En visite à La Réunion, pour la première semaine de rentrée, Gabriel Attal a créé la polémique en évoquant « une immigration importante » de Mahorais et de Comoriens à La Possession, une commune locale. Le nouveau ministre de l’Éducation nationale et de la jeunesse depuis un mois maintenant a présenté ses excuses dans la foulée et promis une visite prochaine à Mayotte.
C’est un premier faux pas qu’il faudra désormais rattraper. Gabriel Attal, le ministre promu récemment à l’Éducation nationale et la Jeunesse, ne s’est pas fait que des amis à Mayotte. Devant une école de La Possession, pendant une visite ministérielle à La Réunion, mercredi matin, il a voulu évoquer la mixité au sein de l’établissement, mais en commettant un impair. « C’est une école concernée aussi par une immigration importante des personnes qui sont d’origine mahoraise ou comorienne », a lâché le ministre. « Ça a pu poser, pas des difficultés, mais des interrogations pour certaines familles réunionnaises. Et finalement, par un travail de médiation avec la maire (N.D.L.R. Vanessa Miranville) et son équipe, les services de la Ville, ceux du rectorat, on arrive à construire cette mixité et que ça se passe bien », a-t-il continué.
C’est bien entendu la première phrase qui a retenu l’attention. Car il n’en fallait pas plus pour irriter les Mahorais réduits au rang d’immigrés comme leurs voisins de l’archipel des Comores. « Monsieur Gabriel Attal, il n’y a pas « d’immigration mahoraise » à La Réunion. Sauf à considérer vos compatriotes du 101e département (Français depuis 1841) comme des étrangers et à faire de com’ politicienne sur notre dos », a réagi par exemple Estelle Youssouffa, la députée de la première circonscription de Mayotte. Son collègue de la deuxième circonscription, Mansour Kamardine, s’est tout aussi vindicatif et en profite pour demander que Mayotte soit « un véritable département français autonome de La Réunion » (voir encadré). « Ses propos inadmissibles sont insoutenables, inqualifiables et démontrent le mépris du Gouvernement représenté par l’un de ses ministres », a déploré, de son côté, le collectif Résistance Réunion/Mayotte en Action (Ré-MaA) dans un long communiqué.</p
« Ma formulation était maladroite »
Les propos s’ajoutent au fait que le ministre de l’Éducation nationale ait choisi uniquement de se rendre à La Réunion (où la reprise est une semaine plus tôt qu’à Mayotte) alors que le système scolaire mahorais souffre à la fois du manque de place pour accueillir tous les élèves, de la crise actuelle de l’eau et des difficultés de recrutement des enseignants. Conscient de sa faute, Gabriel Attal a essayé de rectifier le tir. « Une phrase que j’ai prononcée [mercredi] a laissé penser que je voulais lier l’installation de Mahorais à La Réunion à une immigration. Évidemment, ce n’était aucunement mon intention. Ma formulation était donc maladroite. Les Mahorais sont pleinement Français. C’est ce que j’ai dit ce matin aux élus de Mayotte avec qui j’ai échangé pour leur présenter mes excuses, ainsi qu’aux Mahorais », s’est-il excusé, jeudi. Il ajoute qu’il se rendra sur l’île aux parfums « prochainement pour y travailler avec tous les acteurs de la communauté éducative ».
— Gabriel Attal (@GabrielAttal) August 18, 2023
Espérons que d’ici là, Stéphane Séjourné lui rappellera combien la fierté des Mahorais d’appartenir à la République française est grande. Le patron du parti présidentiel Renaissance et conjoint du ministre avait rappelé « la dimension française et européenne de Mayotte », lors de sa venue à Mayotte en février dernier.
« Faire de Mayotte un département autonome de La Réunion »
S’il qualifie la déclaration du ministre « d’inacceptable », Mansour Kamardine a rebondi sur la polémique pour s’en prendre au gouvernement dont il voit « la volonté de construire Mayotte comme une annexe, voir une sous-région coloniale de La Réunion ». Le député de la deuxième circonscription de Mayotte égratigne aux passages les élus réunionnais « si prompts à insulter et stigmatiser les Mahorais et leurs élus lorsqu’ils se battent en soutenant l’opération « Wuambushu » » (N.D.L.R. en avril, l’ancien maire de Saint-Denis, Gilbert Annette, avait ainsi participé à une manifestation contre l’opération anti-immigration et sécuritaire à Mayotte) et pointe l’amalgame parfois fait entre Comoriens et Mahorais sur l’île Bourbon. « Ces déclarations doivent servir de réveil de la conscience de l’Etat pour, enfin, faire de Mayotte ce qu’elle doit être : un véritable département français autonome de la Réunion et favoriser l’égalité sociale, afin de permettre aux Mahorais d’avoir, sur leur territoire de naissance, ce qu’ils vont chercher dans l’île sœur : infrastructures de développement durable, dont l’eau, l’école, les routes, la piste d’aviation, le port, le système hospitalier. En bref, un territoire français où les valeurs de la République vivent et où l’égalité des chances n’est pas qu’un slogan ! », clame le parlementaire mahorais.