Ils sont finalement douze à s’être inscrits auprès de la préfecture de Mayotte, la semaine dernière, pour se présenter devant les électeurs mahorais, les 30 juin et 7 juillet. Quatre dans la première circonscription et huit dans la deuxième. A treize jours du premier tour, six enjeux entourent ce retour aux urnes anticipé.
Rassemblement national
Le score de la liste de Jordan Bardella aux élections européennes (52,4%) invite les représentants mahorais du Rassemblement national à l’optimisme. Il s’agit du pourcentage le plus élevé à l’échelle nationale. Mais est-ce que cela va se traduire par un bon score aux élections législatives ? C’est moins sûr. L’implantation locale du parti de Marine Le Pen reste difficile. Saïdali Boina Hamissi, seul candidat RN en 2022, n’avait pu obtenir que 2,6% des voix, soit le septième score au premier tour dans la deuxième circonscription. Cette fois-ci, il s’impliquera en tant que directeur de campagne d’Anchya Bamana, la présidente de Maore solidaire. Cinquième des dernières élections sénatoriales, la fille de Younoussa Bamana compte bien rejoindre les bancs de l’Assemblée nationale pour y représenter le sud de Mayotte.
Forces vives
De quel côté penchent les collectifs mahorais dans le nord de Mayotte ? Suppléant d’Estelle Youssouffa en 2022, Saïd Kambi s’estime avoir été lésé ensuite. Les divergences entre l’ex-présidente du collectif des citoyens de Mayotte et ce dernier se sont faites encore plus visibles lors des barrages de février. Celui qui est un des leaders des Forces vives a été un des rares à ne pas appeler à leur levée. Alors que depuis Paris, Estelle Youssouffa appelait à l’apaisement pendant que le gouvernement essayait d’apporter des garanties concernant la loi Mayotte, Saïd Kambi préférait laisser les barragistes stopper ou non leur mouvement d’eux-mêmes.
Sada
Les yeux seront forcément tournés vers Sada, le soir du premier tour, où un trio local aspire à la même fonction. Dans la commune du sud, deux ex-maires, Anchya Bamana (RN) et Mansour Kamardine, s’y affrontent en compagnie du conseiller départemental du canton, Soula Saïd-Souffou. Le député sortant était sorti large vainqueur en 2022 du duel contre Issa Issa Abdou (59,2% contre 41,8%), et ce, malgré une large coalition contre lui. Il repart dans la bataille avec une légère incertitude dans son camp, puisque Les Républicains se déchirent depuis qu’Éric Ciotti a choisi de s’allier avec le Rassemblement national. Il retrouve également dans sa ville un conseiller départemental qui l’a battu par deux fois en 2022 (à Sada lors des législatives et dans le canton quelques mois plus tard) en la personne de Soula Saïd Souffou.
Majorité présidentielle
Avec deux élus au Sénat en 2023 (Thani Mohamed Soilihi et Saïd Omar Oili), le camp présidentiel dispose déjà de deux parlementaires mahorais. Est-ce qu’il pourra en compter un troisième ? Ce n’est pas arrivé depuis 2022 et la large défaite de la députée sortante Ramlati Ali (7,2%) dès le premier scrutin. Ce ne sera pas dans la première circonscription de Mayotte, où cette fois, personne de la majorité présidentielle n’a voulu s’y aventurer. Et dans le sud, elle s’est compliqué la tâche avec deux candidats. En effet, Renaissance a décidé de soutenir à nouveau Madi-Boinamani Madi Mari, qui a fait une belle campagne en 2022 en arrivant troisième (19%) au premier tour. Le directeur général des services de Chiconi devrait à nouveau faire un gros score dans sa ville. Il y a deux ans, lors du premier tour, il y avait récolté 57,6% des suffrages. Résigné lors des dernières élections à jouer l’alliance, Daniel Martial Henry, le président du Modem mahorais, a aussi décidé de défendre crânement ses chances.
