Loi Mayotte : non, non, rien n’a changé…

C’était l’une des annonces phares du dernier comité interministériel des Outre-mer. Au vu des spécificités mahoraises, une loi Mayotte doit être proposée « dans les six mois ». Dans les faits, les propositions du gouvernement pour l’instant sont très semblables aux « 85 solutions pour développer Mayotte » refusées par le conseil départemental de Mayotte, le 13 janvier 2022.

Maintes fois repoussé, le comité ministériel des Outre-mer s’est finalement déroulé à la mi-juillet. De cette réunion, un texte listant différentes mesures pour les départements et territoires en est sorti.   Outre une réforme de l’octroi de mer voulue par le ministre de l’Économie, Bruno Lemaire, la principale annonce concernant Mayotte a été la fameuse loi Mayotte, mise au placard en janvier 2022. A l’époque, le ministre des Outremer, Sébastien Lecornu, avait vécu comme un camouflet le rejet du conseil départemental de Mayotte. Les conseillers départementaux avaient émis un avis défavorable « en l’état » pour le texte, l’estimant pas assez ambitieux sur la convergence sociale et peu précis sur le volet financier et le calendrier des grands projets du territoire. L’élection présidentielle approchant, le projet était alors enterré. « Nul ne peut prétendre faire porter au conseil départemental la responsabilité de l’abandon de ce texte », avait pourtant répliqué Ben Issa Ousseni, le chef de l’exécutif mahorais. Depuis, les relations se sont améliorées, c’est donc sans surprise qu’il y a un mois, la Première ministre Élisabeth Borne a annoncé une nouvelle loi présentée « dans les six mois ».

Mais est-ce que ce sont réellement de nouvelles propositions ? Pas tellement à vrai dire. Moins complet que le texte rejeté en janvier 2022, celui déjà présenté liste peu ou prou les mêmes mesures. L’État y annonce vouloir « reprendre le contrôle de la démographie à Mayotte ». Mais lutter contre les reconnaissances frauduleuses de paternité, durcir les conditions d’obtention des titres de séjour ou de nouveaux moyens pour lutter contre l’immigration irrégulière, c’était déjà le souhait en janvier 2022. A noter toutefois que le durcissement du droit du sol est moins précis maintenant. En 2022, il était évoqué le conditionnement « à la détention d’un titre de séjour, depuis au moins un an, par l’un des deux parents » (c’est trois mois actuellement). Entretemps, celui qui est passé ministre de l’Intérieur et des Outre-mer, Gérald Darmanin, a fait savoir qu’il souhaite que la mesure concerne les deux parents et pas qu’un seul. Est-ce que cette proposition qui va être retenue ? C’est une possibilité.

Enfin un département-région ?

C’est l’une des spécificités de Mayotte sur le plan politique. Le conseiller départemental n’a ni tout à fait les attributions d’un département classique ni tout à fait ceux dévolus habituellement aux régions comme d’autres territoires ultramarins peuvent avoir. Comme le texte précédent, la nouvelle mouture « affirmera le caractère de « région-département » de la collectivité », comme le souhaitent de nombreux élus. Pareil sur l’offre de soins. Alors que le territoire connaît une pénurie de soignants (les maternités de Mramadoudou et Dzoumogné sont toujours fermées), la volonté de l’État est toujours de renforcer l’offre de soins par l’intermédiaire d’une réorganisation de l’actuel hôpital de Mamoudzou, l’arrivée de celui de Combani dont les travaux doivent commencer en 2025 et une ouverture facilitée aux médecins diplômés venant de l’extérieur de l’Union européenne. Sur la convergence des droits sociaux, la promesse tient toujours, comme le flou sur son calendrier. L’établissement public, qui doit assurer l’ingénierie de projets mahorais qui en manquent, demeure aussi dans le texte.

Ainsi sur tous les points versés au dossier du CIOM, seul l’un paraît nouveau, celui sur le plan propre à l’enfance. « Pour accompagner le territoire, confronté à une forte pression démographique, à assumer ses compétences, la loi proposera une stratégie optimale en faveur de l’enfance, pilotée par la secrétaire d’État à l’Enfance (N.D.L.R. Charlotte Caubel actuellement), à l’issue d’une concertation approfondie avec le conseil départemental », est-il écrit.

Une nouveauté qui masque mal le peu d’évolutions par rapport à la première base présentée en janvier 2022 et que les élus départementaux ont préféré refuser. Va-t-on vers un texte au même destin ? Réponse dans cinq mois.

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