De retour de Paris, le maire de Mamoudzou voit grand pour sa ville

Le nouvel élu à la tête de la commune chef-lieu, Ambdilwahedou Soumaïla est de retour d’une mission de deux semaines dans la capitale, où il a pu rencontrer plusieurs institutions, partenaires et personnalités politiques. L’occasion de rappeler ses ambitions pour la ville et pour le développement de Mayotte. Entretien.

Flash Infos : Vous avez été élu maire de Mamoudzou, commune chef-lieu de Mayotte il y a environ quatre mois. Et vous revenez tout juste d’une visite de deux semaines à Paris. Quel était le but de ce voyage, et qui avez-vous rencontré ?

Ambdilwahedou Soumaïla : Chaque fois que nous pourrons faire parler de Mayotte à Paris, à Bruxelles mais aussi partout dans le monde, je ne manquerai pas l’occasion. Cette fois-ci, elle a pris la forme d’une réunion avec l’ensemble des villes choisies dans le cadre du programme Action coeur de ville [un plan du ministère de la Cohésion des territoires qui vise à améliorer les conditions de vie des habitants des villes moyennes et conforter le rôle de ces villes dans le développement du territoire, NDLR]. Nous avons pu faire un état des lieux du dispositif et parler des améliorations pour l’avenir. De mon côté, et au nom de la collectivité de Mamoudzou, j’ai donc plaidé pour que les dispositifs nationaux puissent bénéficier d’un déploiement spécifique sur chaque territoire, sans être rigides. Par exemple, ce plan ambitionne de dynamiser les centre-villes, or pour Mamoudzou, nos intérêts sont plutôt à l’inverse de développer et rendre plus attractives les périphéries.

J’ai aussi pu profiter de cette opportunité pour rencontrer d’autres institutions, comme le directeur de l’agence nationale de rénovation urbaine, pour parler du projet de rénovation de Kawéni, qui est le poumon économique de Mayotte et de Mamoudzou, ou encore la Caisse des dépôts et consignation en ce qui concerne l’habitat, autre enjeu clé pour notre territoire, et la CNAM pour les problématiques liées à la formation et l’éducation. C’était aussi l’occasion de renforcer nos liens avec nos partenaires financiers, le nerf de la guerre ai-je envie de dire ! L’AFD nous a ainsi donné un accord de principe pour nous accompagner à hauteur de 22,6 millions d’euros. Et puis, naturellement, nous nous sommes entretenus avec les parlementaires pour faire entendre collectivement la voix de Mayotte. À ce titre, j’ambitionne de faire de Mamoudzou une ville du monde et nous avons eu une réunion de travail avec un groupe du Japon dans le cadre de l’association Cités unies. L’idée de fond c’est que nos jeunes soient des jeunes du monde. Et d’ailleurs, dans une vision d’excellence éducative et sportive, nous avons aussi déposé des dossiers au ministère des sports, pour le financement des trois plateaux couverts de Kawéni, Baobab, et Vahibé, ou encore pour le stade municipal de Tsoundzou. Tout cela dans la perspective notamment des Jeux des îles 2027. Et pour montrer que la ville chef-lieu anticipe et afficher notre bonne volonté pour la candidature de Mayotte.

Enfin, bien sûr, j’ai profité de cette visite pour parler sécurité, notamment avec le président du Sénat Gérard Larcher. J’ai bon espoir qu’il puisse s’en faire le relai, pour que le gouvernement ait un regard particulier sur ce qui se passe à Mayotte, et notamment à Mamoudzou, au regard des récents événements. J’en ai profité pour lui glisser un mot sur les dotations, car Mamoudzou, à l’instar des 16 autres communes et du Département, n’est toujours pas logée à la même enseigne que les autres collectivités de la nation. Une divergence avec le droit commun, alors même que Mayotte est le département le plus pauvre !

FI : En parlant de sécurité : vous êtes parti peu de temps après les violents heurts qui ont émaillé la rentrée entre Majicavo et Kawéni, village de Mamoudzou. Quelques jours plus tard, vous étiez reçu au ministère de l’intérieur. Au regard de ce climat sécuritaire tendu, comment cela a-t-il influencé cette visite ? Avez-vous pu mettre l’accent sur ce volet sécuritaire, pour obtenir des avancées concrètes ?

A. S. : Naturellement ! Cela m’a permis d’appuyer sur ces sujets et pas que pour Mamoudzou. J’ai porté la voix de Mayotte toute entière, car nous ne pouvons pas continuer à mourir en silence. Plus concrètement, j’ai pu déposer un premier dossier pour demander 13 millions d’euros pour l’éclairage public. En effet, c’est un élément clé de la sécurité, pour les habitants comme pour les policiers ou les pompiers qui interviennent souvent dans le noir. Nous avons besoin que le gouvernement apporte son soutien. Le but de cet investissement sera de mettre aux normes l’éclairage existant mais aussi de couvrir toutes les zones non pourvues. À côté de cela, j’ai aussi déposé un dossier au ministère pour qu’il nous accompagne sur la vidéoprotection. Aujourd’hui, nous avons 66 caméras et une vingtaine hors d’usage, que nous pourrons remettre en état et sécuriser à condition de décrocher les fonds. Enfin, j’ai bien sûr mentionné le sujet des Assises de la sécurité, en les enjoignant à y participer, les 9 et 10 novembre prochains. Car comme je le dis souvent, il y a 300.000 habitants sur ce territoire et peut-être 300.000 solutions pour faire face à cette montée de violence. C’est donc important de réunir l’ensemble des acteurs.

FI : Votre majorité n’a pas eu la gouvernance de la Cadema sachant que cette dernière concentre des compétences clés pour le développement du chef lieu, poumon économique de l’île, notamment sur les transports, avec le projet Caribus par exemple, et sur l’aménagement du territoire. Or, la Cadema était elle aussi en voyage à Paris au même moment que vous. Est-ce le signe d’une volonté de collaboration renforcée, de dépasser les clivages politiques de l’élection ?

A. S. : Ma position n’a pas changé depuis la campagne. Premièrement, j’ai fait campagne pour la mairie de Mamoudzou, pas pour la Cadema. Car dans mon esprit, la Cadema a toujours été un outil de développement des deux communes et non une ambition politique. Mais mon homologue de Dembéni n’a pas eu cette même vision, il a fait le choix de politiser la structure alors que j’ai tout fait pour l’en dissuader : la Cadema ne doit surtout pas être un outil politique, car cela revient à mon sens à prendre en otage l’ensemble des administrés des deux communes… Mais on nous a fait comprendre que la majorité de Mamoudzou n’y avait pas sa place, cela a été dit et répété. Bien sûr, je l’ai regretté, et ce dès le premier conseil communautaire, où j’ai rappelé que mon état d’esprit était toutefois de travailler ensemble pour développer les deux structures. On nous a demandé de nous occuper de Mamoudzou, soit ! Nous avons pris acte et c’est ce que nous sommes en train de faire. Donc nous avons été tous les deux, Mamoudzou et la Cadema, invités à la même réunion, sans que cela ne soit un problème pour nous, à la mairie. Nous assumons tout simplement nos responsabilités. Voilà l’état de fait.

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