembéni

Pièce importante de l’équipe de Moudjibou Saïdi au cours des élections municipales de Dembéni, Mohamadi « Bango » Saïdali est amer. Une histoire de voiture louée le temps de la campagne lui est retombée dessus. Elle lui a même coûté son poste, le maire l’accusant d’escroquerie et de mensonges.

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Moudjibou Saïdi, le maire de Dembéni, ne porte plus Mohamadi « Bango » Saïdali dans son cœur. Ce dernier s’est pourtant démené pendant l’élection.

« Monsieur Mohamadi Saïdali ne respecte ni la déontologie, ni les principes de la fonction publique et transgresse la loi et le règlement intérieur de la collectivité. Il donne une mauvaise image de la fonction publique et de la mairie de Dembéni », conclut le rapport envoyé au centre de gestion, le 21 juin 2022. Le constat dressé par Moudjibou Saïdi, le maire de Dembéni, est sévère. Surtout, il n’est pas du tout du goût de l’intéressé. Mohamadi Saïdali, plus connu sous le surnom de « Bango », n’a pourtant pas ménagé ses efforts pour faire élire l’équipe du maire actuel en 2020 (qui s’est imposé au second tour de 70 voix seulement). Son activisme a même poussé l’équipe de campagne à lui fournir « une voiture louée par un entrepreneur local ». Une mise à disposition que réfute le maire. « Il a loué la voiture de sa propre volonté », avance plutôt celui-ci. Interrogé sur la location d’au moins trois autres véhicules pendant cette campagne, il assure : « Au nom de mon seigneur, je n’ai pas connaissance de ces éléments ». Ce qui est certain, c’est que le véhicule en question va causer la rancœur du maire et la perte d’emploi de « Bango » en ce mois de février 2023. 

Celui-ci ne s’attendait pourtant pas à pareille chute quand il a rejoint en 2020 l’équipe de militants dirigée par Rachadi « Marius » Saindou, alors directeur de campagne du futur maire. Le petit bonhomme très actif s’investit pleinement dans cette campagne. Et celle-ci est anormalement longue à cause du coronavirus, puisque le premier tour a lieu en mars 2020 et le second en juillet. Le contretemps est vite oublié, la victoire est au bout. Et même si elle est étriquée, « Bango » savoure. « J’ai même pleuré le jour où l’on a gagné », raconte celui qui était alors artisan. Les relations amicales avec le nouvel édile sont alors au beau fixe et celui-ci vient le chercher pour qu’il devienne agent de surveillance de la voie publique (ASVP) de Dembéni, au début de l’année 2021. 

1.300 euros donnés par le maire

C’est bien plus tard dans l’année que tout va changer. La voiture, récupérée dans des conditions rocambolesques en juillet 2020 (le loueur a utilisé les doubles pour la reprendre sans prévenir), n’a jamais été payée. La société basée à Poroani réclame son dû. « La gendarmerie m’appelle pour me dire que le loueur veut porter plainte contre ce monsieur. Je le convoque et je lui demande pourquoi il ne paye pas », rapporte le maire. Voulant « l’aider », il lui donne 1.300 euros pour effacer sa dette. « Je l’ai aidé de manière sociale », argue l’élu. « Mais ces 1.300, il les a consommés. » L’employé rétorque que l’argent était pour un dédommagement après la campagne, pas pour la voiture. Et s’il admet ne pas vouloir payer la location au départ, car ce n’était pas prévu selon lui, un accord est toutefois trouvé. Il accepte de rembourser en échelonnant la somme en quatre fois (trois fois 500 euros et une dernière fois 621 euros en avril 2022). Le conflit d’ordre financier terminé, celui entre l’agent et son employeur ne prend pas fin au contraire. Un rapport de Moudjibou Saïdi, datant du 21 juin 2022, explique : « Par son comportement, Monsieur Mohamadi Saïdali, ne respecte pas la tenue d’ASVP qu’il porte, nuit à l’image de la collectivité et celui de son autorité territoriale ». Au téléphone, il réitère : « Il ne respecte pas sa hiérarchie. Il ne mérite pas d’être un fonctionnaire ». Joignant la parole aux actes, il refuse la titularisation de l’employé (il était stagiaire depuis 2021) qui passe, en plus, aux services techniques. Ces décisions, « Bango » ne les accepte pas. Il rappelle que dans un premier rapport de novembre 2021, son supérieur écrit qu’hormis cette affaire de voiture, « sur le plan professionnel, il n’y a rien à reprocher à cet agent ».

« Son CDD l’attend à la mairie »

L’avis de la hiérarchie est à l’opposer de ce que défend le maire. L’édile revient, par exemple, sur un événement de 2008 où « Bango » était accusé d’avoir dérobé l’argent de la régie municipale. « Ce n’est pas vrai. J’ai été entendu par les gendarmes, mais c’était quelqu’un d’Ongojou », rappelle l’intéressé. Il ne se reconnaît pas non plus de cette histoire de vols réguliers dans les vestiaires alors qu’il travaille dans la police municipale ou le fait que ses ex-salariés lui courent après pour des impayés. « C’est du n’importe quoi ! » Le centre de gestion de Mayotte, la structure gérant les ressources humaines des collectivités, a été amené à intervenir dans cette affaire. Commission administrative paritaire et conseil de discipline ont pris le parti du salarié. La première a émis « un avis défavorable concernant la demande de refus de titularisation ». Le conseil de discipline estime que « les faits ne présentaient pas un caractère suffisant de vraisemblance et de gravité pour justifier la mesure d’exclusion définitive de fonction ». 

Les deux décisions n’ont pas changé grand-chose au final. Un arrêté notifié le 26 janvier 2023 indique « qu’il est mis fin au stage de Monsieur Mohamadi Saïdali en qualité d’adjoint technique territorial à compter du 4 février 2022 (sic) ». Refusant son licenciement, l’ex-employé municipal compte désormais saisir la justice pour le contester. Il dit ne pas vouloir de la main tendue du maire qui propose un nouveau CDD d’un an et a envoyé plusieurs personnes chez « Bango » pour le convaincre. « Son CDD l’attend à la mairie », fait-il remarquer.

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