Les Forces vives, encore en train d’étudier le courrier ministériel reçu ce mercredi à la suite des annonces faites par le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer, Gérald Darmanin, se sont réunies avec des élus du département ce jeudi. Ces derniers espèrent une sortie de crise. La réponse des Forces vives devrait être connue ce vendredi. En attendant, ils nous confient leur ressenti.
Au lendemain du congrès de Pamandzi, en Petite-Terre, et de la réception in extremis du courrier ministériel au sein duquel Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur et des Outre-mer, a acté les annonces faites dimanche dernier lors de sa visite express sur l’île dimanche, les Forces vives ont « mis les choses à plat » avec les élus du département ce jeudi 15 février.
Au cours d’un échange à huis clos d’une heure, dans l’hémicycle Bamana du Conseil départemental, à Mamoudzou, la missive, cosignée par la ministre déléguée aux Outre-mer, Marie Guévenoux, a été analysée plus en détails. « Ils avaient besoin de le faire à tête reposée », souligne Daniel Zaïdani, conseiller départemental de Pamandzi. Le porte-parole des Forces vives, Abdou Badirou, nous confiait d’ailleurs ce jeudi, en fin de matinée que les avis entre les membres « étaient partagés » sur l’interprétation de cette lettre et la suite à donner au mouvement. Certains de ses leaders s’étant déjà sentis trahis concernant les issues des anciennes contestations en 2011 et 2018.
S’il est unanimement admis que l’ensemble des mesures prévues pour Mayotte ont été couchées noir sur blanc, l’absence de calendrier d’application concernant plusieurs d’entre elles fait grincer des dents. « À part la date du 22 mai pour la loi Mayotte (désormais loi « d’urgence pour Mayotte », N.D.L.R) et la réforme constitutionnelle pour le droit du sol, les autres annonces ne sont pas datées », relate Hélène Pollozec, conseillère départementale du canton de Mamoudzou 3. Élus et Forces vives demandent aujourd’hui des précisions sur l’opération Wuambushu 2 et sur le « rideau de fer » promis par Gérald Darmanin pour juguler l’immigration clandestine.
« Il n’est pas exclu qu’ils suspendent leur mouvement »
Reste à savoir si le mouvement social Mahorais va rentrer dans une « deuxième phase », au cours de laquelle les barrages pourraient être levés. C’est en tout cas la demande qui a été formulée par les élus de Mayotte, ce jeudi. « À la fin de la réunion, les forces vivent ont annoncé une réunion des chefs de barrage à Tsararano dans l’objectif de décréter la suite du mouvement », confie un conseiller départemental. Cette nouvelle assemblée générale des Forces vives est prévue ce vendredi 16 février, à 14 h, à Tsararano, dans la commune de Dembéni.
Safina Soula, représentante des Forces vives et présidente du collectif des citoyens de Mayotte 2018, nous le confirme ce jeudi soir et ajoute que l’ensemble des barragistes sont conviés pour discuter de l’issue du mouvement. Elle ajoute que la communication sur l’issue du mouvement se fera à l’occasion de ce rassemblement, ne voulant pas en dire plus avant ce rendez-vous.
« Finalement on a eu la réponse qu’on voulait du courrier, demain tout sera communiqué », nous répond-elle lorsqu’on lui fait remarquer que l’opinion des Forces vives semble divisée depuis la réception du courrier du ministre. Va-t-on vers une issue plutôt positive ? « On verra on attend demain », maintient Safina Soula jeudi soir. Abdou Badirou, également représentant du mouvement des Forces vives, nous confirme que la décision finale quant à la suite du mouvement devrait être connue à l’issue de cette réunion.
Vers une suspension des barrages ?
L’éventualité d’une suspension des barrages a ainsi été largement évoquée ce jeudi. Une demande formulée par la députée Estelle Youssouffa la veille. « On a sollicité les membres des Forces vives à passer à une autre phase de leur mouvement en enlevant ces barrages », confirme Abdoul Kamardine, conseiller départemental de M’tsamboro. Ce temps d’échange a aussi permis de consolider le « dialogue de confiance » entre la société civile et les élus, selon plusieurs conseillers départementaux.
« On leur a expliqué nos inquiétudes, c’est aux Forces vives de se consulter à présent », nous livre également Mikidache Houmani, maire de Dzaoudzi-Labattoir, présent lors de cette réunion avec les autres élus. « On attend leur retour. On essaie de discuter avec eux, de trouver une solution pour que cette crise se termine mais c’est à eux de cibler à quel moment ils vont aller enlever les barrages. »
« Ce qui est clair, c’est que nous n’avons pas fait descendre la population dans la rue. Ce ne sont pas les élus qui peuvent inverser la tendance. On a discuté avec les collectifs pour savoir où est-ce qu’ils en étaient dans leur réflexion. Il n’est pas exclu qu’ils suspendent leur mouvement », ajoute encore Daniel Zaïdani. « En 2011, les collectifs n’en faisaient un peu qu’à leur tête. Là on est dans le dialogue et l’échange, on essaie de leur apporter notre vision. »