La Chambre régionale des comptes épingle la gestion de la Ville de Mamoudzou

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FI - Ville Mamoudzou rapport CRC
Malgré un redressement des finances de la Ville de Mamoudzou amorcé en 2023 “la capacité de désendettement représente encore près de 26 ans au 1er janvier 2024”, estime la Chambre.

La Chambre régionale des comptes (CRC) de Mayotte a rendu, le 10 juillet, un rapport sévère sur la gestion de la commune de Mamoudzou au cours des exercices des dernières années. Elle constate des dépenses trop importantes par rapport aux recettes et aux moyens engagés. Concernant la compétence scolaire, elle déplore que des enfants ne soient pas scolarisés normalement alors que ce poste de dépenses est très élevé.

Une situation financière critique 

La Chambre constate que sur les 22 recommandations adressées lors des examens de gestion de la Ville sur les exercices de 2014 à 2018, “une grande majorité n’a pas été mise en œuvre”. et que la “quasi-totalité des observations formulées à cette époque reste toujours d’actualité.”

Les dépenses de fonctionnement sont plus importantes que les recettes, “l’épargne brute s’est dégradée passant de 8,5 millions d’euros en 2018 à 0,1 million en 2022”. Néanmoins, la commune “a amorcé un redressement en 2023”. Insuffisant toutefois car, “la capacité de désendettement représente encore près de 26 ans au 1er janvier 2024.” La Chambre note d’importants efforts réalisés pour encadrer les processus et les procédures internes en particulier dans leurs aspects financiers mais déplore le fait que cet effort semble “peu exploité dans son application, au vu des nombreux dysfonctionnements relevés en matière de ressources humaines et de commande publique.”

La compétence scolaire, une mission difficile à assurer 

En octobre 2023, la commune comptait près de 17.000 enfants scolarisés en maternelle et en primaire, en augmentation de 18 % depuis 2018. Cependant, elle n’a pas la capacité de les scolariser tous normalement et a recours à divers systèmes dégradés (rotations, classes itinérantes, co-enseignements, etc. Malgré cela, elle ne parvient pas tous à les scolariser, en même temps, elle en accueille qui ne relèvent pas de son territoire. Une situation “porteuse de complications et de désorganisations”, estime l’institution. 

Malgré ce contexte difficile à relever, la Ville met en oeuvre des moyens considérables pour faire face aux besoins scolaires, tant en fonctionnement qu’en investissement.  “L’actualisation du plan pluriannuel d’investissement (PPI) en 2021 a intégré de nouvelles opérations concernant la sécurité (5 M€), l’éclairage (15 M€), le bâtiment (13 M€), l’enseignement et l’éducation (70 M€) et le sport et la jeunesse (50 M€)”, décrit la Chambre régionale des Comptes.

Des travaux ont aussi été mis en œuvre par la commune depuis 2018 concernant la réhabilitation des groupes scolaires, et de construction, de nouvelles écoles, de salles de classes et de réfectoires. “Leur réalisation n’arrive pourtant pas à suivre l’agenda des financements”, indique le rapport. A titre d’exemple, la Ville compte un seul réfectoire de cantine construit, mais il n’est toujours pas fonctionnel, il a accumulé au moins une année scolaire de retard.

L’accueil périscolaire est aussi pointé du doigt. Bien qu’il soit généralisé et totalement pris en charge par la collectivité, il demeure “peu développé malgré les moyens consentis”, juge la Chambre. Les animateurs même s’ils pour la plupart qualifiés “se contentent en général de garder les élèves.” La municipalité consacre 1,46 million d’euros pour les 260 animateurs employés.

Recommandations de la Chambre régionale des comptes 

Plusieurs recommandations sont définies dans le rapport. En comptabilité : “fiabiliser la comptabilité analytique par fonctions d’ici juin 2025” et “mettre en place un outil de suivi de la trésorerie pour la fin 2024.”

Concernant le système scolaire, la Chambre demande de “dresser, dès à présent, annuellement la liste des enfants résidant sur le territoire communal et soumis à l’obligation scolaire” et de “définir individuellement dès à présent, le montant et les modalités de versement et de contrôle de la bonne utilisation des subventions versées à chaque association « parents relais »”.

La réponse du maire Ambdilwahedou Soumaïla 

Le maire de Mamoudzou a répondu dans un long courrier à Nicolas Péhau, le président de la CRC Mayotte. Il reconnaît l’étendue de la tâche à accomplir : “ je suis bien entendu pleinement conscient des importants efforts que nous devons encore consentir pour porter la gestion de la Ville vers l’excellence”. En parallèle, il met entre autres sur le compte des crises successives les problèmes de gestion de la Ville. “J’appelle néanmoins votre attention sur la difficulté de la tâche qui m’incombe compte tenu du contextes de crises permanentes que connaît Mayotte depuis plusieurs années. Tous les efforts de “mise à niveau” de la gestion de la collectivité sont chaque fois mis à mal par une nouvelle crise”. Crise de l’eau, crash informatique à la suite de la panne du concessionnaire Electricité de Mayotte, opération Wuambushu, barrages et l’insécurité permanente. L’édile s’engage néanmoins “très formellement à continuer les importants efforts d’organisation, de planification et d’encadrement initiés depuis trois ans.”