Les parlementaires mahorais alertent régulièrement les services de l’État sur les problèmes de distribution d’eau dans le 101e département français. Mansour Kamardine s’est fendu, ce jeudi, d’un communiqué très critique sur la gestion étatique du problème. Le député de la deuxième circonscription de Mayotte milite également pour la création d’un office de l’eau.
« De nouveau, de nombreux Mahorais ne pourront se laver demain ! En effet, les coupures d’eau se multiplient et se succèdent depuis plusieurs semaines à Mayotte, couvrant différentes zones à l’Ouest, au Sud, à l’Est. Alors que le gouvernement n’a pas repris dans les crédits de la mission outre-mer du projet de loi de finances pour 2023, adoptés sans vote grâce au recours au 49-3, l’amendement que j’avais fait adopter concernant l’abondement des crédits dédiés à l’accès à l’eau à Mayotte, les Mahorais souffrent avant même le début de la période critique, désormais habituelle depuis 2016 », s’insurge le député Mansour Kamardine, dans un courrier daté du jeudi 3 novembre. En effet, des perturbations ont principalement touché Mamoudzou et le sud de l’île, la semaine dernière et ce week-end (voir encadré). La première a été pénalisée, ce lundi 31 octobre, par « des coupures d’électricité ». Les pompes ne pouvant fonctionner, la société mahoraise des eaux (SMAE) avait alors décidé de stopper la distribution d’eau sur toute la commune, de 14h, au lendemain, à 6h. A cela, s’ajoute une restriction de la consommation d’eau pour usage alimentaire, les jours précédents, « pour cause de suspicion de pollution d’un captage d’eau brute ». Mercredi, c’est une casse à l’usine d’eau potable de l’Ourouveni qui a entraîné une grosse perturbation du réseau sur toutes les communes du sud de Mayotte. Si le village de Passamaïnty, Bandrélé et Dembéni étaient les premiers concernés, de nouvelles casses dans la journée de jeudi ont empiré la situation et étendu les coupures aux autres communes du sud.
« Un opérateur incapable de respecter ses engagements »
« Pourtant, la question de l’eau a été maintes fois abordée par les députés ultramarins lors des débats sur les crédits outre-mer, vendredi 28 octobre. Pourtant tous les orateurs, venant de tous les groupes politiques de l’Assemblée nationale, ont marqué l’urgence et le caractère essentiel du sujet. Pourtant les députés ont rectifié le budget pour faire face à la problématique qui est particulièrement criante à Mayotte et aux Antilles. Mais, non ! Peu importe ! Nous devons subir la situation et accepter que l’État n’ait pas lancé depuis 2017 la déclaration d’utilité publique (DUP) qui est indispensable à la construction de la troisième retenue collinaire et cela malgré les délibérations des collectivités territoriales la sollicitant officiellement », poursuit le parlementaire sadois, en référence à la retenue collinaire d’Ourouvéni toujours bloquée par des propriétaires de terrains peu enclins à vendre.
« Peu importe ! Nous devons subir les conséquences d’un forcing de l’État pour transférer, en 2017, des millions d’euros à un opérateur privé [la SMAE] qui s’est montré incapable, en cinq ans, de respecter ses engagements à augmenter la production d’eau par dessalement. La situation est intolérable, le comportement de l’État est intolérable. C’est pourquoi nous devrons nous lever et nous mobiliser prochainement, en masse, pour faire valoir ce droit fondamental d’accès à l’eau potable », fait-il valoir.
Tous les départements ultramarins ont un office de l’eau, sauf Mayotte
Dernièrement, le député rappelait qu’il milite pour la création d’un office de l’eau. « Les institutions locales de coordination, de programmation, de pilotage et de gestion peinent à mettre en œuvre, avec efficacité, la politique publique d’accès à l’eau et de préservation de sa ressource. Cette situation relève, notamment, de l’organisation institutionnelle à Mayotte. En effet, contrairement à tous les départements d’outre-mer, Mayotte ne dispose d’aucun office de l’eau. Pourtant, l’article L. 213-13 du code de l’environnement prescrit « qu’il est créé, dans chacun des départements d’outre-mer, un office de l’eau ». Cet organe est chargé « de faciliter les diverses actions d’intérêt commun dans le domaine de la gestion de l’eau et des milieux aquatiques » », a-t-il demandé au gouvernement via une question écrite, le 6 septembre. Ce dernier lui a répondu, fin octobre. Il rappelle que la création d’un office de ce type est possible « à la condition de lui assurer des moyens suffisamment importants par la perception de redevances afin de pouvoir réaliser les investissements dans des infrastructures à même de garantir la disponibilité de la ressource en eau ». En attendant, c’est la direction de l’environnement, de l’aménagement et du logement de Mayotte (DEAL 976) qui « assure les principales missions dévolues à un office ». Toutefois, le Gouvernement ne ferme pas la porte à la demande du député. Il reconnaît qu’une mission du conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD), dans un rapport datant de mai 2022, « confirme le principe de création à terme d’un office de l’eau à Mayotte sur des bases articulées avec le syndicat mixte de l’eau et de l’assainissement de Mayotte (Eaux de Mayotte), et d’en définir le périmètre et le modèle économique ».
La SMAE obligée de faire des tours d’eau ce week-end
La société Mahoraise des eaux (SMAE) a connu plusieurs problèmes matériels cette semaine, la distribution d’eau en a donc été grandement affectée sur tout le territoire mahorais. La filiale de Vinci a donc mis en place des tours d’eau, ce week-end, afin « de conserver des niveaux d’eau dans les réservoirs suffisamment hauts pour permettre le bon fonctionnement de la distribution ».
De ce vendredi 4 au dimanche 6 novembre, les communes de Koungou, Mamoudzou et Petite-Terre ont ainsi connu des coupures ciblées selon les quartiers.