En réponse à l’avis défavorable émis par le conseil départemental le 13 janvier dernier concernant le projet de loi Mayotte, le député Mansour Kamardine propose l’organisation dans le mois d’un référendum. Une suggestion passée sous silence par le ministre des Outre-mer, Sébastien Lecornu, qui préfère dénoncer une instrumentalisation politicienne et réaffirmer la volonté de l’État de ne pas abandonner le processus. L’un comme l’autre campe sur ses positions.
Quoi qu’on en dise, quoi qu’on en pense, le projet de loi Mayotte fait couler beaucoup d’encre ! Nouvel exemple ce mardi 1er février avec l’intervention du député LR Mansour Kamardine au Palais Bourbon. Dans son allocution, le parlementaire défend l’avis défavorable émis à l’unanimité par le conseil départemental, le 13 janvier dernier. Une décision prise après avoir consulté l’ensemble des maires de l’île aux parfums et des représentants de la société civile puisque « les propositions des Mahorais ne sont pas prises en compte ».
Une erreur selon le ministre de l’Outre-mer, Sébastien Lecornu. « Un vote avec des réserves, ce qui aurait été possible, permettait de dire que ce texte n’était pas suffisant, mais la discussion parlementaire à l’Assemblée et au Sénat aurait permis de l’enrichir. Votre droit d’amendement sert à cela. » Or, pour le membre du gouvernement, la prise de position de la collectivité « a bloqué [un] projet de loi que tout le monde attendait et que le président de la République m’avait permis de mettre sur la table » à l’occasion des dix ans de la départementalisation, le 31 mars 2021.
Manque de considération
Malgré la participation de plus de 1.600 personnes autour des ateliers thématiques animés par le préfet de l’époque, Jean-François Colombet, et la remontée de plus de 680 propositions le 1er mai de la même année, le compte n’y est pas aux yeux des Mahorais. « La question est celle unanimement exprimée et qui demande que l’Etat, après 40 années durant lesquelles il a décidé à notre place, accepte enfin de nous écouter ! C’est pour cela que je regrette très sincèrement la posture que vous affichez et selon laquelle « ce projet est à prendre ou à laisser ! Il n’y aura pas de discussions tant que vous ne vous agenouillerez pas » », déplore Mansour Kamardine, après avoir évoqué l’interview donnée par son interlocuteur à la presse locale le matin-même dans laquelle il critique ceux qui font perdre du temps par des calculs politiciens.
Ordonnances et décrets
Dans ces conditions, que peut-on attendre pour la suite ? Le successeur d’Annick Girardin compte avancer sur le registre réglementaire. « Tout ce que nous pouvons faire par voie d’ordonnances et de décrets, nous allons le faire. Ce n’est pas parce que vous êtes candidat à l’élection législative que l’on doit ralentir l’ambition du gouvernement pour Mayotte. » Sur les questions régaliennes, telles que les luttes contre l’immigration clandestine et la délinquance, Sébastien Lecornu annonce que « des dispositions vont être reprises par Gérald Darmanin, dans le cadre de la loi d’orientation pour le ministère de l’Intérieur ».
Concernant l’avenir du projet de loi, le ministre des Outre-mer assure que ce dernier est tout sauf « stoppé », comme l’affirme Mansour Kamardine, et renouvelle sa volonté d’arrêter « de perdre du temps » avec des perturbations politiciennes dans le calendrier électoral à venir. « Quand j’entends une proche de Madame Le Pen dire sur les ondes ce [mardi] matin que c’est une bonne chose qu’[il] soit mort parce qu’il n’y avait rien dedans, pardon mais ce cynisme on en crève ! » Décidément, l’échange de quelques minutes entre les deux hommes politiques aura plutôt viré au dialogue de sourds qu’à la réconciliation. Preuve en est : la suggestion du parlementaire d’envisager l’organisation dans le mois d’un référendum local des électeurs pour donner leur avis sur ce projet de loi – et ainsi s’affranchir des logiques politiciennes – n’a pas trouvé d’écho…
Pour Ben Issa Ousseni, ce n’est pas au Département de porter l’abandon de ce texte
À Mayotte, le député (et aussi conseiller départemental) Mansour Kamardine n’est pas le seul à défendre l’avis défavorable émis par le Département le 13 janvier dernier. Le président de la collectivité, Ben Issa Ousseni, évoque « avoir tout de suite indiqué que son téléphone et son téléphone étaient ouverts si le gouvernement souhaitait revoir sa copie sur la base d’une rediscussion » et précise attendre « toujours un signe qui n’est jamais venu ».
L’élu du canton de Tsingoni ajoute avoir « transmis en annexe à la délibération un tableau qui énumère clairement ce qui devrait y figurer ». Une note visiblement restée lettre morte… « Tout est sur la table pour qui se serait donné la peine de lire la contribution de mai 2021 dans laquelle figurait la position du conseil départemental. » Face à cette absence de dialogue aux yeux de Ben Issa Ousseni, le président réfute d’entendre dire que « nous sommes responsables de l’abandon d’un texte qui méritait mieux ». Ambiance.