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La justice comorienne a estimé que les douze passagers, décédés le 26 février 2022 au large de Mohéli pendant le crash, n’étaient en réalité pas assurés. Le tribunal a accordé aux ayants droits directs, notamment les parents, une indemnisation individuelle de 50.825 euros. La compagnie comorienne a indiqué vouloir faire appel, lequel aura un effet suspensif.

Première victoire judiciaire pour les proches des victimes du crash survenu au large de Mohéli, voilà maintenant deux ans. Ce samedi 28 septembre, le tribunal de première instance de Moroni a condamné la compagnie comorienne AB Aviation à verser les indemnisations à tous les membres directs des douze Comoriens, qui ont péri le 26 février 2022. Cet accident a causé la mort de quatorze personnes, dont deux membres d’équipage tanzaniens. En attendant un procès pénal, la justice a ainsi ordonné le paiement des compensations aux familles. Le verdict précise que les parents (père et mère), les enfants et les conjoints doivent toucher chacun, la somme de 25 millions de francs comoriens, soit près de 50.825 euros. Les frères et sœurs ont quant à eux droit à quinze millions de francs, ce qui s’élève à 30.495 euros. A cela s’ajoute enfin cinq millions de francs accordés à chaque famille, a-t-on appris. Une source a précisé que peu importe le nombre des ayants droits reconnus par la loi, la somme sera la même pour chacun. Au départ, il y avait 101 personnes considérées comme proches des victimes. Mais la justice n’a retenu que ceux dont les liens directs avec les victimes sont établis. Cela exclut de facto les tantes, oncles, neveux, et tous les autres prétendants. Le tribunal a surtout condamné exclusivement la compagnie comorienne à verser seule les indemnisations. Cette décision épargne donc les autres acteurs assignés devant la justice, à savoir l’entreprise tanzanienne, Fly Zanzibar, propriétaire du vol accidenté. L’assureur, Phoenix, tout comme l’Agence nationale de l’aviation civile et de la météorologie (ANACM) sont tirés d’affaire. Le tribunal a estimé qu’en fait les passagers qui étaient à bord du Cessna, loué par AB Aviation pour effectuer des rotations dans les îles, n’étaient pas inclus dans la police d’assurance.

Contrat de location

Maître Moncef Saïd Ibrahim, qui défendait les droits de Fly Zanzibar, a salué la décision rendue ce samedi. « La justice s’est prononcée. Nos pensées vont en premier lieu aux victimes de l’accident, dont les familles pourront entamer le travail de deuil. Elle a mis hors de cause notre cliente Fly Zanzibar et tous les éléments ont relevé la seule responsabilité de AB Aviation, qui en a été condamné », a réagi l’avocat, tout en se réjouissant « que la justice ait ainsi rappelé les obligations et la lourde responsabilité qui pèsent sur les transporteurs aériens en matière de sûreté et de sécurité ». Sans tarder, AB Aviation, a de son côté annoncé via un communiqué de presse, publié en moins de deux heures après le délibéré, son intention de faire appel.  Celui-ci aura un effet suspensif dans l’exécution de la décision. « Le tribunal civil de Moroni dans son audience au fond du 28 septembre 2024 opposant les familles des victimes à la compagnie AB Aviation avec interventions de Fly Zanzibar, Phoenix of Tanzania Assurance Company, ainsi que l’ANACM, a rendu une décision qui met hors de cause la société d’assurance Phoenix of Tanzania Assurance et l’Anacm alors que Flyzanzibar propriétaire de l’appareil avait souscrit à une police d’assurance numéro 16220/20/HO qui couvre les passagers comme stipulé clairement dans l’instrumentum », a martelé la compagnie comorienne, qui depuis cet accident n’opère plus dans le transport domestique. Pour montrer qu’il n’est pas satisfait du délibéré, bien qu’il n’ait pas manqué de réitérer sa compassion envers les familles des victimes, le transporteur comorien a déjà prévu d’interjeter en appel.  Deux ans après le crash, au large de Mohéli du vol Y61103, dont l’épave n’a jamais été retrouvé, les familles des victimes ont eu droit à un procès civil. Celui-ci s’est tenu le 5 juin 2024. Pendant les débats, seul un point était au centre des plaidoiries qui n’ont pas duré une heure. Il s’agit de la question de l’assurance des passagers. La justice devait vérifier et trancher si au vu des éléments présentés, l’indemnisation revenait à AB Aviation ou son locataire, Fly Zanzibar, qui dès le départ a toujours clamé que le contrat le liant à la compagnie comorienne stipulait que les passagers seraient sous la responsabilité du locataire. La même problématique s’était également posé quand le juge de référé a demandé le versement des provisions de deux millions de francs (4.000 euros) à chaque ayant droit. Rappelons que deux mois après l’accident du Cessna qui entrainé la mort de 14 personnes, dont les corps n’ont jamais été retrouvés, AB Aviation avait en conférence de presse, assuré que la police d’assurance de son partenaire, Fly Zanzibar incluait les passagers, l’appareil et les tiers.

Mais progressivement, les termes du contrat de location de l’aéronef ont pris le dessus. Et avec l’appel annoncé, les familles risquent de ne pas toucher de sitôt les dédommagements.