Comores : Une mission de l’Onu à Moroni pour prendre le pouls avant les élections

Une délégation des Nations unies a rencontré politiciens et acteurs de la société civile comorienne afin de recueillir leurs impressions sur le climat qui règne dans le pays à moins d’une année des échéances électorales. Les conclusions de la mission permettront de donner une réponse à la requête du gouvernement comorien qui a sollicité un appui pour l’organisation des scrutins présidentiel et gubernatorials. 

La délégation onusienne dépêchée à Moroni depuis le 18 juin a achevé sa mission, ce jeudi 29 juin. Pendant plus de dix jours, ces quatres experts des Nations Unies ont enchainé les rencontres avec les différents acteurs avec comme ordre du jour : les élections présidentielle et gubernatoriales, dont la campagne doit, sauf changement de dernière minute, débuter au mois de décembre prochain. Suite à une demande d’assistance formulée par les autorités comoriennes, l’ONU a donc envoyé cette équipe dans l’archipel pour prendre la température. Sa mission était selon le ministère comorien des Affaires étrangères d’évaluer le processus électoral, officiellement lancé avec la mise en place de la commission électorale nationale indépendante (Ceni). Au lendemain de son arrivée, la délégation s’est entretenue avec le ministre de l’Intérieur, Fakridine Mahamoud Mradabi, qui assurait l’intérim de son collègue des Affaires étrangères. « Les échanges entre les deux parties ont porté sur les prérogatives et les dispositions à mettre en place pour que les élections soient libres, inclusives et transparentes. Le ministre est revenu sur la procédure d’apaisement et d’inclusion engagée par le chef de l’État, Azali Assoumani, et a assuré la disponibilité et le souhait du Gouvernement de renforcer le dialogue avec toute la classe politique nationale », écrivait le service de communication de la diplomatie comorienne, le 19 juin. Mais le lendemain, la mission a continué les entretiens avec d’autres personnalités et institutions.

Intimidation

 L’ancien gouverneur de la Grande Comore, a eu l’occasion d’échanger avec eux. « Nous avons montré notre disponibilité à discuter avec le pouvoir sur les cinq points que constitue la lettre de l’opposition adressée à Azali Assoumani. Ensuite, nous avons évoqué d’autres points concernant la sécurisation des élections. Par exemple, le recrutement des bénévoles nationales à raison de deux personnes par bureau de vote. Ces observateurs doivent être mandatés par les Nations unies », a rapporté, Mouigni Baraka Said Soilihi, qui a exigé la publication des résultats par voie digitale ou encore la prolongation de la période de recensement conformément à « leur constitution ». Cette dernière, mentionne une révision des listes électorales chaque année pour une période d’au moins un mois.  Au niveau des organisations féminines de la société civile, le discours n’a pas vraiment changé. « En gros, on a expliqué le climat de méfiance qui prévaut envers les institutions, les traumatismes des élections de 2019 et l’absence de libertés publiques malgré les déclarations du gouvernement. Nous avons relevé le climat d’intimidation et de la nécessité d’assurer une sécurisation internationale des élections si l’on veut que les électeurs se déplacent aux urnes », a confié une des participantes. Aux Comores, la femme est toujours écartée aussi bien dans les instances de décision que dans les partis politiques.

« La préoccupation du gouvernement est d’organiser des élections libres, transparentes et inclusives. Les experts de l’Onu sont là pour échanger avec les parties prenantes. Après cette mission, un rapport sera remis au secrétariat général qui sur la base de celui-ci saura quelle assistance le pays a besoin », a souligné Fayçoil Mohamed Djitihadi, directeur général des affaires politiques et juridiques au sein du ministère comorien des Affaires étrangères. Il a précisé qu’à défaut de pouvoir apporter de l’aide dans le domaine sollicité, le bureau de New-York peut se tourner vers les autres partenaires à l’instar de l’Union Européenne. « A chaque élection, il y a une mission onusienne qui vient sur place et enchaine des consultations avec les médias, les partis politiques et la société civile, pour connaitre leurs préoccupations. Après, ils décideront s’ils enverront des observateurs ou apporteront de l’aide », a relevé une source onusienne. Lors des dernières échéances électorales de 2019, décriées par l’opposition et de nombreux observateurs présents, l’Onu n’avait pas été saisie à temps. Va-t-elle s’impliquer cette fois-ci ? Possible puisqu’à la veille de la prise de fonction d’Azali Assoumani à la tête de l’Union africaine, António Guterres, secrétaire général de l’Onu, avait promis l’accompagnement de son institution.

 Libération des prisonniers

Depuis, le gouvernement comorien essaie de tendre la main à l’opposition qui refuse d’accorder une crédibilité au processus électoral en cours qu’il juge « biaisé » d’avance. Les opposants au régime continuent de dénoncer l’adoption de plusieurs lois qui risquent de limiter selon eux l’espace démocratique : exclusion des binationaux, instauration d’un système de parrainages. La récente nomination des treize membres de la commission électorale nationale indépendante sans aucun représentant de l’opposition, le parlement étant acquis au parti présidentiel, ne soigne en aucun cas l’image d’Azali Assoumani. Pour prendre à témoin la communauté internationale, le Front commun des forces vives regroupant opposition nationale et société civile a adressé un courrier au numéro un de l’Onu, le jour même de la venue de la délégation. Dans cette lettre, le front réitère sa disponibilité à un dialogue pour sauver le pays seulement sous les auspices de l’Onu, de la Ligue arabe, mais pas seulement. Autre condition posée : la libération des détenus politiques, le retour des exilés sans risque de représailles et l’inclusion de la diaspora dans à ce cadre de concertation. Samedi, les autorités judicaires auraient accepté de lever les mesures de contrôle judiciaire qui frappaient certains opposants restés au pays. Seulement ceux qui formuleraient  la demande.

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