Face aux risques de nouvelle flambée épidémique à Mayotte, le député LR Mansour Kamardine martèle depuis plusieurs semaines l’absence de moyens déployés par le gouvernement sur le territoire. Malgré les mesures fortes prises récemment par le préfet, le parlementaire regrette le retard à l’allumage au sujet de la campagne de vaccination et exige le renforcement de la politique migratoire pour éviter de provoquer une nouvelle crise sociale majeure.
Flash Infos : Depuis le début de l’année, vous ne cessez d’alerter sur une possible reprise épidémique à Mayotte. Vos craintes se sont confirmées avec l’arrivée sur le territoire du variant sud-africain, qui a poussé le préfet à prendre des mesures drastiques, comme la mise en place du couvre-feu ce jeudi 21 janvier. Comment avez-vous accueilli ses déclarations ?
Mansour Kamardine : Je dirais qu’il y a une certaine forme d’espérance dans les décisions prises par le préfet. Je souhaite qu’il y ait maintenant un renforcement des contrôles pour lutter contre l’organisation de fêtes et de mariages qui participent à la circulation de l’épidémie et qui mettent en danger la santé collective. En métropole, des moyens importants ont été déployés pour endiguer les rassemblements, notamment à l’occasion du passage à la nouvelle année. Je ne crois pas que ce soit la fin du monde si nous demandons aux habitants de ne pas se regrouper… Nous pouvons attendre un petit peu et prendre notre mal en patience, non ?!
FI : L’une des autres mesures fortes annoncées par le délégué du gouvernement est l’appel à mobilisation des opérateurs nautiques privés pour participer à la détection en mer des kwassas. Que vous inspire cette demande ?
M. K. : Je salue le renforcement de la protection de nos frontières. Mais l’initiative de faire appel à des opérateurs nautiques privés, qui je l’espère se mobiliseront, permet de corroborer ce que nous dénonçons depuis des mois, voire même depuis des années. Les moyens affectés sont en deçà des besoins réels ! La France doit assumer la souveraineté de Mayotte, ce n’est quand même pas la mer à boire. Il apparaît essentiel que le gouvernement opère dans les plus brefs délais un calibrage vers le haut pour endiguer le phénomène migratoire des kwassas. Car il est avéré que nous trouvons de tout à bord de ces embarcations de fortune : aussi bien des personnes porteuses du virus que des cheptels et de la contrebande.
FI : Justement, n’est-ce pas un aveu d’échec de la politique migratoire pratiquée à Mayotte ? La solution ne serait-elle pas plutôt diplomatique, comme le préconise le document-cadre de partenariat franco-comorien de juillet 2019 ?
M. K. : À la question, faut-il développer une coopération sanitaire ? La réponse est oui, bien évidemment. L’agence française de développement (AFD) vient de mobiliser 1 million d’euros pour aider l’Union des Comores à faire face à l’épidémie. Il faut le faire sans condition ! En apportant notre appui aux autorités comoriennes, nous réalisons une double opération : nous l’épaulons pour soigner sa population et nous nous protégeons. Mais en contrepartie, nous pouvons être plus fermes avec ses dirigeants politiques et faire en sorte qu’elle respecte sa part du marché.
FI : Quant à la campagne de vaccination, elle s’est accélérée sur l’ensemble du territoire national et dans les Outre-mer, et Mayotte passe encore une fois pour la cinquième roue du carrosse… Ici, elle ne doit pas débuter avant le début de semaine prochaine.
M. K. : Avec mes collègues parlementaires, nous avons appelé de nos vœux à un véritable plan actif de vaccination. Malheureusement, l’agence régionale de santé se trouve seule pour faire un appel du pied à Paris dans le but qu’on lui envoie les doses nécessaires. La population mahoraise souhaite ardemment être vaccinée ! Peut-être même plus qu’ailleurs puisque nos capacités hospitalières et logistiques sont limitées, à l’image des 16 lits en réanimation. D’autant plus que nous sommes à portée du variant sud-africain.
Ce nouvel épisode démontre bien à quel point le 101ème département est totalement délaissé par le gouvernement. Ce que nous vivons actuellement, nous l’avons déjà vécu en 1981 lors de l’arrivée au pouvoir de François Mitterrand, qui souhaitait purement et simplement le largage de Mayotte à l’Union des Comores. Mais c’était sans compter sur la détermination des Mahorais. Notre histoire est comparable à la fable «Le Chêne et le Roseau» de Jean de La Fontaine. Nous ne rompons pas et nous continuerons à exprimer notre souffrance.
FI : Selon vous, les Mahorais sont-ils prêts à respecter le couvre-feu, voire même à accepter un nouveau confinement si la situation sanitaire ne s’améliore pas d’ici 15 jours ?
M. K. : Les Mahorais comprennent la nécessité du couvre-feu et l’éventualité du confinement. À condition que tous les moyens soient mis à notre disposition, comme l’envoi des bâtiments de la marine nationale pour surveiller nos côtes. Si demain, des kwassas continuent de beacher, cela va provoquer une crise sociale majeure. L’opinion ne l’acceptera pas. Et nous risquons d’aller au devant de grosses difficultés, comme des affrontements avec les forces de l’ordre…