Nouveau Front populaire
Dès l’annonce de la dissolution, les leaders des partis de gauche ont choisi de s’allier pour former le Nouveau Front populaire. Cette union de la gauche a même déjà défini un programme. Plusieurs points y concernent Mayotte. Il y est promis de « cesser de faire de Mayotte un territoire de seconde zone de la République, d’étendre l’aide médicale d’État, aligner les niveaux du RSA et du Smic sur le reste du pays et scolariser systématiquement tous les enfants ». Sur l’immigration, il y est proposé d’« améliorer les conditions d’accueil des exilés à Mayotte et supprimer les conditions empêchant le déplacement entre Mayotte et le reste du territoire ». Localement, Kira Bacar Adacolo (Union pour la sécurité de Mayotte) s’en réclame dans la deuxième circonscription de Mayotte, même si le Nouveau Front populaire n’a pas encore investi ses candidats ultramarins à ce jour.
Reconquête
Sans candidat en 2022, pour sa première année d’existence, le parti d’Éric Zemmour en présente cette fois-ci dans chacune des circonscriptions de Mayotte. C’est le seul dans ce cas. Aurélia Maillard, sa déléguée départementale, est candidate dans le nord, et Marion Moreno dans le sud. Au cours des élections européennes du 9 juin, la formation d’extrême-droite était arrivée à la cinquième place avec 4,9% des voix à Mayotte. Ahumad Salime (divers droite) et Mikhaël Saïfy (Lutte ouvrière) partageront avec ces deux candidates les rôles d’outsiders, mais pas de primo-candidats. En effet, le premier s’est déjà présenté aux élections de législatives de 2002, 2007 et 2022. Lors de la dernière, il avait terminé à la dernière place dans la deuxième circonscription de Mayotte avec 0,38% des suffrages.
La liste des prétendants
Circonscription nord :
- Estelle Youssouffa (Sans étiquette), remplaçante Fatourani Mohamadi
- Saïd Kambi (Sans étiquette), Yasmina Aboudou
- Mikhaël Saïfy (Lutte ouvrière), Arzade Saïdali
- Aurélia Maillard (Reconquête), Serge Bensoussan
Circonscription sud :
- Mansour Kamardine (Les Républicains*), Fazianti Djoumoi Tsimpou
- Soula Saïd Souffou (MDM), Zouhouria Foundi Chebani
- Madi-Boinamani Madi Mari (Renaissance), Toiyfati Saïd
- Kira Bacar Adacolo (USM/Front populaire), Kamaria Ali
- Anchya Bamanda (Rassemblement national), Mahamoud Hamada Sidi Moukou
- Daniel Martial Henry (Modem), Jeanne Bébé
- Manon Moreno (Reconquête), James Gerges
- Ahumad Salime (divers droite), Boinariziki Abdallah Assani
*Une scission s’est formée au sein du parti Les Républicains. Mansour Kamardine ne fait pas partie des candidats adoubés par Éric Ciotti, le président contesté de la formation politique.
Théophane « Guito » Narayanin pas candidat
Battu par Estelle Youssouffa en 2022, au second tour des élections législatives, Théophane « Guito » Narayanin a indiqué par un communiqué qu’il ne sera pas candidat cette fois-ci. Se disant sollicité, le patron d’IBS avance comme argument que « le calendrier imposé ne [lui] permettra pas d’être candidat à cette élection, étant pour [sa] part actuellement en déplacement à l’étranger dans le cadre d’une opération humanitaire [qu’il a] personnellement initié ». En outre, sa suppléante, Cris Kordjee « ne peut se libérer du fait d’impératifs professionnels ». « Croyez bien que mon amour, mon engagement et mon attachement pour Mayotte restent sans faille, et que je serai toujours présent pour faire entendre la voix des Mahoraises et des Mahorais », ajoute-il.
L’ex-candidat de la première circonscription de Mayotte ne donne, pour le moment, aucune consigne de vote à deux semaines du scrutin. « J’invite l’ensemble de la population à élire des représentants intègres et indépendants qui travailleront sincèrement pour Mayotte, sans arrogance ni népotisme, avec toute la conviction et la transparence qui s’imposent, et qui sauront mettre de côté leurs intérêts personnels au profit de l’intérêt général », fait-valoir, avant de signer : « Votre bien dévoué. Rohoni ya wamaoré paka cho ! ».
Rédacteur en chef de Flash Infos depuis 2022. Passionné de politique, sport et par l'actualité mahoraise, ainsi que champion de saleg en 2024. Passé un long moment par l'ouest de la France, avant d'atterrir dans l'océan Indien au début de l'année 2022. Vous me trouverez davantage à la plage quand je ne suis pas à la rédaction.